Chapitre 3 : Où se situe cette étude?

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La recherche empirique antérieure a été instrumentale dans l'établissement de liens directs entre la variation des conditions économiques relatives des immigrants canadiens et les différences de transférabilité des compétences acquises par le système éducatif du pays d'origine ou d'obtention du diplôme. Cependant, plusieurs aspects importants qui n'y ont pas été pris en compte nécessitent la conduite de recherches approfondies supplémentaires. Par exemple, Gilmore et Le Petit (2008) ne considèrent pas les individus ayant une éducation postsecondaire non universitaire, bien que ce groupe démographique représente une portion non négligeable de la population active canadienne. Zietsma (2010) se concentre uniquement sur les individus travaillant dans les professions règlementées et, de ce fait, n'est pas en mesure de nous informer sur les performances économiques des immigrants avec une éducation étrangère qui travaillent dans les professions non règlementées ainsi que dans le commerce.

Plante (2010) offre un profil sociodémographique plus complet des immigrants internationalement instruits ayant des études postsecondaires ainsi qu'un portait global de leurs résultats sur le marché du travail relativement aux Canadiens de naissance et aux immigrants avec une éducation canadienne. Cependant, la présence étude, tout comme les deux précédentes, ne prend pas en compte divers facteurs qui peuvent avoir un effet sur la performance des immigrants internationalement instruits sur le marché du travail.1 Ainsi, il est difficile de connaître la mesure dans laquelle les résultats obtenus peuvent être attribués aux différences dans les autres caractéristiques fortement corrélées à la qualité de l'emploi et aux revenus salariaux.

L'étude de Galarneau et Morissette (2004) couvre seulement les résultats des immigrants très récents sur le marché du travail tandis que Boyd et Schellenberg (2007) étudient uniquement l'employabilité des docteurs et des ingénieurs. De leur côté, Ferrer, Green et Riddell (2006), Alboim, Finnie et Meng (2005) ainsi que Sweetman et McBride (2004) considèrent que les compétences dans le groupe des immigrants internationalement instruits sont qualitativement homogènes, ce qui n'est pas corroboré empiriquement dans l'étude de Sweetman (2004). Par contre, à cause de l'absence de renseignements directs sur le lieu d'obtention du diplôme dans ses données, Sweetman (2004) considère que le pays de provenance des immigrants canadiens équivaut nécessairement à l'endroit dans lequel ils ont reçu leur plus haut niveau d'éducation prémigratoire.

Nous avons appris de la recherche empirique sur la migration (voir par exemple, Mayda, 2005) que la migration internationale est déterminée par une combinaison de considérations économiques (telles que la pauvreté, le chômage, l'espérance de salaires plus élevés ou de meilleures conditions de vie), politiques (comme les conflits, la violence, la mauvaise gouvernance et la liberté politique), sociales et culturelles (comme la religion, la réunification familiale, la violation des droits de l'homme, la discrimination). Une portion non négligeable d'individus nés à l'étranger pourrait, pour plusieurs de ces considérations, avoir obtenu un diplôme dans un pays étranger donné, s'en aller vivre temporairement dans un second pays étranger par la suite et finalement choisir de s'établir  en permanence au Canada. En appui à ce raisonnement, Gilmore et Le Petit (2008) ont montré que, en date de 2007, 25 % des immigrants canadiens détenant un diplôme européen étaient nés en dehors de l'Europe et que deux tiers de ceux qui ont un diplôme universitaire américain sont nés en dehors des États-Unis. Il est donc raisonnable de penser que l'utilisation d'une telle technique d'imputation pourrait sérieusement créer une classification erronée des compétences hautement transférables comme étant faiblement transférables et vice versa ou capter les effets qui n'ont rien à voir avec la transférabilité internationale des compétences comme telles. La classification erronée des compétences pourrait en retour miner une conclusion importante de l'étude de Sweetman (2004), selon laquelle, en moyenne, les immigrants issus de pays dont les résultats éducatifs sont de « haute qualité » ont de plus grands rendements économiques par rapport à ceux dont l'éducation est issue de pays dont les résultats éducatifs sont de « basse qualité ».

Boyd et Thomas (2001) supposent que tous les immigrants reçus au Canada à l'âge adulte ont été instruits à l'étranger, tandis que ceux qui sont arrivés en très bas âge au Canada y ont probablement terminé leur éducation. Il existe des preuves selon lesquelles les différences dans l'accumulation de la scolarité après la migration conduisent aux différences observées dans les résultats de participation au marché du travail canadien dans diverses cohortes d'immigration (voir par exemple, Plante, 2010; Ferrer, Green et Riddell, 2006). Ainsi, il se pourrait qu'un nombre significatif de personnes nées à l'étranger et reçues en tant qu'adultes aient choisi de terminer leurs études au Canada avant de participer au marché du travail canadien. Similairement, il se pourrait que pour des raisons inobservées, une portion substantielle d'individus nés à l'étranger et reçus en très bas âge ait choisi d'obtenir un diplôme dans un établissement éducatif étranger.

Sous l'hypothèse nulle que ces deux scénarios soient plausibles dans les données utilisées par Boyd et Thomas, il paraît juste de présumer que cette étude sous-estimerait ou surestimerait d'une certaine manière les variations concernant la façon dont les immigrants reçus qui ont étudié à l'extérieur du Canada s'en sortent sur les marchés du travail canadiens. L'analyse effectuée par Mata (2008) est probablement celle qui se rapproche le plus de notre travail. Cependant, cette recherche exploratoire s'appuie sur des données agrégées tirées des totalisations officielles du Recensement de 2006 et ne nous informe pas sur l'effet que le lieu des études postsecondaires exerce sur les revenus d'emplois des immigrants internationalement instruits. Sans de telles analyses, les résultats de cette étude paraissent très limités dans leurs incidences sur les politiques.

Nous complémentons les études canadiennes antérieures en utilisant des techniques multivariées et des données récentes pour offrir des perspectives différentes sur les variations observées à l'intérieur du groupe des immigrants internationalement instruits et concernant les performances individuelles sur le marché du travail canadien. Notre analyse est importante pour la compréhension de l'effet réel qu'exerce le lieu de l'éducation sur les résultats de participation des immigrants hautement instruits au marché du travail canadien parce que, contrairement à la plupart d'études antérieures, nous : (a) tirons profit des renseignements statistiques les plus récents disponibles dans le Recensement de 2006 sur le lieu d'achèvement des études postsecondaires,2 (b) considérons l'ensemble des participants potentiels au marché du travail qui détiennent un certificat, diplôme ou grade postsecondaire, peu importe le domaine d'études ou la profession, et enfin, (c) examinons simultanément le succès sur le marché du travail des immigrants en termes de leur situation d'activité, de leurs revenus salariaux et de leur niveau d'adéquation entre l'éducation requise et l'emploi.


Notes

  1. Comme l'âge, le sexe, l'expérience sur le marché du travail, le statut matrimonial, la maîtrise des langues officielles, les cycles économiques, les antécédents familiaux, etc.
  2. Il devrait être noté que l'Enquête sur la population active (EPA) collecte des données sur le lieu des études depuis janvier 2006. Cependant, l'EPA est un sondage et ne peut pas offrir un niveau de détails comparable à celui qui est rendu possible par le Recensement.
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