Rapports économiques et sociaux
Déséquilibres du marché du travail : données probantes de l’Outil de suivi de l’économie canadienne
DOI: https://doi.org/10.25318/36280001202300600001-fra
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Chaque mois, Statistique Canada publie des dizaines de communiqués de données statistiques et d’analyses dans le cadre de sa mission visant à aider les Canadiens à mieux comprendre leur pays. Ces statistiques mettent en lumière les tendances qui touchent les personnes vivant au Canada et la dynamique interreliée au sein de l’économie canadienne. Les tendances ou les chocs dans n’importe quel secteur économique ont des répercussions sur d’autres secteurs : les dépenses et la production, les emplois et les prix, les industries et les régions géographiques. Cette dynamique a été particulièrement forte pendant la période de turbulences économiques déclenchée par la pandémie de COVID-19, ce qui a mis en évidence la valeur des statistiques détaillées et actuelles pour comprendre la société canadienne.
L’Outil de suivi de l’économie canadienne, lancé le 16 mai 2023, est un nouvel outil de visualisation des données qui combine certains indicateurs mensuels de l’activité économique provenant de l’Entrepôt commun de données de sortie de Statistique Canada en une interface unifiée et personnalisable. L’outil de suivi comprend actuellement six indicateurs : entreprises nouvellement ouvertes et fermées, emploi et rémunération hebdomadaire moyenne, postes vacants et taux de postes vacants, produit intérieur brut, Indice des prix à la consommation et prix des produits industriels. Chaque nouvelle diffusion de données pour ces séries est automatiquement intégrée dans l’Outil de suivi de l’économie canadienne, ce qui permet de s’assurer que les statistiques demeurent actuelles et à jour.
L’Outil de suivi de l’économie canadienne réunit les travaux de nombreux secteurs de programme au sein de Statistique Canada, tant en ce qui concerne les données sous-jacentes affichées que la collaboration qui a mené à sa création et à sa conception. L’interface de visualisation facilite les comparaisons entre les indicateurs économiques et la désagrégation par industrie, catégorie de produit et région géographique. Ce projet reflète le principe selon lequel l’intégration de l’information entre les champs d’activité économique renforce la capacité de comprendre l’économie canadienne et sa dynamique changeante.
Cet article est le premier d’une série qui dévoilera des renseignements tirés de l’Outil de suivi de l’économie canadienne. Ces articles permettront d’explorer et d’interpréter les tendances qui touchent les Canadiens pendant que l’activité économique continue de reprendre de la vigueur après avoir été touchée par la pandémie.
Les déséquilibres sur le marché du travail persistent, mais varient d’une industrie à l’autre
Des déséquilibres importants entre l’offre et la demande de main-d’œuvre ont été un élément persistant de la reprise après la pandémie depuis que l’activité économique a commencé à augmenter de façon constante au cours du deuxième semestre de 2021. Malgré l’ajout de 1,4 million d’emplois salariés entre le milieu de l’année 2021 et le printemps 2022, les postes vacants, après correction pour tenir compte de la saisonnalité, ont dépassé le million d’avril à juin 2022, car les défis liés au recrutement et au maintien en poste des travailleurs sont demeurés généralisés. Bien que les hausses solides du nombre d’emplois enregistrées au cours des derniers mois se soient accompagnées d’une diminution graduelle du nombre de postes vacants, le nombre total de postes vacants demeure bien au-dessus des niveaux prépandémiques, puisque le ratio de chômeurs par rapport au nombre total de postes vacants, un indicateur clé de la tension du marché du travail, demeure proche des creux historiquesNote .
La demande de main-d’œuvre non comblée diminue dans l’hébergement et les services de restauration et dans la fabrication
L’évolution du nombre total de postes vacants au cours de la dernière année peut occulter d’importantes différences au niveau de l’industrie, où les employeurs et les travailleurs continuent de s’adapter à des tensions particulières. La diminution du nombre de postes vacants dans les secteurs axés sur la clientèle, comme l’hébergement et les services de restauration, et dans les secteurs à forte intensité de commerce, comme la fabrication, contraste avec l’augmentation continue de la demande de main-d’œuvre dans les services du secteur public, notamment les soins de santé et l’assistance sociale. Voici un aperçu des tendances récentes en matière d’emploi et de production dans ces secteurs.
