Section 1 : Méthode et hypothèses

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Méthode

Les projections démographiques pour le Canada, les provinces et les territoires sont réalisées au moyen de la méthode des composantes, une méthode utilisée depuis plusieurs décennies par Statistique Canada comme par d'autres agences statistiques provinciales, territoriales, nationales et internationales pour projeter quelques caractéristiques — âge, sexe, lieu de résidence essentiellement — d'une population. Chaque composante de l'accroissement — fécondité, mortalité, immigration et émigration — fait l'objet d'une ou de plusieurs hypothèses qui, une fois appliquées sous forme d'effectifs, de taux ou de quotients à la population de départ, génèrent des naissances, des décès, des immigrants et des émigrants. La population de l'année suivante est ensuite obtenue par une comptabilité démographique simple, les naissances et les immigrants étant ajoutés à la population de départ alors que les décès ainsi que les émigrants en sont retranchés.

Le modèle de projection utilisé par Statistique Canada permet de tenir compte de l'interaction entre les phénomènes démographiques. Pour ce faire, le modèle construit d'abord une matrice de transition qui combine les divers taux associés aux évènements (naissances, décès, immigration, émigration, migration interne). Cette matrice de transition est ensuite appliquée à la population en début de période afin d'obtenir la population en fin de période. Cette étape permet par ailleurs de calculer la population moyenne en cours d'année, population nécessaire au calcul des événements observés au cours d'une année donnée.

Enfin, la population de chacune des provinces et des territoires est projetée individuellement, ce qui permet de tenir compte des particularités régionales. La sommation de ces populations projetées permet d'obtenir une projection cohérente de la population du Canada dans son ensemble.

Population de départ

La population de départ de ces projections provient des estimations postcensitaires provisoires au 1er juillet 2009 telles que calculées par la Division de la démographie de Statistique Canada. Ces estimations selon l'âge (de 0 à 99 ans et 100 ans ou plus), le sexe et la province ou le territoire de résidence sont basées sur le Recensement de 2006 et sont ajustées pour tenir compte du sous-dénombrement net par âge, sexe et province ou territoire. Au 1er juillet 2009, la population canadienne était estimée à 33 739 859 individus. Le Tableau 1.1 présente les effectifs de population des divers provinces et territoires. Ces estimations sont également disponibles gratuitement sur le site Internet de Statistique Canada.

Fécondité

Parce que la fécondité a un effet considérable sur la taille et la structure par âge d'une population, trois hypothèses sont habituellement formulées pour cette composante. Cette édition des projections démographiques ne fait pas exception et ces hypothèses reposent sur un examen attentif des tendances historiques et récentes tant au niveau provincial, territorial, national qu'international. Les hypothèses portent à la fois sur le niveau futur de la fécondité et sur son calendrier (l'âge moyen à la maternité).

Présentation des hypothèses

Au niveau national, l'hypothèse moyenne retenue pour ces projections correspond à un indice synthétique de fécondité de 1,70 enfant par femme atteint dès la première année projetée et maintenu constant sur toute la période de projection. Il s'agit d'une révision à la hausse par rapport aux dernières projections démographiques publiées en 2005 qui suggéraient un niveau de 1,51 enfant par femme.

Selon cette hypothèse moyenne, l'âge moyen à la maternité continuerait d'augmenter et passerait de 29,75 ans en 2007 à 30,17 ans en 2009, soit une augmentation d'environ 0,4 an. Il serait ensuite maintenu constant sur toute la période de projection.

Les hypothèses faible et forte ont pour leur part été établies à 1,50 et 1,90 enfant par femme au niveau national. Ces niveaux sont progressivement atteints en 2013-2014 et sont ensuite maintenus constants jusqu'à la fin de la période de projection (Graphique 1.1). L'âge moyen à la maternité augmente également selon ces deux hypothèses, soit de 0,6 an et 0,2 an selon les hypothèses faible et forte, respectivement.

Le Tableau 1.2 présente, pour chaque province/ territoire, les indices synthétiques de fécondité observés et projetés selon trois hypothèses dérivées de celles élaborées au niveau national. Ces hypothèses ont été constituées en appliquant au taux de fécondité selon l'âge de chacun des provinces et territoires des facteurs de variation calculés à l'échelon national de manière à atteindre un indice synthétique de fécondité et un âge moyen à la maternité cibles. De façon générale et à l'image de la situation observée en 2007, Terre-Neuve-et-Labrador présenterait la fécondité la plus faible selon les trois hypothèses et le Nunavut la plus forte.

