Rapports sur la santé
Les caractéristiques fonctionnelles des enfants expliquent mieux leurs résultats et ceux des familles que le diagnostic : Étude fondée sur la population des enfants atteints d’autisme ou d’autres troubles/déficiences neurologiques du développement

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par Anton Miller, Jane Shen et Louise C. Mâsse

Date de diffusion : le 15 juin 2016

Les enfants qui ont des troubles/déficiences neurologiques du développement (TDND) ou un « handicap neurologique »Note 1 constituent la sous-population identifiable la plus importante d’enfants ayant des incapacitésNote 2 et représentent de 7 à 14 % de tous les enfants dans les pays développésNote 3Note 4. Les TDND comprennent toute une gamme de problèmes de santé caractérisés par des incapacités au chapitre de la posture/mobilité, du fonctionnement cognitif/adaptatif, de la communication, des relations sociales et de la régulation des émotions et du comportement, des marqueurs biologiques ou physiques d’un problème médical particulier étant ou non présents. Parmi les diagnostics compris dans les TDND figurent les troubles du spectre de l’autisme (TSA), les difficultés intellectuelles ou d’apprentissage, le trouble déficitaire de l’attention avec hyperactivité (TDAH), la paralysie cérébrale et les syndromes de Down et d’alcoolisation fœtale.

Les enfants ayant un handicap neurologique ont besoin de services et de soutiens dans les secteurs de la santé, de l’éducation, ainsi que des services à la famille et des services sociauxNote 5. Les problèmes de santé figurant dans les taxonomies de diagnostics, comme la Classification internationale des maladies (CIM)Note 6 ou le Manuel diagnostique et statistique des troubles mentaux (DSM)Note 7, ont souvent préséance dans les critères d’admissibilité aux services et aux soutiensNote 8Note 9Note 10, ou servent de base aux « catégories d’incapacités » à partir desquelles la fourniture de soutiens à l’enseignement est déterminéeNote 11Note 12Note 13Note 14. Toutefois, cette approche a été remise en question par suite de demandes en vue de mettre l’accent sur les caractéristiques fonctionnelles des personnesNote 9Note 15Note 16Note 17Note 18 , plutôt que sur la catégorie de diagnostic à laquelle elles appartiennent. Ces préoccupations surviennent dans le contexte des progrès réalisés quant à la conceptualisation des incapacités, ainsi que de la reconnaissance des limites des systèmes de classification catégorique des diagnostics dans les domaines de la santé mentale et développementaleNote 19Note 20.

La Classification internationale du fonctionnement, du handicap et de la santé (CIF) de 2001Note 21 de l’Organisation mondiale de la Santé a fait progresser la conceptualisation de l’incapacité de trois façons :

Dans la CIF, on suppose que le fonctionnement se manifeste au niveau du corps, de la personne, ou de la personne dans la société, opérationnalisé respectivement comme l’intégrité (ou la déficience) des structures corporelles et du fonctionnement physiologique, la capacité (ou la difficulté) de s’adonner aux activités de la vie quotidienne, et la participation à des activités significatives avec d’autres personnes (ou les restrictions à ce chapitre). Même si le cadre et les concepts de la CIF sont de plus en plus adoptés et déployés dans des contextes cliniques et de rechercheNote 22Note 23, la recherche empirique sur la dynamique et les mécanismes des interactions entre les problèmes de santé diagnostiqués et les caractéristiques fonctionnelles demeure limitée.

La pertinence de l’utilisation de classifications catégoriques des diagnostics en santé mentale et développementale a été remise en question en raison de préoccupations concernant la validité des problèmes de santé définis de cette façonNote 19, de l’hétérogénéité clinique des personnes appartenant à une catégorie de diagnostic, comme le TSANote 24, ainsi que de la complexité fonctionnelle et diagnostique des enfants ayant des TDNDNote 2Note 25. Les cliniciens observent un chevauchement considérable entre les caractéristiques fonctionnelles au quotidien des enfants ayant reçu différents diagnostics de TDND, en dépit du caractère distinct des ensembles de symptômes établis pour des problèmes comme le TSA, le TDAH ou l’incapacité intellectuelle.