Au cours de la dernière année, moins d’entreprises du secteur de l’hébergement et des services de restauration et du secteur de la fabrication ont signalé des défis liés au recrutement et au maintien en poste, et les intentions d’embauche dans les deux secteurs ont commencé à diminuer (graphique 1)Note . Après être demeuré ou à proximité des niveaux à deux chiffres pendant cinq trimestres consécutifs, le taux de postes vacants dans les services d’hébergement et de restauration a chuté à 7,8 % à la fin de 2022, encore plus de 3 points de pourcentage au-dessus de son niveau prépandémiqueNote . Les augmentations des salaires offerts de fin 2021 à fin 2022 dans ce secteur (+5,4 %) continuent d’être inférieures à la moyenne pour l’ensemble de l’économie (+8,5 %). Le nombre total de postes vacants dans les secteurs de l’hébergement et des services de restauration a fortement diminué depuis le milieu de 2022, pour atteindre 90 000 à la fin de l’année, et il est demeuré près de ce niveau au début de 2023Note .
Tableau de données du graphique 1
Mois et années | Services d'hébergement et de restauration | Fabrication | Soins de santé et assistance sociale |
---|---|---|---|
nombre de postes vacants | |||
2019 | |||
janvier | 56 540 | 44 505 | 57 450 |
février | 54 095 | 46 520 | 60 400 |
mars | 59 675 | 50 900 | 68 380 |
avril | 74 170 | 55 800 | 65 970 |
mai | 82 280 | 47 315 | 74 950 |
juin | 75 835 | 49 355 | 66 250 |
juillet | 74 280 | 47 610 | 63 565 |
août | 78 415 | 47 350 | 65 670 |
septembre | 77 600 | 53 730 | 70 830 |
octobre | 67 265 | 48 895 | 61 460 |
novembre | 64 095 | 39 805 | 69 425 |
décembre | 52 965 | 37 980 | 61 010 |
2020 | |||
janvier | 57 300 | 42 330 | 70 185 |
février | 60 565 | 42 380 | 73 580 |
mars | 66 815 | 40 175 | 71 400 |
avril | Note ..: indisponible pour une période de référence précise | Note ..: indisponible pour une période de référence précise | Note ..: indisponible pour une période de référence précise |
mai | Note ..: indisponible pour une période de référence précise | Note ..: indisponible pour une période de référence précise | Note ..: indisponible pour une période de référence précise |
juin | Note ..: indisponible pour une période de référence précise | Note ..: indisponible pour une période de référence précise | Note ..: indisponible pour une période de référence précise |
juillet | Note ..: indisponible pour une période de référence précise | Note ..: indisponible pour une période de référence précise | Note ..: indisponible pour une période de référence précise |
août | Note ..: indisponible pour une période de référence précise | Note ..: indisponible pour une période de référence précise | Note ..: indisponible pour une période de référence précise |
septembre | Note ..: indisponible pour une période de référence précise | Note ..: indisponible pour une période de référence précise | Note ..: indisponible pour une période de référence précise |
octobre | 52 275 | 51 505 | 94 330 |
novembre | 43 370 | 46 960 | 109 790 |
décembre | 43 495 | 41 125 | 99 085 |
2021 | |||
janvier | 33 015 | 52 800 | 87 535 |
février | 40 275 | 49 465 | 116 170 |
mars | 71 570 | 54 980 | 96 740 |
avril | 64 510 | 69 180 | 103 200 |
mai | 78 365 | 62 390 | 119 565 |
juin | 123 700 | 66 025 | 106 285 |
juillet | 137 910 | 80 005 | 101 115 |
août | 166 005 | 81 925 | 127 295 |
septembre | 189 485 | 81 755 | 126 765 |
octobre | 155 415 | 91 975 | 120 320 |
novembre | 133 605 | 81 575 | 121 270 |