Justification des hypothèses

Plusieurs éléments ont été considérés au moment de la formulation des hypothèses de fécondité pour le Canada. D'une part, on a observé un mouvement à la hausse de la fécondité canadienne depuis 2004, l'indice synthétique de fécondité (ISF) étant passé de 1,53 enfant par femme à 1,66 en 2007, dernière année disponible au moment de la réalisation de ces projections. Le niveau atteint en 2007 était le plus élevé au pays depuis 1995, témoignant du fait qu'il s'agit bien d'une hausse significative observée sur une période de trois ans seulement. Plus encore, les données des naissances pour l'année 2008 diffusées par certaines provinces canadiennes montrent une poursuite de la tendance haussière, laissant croire que l'ISF observé pour le Canada en 2008 sera plus élevé encore qu'en 2007. Par exemple, l'ISF était déjà supérieur à 1,70 enfant par femme au Québec en 2008 (1,74) et supérieur à 1,50 en Colombie-Britannique, soit les niveaux les plus élevés depuis 1976 et 1997, respectivement. Il convenait donc de tenir compte de ces tendances récentes et de réajuster à la hausse l'hypothèse moyenne de fécondité par rapport au dernier exercice.

Le niveau de la descendance finale des Canadiennes nées entre 1960 et 1975, a également été considéré dans l'élaboration de l'hypothèse moyenne. La descendance finale d'une génération de femmes, par exemple celles nées en 1960, correspond au nombre moyen d'enfants que ces femmes auront réellement eu au cours de leur vie reproductive. Cet indicateur est utile pour établir des hypothèses de fécondité puisqu'il est exempt des variations conjoncturelles de la fécondité. Si l'ISF a atteint au Canada des niveaux proches de 1,50 enfant par femme, aucune génération de Canadiennes n'a pour l'instant atteint une descendance finale inférieure à 1,76 enfant par femme, laissant croire qu'une hypothèse moyenne proche de ce niveau est raisonnable pour des projections à moyen ou long terme.

Enfin, l'hypothèse moyenne a également été établie en considérant l'évolution récente de la fécondité dans de nombreux pays industrialisés. À l'instar du Canada, la fécondité de nombreux pays a également augmenté au cours des années récentes, suggérant que la hausse au Canada n'est pas un phénomène isolé. Par exemple, la fécondité au Royaume-Uni est passée d'environ 1,65 enfant par femme en 2001 à 1,90 enfant par femme en 2007 (Graphique 1.2). Il est intéressant de remarquer que le Canada se situe entre deux groupes de pays bien distincts. Un premier groupe, composé des États-Unis, de l'Australie, du Royaume-Uni (tous trois des pays anglo-saxons comme le Canada), de la France et de la Suède, présente habituellement une fécondité plus élevée. À l'opposé, l'Italie, le Japon, l'Espagne, l'Allemagne ou encore la Suisse présentent habituellement une fécondité inférieure. L'hypothèse moyenne a été élaborée afin de préserver la position intermédiaire du Canada tout en tenant compte du mouvement à la hausse qui peut être observé pour la presque totalité de ces pays.

L'hypothèse moyenne fait également rapidement passer l'âge moyen à la maternité de 29,75 à 30,17 ans. Il s'agit d'un gain d'environ 0,4 an qui prolonge une longue tendance à la hausse au cours des dernières décennies. Le taux de fécondité des femmes âgées de 30 à 34 ans a d'ailleurs surpassé en 2005 celui des femmes âgées de 25 à 29 ans, témoignant du fait que les Canadiennes ont leurs enfants de plus en plus tard. La hausse ininterrompue jusqu'ici des taux d'activité féminins ainsi que le calendrier de la fécondité plus tardif encore dans certains pays comme l'Australie permet de croire qu'une telle hypothèse est raisonnable.

L'hypothèse faible a été fixée à 1,50 enfant par femme en considérant l'évolution de la fécondité canadienne au cours des dernières décennies. Ce niveau correspond, à peu de chose près, au niveau le plus faible jamais observé au Canada (1,51 enfant par femme en 2000 et 2002). Il s'apparente également aux niveaux de fécondité les plus faibles observés en 2007 dans les provinces ou territoires canadiens (Terre-Neuve-et-Labrador, Nouvelle-Écosse, Nouveau- Brunswick et Colombie-Britannique). Ce niveau est également légèrement supérieur à la fécondité récemment observée au sein du groupe de pays industrialisés dit « à faible fécondité » et composé de l'Allemagne, du Japon, de l'Italie, de la Suisse et de l'Espagne. Enfin, certains phénomènes historiquement liés à une faible fécondité demeurent en progression : l'union libre, la participation des femmes au marché du travail de même que leur niveau moyen de scolarité. Il n'est pas impossible que ces phénomènes exercent encore une pression à la baisse sur la fécondité canadienne dans l'avenir.