Des données empiriques sur les rôles du diagnostic par rapport aux caractéristiques fonctionnelles dans les résultats des enfants et des familles pourraient éclairer les politiques sur les services et les soutiens pour les enfants ayant un handicap neurologique. À cette fin, un ensemble de données nationales sur les incapacités, celles de l’Enquête sur la participation et les limitations d’activités de 2006, a servi à étudier les rapports entre le diagnostic reçu par l’enfant (TSA par rapport à d’autres diagnostics de troubles neurologiques du développement), une gamme de caractéristiques fonctionnelles liées dans une large mesure au développement neurologique ou psychologique, et des mesures de la santé et du bien-être des enfants et des familles. Dans le cadre de l’analyse, on a tenté de déterminer si les caractéristiques fonctionnelles les plus étroitement associées à un diagnostic de TSA (communication, apprentissage et régulation des émotions et du comportement) constituent un facteur de médiation pour les associations entre le diagnostic reçu par l’enfant et la santé physique et psychologique des parents, le bien-être économique de la famille et la participation de l’enfant à diverses activités, tout en tenant compte de l’effet d’autres caractéristiques fonctionnelles moins étroitement liées au TSA (audition, vision, mobilité, dextérité et douleur) et d’autres variables démographiques. On a fait l’hypothèse que les caractéristiques du développement neurologique et les caractéristiques fonctionnelles connexes seraient plus utiles que le diagnostic reçu par l’enfant pour expliquer les résultats de l’enfant et de la famille, et constitueraient un facteur de médiation importante ou complète pour les effets apparents du diagnostic. On a sélectionné le TSA comme « diagnostic de référence », en raison des augmentations de sa prévalence et de ses répercussions sur la santé publique et les servicesNote 26Note 27. En outre, des programmes de financement ont été mis en œuvre de façon particulière pour les enfants ayant un TSA, même si un diagnostic de TSA n’est que l’un des nombreux facteurs pertinents pour comprendre les caractéristiques et les besoins des enfants touchés et de leurs famillesNote 28Note 29.

Données et méthodes

Source des données

L’Enquête sur la participation et les limitations d’activités (EPLA) de 2006 est une enquête nationale postcensitaire sur les adultes et les enfants ayant une incapacité (opérationnalisée comme la présence de limites dans les activités au quotidien en raison d’un problème de santé). Les participants à l’EPLA ont été sélectionnés à partir du Recensement du Canada de 2006, sur la base de réponses à deux questions « filtres » générales concernant les limitations d’activités, ainsi que de l’âge et de la région géographique. Dans le cas des enfants de moins de 15 ans, le questionnaire de l’enfant a servi à déterminer la nature, la gravité et les répercussions des incapacités (problèmes de vision, d’audition, de communication, de mobilité, de dextérité, d’apprentissage, du développement, et problèmes émotionnels ou psychologiques), ainsi que les problèmes et les diagnostics limitant la participation. Des interviews téléphoniques ont été menées en 2006-2007 auprès de 7 072 parents/tuteurs (« parents »), à partir d’un échantillon d’environ 9 000 personnes. Les données ont été pondérées par suite d’un rajustement pour tenir compte des tendances de la non-réponse et de plusieurs caractéristiques des enfantsNote 30, avec pour résultat un échantillon pondéré représentatif de 340 340 personnes.

