Section 1 : Violence familiale envers les enfants et les jeunes au Canada, affaires déclarées par la police, 2018
par Shana Conroy
Le taux d’affaires de violence familiale envers les enfants et les jeunes déclarées par la police augmente depuis 2017
- En 2018, on a dénombré 60 651 enfants et jeunes de 17 ans ou moins ayant été victimes d’affaires de violence déclarées par la police au CanadaNote . Parmi ces victimes, 57 % étaient de sexe féminin et 43 %, de sexe masculin. Dans l’ensemble, les enfants et les jeunes victimes de violence ont été le plus souvent agressés par une simple connaissance (32 %) ou par un membre de la famille (31 %), et relativement moins souvent par un étranger (17 %) (tableau 1.1).
- Dans le cas des 18 965 enfants et jeunes victimes de violence aux mains d’un membre de la famille, l’agresseur était le plus souvent un parent (59 %), un autre membre de la famille, comme un grand-parent, un oncle ou une tante (24 %), ou encore un frère ou une sœur (16 %). Cette tendance était la même chez les victimes de sexe féminin et chez celles de sexe masculin (tableau 1.1).
- De 2017 à 2018, le taux de violence familiale envers les enfants et les jeunes a augmenté de 7 %, tandis que le taux de violence non familiale a légèrement diminué de 2 %. De 2009 à 2018, le taux de violence familiale envers les enfants et les jeunes est demeuré assez stable (-1 %), alors que le taux de violence non familiale a connu une baisse relativement importante (-31 %) (graphique 1.1)Note .

Tableau de données du graphique 1.1
| Année | Violence familiale | Violence non familiale | ||||
|---|---|---|---|---|---|---|
| victimes de sexe féminin | victimes de sexe masculin | total des victimes | victimes de sexe féminin | victimes de sexe masculin | total des victimes | |
| taux pour 100 000 personnes | ||||||
| 2009 | 324 | 211 | 266 | 791 | 878 | 835 |
| 2010 | 337 | 210 | 272 | 778 | 823 | 801 |
| 2011 | 324 | 209 | 265 | 716 | 768 | 743 |
| 2012 | 317 | 203 | 259 | 682 | 704 | 693 |
| 2013 | 298 | 191 | 243 | 624 | 584 | 603 |
| 2014 | 286 | 188 | 236 | 563 | 512 | 537 |
| 2015 | 277 | 185 | 230 | 567 | 509 | 538 |
| 2016 | 277 | 186 | 231 | 593 | 505 | 548 |
| 2017 | 305 | 192 | 247 | 646 | 532 | 588 |
| 2018 | 324 | 206 | 264 | 655 | 504 | 578 |
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Note : Les taux sont calculés pour 100 000 personnes de 17 ans ou moins. Les chiffres de population sont fondés sur des estimations au 1er juillet fournies par la Division de la démographie de Statistique Canada. Représente les enfants et les jeunes victimes de 17 ans ou moins. Exclut les victimes de violence conjugale de moins de 15 ans et les victimes de violence entre partenaires amoureux ou autres partenaires intimes de moins de 12 ans. Exclut les victimes dont le sexe ou l'âge était inconnu ou pour lesquelles le lien de l'auteur présumé avec la victime était inconnu. Exclut un petit nombre de victimes au Québec dont on ignorait l'âge mais qui ont été classées incorrectement et ont reçu la valeur « 0 ». Repose sur la base de données sur les tendances du Programme de déclaration uniforme de la criminalité fondé sur l'affaire qui, depuis 2009, comprend les données de 99 % des services de police au Canada. Par conséquent, les chiffres peuvent ne pas correspondre à ceux figurant ailleurs dans le présent rapport Source : Statistique Canada, Centre canadien de la statistique juridique, base de données sur les tendances du Programme de déclaration uniforme de la criminalité fondé sur l'affaire. |
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Le taux d’infractions sexuelles déclarées par la police qui ont été perpétrées au sein de la famille est près de cinq fois plus élevé chez les enfants et les jeunes de sexe féminin que chez ceux de sexe masculin
- En 2018, le taux d’affaires de violence familiale envers les enfants et les jeunes déclarées par la police était de 266 pour 100 000 personnes. Par ailleurs, ce taux augmentait avec l’âge des victimes, lequel passait de 159 victimes de 5 ans ou moins pour 100 000 personnes à 379 victimes de 15 à 17 ans pour 100 000 personnes. Il est important de souligner que la victimisation des enfants et des jeunes est souvent difficile à détecter — particulièrement dans un contexte de violence familiale — et que les données déclarées par la police sont probablement une sous-estimation de l’ampleur réelle du problème. Par exemple, les jeunes victimes forment un groupe distinct puisqu’elles ne sont peut-être pas conscientes qu’elles sont l’objet de victimisation, ne savent peut-être pas vers qui ou vers quelle ressource se tourner pour obtenir de l’aide, ne sont peut-être pas en mesure de signaler elles-mêmes la violence qu’elles subissent, et dépendent peut-être de l’agresseur (tableau 1.2).