L'hypothèse faible est associée à un vieillissement plus important du calendrier de la fécondité, l'âge moyen à la maternité progressant de 0,6 an pour atteindre 30,33 ans. Ce niveau a déjà été observé dans certains pays industrialisés et paraît donc raisonnable à la vue des tendances passées à ce chapitre.

L'hypothèse forte a été fixée à 1,90 enfant par femme en tenant compte du contexte international : ce niveau correspond à peu près au niveau moyen récent de la fécondité dans les pays industrialisés dit « à forte fécondité » comme les États-Unis, la France, l'Australie, le Royaume-Uni ou encore la Suède. Ce niveau est également légèrement inférieur à la fécondité moyenne observée en 2007 dans les provinces où on enregistrait les niveaux de fécondité les plus élevés (Manitoba, Saskatchewan et Alberta). Enfin, il convient de rappeler que ce niveau n'a pas été observé au Canada depuis 1972 et qu'il demeure en deçà du seuil de remplacement des générations (environ 2,10 enfants par femme).

L'hypothèse forte fait passer l'âge moyen à la maternité de 29,75 à 29,96 ans. L'exemple récent de plusieurs pays, en particulier de l'Australie, montre qu'un vieillissement léger du calendrier de la fécondité n'est pas incompatible avec une hausse significative du niveau de la fécondité. L'âge moyen à la maternité n'ayant pas rajeuni au Canada depuis 1975, l'hypothèse forte retenue fait augmenter cet âge au cours des prochaines années, bien que la progression soit plus modeste que dans le cas des hypothèses faible et moyenne.

Mortalité

Comme pour la fécondité, trois hypothèses ont été formulées quant à la mortalité canadienne future, cette composante démographique pouvant avoir un effet important sur les effectifs des populations âgées et très âgées du pays. Dans un contexte de vieillissement démographique, ces populations sont d'un intérêt particulier.

Les trois hypothèses formulées suggèrent la poursuite du déclin séculaire de la mortalité canadienne, donc une espérance de vie à la naissance qui continuerait d'être à la hausse au cours des prochaines années. Les tendances depuis 1921 sont en effet claires et montrent que la mortalité s'est considérablement réduite au cours des 90 dernières années au Canada. Entre 1921 et 2006, l'espérance de vie a progressé de près de 25 ans chez les femmes et de 22 ans chez les hommes. Le rythme auquel l'espérance de vie a progressé a cependant varié d'une période à l'autre, celui-ci ayant été globalement moins rapide au cours des récentes décennies que plus tôt au 20e siècle, particulièrement chez les Canadiennes.

La méthode utilisée pour projeter la mortalité est la même que celle utilisée dans l'édition précédente des projections démographiques. Elle fait appel à un modèle paramétrique développé par Li et Lee (2005). Celui-ci permet de projeter les taux de mortalité par âge et sexe de façon cohérente pour chacune des provinces, ce qui est souhaitable notamment afin de tenir compte du fait que des normes canadiennes assurent une assez forte similitude des divers régimes d'assurance maladie des provinces et territoires.

Les paramètres du modèle Li et Lee sont dérivés de l'évolution des taux de mortalité observés sur une période donnée, cette fois-ci fixée à l'intervalle 1981-2006. Cette période permet non seulement de tenir compte du rythme récent de réduction de la mortalité canadienne mais présente aussi l'avantage de refléter la réduction de l'écart entre l'espérance de vie des hommes et des femmes.

La mortalité des territoires a été projetée en utilisant la méthode des écarts récents à la moyenne nationale, les populations de ces régions étant trop faibles pour permettre d'obtenir des paramètres fiables du modèle Li-Lee. Contrairement à l'édition précédente, chacun des territoires a été traité individuellement cette fois.

Les hypothèses faible et forte ont été dérivées à partir des intervalles de confiance à 1 % du modèle ARIMA utilisé pour projeter un paramètre de l'équation utilisée dans la méthode Li-Lee. Ces intervalles permettent d'obtenir une fourchette raisonnable quant à l'évolution future de l'espérance de vie des provinces et territoires.

Présentation des hypothèses

Selon l'hypothèse moyenne, l'espérance de vie à la naissance des Canadiennes passerait de 82,9 ans en 2006 à 87,3 ans en 2036, soit un gain de 4,4 ans en 30 ans (Tableau 1.3). En comparaison, le gain s'était chiffré à 5,1 ans entre 1976 et 2006. Chez les hommes, l'espérance de vie passerait de 78,2 ans en 2006 à 84,0 ans en 2036, en hausse de 5,8 ans. Au cours de la période de 1976 à 2006, l'augmentation avait été plus importante, soit de 7,8 ans. La progression plus rapide de l'espérance de vie des hommes signifie que l'écart entre la mortalité entre les deux sexes continuerait de se réduire au cours des prochaines années, passant de 4,7 ans en 2006 à 3,3 ans en 2036.