La présente étude porte sur les enfants de 5 à 14 ans qui fréquentaient l’école, pour qui des données sur la participation à diverses activités sont disponibles. Les analyses se limitaient aux enfants ayant des TDND, tels qu’identifiés au moyen d’une méthode décrite dans des travaux antérieurs se rapportant à l’EPLA. Ces enfants rendaient compte de près des trois quarts des 5 à 14 ans ayant des incapacités dans la base de donnéesNote 2. Il fallait d’abord classer les enfants dans l’un des six groupes de TDND reflétant les domaines fonctionnels les plus largement reconnus du développement de l’enfant (motricité, parole-langage, apprentissage/cognition, et domaines social, sensoriel et psychologique). Au préalable, on avait examiné en détail tous les codes de la CIM-10 disponibles pour chaque enfant. La classification dépendait d’un consensus entre deux pédiatres spécialistes du développement, du recours à un troisième examinateur pour les cas ambigus, et de l’élimination des cas jugés inclassablesNote 2.

La présente étude a été approuvée par le Comité d’éthique de la recherche de l’Université de la Colombie-Britannique.

Mesures

Diagnostic de l’enfant : Le diagnostic de TSA (oui/non) a été confirmé par la présence de codes pertinents de la CIM-10 (F84.0-F84.5, F84.8 et F84.9), à partir des renseignements fournis par les parents pendant l’interview de l’EPLA. Cela comprenait leur perception des principaux problèmes de santé de leur enfant, ou leur réponse à une question concernant un certain nombre de problèmes de santé chroniques particuliers, dont l’un était l’autisme diagnostiqué par un professionnel.

L’état fonctionnel de l’enfant comprenait : 1) les domaines fonctionnels les plus étroitement liés à un diagnostic de TSA; et 2) d’autres domaines. Les trois domaines les plus pertinents du fonctionnement lié au TSA disponibles dans l’EPLA étaient la parole et la communication, l’apprentissage et la cognition, le fonctionnement émotionnel-comportemental-psychologique. Les autres domaines étaient la vision, l’audition, la mobilité, la dextérité et la douleur. On a utilisé deux sources pour les caractéristiques fonctionnelles de l’enfant : les éléments de l’Indice de l’état de santé (IES) (Health Utilities Index (HUI), en anglais)légèrement modifiés dans l’EPLA pour le groupe d’âge viséNote 30, et l’indice d’incapacité de l’EPLA (tableau 1). Deux variables latentes visant à saisir le concept des caractéristiques neurologiques du développement et fonctionnelles connexes de l’enfant ont été créées : 1) caractéristiques fonctionnelles liées au TSA (« fonctionnement lié au TSA »); et 2) caractéristiques fonctionnelles non spécifiques de l’enfant (« autre fonctionnement »). Le fonctionnement lié au TSA comprenait les trois attributs de l’IES et les trois éléments de l’indice d’incapacité de l’EPLA les plus étroitement associés aux incapacités de base du TSA déterminées précédemment. Il a été entré comme facteur de médiation dans les analyses; l’autre fonctionnement (décrit ci-après) a servi de covariable.

Conformément au concept de qualité de vie de la famille dans le contexte de l’incapacitéNote 31, la santé et le bien-être de la famille comprenaient la santé physique et le bien-être psychologique des parents, ainsi que les répercussions économiques liées au fait d’avoir un enfant ayant une incapacité (tableau 1). Une structure factorielle de deuxième ordre, dans laquelle le bien-être psychologique et les répercussions économiques étaient traités comme des concepts latents, et la santé physique, comme une variable indicatrice, a été appuyée par une analyse factorielle confirmatoire (AFC) exécutée à l’égard de cet échantillon (χ2(df = 64) = 418,56, p < 0,001; RMSEA = 0,048, IC de 90 % 0,044–0,052, p = 0,768; CFI = 0,933; et WRMR = 2,002; figure A en annexe). Les coefficients alpha de Cronbach étaient de 0,79 et 0,74 pour le bien-être psychologique et les répercussions économiques, respectivement.