- Parmi les enfants et les jeunes victimes de violence familiale, le taux de voies de faitNote était plus élevé que le taux d’infractions sexuellesNote (145 et 90 pour 100 000 personnes, respectivement). En outre, le taux de voies de fait était le plus élevé chez les victimes de 15 à 17 ans (236), et le taux d’infractions sexuelles atteignait un sommet chez les jeunes de 12 à 14 ans (132) (tableau 1.2).
- On observait des différences selon le sexe de la victime en ce qui a trait au type de violence familiale subie : les taux de voies de fait étaient semblables pour les victimes de sexe féminin et celles de sexe masculin (143 par rapport à 148 pour 100 000 personnes), mais le taux d’infractions sexuelles était près de cinq fois plus élevé chez les victimes de sexe féminin (149 par rapport à 32) (tableau 1.2).
Les affaires de violence familiale envers les enfants et les jeunes déclarées par la police sont plus souvent classées par mise en accusation que les affaires de violence non familiale
- Quel que soit le type d’infraction, les affaires de violence familiale envers les enfants et les jeunes déclarées par la police sont plus souvent classées par mise en accusation — ou une accusation est recommandée — que les affaires de violence non familiale. En ce qui a trait à la proportion d’affaires classées par mise en accusation, on observait l'écart le plus marqué entre les victimes d’affaires de violence familiale et celles d’affaires de violence non familiale pour les autres infractions comportant de la violence ou la menace de violenceNote (60 % par rapport à 32 %), suivies des infractions sexuelles (44 % par rapport à 37 %) et des voies de fait (41 % par rapport à 36 %) (tableau 1.3).
- Pour les enfants et les jeunes victimes de violence familiale, les affaires de violence qui restaient le plus souvent non classées étaient les infractions sexuelles (44 %), ce qui était moins fréquent dans le cas des voies de fait (30 %) et des autres infractions comportant de la violence ou la menace de violence (21 %). On a enregistré une plus grande proportion d’infractions sexuelles non classées chez les victimes de violence familiale de sexe masculin que chez celles de sexe féminin (49 % par rapport à 43 %) (tableau 1.3).
La majorité des enfants et des jeunes victimes d’affaires de violence familiale déclarées par la police vivent avec la personne qui les a agressés
- La grande majorité des enfants et des jeunes victimes d’affaires de violence familiale déclarées par la police ont été agressés dans un lieu résidentiel (91 % des victimes de sexe féminin et 90 % des victimes de sexe masculin) (tableau 1.4).
- La plupart des enfants et des jeunes qui ont été victimes de violence familiale dans un lieu résidentiel vivaient avec la personne qui les a agressés, ce qui était un peu plus courant chez les victimes de sexe masculin que chez celles de sexe féminin (69 % par rapport à 60 %). De plus, 16 % des victimes de sexe féminin et 13 % des victimes de sexe masculin ont été l’objet de violence dans leur propre résidence, où l’auteur présumé ne vivait pas (tableau 1.4).
- Parmi les enfants et les jeunes qui ont été l’objet de violence familiale dans un lieu résidentiel, il était plus courant chez les victimes de sexe masculin que chez celles de sexe féminin de vivre avec l’auteur présumé, quel que soit le type de lien familial. Parmi les victimes de sexe masculin, 75 % vivaient avec un parent, 72 %, avec un frère ou une sœur et 42 %, avec un autre membre de la famille qui les a agressées (comparativement à 73 %, 62 % et 34 % des victimes de sexe féminin, respectivement) (tableau 1.4).
La force physique est souvent employée contre les enfants et les jeunes victimes dans les affaires de violence familiale déclarées par la police
- La force physique a été employée contre les trois quarts (75 %) des enfants et des jeunes victimes d’affaires de violence familiale déclarées par la police. Environ 1 enfant ou jeune victime de violence familiale sur 6 (15 %) a fait l’objet d’une agression dans laquelle une arme était présente; la présence d’une arme à feu était rare (1 %) (tableau 1.5)Note .