D'une province à l'autre, les écarts d'espérance de vie seraient assez faibles en 2036, une situation à l'image de celle observée en 2006 et témoignant de la relative homogénéité de la mortalité au Canada. Parmi les provinces, Terre-Neuve-et-Labrador présenterait les espérances de vie les plus faibles en 2036, avec 81,7 ans chez les hommes et 85,5 ans chez les femmes, et la Colombie-Britannique les plus élevées, soit 84,5 ans chez les hommes et 87,8 ans chez les femmes.

L'hypothèse faible ne ferait progresser l'espérance de vie que de 3,1 ans chez les femmes et 4,1 ans chez les hommes d'ici 2036; elles atteindraient alors 86,0 et 82,3 ans, respectivement. En revanche, l'hypothèse forte ferait augmenter l'espérance de vie plus rapidement, soit de 5,5 ans chez les femmes et de 7,2 ans chez les hommes, soit à un rythme comparable à celui observé au cours des 25 dernières années. Selon cette hypothèse, l'espérance de vie en 2036 atteindrait 88,4 et 85,4 ans chez les femmes et les hommes, respectivement.

Toutes les hypothèses suggèrent que la réduction de l'écart observé entre l'espérance de vie des hommes et des femmes se poursuivra.

Justification des hypothèses

L'évolution future de la mortalité fait l'objet de nombreux débats au sein de la communauté scientifique. Pour certains, l'allongement futur de l'espérance de vie est incertain, la mortalité étant déjà très faible à de nombreux âges. Si les connaissances, la médecine et la technologie continuent de progresser, il est probable que les gains futurs devront être réalisés face à des maladies chroniques comme le cancer, première cause de mortalité au Canada depuis quelques années, ou encore face à des maladies qui touchent essentiellement la population très âgée. D'autres pensent que la prévalence grandissante de certaines maladies chez les jeunes, par exemple l'obésité, et des maladies qui y sont associées, le diabète et l'hypertension notamment, pourrait ralentir considérablement la progression de l'espérance de vie au cours des prochaines décennies. Certains pensent également que l'espérance de vie à l'échelle des populations s'approche déjà d'une limite compte tenu des systèmes de santé en place. Des gains futurs exigeraient, dans ce contexte, des investissements publics importants qui ne sont pas encore acquis. À l'opposé, de nombreux scientifiques demeurent optimistes, soulignant que l'espérance de vie continue de progresser malgré son niveau élevé déjà atteint dans certains pays. Les limites de la vie humaine se situant bien au-delà de 100 ans, ces chercheurs soulignent que l'espérance de vie d'une population dispose encore d'une marge de progression importante.

Quoi qu'il en soit, les Canadiennes et Canadiens bénéficient d'une des espérances de vie à la naissance les plus élevées du monde. Une comparaison des espérances de vie observées au cours de la période 2007-2009 montre que les Canadiennes n'étaient devancées à ce chapitre que par les Françaises, les Espagnoles, les Suissesses, les Australiennes et les Japonaises, ces dernières jouissant de l'espérance de vie la plus forte, soit de 86 ans. Les Canadiens, quant à eux, n'étaient devancés que par les Japonais, les Suédois, les Suisses, les Australiens et les Islandais qui, avec une espérance de vie de 80 ans, étaient en tête à ce chapitre. Les hypothèses développées tiennent compte de cette situation et proposent des espérances de vie qui, en 2036, n'ont jamais été observées à ce jour, ce qui contribuerait à maintenir le Canada parmi les pays présentant des espérances de vie très élevées, tant chez les hommes que chez les femmes.

Immigration internationale

Depuis plusieurs années déjà, la croissance démographique canadienne repose davantage sur l'accroissement migratoire (solde des immigrants et des émigrants) que sur l'accroissement naturel (solde des naissances et des décès). Considérant qu'il est attendu que cette situation persiste dans les prochaines décennies en raison d'une faible fécondité et du vieillissement démographique, les hypothèses portant sur cette composante prennent une grande importance dans le présent exercice.

L'effectif d'immigrants annuellement admis au Canada ainsi que le taux d'immigration ont cependant parfois varié considérablement d'une année à l'autre. Par exemple, le taux d'immigration est passé de près de 9,0 pour mille en 1993 à moins de 6,0 pour mille en 1998, soit cinq ans plus tard. Des variations, plus importantes encore, avaient été observées dans les décennies antérieures. Afin de tenir compte du caractère parfois fluctuant de l'immigration, trois hypothèses portant sur les niveaux futurs de l'immigration au Canada ont été formulées comme c'est habituellement le cas dans les projections de Statistique Canada.