La participation de l’enfant comprenait la participation à l’école et la participation à l’extérieur de l’école (tableau 1). Une AFC exécutée à l’égard de cet échantillon a appuyé la structure factorielle de la participation de l’enfant (χ2(df = 34) = 63,25, p = 0,0017; RMSEA = 0,018, IC de 90 % 0,011–0,025, p = 1,000; CFI = 0,958; et WRMR = 0,998; figure B en annexe). Les coefficients alpha de Cronbach étaient de 0,71 et 0,49 pour la participation à l’école et la participation à l’extérieur de l’école, respectivement. Les coefficients alpha de Cronbach n’étaient pas optimaux pour la participation à l’extérieur de l’école, probablement en raison d’un manque de variance dans les données pour ce concept.

Les covariables entrées dans les modèles d’analyse étaient l’âge et le sexe de l’enfant, le revenu annuel de la famille, l’emplacement de la résidence (urbain/rural), et l’« autre fonctionnement » de l’enfant, qui regroupait les cinq attributs restants de l’IES et quatre éléments de l’incapacité de l’EPLA (tableau 1).

Analyses

Au moyen d’une modélisation avec équations structurelles (MES), on a exécuté trois modèles. Le modèle à covariables examinait le rapport entre toutes les covariables et les trois variables de résultats – santé et bien-être de la famille, participation de l’enfant à l’école, et participation de l’enfant à l’extérieur de l’école. Le modèle à effets directs a permis de vérifier si le diagnostic de l’enfant avait un effet direct sur les trois variables de résultats lorsque l’on tenait compte des covariables. Le modèle à effets indirects a permis de vérifier si le diagnostic de l’enfant avait un effet indirect sur les trois variables de résultats, en incluant le fonctionnement lié au TSA et, le cas échéant, si le fonctionnement lié au TSA constituait un facteur de médiation pour les effets indirects, une fois prises en compte les covariables (figure 1).

Au moyen du logiciel MPlus (version 7.11, MUTHÉN & MUTHÉN, Los Angeles, CA), on a eu recours à la méthode des moindres carrés pondérés ajustés sur la moyenne et sur la variance. À partir des critères publiésNote 32Note 33, l’ajustement a été considéré comme acceptable si : l’erreur quadratique moyenne de l’approximation (RMSEA) avec une borne supérieure d’intervalle de confiance (IC) de 90 % était < 0,08 ou une valeur p ≥ 0,05; l’indice comparatif d’ajustement (CFI) était > 0,95; et le résidu quadratique moyen pondéré (WRMR) était < 1,0. Étant donné la forte influence de la taille de l’échantillon sur la signification statistique des coefficients de corrélation, on a considéré qu’un coefficient de trajectoire uniformisé (SPC) avait un effet direct ou indirect sur les résultats, uniquement s’il était statistiquement significatif (p < 0,05) et avait une valeur absolue supérieure à ,22 (expliquant ainsi au moins 5 % de la variance totale, approximativementNote 34). Pour comparer les modèles, on a examiné le R-carré additionnel (pourcentage de la variance additionnelle expliquée par l’ajout de variables dans un modèle), et une proportion additionnelle de 5 % de la variance expliquée a été considérée comme significative. Enfin, on a eu recours au test de Sobel pour vérifier la signification des effets soumis à un facteur de médiationNote 35.

Résultats

Les caractéristiques des enfants et de leurs familles sont présentées dans le tableau 1. Des indices sommaires pour les trois analyses de MES sont présentés dans le tableau 2.

Tous les modèles étaient ajustés adéquatement aux données – les RMSEA se situaient dans des fourchettes acceptables, même si le CFI et le WRMR se situaient à l’extérieur de la fourchette idéale (tableau 2). Dans tous les cas, l’examen des indices de modification n’a pas permis de déterminer de façons d’améliorer l’ajustement du modèle. La suppression des trajectoires non significatives peut augmenter l’ajustement du modèle, mais compte tenu de la nature confirmatoire de ces analyses, on n’a pas supprimé les trajectoires non significatives.