décembre | 140 225 | 72 500 | 134 030 |
2022 | |||
janvier | 96 125 | 84 720 | 133 885 |
février | 116 595 | 80 030 | 121 335 |
mars | 151 555 | 84 250 | 147 535 |
avril | 152 045 | 92 125 | 126 970 |
mai | 166 215 | 86 720 | 140 975 |
juin | 169 770 | 82 645 | 147 285 |
juillet | 149 250 | 83 380 | 150 150 |
août | 140 995 | 87 090 | 142 480 |
septembre | 151 850 | 75 860 | 157 905 |
octobre | 127 105 | 79 950 | 150 145 |
novembre | 111 680 | 69 745 | 133 335 |
décembre | 90 035 | 60 500 | 147 410 |
2023 | |||
janvier | 86 075 | 64 065 | 160 365 |
février | 91 260 | 57 115 | 135 370 |
mars | 105 255 | 60 240 | 144 430 |
.. indisponible pour une période de référence précise Note : Il n’y a pas de données sur les postes vacants pour la période d’avril 2020 à septembre 2020. Les données ne sont pas désaisonnalisées. Source : Statistique Canada, Outil de suivi de l’économie canadienne. |
Les changements à l’égard de l’emploi et la production dans les secteurs de l’hébergement et des services de restauration ont divergé au cours des derniers mois. L’emploi salarié a continué de suivre une tendance à la hausse, mais à un rythme plus modéré, tandis que la production a connu un ralentissement au deuxième semestre de 2022, la hausse des prix ayant pesé sur les dépenses discrétionnaires (graphique 2)Note . Les ouvertures d’entreprises se sont maintenues, les coûts des emprunts et du service de la dette ayant augmenté.
Tableau de données du graphique 2
Mois et années | Services d'hébergement et de restauration | Fabrication | Services de soins de santé et assistance sociale |
---|---|---|---|
indice (janvier 2021 = 100) | |||
2021 | |||
janvier | 100,0 | 100,0 | 100,0 |
février | 105,9 | 98,3 | 100,7 |
mars | 119,4 | 99,4 | 101,2 |
avril | 107,0 | 97,4 | 101,9 |
mai | 102,1 | 97,0 | 102,4 |
juin | 120,6 | 98,6 | 102,7 |
juillet | 137,2 | 97,8 | 103,0 |
août | 146,5 | 98,1 | 103,1 |
septembre | 145,9 | 96,7 | 103,2 |
octobre | 144,3 | 99,1 | 103,2 |
novembre | 147,3 | 100,2 | 103,2 |
décembre | 145,3 | 100,8 | 103,4 |
2022 | |||
janvier | 125,1 | 101,4 | 103,3 |
février | 142,7 | 102,0 | 103,9 |
mars | 153,7 | 103,8 | 104,1 |
avril | 155,6 | 103,6 | 104,2 |
mai | 158,1 | 103,0 | 104,5 |
juin | 160,4 | 103,5 | 104,8 |
juillet | 160,2 | 102,9 | 105,2 |
août | 161,6 | 102,4 | 105,5 |
septembre | 161,5 | 102,5 | 105,9 |
octobre | 162,0 | 101,6 | 106,4 |
novembre | 160,5 | 101,9 | 106,7 |
décembre | 161,2 | 101,7 | 107,0 |
2023 | |||
janvier | 168,0 | 102,9 | 107,3 |
février | 168,0 | 103,3 | 107,5 |
mars | 164,3 | 102,6 | 107,7 |
Source : Statistique Canada, Outil de suivi de l’économie canadienne. |
Bien que les défis liés à la main-d’œuvre dans le secteur de la fabrication aient également diminué, les coûts élevés des intrants et du transport demeurent des obstacles clés alors que les perturbations de la chaîne d’approvisionnement continuent de s’amoindrirNote . Le taux de postes vacants dans le secteur de la fabrication a diminué pour s’établir à 4,3 % à la fin de 2022, en baisse d’environ un point de pourcentage par rapport au sommet atteint plus tôt au cours de l’année, mais environ 1,7 point de pourcentage au-dessus de son point de repère d’avant la COVID-19. Après une tendance à la baisse au cours du deuxième semestre de 2022, le nombre de postes vacants dans le secteur de la fabrication s’est élevé à environ 60 000 à la fin de l’année et il est demeuré près de ce niveau au début de 2023.