Présentation des hypothèses

Les hypothèses d'immigration ont été formulées en deux temps. Dans un premier temps, les hypothèses faible, moyenne et forte sont, pour les trois premières années de projection, directement tirées du Plan d'immigration 2009 tel que formulé par Citoyenneté et immigration Canada (CIC). Il est considéré que cette fourchette d'immigrants énoncée par CIC dans son plan d'immigration pour l'année 2009 est la meilleure estimation du niveau de l'immigration canadienne à court terme. Ainsi, le Plan d'immigration visait à admettre en 2010 entre 240 000 (hypothèse faible) et 265 000 (hypothèse forte) immigrants au Canada. L'hypothèse moyenne a été fixée à la valeur centrale de la fourchette, soit 252 500 immigrants annuellement.

Après les trois premières années de projection, les hypothèses sont formulées sur la base de taux d'immigration plutôt que d'effectifs. Les effectifs d'immigrants annuellement admis au Canada évoluent donc de pair avec la croissance démographique projetée. L'utilisation de taux permet notamment d'éviter que ces derniers ne décroissent mécaniquement avec toute croissance démographique future, un effet systématiquement engendré lorsque les hypothèses reposent sur des effectifs d'immigrants gardés constants sur la période de projection. Enfin, contrairement à l'exercice précédent ou les effectifs d'immigrants atteints en 2031 étaient maintenus constants jusqu'en 2056, les présentes hypothèses utilisent les taux d'immigration jusqu'à la fin de la période de projection pour le Canada, soit en 2061.

L'hypothèse moyenne suppose que le taux d'immigration serait de 7,5 pour mille au Canada durant toute la période de projection, sauf bien sûr les trois premières années ou ce sont les effectifs tirés du Plan d'immigration qui sont utilisés (Graphique 1.3). Ce niveau correspond au taux annuel moyen d'immigration observé sur la période de 1991 à 2008.

L'hypothèse faible suggère plutôt que le taux d'immigration s'établirait à 6,0 pour mille entre 2012-2013 et 2060-2061 au Canada. Ce niveau correspond environ au taux d'immigration le plus faible observé depuis 1991. Enfin, l'hypothèse forte fixe le taux d'immigration à 9,0 pour mille sur la même période de projection, un niveau qui correspond au taux le plus élevé observé depuis 1991 également.

La distribution provinciale de l'immigration canadienne a changé au cours des dernières années. Une proportion plus grande d'immigrants s'établit par exemple au Manitoba et en Alberta. À l'opposé, la proportion d'immigrants qui choisissent l'Ontario est en baisse depuis quelques années, étant passée d'environ 60 % à près de 50 %. Afin de tenir compte de ces changements importants, la répartition des immigrants admis au Canada dans les divers provinces et territoires a été basée sur la moyenne de la distribution provinciale des immigrants au cours de la période 2005-2006 à 2007-2008. Cette distribution est maintenue constante sur toute la période de projection.

La même période a également été utilisée pour distribuer les immigrants selon l'âge et le sexe. La répartition observée dans la province a été utilisée dans les régions qui reçoivent des contingents d'immigrants importants, soit en Ontario, au Québec, en Colombie-Britannique et en Alberta. Dans le cas de la Saskatchewan et du Manitoba, c'est la répartition moyenne de ces deux provinces qui a été utilisée. Enfin, la répartition par âge et sexe nationale moyenne a été utilisée dans toutes les autres régions.

Le Tableau 1.4 présente les effectifs d'immigrants observés (2008-2009) et projetés (2035-2036) pour le Canada, les provinces et les territoires, selon les trois hypothèses retenues. Selon l'hypothèse moyenne, le Canada accueillerait près de 334 000 immigrants en 2035-2036 dont près de la moitié (166 300) s'établiraient en Ontario.

Justification des hypothèses

L'immigration est une composante difficile à projeter à long terme. À court terme, les niveaux d'immigration sont déterminés par le ministère responsable. Outre l'observation des niveaux récents de l'immigration, il convient donc de prendre en considération d'autres éléments dans la formulation des hypothèses.

L'hypothèse forte fixe le taux d'immigration à 9,0 pour mille, ce qui pourrait refléter une augmentation visant à combler les besoins importants à venir de la population active canadienne. Il est à prévoir que de nombreux travailleurs – la plupart appartenant à la génération des baby-boomers, nés entre 1946 et 1965 – quitteront la population active au cours des prochaines années pour rejoindre les rangs de la population âgée. L'immigration pourrait venir soutenir la population active qui devra notamment répondre aux besoins d'une population âgée en forte croissance.