Le modèle à covariables expliquait 11,6 % de la variance pour la santé et le bien-être de la famille, 16,6 % de la variance pour la participation à l’école et 16,4 % de la variance pour la participation à l’extérieur de l’école.

Dans le modèle à effets directs, le diagnostic de TSA de l’enfant avait un effet direct significatif sur la santé et le bien-être de la famille (SPC = ,29, p < 0,05) et sur la participation à l’école (SPC = ,35, p < 0,05) (figure 2), mais pas sur la participation à l’extérieur de l’école (SPC = ,10, p = 0,02), le coefficient de trajectoire ne respectant pas le critère pour une ampleur d’effet significative. L’inclusion du diagnostic de l’enfant dans le modèle à covariables expliquait des proportions additionnelles de 8 % et 10,9 % de la variance totale pour la santé et le bien-être de la famille et la participation à l’école, respectivement.

Dans le modèle à effets indirects, les effets directs du diagnostic de l’enfant sur les résultats de l’enfant et de la famille disparaissaient lorsque le fonctionnement lié au TSA était ajouté (figure 3), les SPC n’atteignant plus les seuils pour la signification statistique ou l’ampleur de la taille de l’effet. Le fonctionnement lié au TSA avait un effet direct significatif sur la santé et le bien-être de la famille (SPC = ,73, p < 0,05), la participation à l’école (SPC = ,54, p < 0,05), et la participation à l’extérieur de l’école (SPC = ,25, p < 0,05). Comme il était à prévoir, le fonctionnement lié au TSA comportait aussi un lien significatif avec le diagnostic de l’enfant (SPC = ,39, p < 0,05), ce qui signifie que l’absence de diagnostic de TSA était liée à une incapacité moins grande dans les domaines de la parole et de la communication, de la cognition et de l’apprentissage, et du fonctionnement émotionnel – comportemental/psychologique (figure 3). Qui plus est, le fonctionnement lié au TSA représentait un facteur de médiation important entre le diagnostic et la santé et le bien-être de la famille (z = 7,88, p < 0,05), la participation de l’enfant à l’école (z = 7,18, p < 0,05), et la participation de l’enfant à l’extérieur de l’école (z = 3,38, p < 0,05). L’inclusion du fonctionnement lié au TSA dans le modèle expliquait des proportions additionnelles de 43,6 %, 24,0 % et 5,2 % de la variance totale de la santé et du bien-être de la famille, de la participation à l’école et de la participation à l’extérieur de l’école, respectivement (tableau 2).

Discussion

Conformément aux hypothèses, dans le cas des enfants ayant reçu un diagnostic de TSA ou d’autres TDND, les caractéristiques fonctionnelles du développement neurologique expliquaient davantage la variance dans les résultats de la famille et de l’enfant que le diagnostic de l’enfant, et constituaient un facteur de médiation pour les effets apparents du diagnostic sur ces résultats. Pour les cliniciens, ces résultats peuvent sembler intuitifs, mais les conclusions de la présente analyse fournissent des données probantes qui pourraient se révéler pertinentes pour les réflexions et la planification relatives aux services et aux soutiens destinés aux enfants ayant une incapacité neurologiqueNote 36Note 37. De fait, elles font ressortir l’importance des caractéristiques fonctionnelles à une époque où un diagnostic donné continue souvent d’être un critère important, et parfois majeur, de la détermination de l’admissibilité.

