Rapports sur la santé
Services de garde pour les jeunes enfants ayant une incapacité

Résumé

Contexte

Plus de la moitié (56 %) des enfants canadiens âgés de 0 à 5 ans sont confiés à des services de garde non parentaux; cependant, les données sur l’utilisation des services de garde sont limitées en ce qui concerne les enfants ayant une incapacité. La présente étude permet d’examiner l’utilisation des services de garde d’enfants chez les jeunes enfants ayant une incapacité au Canada, en mettant l’accent sur différents types d’incapacité.

Données et méthodologie

Des analyses ont été menées sur 1 189 enfants âgés de 0 à 5 ans déclarés comme ayant une incapacité dans le cadre de l’Enquête sur les modes d’apprentissage et de garde des jeunes enfants – Les enfants ayant un problème de santé de longue durée ou une incapacité de 2023. L’analyse a porté sur les taux de fréquentation de services de garde d’enfants, les difficultés à trouver ces services, les difficultés liées à ces services et sur le fait que les parents avaient déclaré qu’une place en garderie avait déjà été refusée à leur enfant en raison de son problème de santé. Des modèles de régression logistique ont été mis à l’essai pour vérifier les différences dans le principal mode de garde et la difficulté de trouver des services de garde en fonction de l’incapacité de l’enfant, tout en tenant compte de variables sociodémographiques.

Résultats

Parmi les enfants âgés de 0 à 5 ans ayant une incapacité, 45 % ont fréquenté une garderie, un établissement préscolaire ou un centre de la petite enfance, ou un service de garde d’enfants avant ou après l’école comme principale forme de service de garde; 17 % ont fréquenté un autre type de service de garde, comme un service de garde en milieu familial ou par une personne apparentée; et 38 % n’ont pas eu régulièrement recours à des services de garde non parentaux. Les parents de près de la moitié des enfants ayant une incapacité ont déclaré avoir de la difficulté à trouver un service de garde, en particulier pour les enfants ayant des problèmes émotionnels. Près de 1 parent d’un enfant ayant une incapacité et ayant recours à des services de garde sur 10 a déclaré que leur enfant s’était vu refuser une place en service de garde en raison de son problème de santé.

Interprétation

Ces constatations soulignent le besoin de renseignements pour appuyer des politiques, des pratiques et des ressources inclusives pour les enfants ayant une incapacité au sein du système d’apprentissage et de garde des jeunes enfants à l’échelle du Canada.

Mots-clés

jeunes enfants, services de garde, incapacités, inclusion, Canada

Auteurs

Stacie Kerr et Leanne Findlay travaillent à la Division de l’analyse de la santé de Statistique Canada. Rubab Arim travaille à la Division de l’analyse sociale et de la modélisation de Statistique Canada.

 

Ce que l’on sait déjà sur le sujet

• Des statistiques récentes et représentatives à l’échelle nationale sont disponibles sur les services de garde pour l’ensemble de la population d’enfants canadiens âgés de 0 à 5 ans (p. ex. taux de fréquentation, types de modes de garde utilisés, difficultés à trouver des services de garde).
• Le Cadre multilatéral d’apprentissage et la garde des jeunes enfants et les ententes et plans d’action provinciaux et territoriaux pour un système pancanadien d’apprentissage et de garde des jeunes enfants décrivent un engagement envers des services de garde d’enfants inclusifs et accessibles. Cependant, on en sait peu sur l’utilisation des services de garde en ce qui concerne les enfants ayant une incapacité.

Ce qu’apporte l’étude

• Un peu plus de 6 enfants ayant une incapacité sur 10 âgés de 0 à 5 ans fréquentaient des services de garde non parentaux.
• Les parents d’enfants ayant une incapacité ont déclaré avoir de la difficulté à trouver et à utiliser des services de garde; environ 1 parent d’enfants ayant une incapacité ayant recours à des services de garde sur 10 a déclaré que son enfant s’était vu refuser une place en service de garde en raison de son problème de santé.
• Les résultats suggèrent que le principal service de garde ne différait pas selon le type d’incapacité, même si les parents d’enfants ayant des problèmes émotionnels étaient particulièrement susceptibles de déclarer avoir de la difficulté à trouver des services de garde.

Introduction

Avant la scolarisation formelle, les services de garde sont le principal milieu dans lequel les jeunes enfants passent leur temps en dehors de la famille; 56 % des enfants canadiens âgés de 0 à 5 ans recevant des services de garde non parentaux^Note 1. La Convention relative aux droits de l’enfant des Nations Unies (CDE) reconnaît que les enfants ayant une incapacité physique ou mentale ont le droit de participer activement à la société, y compris en milieu de garde. Le projet de loi C-35, Loi sur l’apprentissage et la garde des jeunes enfants au Canada, établit une vision pour un système d’apprentissage et de garde des jeunes enfants à l’échelle du Canada (AGJEC), en mettant l’accent sur une approche fondée sur les droits conformément à la Convention relative aux droits des personnes handicapées (CDPH) et à d’autres cadres relatifs aux droits de la personne^Note 2, ^Note 3.

Malgré les engagements en matière de droits de la personne et les nombreux avantages que présentent des services de garde inclusifs aux enfants ayant une incapacité et leurs familles, on en sait très peu sur l’utilisation des services de garde en ce qui concerne les enfants ayant une incapacité. Il a été démontré que des services de garde inclusifs et de grande qualité favorisaient le développement des enfants, en particulier celui des enfants ayant une incapacité^Note 4, ^Note 5, ^Note 6. De plus, l’accès à des services de garde peut être bénéfique pour les enfants ayant une incapacité et leurs familles, car il permet aux enfants de participer à des programmes d’apprentissage et à des activités sociales avec leurs pairs dans un environnement inclusif. Cela offre également aux parents un accès à du soutien pour leur enfant et leur permet de travailler^Note 7, ^Note 8, ^Note 9.