L'hypothèse faible, qui fixe le taux d'immigration à 6,0 pour mille, est également plausible si on considère plusieurs facteurs. D'une part, l'intégration économique des immigrants a semblé, au cours des dernières décennies, être plus difficile qu'auparavant. D'autre part, le développement économique rapide de certains pays sources de l'immigration récente au Canada – Chine et Inde en particulier – pourrait réduire le bassin de candidats potentiels à l'immigration. La concurrence accrue d'autres pays industrialisés pour des immigrants qualifiés pourrait également modifier la capacité du Canada de recruter les immigrants dont il aurait besoin.

Émigration

Les programmes des estimations et des projections démographiques de Statistique Canada distinguent trois composantes qui composent l'émigration : les émigrants, les émigrants de retour ainsi que le solde des personnes temporairement à l'étranger.

Émigrants

Les émigrants sont des citoyens canadiens ou des immigrants reçus ayant quitté le pays pour s'établir de façon permanente dans un autre pays. Le nombre d'émigrants a peu fluctué autour d'une moyenne de 45 700 personnes depuis le début des années 1990. Dans ce contexte, une seule hypothèse a été formulée, celle de maintenir constants sur toute la période de projection les taux moyens d'émigration par âge, sexe et province/territoire observés au cours de la période de 1991-1992 à 2007-2008. Ainsi formulée, l'hypothèse suppose que le nombre d'émigrants passerait de 48 800 personnes en 2009-2010 à près de 59 200 en 2035-2036 selon le scénario de croissance moyenne (M1).

Émigrants de retour

Les émigrants de retour sont des citoyens canadiens ou des immigrants reçus ayant émigré du pays et qui reviennent s'y établir. Leur nombre, modeste, est estimé à environ 23 500 personnes par année depuis le début des années 2000. La grande majorité de ces émigrants de retour se concentrent dans quatre provinces, soit l'Ontario, le Québec, l'Alberta et la Colombie-Britannique.

Comme dans l'édition précédente des projections, l'hypothèse formulée pour les émigrants de retour repose sur la relation qui existe entre ces derniers et l'émigration, les personnes susceptibles de revenir s'établir au pays étant celles qui en ont émigré à un moment de leur vie. Le nombre projeté d'émigrants de retour est obtenu en appliquant un taux de migration de retour au nombre d'émigrants générés par le modèle de projection. Ce taux a été fixé à 44,5 %, soit la moyenne au cours de la période 1991-1992 à 2007-2008, c'est-à-dire la même période que pour l'hypothèse d'émigration.

Personnes temporairement à l'étranger

Les personnes temporairement à l'étranger sont des citoyens canadiens ou des immigrants reçus vivant temporairement dans un autre pays et qui ne possèdent plus de lieu habituel de résidence au Canada. Les données disponibles quant à cette composante portent sur un solde annuel, et non un nombre. Un solde est la résultante de deux flux, ici les personnes quittant temporairement et revenant au Canada.

Depuis le début des années 2000, le solde annuel des personnes temporairement à l'étranger est demeuré stable et s'est établi en moyenne à un peu plus de 20 000 personnes. Ce solde touche essentiellement quatre provinces, l'Ontario, le Québec, l'Alberta et la Colombie-Britannique.

L'hypothèse retenue dans cet exercice de projection est de maintenir constant jusqu'en 2061 le solde annuel moyen observé durant la période allant de 2005-2006 à 2007-2008, soit d'environ 21 180 personnes. Ce niveau est très proche du solde moyen pour la période de 1991-1992 à 2007-2008, témoignant du peu de variations importantes observées pour cette composante au cours des deux dernières décennies.

La distribution par âge, sexe et province/territoire utilisée dans les projections est également celle dérivée de la moyenne observée au cours de la période de 2005-2006 à 2007-2008.

Résidents non permanents

Les résidents non permanents du Canada regroupent les personnes suivantes : les personnes qui revendiquent un statut de réfugié, les personnes titulaires d'un permis de travail, ministériel ou d'études ainsi que les membres de leur famille vivant avec elles au Canada. Le solde annuel de résidents non permanents a augmenté considérablement au cours des années récentes, passant de près de 9 000 personnes en 2004-2005 à plus de 70 000 en 2008-2009. Le solde a particulièrement augmenté dans certaines provinces, notamment l'Alberta, la Colombie-Britannique et la Saskatchewan. De plus, une nouvelle catégorie d'immigrants de CIC, la Catégorie de l'expérience canadienne (CEC), permet à des résidents non permanents du Canada qui satisfont à certaines conditions de présenter une demande de résidence permanente. Cette catégorie pourrait rehausser l'attrait du statut de résidents non permanents au Canada et ainsi conduire, au cours des prochaines années, au maintien d'un solde annuel élevé, qui plus est dans un contexte où de nombreux Canadiens quitteront prochainement le marché du travail.