Des études antérieures ont démontré des liens entre des diagnostics de problèmes neurologiques du développement particuliers et les résultats de l’enfant et de la familleNote 38Note 39Note 40, mais ont peu porté sur le rôle explicatif possible des caractéristiques fonctionnelles de l’enfant. Dans une étude, on a déterminé que le stress des parents était plus élevé dans les familles où un enfant avait reçu un diagnostic de trouble du spectre de l’alcoolisation fœtale plutôt que de TSA,Note 38, mais on n’a pas examiné les variations de caractéristiques fonctionnelles ou comportementales de l’enfant. D’autres études ont montré qu’un diagnostic de TSA était associé à un plus grand nombre de besoins de soins de santé non comblés et à des répercussions plus graves sur la famille, par rapport aux besoins de soins de santé spéciaux en généralNote 39, ou aux autres déficiences du développement (syndrome de Down, paralysie cérébrale et retard de développement) ou problèmes de santé mentale (problèmes d’anxiété ou de comportement)Note 40 . Même si cette dernière étude a tenu compte de la situation fonctionnelle des enfants, celle-ci a été confirmée au moyen d’une seule question génériqueNote 40. Les mesures composites de la présente analyse étaient probablement plus sensibles parce qu’elles comprenaient des évaluations du fonctionnement pour une gamme de domaines, et qu’elles ont révélé que les caractéristiques fonctionnelles expliquaient mieux l’effet apparent du diagnostic et constituaient un facteur de médiation pour cet effet. Kogan et coll.Note 39 ont déterminé que divers problèmes émotionnels, développementaux et comportementaux, outre un diagnostic de TSA, prédisaient les répercussions sur la famille et les besoins non comblés, et que la capacité fonctionnelle de l’enfant était le prédicteur le plus fort et le plus robuste. En dépit de ces résultats, les auteurs ont mis l’accent sur le rôle d’un diagnostic de TSA dans leurs conclusionsNote 39.

Un ensemble limité de travaux ont porté de façon explicite sur les répercussions relatives du diagnostic et des caractéristiques fonctionnelles sur la santé et les besoins de services d’un fournisseur de soins. Selon Blacher et McIntyreNote 29, un diagnostic d’autisme chez les jeunes adultes ayant des incapacités cognitives-adaptatives prédisait un bien-être maternel moins grand qu’une incapacité intellectuelle non différenciée, la paralysie cérébrale ou le syndrome de Down. Toutefois, dans d’autres analyses, on a déterminé que ce rapport était presque entièrement fonction du niveau de problèmes comportementaux de l’enfant. D’autres chercheurs ont déclaré que la nécessité de soutiens à domicile dans les familles où un enfant avait une incapacité intellectuelle ou d’autres besoins spéciaux était plus fortement prédite par le degré d’incapacité de l’enfant dans les activités au quotidien et l’incapacité intellectuelle, que par un diagnostic d’incapacité intellectuelle proprement ditNote 10Note 15. Enfin, parmi les enfants ayant une vaste gamme de problèmes de santé chroniques et de difficultés fonctionnelles, les mesures de l’utilisation des services de santé, des limites personnelles et des répercussions sur la famille étaient toutes prédites par les problèmes de santé et les difficultés fonctionnelles; toutefois, les difficultés fonctionnelles étaient le meilleur prédicteur de tous les résultats, sauf les absences de l’écoleNote 16.

La présente étude confirme l’importance des caractéristiques fonctionnelles par rapport au diagnostic pour expliquer les variations dans les répercussions sur la famille et la participation de l’enfantNote 10Note 21Note 41. La démonstration de ces rapports dans une population bien définie d’enfants canadiens ayant des TDND confirme l’importance de ces travaux pour l’organisation des services de santé et de réhabilitation et des services sociaux pour les enfants ayant une incapacité neurologique. Ces résultats complètent les données probantes concernant la complexité fonctionnelle, diagnostique et biologique chez les enfants ayant des TDNDNote 2Note 25Note 42Note 43Note 44Note 45 et la fréquence de problèmes comportementaux, émotionnels ou autres de santé mentale coexistantsNote 46Note 47Note 48, ce qui renforce collectivement les préoccupations concernant l’utilisation de classifications catégoriques du DSM ou de la CIM pour la planification des services. La présente étude illustre en outre la portée des recherches innovatrices sur les rapports dynamiques entre les domaines de la CIF.