Comme pour l’hébergement et les services de restauration, la production s’est modérée à mesure que les conditions du marché du travail se sont améliorées. L’emploi salarié dans le secteur manufacturier a légèrement augmenté à la fin de 2022, en raison de la réduction des intentions d’embauche, les gains modérés en matière d’emploi ayant compensé la baisse de l’embauche pendant la période estivale. Parallèlement, la production industrielle a ralenti, les volumes réels diminuant au cours de quatre des six derniers mois de 2022, les ouvertures d’entreprises ayant ralenti.
Peu de signes d’une diminution des postes vacants dans le secteur des soins de santé et de l’assistance sociale
Au cours de la dernière année, il y a eu peu de changement dans le nombre d’organismes de soins de santé et d’assistance sociale qui ont déclaré des obstacles liés au travail. Plus de 4 organismes de soins de santé et d’assistance sociale sur 10 prévoient des difficultés à court terme pour recruter des travailleurs qualifiés, tandis que le tiers s’attend à des difficultés à retenir leurs employésNote . Contrairement à d’autres secteurs, les postes vacants dans le secteur des soins de santé et de l’assistance sociale se sont maintenus à des niveaux élevés à mesure que l’emploi salarié augmentait.
L’emploi salarié dans le secteur des soins de santé et de l’assistance sociale a augmenté de façon constante au cours des quatre derniers mois de 2022 et a dépassé de 134 000 le point repère d’avant la COVID-19 (un gain net étant dépassé par les services professionnels, scientifiques et techniques seulement). Le taux de postes vacants dans le secteur des soins de santé et de l’assistance sociale, à 6 %, demeure deux fois plus élevé qu’avant la pandémie. Le nombre de postes de soins de santé non pourvus (+96 200) a continué d’augmenter, en raison de la demande accrue d’infirmiers autorisés et d’infirmiers psychiatriques autorisés, d’infirmiers auxiliaires autorisés, d’aides-infirmiers, d’aides-soignants et d’associés au service aux patients. Depuis la fin de l’année 2021, les augmentations des salaires offerts en soins de santé et en assistance sociale (+8,2 %) correspondent à la moyenne économique. Le nombre total de postes vacants dans le secteur des soins de santé et de l’assistance sociale a atteint 160 000 en janvier 2023, avant de diminuer légèrement en février et mars.
Postes vacants et exigences en matière de scolarité
Les tableaux ci-dessus illustrent comment l’Outil de suivi de l’économie canadienne peut être utilisé en combinaison avec d’autres sources de données pour élaborer des profils sectoriels. Une analyse simultanée de Morissette (2023) donne de nouveaux renseignements sur les déséquilibres actuels sur le marché du travail en comparant le nombre de postes vacants exigeant un niveau de scolarité donné par rapport au nombre de personnes en chômage ayant ce niveau de scolarité. L’auteur ne trouve aucune preuve indiquant que les postes vacants exigeant un niveau de scolarité plus élevé reflètent un manque de chercheurs d’emploi ayant un haut niveau de scolarité. Au contraire, le nombre de chômeurs ayant un haut niveau de scolarité dépasse le nombre de ces postes dans presque toutes les régions économiques. Ce constat suggère qu’un manque de concordance entre les compétences requises pour ces postes et les compétences des chercheurs d’emploi joue un rôle important. L’inverse est vrai pour les postes vacants exigeant un niveau de scolarité plus faible, la demande non comblée dépassant l’offre de main-d’œuvre dans la plupart des régions du pays.
Auteurs
Guy Gellatly travaille à la Division de l’analyse stratégique,publication et formation, Statistique Canada. Michael Stepner travaille à la Division de l'analyse sociale et de la modélisation, Statistique Canada.
Références
Morissette, R. 2023. Chômage et postes vacants selon le niveau de scolarité, de 2016 à 2022 (statcan.gc.ca). Rapports économiques et sociaux. No 36-28-0001 au catalogue Volume 3, numéro 6. Ottawa : Statistique Canada.
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