- Malgré l’emploi de la force physique ou la présence d’une arme dans 91 % des affaires, 6 enfants et jeunes victimes de violence familiale sur 10 (62 %) n’ont subi aucune blessure corporelle à la suite de la victimisation qu’ils ont vécue. Dans le cas des 4 victimes sur 10 (38 %) qui ont subi des blessures corporelles, les blessures étaient presque toutes mineures. Les victimes de violence familiale de sexe masculin étaient plus susceptibles de subir des blessures que celles de sexe féminin (45 % par rapport à 34 %). Il n’est pas possible de déterminer les répercussions émotionnelles de la victimisation avec violence à court et à long terme au moyen des données déclarées par la police (tableau 1.5).
Début de l’encadré 1.1
Encadré 1.1
Expériences autodéclarées de pratiques parentales sévères
En 2018, Statistique Canada a mené l’Enquête sur la sécurité dans les espaces publics et privés (ESEPP) dans le cadre de la stratégie « Il est temps : Stratégie du Canada pour prévenir et contrer la violence fondée sur le sexe ». À l’aide de cette enquête, on a posé des questions aux Canadiens de 15 ans et plus sur les comportements sexuels inappropriés qu’ils ont vécus à la maison, au travail, en public et en ligne, ainsi que sur les voies de fait et les agressions sexuelles dont ils ont été victimes. L’ESEPP comportait également des questions rétrospectives sur les pratiques parentales sévères subies avant l’âge de 15 ans. Bien que certaines formes de pratiques parentales sévères ne soient pas nécessairement considérées comme des actes criminels, des recherches ont démontré que le fait de prodiguer des soins à un enfant en bas âge peut avoir des répercussions importantes sur le bien-être et le développement de celui-ciNote .
L’ESEPP comportait les questions suivantes au sujet des pratiques parentales sévères :
Avant l’âge de 15 ans, [...] vos parents ou d’autres personnes qui étaient responsables de vous [ont-ils] fait l’une des actions suivantes?
- Ils vous ont donné la fessée avec leur main ou vous ont tapé sur les mains?
- Ils ont tenu des propos qui vous ont vraiment fait de la peine?
- Ils ont tenu des propos qui vous ont fait sentir comme si vous n’étiez pas voulu ou aimé?
- Ils n’ont pas répondu à vos besoins fondamentaux, comme vous laver, vous nourrir ou vous vêtir?
Parmi les répondants vivant dans les provinces au Canada, 64 % ont déclaré avoir vécu une certaine forme de pratique parentale sévère (65 % des femmes et 62 % des hommes). Les pratiques parentales sévères les plus souvent déclarées étaient la fessée ou la tape (55 % de l’ensemble des Canadiens), les propos qui ont fait de la peine (38 %), les propos qui ont fait sentir l’enfant comme s’il n’était pas voulu ou pas aimé (19 %) et le fait de ne pas répondre aux besoins fondamentaux de l’enfant (4 %). La tendance était la même, tant chez les femmes que chez les hommes.
Fin de l’encadré 1.1
Les auteurs d’affaires de violence familiale envers les enfants et les jeunes déclarées par la police sont le plus souvent âgés de 18 à 44 ans
- Parmi tous les auteurs d’affaires de violence envers des enfants et des jeunes déclarées par la police, 34 % des auteurs présumés de sexe féminin et 30 % des auteurs présumés de sexe masculin ont agressé un membre de leur famille. Pour chaque tranche de 100 000 personnes, 9 femmes et 31 hommes étaient des auteurs présumés de violence familiale envers des enfants et des jeunes (tableau 1.6)Note .
- Dans l’ensemble, les auteurs présumés de violence familiale envers des enfants et des jeunes étaient le plus souvent âgés de 18 à 44 ans (34 pour 100 000 personnes). La tendance était la même, tant chez les auteurs présumés de sexe féminin que chez les auteurs présumés de sexe masculin (tableau 1.6).
Les affaires de violence familiale envers les enfants et les jeunes déclarées par la police augmentent dans presque toutes les provinces et tous les territoires depuis 2017
- Parmi les provinces, les plus hauts taux d’affaires de violence familiale envers les enfants et les jeunes ont été enregistrés en Saskatchewan (453 pour 100 000 personnes), au Manitoba (370) et au Québec (368), alors que les plus faibles taux ont été observés en Ontario (182), en Colombie-Britannique (200) et en Alberta (244). Tout comme c’est le cas pour la criminalité en général, ce sont les territoires qui ont affiché les taux d’affaires de violence familiale envers les enfants et les jeunes les plus élevés (tableau 1.7).