Limites

Les forces et l’importance de ces conclusions devraient être prises en compte dans le contexte de plusieurs limites. Les principales variables ont été confirmées à partir de données déclarées par les parents, sans corroboration du diagnostic ou des caractéristiques fonctionnelles de l’enfant par des tiers. Toutefois, la majeure partie de la recherche fondée sur des enquêtes est sujette aux mêmes limites possibles. Par ailleurs, le risque d’incompréhension et de biais est réduit dans l’EPLA, grâce à la collecte de données par des intervieweurs expérimentés et bien formés.

Le plan transversal de la présente étude diminue la capacité d’inférer que les résultats découlent de différences dans les diagnostics ou les caractéristiques fonctionnelles des enfants. Au moment de l’établissement du modèle, on a considéré que le fonctionnement de l’enfant lié au TSA représentait une variable explicative proximale associée à des aspects des résultats de l’enfant et de la famille pouvant constituer un facteur de médiation pour les rapports entre le diagnostic et les « résultats ». L’hypothèse était que les caractéristiques mesurées individuellement révèlent davantage au sujet du « comportement » de l’enfant au quotidien (y compris les conséquences sur la participation et la fourniture de soins), que la connaissance de la catégorie de diagnostic de l’enfant. Cette hypothèse est appuyée par des données probantes de l’hétérogénéité clinique et de la complexité fonctionnelle à l’intérieur des catégories de diagnosticsNote 2Note 24Note 25. En vue d’atténuer cette limite possible, lorsque les modèles ont été exécutés en utilisant le diagnostic de l’enfant comme facteur de médiation, les résultats et les conclusions sont demeurés inchangés (données non présentées).

Il aurait peut-être été préférable de retenir des éléments plus affinés et choisis par le chercheur pour analyser les caractéristiques fonctionnelles des enfants. Néanmoins, l’EPLA a fourni des données uniformes permettant d’étudier le rapport entre le diagnostic et le fonctionnement chez les enfants ayant une incapacité neurologique.

Enfin, la question filtre utilisée dans le cadre de la stratégie postcensitaire de l’EPLA peut avoir entraîné une sous-représentation des personnes ayant une incapacité mentale et psychologiqueNote 49. Les répercussions possibles de cela sur les enfants participants, ainsi que sur les analyses, ne sont pas claires.

Mot de la fin

Ces résultats sont les plus pertinents pour la planification et la fourniture de services et de soutiens pour les enfants ayant une incapacité neurologique. Ils sont aussi pertinents pour les cliniciens susceptibles de mettre l’accent principalement ou exclusivement sur l’établissement d’un diagnostic. Un horizon d’évaluation élargi, qui comprend des mesures et de la documentation au sujet des caractéristiques fonctionnelles individuelles, permettrait aux médecins d’établir des partenariats plus complets avec les fournisseurs de services auxiliaires et habilitantsNote 50. D’autres recherches pourraient porter sur les rapports prédictifs entre le diagnostic, les caractéristiques fonctionnelles et les résultats pour d’autres problèmes neurologiques du développement et de santé chroniques de l’enfance, ainsi que sur la façon dont le diagnostic et les caractéristiques fonctionnelles de l’enfant interagissent pour prédire le besoin de services et de soutiens perçu par la famille et les professionnels.

Remerciements

Les présents travaux ont été menés grâce à un soutien financier accordé au Réseau canadien des centres de données de recherche (RCCDR) par le Conseil de recherches en sciences humaines (CRSH), les Instituts de recherche en santé du Canada (IRSC), la Fondation canadienne pour l’innovation (FCI) et Statistique Canada. M. Miller et Mme Mâsse reçoivent du soutien de la Sunny Hill Foundation for Children et du Child and Family Research Institute, respectivement.

Les auteurs remercient le personnel du Centre de données de recherche interuniversitaire de la Colombie-Britannique, à l’Université de la Colombie-Britannique, pour leur soutien relativement à l’accès aux données.

Appendix

Références
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