L'hypothèse retenue au chapitre des résidents non permanents a donc été modifiée par rapport au dernier exercice afin de tenir compte des récents changements. L'hypothèse retenue suggère que le solde annuel passerait linéairement d'un niveau d'environ 51 000 en 2007-2008 à 0 en 2018-2019, soit durant une période où les sorties de la population active seront très probablement nombreuses. Passé 2018, le solde des résidents non permanents serait maintenu à 0 pour le reste de la période de projection. Cette hypothèse ferait donc passer les effectifs de résidents non permanents dans la population canadienne d'environ 576 000 personnes en 2009 à un peu plus de 750 000 personnes en 2018.

Toujours afin de tenir compte des récents changements, la distribution par âge, sexe et province/territoire correspond à celle observée au cours de la période allant de 2005-2006 à 2007-2008. Cette distribution serait maintenue constante sur toute la période de projection.

Migrations interprovinciales

De toutes les composantes de la croissance démographique, les hypothèses de migrations interprovinciales engendrent souvent les variations les plus importantes quant aux effectifs et la croissance projetés de la population des divers provinces et territoires. La forte volatilité de la migration interprovinciale rend difficile leur projection; d'une année à l'autre, les variations dans les soldes migratoires interprovinciaux peuvent être très importantes et passer, par exemple, d'un niveau positif à un niveau négatif. De plus, parce qu'elle est souvent associée à des facteurs structurels ou économiques (Coulombe, 2006; Bernard et al., 2009), la migration interprovinciale ajoute une grande part d'incertitude dans les projections à l'échelle des provinces et des territoires.

Pour toutes ces raisons, et dans un souci de proposer une fourchette raisonnable de situations possibles dans l'avenir, cette composante fait l'objet de quatre hypothèses distinctes. Ces hypothèses doivent de plus être élaborées en tenant compte d'une contrainte importante : la somme des soldes interprovinciaux de tous les provinces et territoires doit être nulle.

Présentation des hypothèses

La méthode utilisée pour projeter les migrations interprovinciales est la même que dans l'édition précédente des projections : dans un premier temps, des taux de sortie par âge et sexe pour chacun des provinces/territoires sont calculés sur la base de périodes de référence sélectionnées au moyen d'une analyse des tendances passées. Dans un deuxième temps, des matrices origine-destination sont utilisées pour répartir les sortants interprovinciaux dans les autres provinces ou territoires du Canada. Ces matrices origine-destination sont calculées en utilisant les mêmes périodes de référence que les taux de sortie afin de préserver la cohérence du modèle.

Les quatre hypothèses, reflétant autant de périodes de références passées, sont les suivantes : tendances « historiques » (1981 à 2008), tendances 1988 à 1996, tendances 2001 à 2006 et tendances 2006 à 2008.

  1. Hypothèse tendances historiques (1981 à 2008)

Le but de cette hypothèse est de prendre en considération les tendances générales à long terme de la migration interne au Canada. La période de référence de cette hypothèse est par conséquent la plus longue des quatre hypothèses définies pour ces projections et a été fixée de 1981 à 2008. L'analyse sur une telle période permet notamment de dégager des mouvements habituellement favorables à l'Ouest du pays, en particulier à l'Alberta et la Colombie-Britannique, voire à l'Ontario et moins favorable à l'Est, notamment à Terre-Neuve-et-Labrador, en Nouvelle-Écosse, au Nouveau-Brunswick et au Québec. Ce scénario engendre les soldes interprovinciaux les plus favorables des quatre hypothèses pour l'Ontario et le Manitoba et les plus défavorables pour Terre-Neuve-et-Labrador, les Territoires du Nord-Ouest ainsi que le Yukon (Tableau 1.5).

  1. Hypothèse tendances 1988 à 1996

Cette hypothèse repose sur les tendances observées au cours de la période de 1988 à 1996, lesquelles ont été favorables à la Colombie-Britannique, cette province ayant enregistré un solde interprovincial annuel moyen de presque 34 000 personnes, soit le solde le plus élevé des quatre hypothèses pour cette province. L'expansion continue des économies émergentes de l'Asie ainsi que la présence moins importante du secteur manufacturier – alors en crise - dans l'économie de la province l'avaient alors relativement épargnée des difficultés économiques vécues ailleurs au pays. Cette hypothèse engendre également les soldes les plus favorables pour l'Île-du-Prince-Édouard, la Nouvelle-Écosse, le Nouveau-Brunswick, les Territoires du Nord-Ouest et le Nunavut.