- À l’instar de la violence non familiale, les taux d’affaires de violence familiale envers les enfants et les jeunes étaient plus élevés chez les victimes de sexe féminin que chez celles de sexe masculin dans chaque province et territoire. Les écarts les plus marqués entre le nombre de victimes de sexe féminin et le nombre de victimes de sexe masculin ont été observés dans les Territoires du Nord-Ouest (1 647 par rapport à 723), au Manitoba (483 par rapport à 262), au Nunavut (1 845 par rapport à 1 001) et au Nouveau-BrunswickNote (434 par rapport à 241) (tableau 1.7).
- De 2017 à 2018, les affaires de violence familiale déclarées par la police ont augmenté dans chaque province et territoire, à l’exception de la Saskatchewan (-7 %), qui a tout de même affiché le taux le plus élevé parmi les provinces en 2018, et de l’Alberta (-1 %). La plus forte augmentation a été observée à l’Île-du-Prince-Édouard (+62 %), suivie des Territoires du Nord-Ouest (+21 %) et du Yukon (+12 %). Cependant, compte tenu du nombre relativement faible de victimes dans ces régions, tout changement dans les chiffres a une incidence importante sur le taux. L’augmentation globale au Yukon est attribuable à une hausse de 30 % chez les victimes de sexe féminin, alors qu’une diminution de 7 % a été enregistrée chez les victimes de sexe masculin (tableau 1.7)Note .
Le taux d’affaires de violence familiale envers les enfants et les jeunes déclarées par la police est près de deux fois plus élevé dans les régions rurales que dans les régions urbaines
- En 2018, le taux d’affaires de violence familiale envers les enfants et les jeunes déclarées par la police était près de deux fois plus élevé dans les régions rurales que dans les régions urbaines (448 par rapport à 227 pour 100 000 personnes). Cette tendance était semblable chez les victimes de sexe féminin et chez celles de sexe masculin, bien que l’écart entre les régions rurales et les régions urbaines était plus important chez les victimes de sexe féminin (566 par rapport à 276) que chez celles de sexe masculin (336 par rapport à 180) (tableau 1.8)Note .
- Le taux d’affaires de violence familiale envers les enfants et les jeunes était plus faible dans les régions métropolitaines de recensement (RMR) — les plus grandes villes du Canada — que dans les régions autres que les RMR (207 pour 100 000 personnes par rapport à 413)Note . Les taux d’affaires de violence familiale envers les enfants et les jeunes étaient les plus élevés à Saguenay, à Trois-Rivières, à Halifax et à Gatineau (451, 389, 361 et 359, respectivement), alors qu’ils étaient les plus faibles à Kelowna, à Barrie, à Ottawa et à Guelph (98, 123, 129 et 129, respectivement) (tableau 1.9).
- Les victimes de sexe féminin affichaient des taux plus élevés d’affaires de violence dans toutes les RMR. L’écart entre le taux des victimes de sexe féminin et celui des victimes de sexe masculin était le plus marqué à Guelph (198 pour 100 000 personnes par rapport à 63) et dans le Grand Sudbury (443 par rapport à 160) (tableau 1.9).
Les homicides commis contre un enfant ou un jeune au sein de la famille sont le plus souvent motivés par la frustration, la colère ou le désespoir
- Les homicides perpétrés au sein de la famille surviennent dans des contextes interpersonnels complexes où l’on retrouve souvent des antécédents de violenceNote . De 2008 à 2018, le principal mobile dans les affaires d’homicide perpétrées contre un enfant ou un jeune au sein de la famille était, de loin, la frustration, la colère ou le désespoir (61 %); peu importe le groupe d’âge, il s’agissait du mobile le plus fréquent. Une dispute ou une querelle était également un mobile courant dans les affaires d’homicide commises contre des jeunes de 12 à 14 ans et de 15 à 17 ans (19 % et 24 %, respectivement) (tableau 1.10).
- Les auteurs d’homicides contre les enfants et les jeunes sont plus souvent un membre de la famille qu’une personne non apparentée (2,23 par rapport à 1,81 pour 1 million de personnes). De 2008 à 2018, le taux d’homicides commis contre des enfants et des jeunes au sein de la famille a reculé de 38 %, lequel est passé de 3,59 à 2,23 pour 1 million de personnes (ou de 25 victimes en 2008 à 16 victimes en 2018) (tableau 1.11).
Tableaux de données détaillés
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