À l'inverse, cette période génère les soldes interprovinciaux les plus défavorables des quatre hypothèses pour les trois provinces des Prairies, soit le Manitoba, la Saskatchewan et l'Alberta.

  1. Hypothèse tendances 2001 à 2006

L'expansion de l'économie de l'Alberta, en particulier de l'industrie pétrolière, a eu un effet non négligeable sur les mouvements de migration interne au Canada. En effet, cette province réussit à attirer de nombreux travailleurs depuis une quinzaine d'années déjà, et l'hypothèse 2001 à 2006 vise à refléter ce phénomène. Il s'agit bien évidemment de l'hypothèse qui génère les soldes les plus favorables des quatre hypothèses pour l'Alberta, mais aussi pour le Québec qui a connu, durant ces années, une croissance économique soutenue. À l'inverse, ce scénario est le moins favorable à la Colombie-Britannique dont le solde annuel moyen n'atteint qu'un peu plus de 3 000.

  1. Hypothèse tendances 2006 à 2008

Plusieurs changements importants sont récemment survenus au chapitre des migrations interprovinciales. Après 22 années ininterrompues de soldes annuels négatifs en Saskatchewan, la tendance s'est inversée en 2006-2007 et cette province présente depuis des soldes positifs et en constante augmentation. En 2007-2008, la Saskatchewan a ainsi gagné plus de 4 000 personnes dans ses échanges avec les autres provinces et territoires du pays.

La situation à Terre-Neuve-et-Labrador ainsi qu'au Manitoba a également évolué de façon importante très récemment. À Terre-Neuve-et-Labrador par exemple, le solde annuel interprovincial est passé d'une moyenne de -4 000 au cours de la période 2004-2005 à 2006-2007 à -528 en 2007-2008. Le solde migratoire est même devenu positif en 2008-2009 (données provisoires) après 24 années ininterrompues de soldes négatifs. Enfin, le solde de l'Ontario s'est également beaucoup dégradé pour plonger à des niveaux jamais vus depuis la fin des années 1990, à près de -17 400 personnes par année en moyenne au cours de la période 2006-2007 à 2007-2008.

Ces changements sont probablement en partie liés à la situation économique récente du Canada. La Saskatchewan a connu d'importants développements dans les secteurs miniers et pétroliers qui ont stimulé sa croissance économique. D'importants investissements à Terre-Neuve-et-Labrador ont créé une demande pour de la main-d'oeuvre qualifiée. Enfin, les difficultés du secteur automobile en Ontario ont pu contribuer à dégrader son solde interprovincial.

C'est afin de tenir compte de ces changements importants que l'hypothèse 2006 à 2008 a été élaborée. Cette hypothèse génère les soldes interprovinciaux les plus favorables ou les moins défavorables pour la Saskatchewan, Terre-Neuve-et-Labrador ainsi que le Yukon et les soldes les plus négatifs pour l'Ontario, le Québec, le Nouveau-Brunswick, la Nouvelle-Écosse, l'Île-du-Prince-Édouard et le Nunavut.

Soldes projetés

Les graphiques 1.4 à 1.16 montrent les soldes interprovinciaux observés et projetés pour chacune des provinces et des territoires au cours de la période de 1981-1982 à 2035-2036 et selon les divers scénarios proposés 1 . Ces graphiques permettent notamment d'illustrer certains effets de l'application de taux de sortie constants à des populations de volume et de structure variables dans le temps. L'utilisation de taux de sortie, en comparaison avec l'utilisation d'effectifs fixes, possède plusieurs avantages dont celui de tenir compte des effectifs des populations soumises au risque de migrer et de l'évolution de leur structure par âge. Toutefois, le fait que la population à risque de quitter une région n'évolue pas nécessairement au même rythme que les populations à risque d'y entrer est susceptible d'entraîner une variation dans le temps du taux de migration nette.

Ce phénomène peut s'expliquer ainsi : si la population d'une région croît moins rapidement que les populations des autres régions, cette région verra son solde migratoire s'améliorer, car les départs iront en diminuant et les entrées en augmentant. L'inverse est aussi vrai. Ainsi, les provinces à rythme d'accroissement plus faible, par exemple les provinces de l'Atlantique, voient leurs soldes interprovinciaux s'améliorer à mesure que la projection avance dans le temps; à l'inverse, les provinces à rythme d'accroissement élevé, notamment l'Ontario, voient leurs soldes se dégrader progressivement. Cet effet découle du fait que les hypothèses reposent sur des taux de sortie constants ainsi que sur des matrices origine-destination invariables. L'effet reste toutefois modéré dans la majorité des régions.

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