Dans le budget de 2021, le gouvernement du Canada s’est engagé à investir plus de 27 milliards de dollars sur cinq ans pour construire un système d’AGJEC, même si les règlements, les subventions, les politiques et les mesures de soutien à l’inclusion relèvent de la compétence provinciale et territoriale. Le Cadre multilatéral d’apprentissage et la garde des jeunes enfants indique que les provinces et les territoires devront bâtir des systèmes de garde d’enfants en répondant aux priorités qui touchent les familles « qui en ont davantage besoin », comme celles ayant « des enfants ayant différents niveaux de capacité »^Note 10. Outre le Québec, qui a conclu une entente asymétrique avec le gouvernement du Canada, tous les secteurs de compétence précisent les objectifs liés à l’inclusion des enfants ayant une incapacité et d’autres groupes de population mal desservis dans leurs ententes et leurs plans d’action avec le gouvernement fédéral^Note 11. Le Fonds pour l’accessibilité dans le budget fédéral de 2022 a désigné des fonds visant à créer des services de garde d’enfants accessibles à l’échelle nationale.

Données nationales sur les jeunes enfants ayant une incapacité au Canada

Les sources de données nationales permettant de cerner et d’étudier les jeunes enfants canadiens ayant une incapacité sont limitées^Note 12, ^Note 13. La plus récente enquête sur l’incapacité visant les jeunes enfants, l’Enquête sur la participation et les limitations d’activités de 2006, a révélé que 2 % des enfants âgés de 0 à 4 ans avaient une incapacité et 52 % de ces enfants fréquentaient un mode ou un autre de services de garde^Note 14. Plus récemment, l’Enquête canadienne sur la santé des enfants et des jeunes de 2019 a indiqué que 4 % des enfants âgés de 2 à 4 ans avaient au moins une difficulté fonctionnelle, et que 56 % de ces enfants fréquentaient régulièrement des services de garde^Note 15.

Caractéristiques de l’enfant et de la famille liées au recours aux services de garde

Des études canadiennes montrent que les enfants de ménages à faible revenu, ayant des parents immigrants et des parents moins scolarisés sont moins susceptibles de fréquenter un service de garde d’enfants^Note 16, ^Note 17. Les enfants de familles monoparentales sont plus portés à fréquenter des garderies que des services de garde en milieu familial, mais ne sont pas plus ou moins enclins à fréquenter des services de garde d’enfants dans l’ensemble^Note 16, ^Note 18. L’âge est également lié au recours aux services de garde; environ 20 % des enfants de moins d’un an étaient confiés à des services de garde non parentaux, comparativement à 60 % des enfants de 1 à 3 ans^Note 19, ^Note 20. Aux États-Unis, les enfants ayant une incapacité sont moins susceptibles d’être confiés à des services de garde informels qu’à des garderies, comparativement aux enfants n’ayant pas d’incapacité^Note 21.

Les enfants ayant une incapacité diffèrent également des enfants sans incapacité sur le plan de leurs caractéristiques sociodémographiques. Les enfants ayant une incapacité sont plus enclins à vivre dans des familles monoparentales ou à faible revenu, et leurs parents sont moins scolarisés ou font face à d’autres obstacles à l’emploi^Note 8, ^Note 22, ^Note 23, ^Note 24, ^Note 25, ^Note 26. Ils sont en outre plus susceptibles d’être plus âgés, possiblement en raison d’occasions accrues de déclarer une incapacité à l’école plutôt qu’au cours des premières années^Note 7, ^Note 27. Ces facteurs intersectionnels peuvent avoir une incidence sur l’utilisation de services de garde et les expériences des familles ayant des enfants ayant une incapacité (p. ex. les familles à faible revenu peuvent ne pas avoir les moyens de payer des soins ou des thérapies spécialisés).

La documentation laisse entendre que le type d’incapacité influe sur l’accès et les expériences en service de garde^Note 28. Par exemple, des aménagements physiques accessibles et de l’équipement spécialisé peuvent être nécessaires pour les enfants ayant une incapacité physique. Toutefois, de nombreux modes de garde, en particulier les modes de garde en milieu familial, ne sont pas accessibles, et les attitudes à l’égard de la prestation de services aux enfants ayant une incapacité peuvent varier en fonction de l’incapacité^Note 29, ^Note 30. Les enfants ayant différents types de difficultés fonctionnelles peuvent avoir besoin de soutiens personnalisés, d’environnements adaptés et de différents types d’aide pour utiliser les services de garde.

Objectifs

La présente étude examine le recours aux services de garde chez les enfants ayant une incapacité à l’aide de l’Enquête sur les modes d’apprentissage et de garde des jeunes enfants – Les enfants ayant un problème de santé de longue durée ou une incapacité (EMAGJE-EPSLDI)^Note 31. Elle examine les taux globaux de fréquentation de services de garde, les difficultés à trouver des services de garde et les difficultés particulières signalées par les parents. La présente étude permet également d’examiner les situations où le parent avait l’impression qu’une place en garderie avait été refusée à son enfant en raison de son problème de santé. Les résultats sont présentés par type d’incapacité. Étant donné que l’échantillon de l’enquête ne comprenait que des enfants ayant une incapacité, il est impossible d’effectuer des comparaisons directes avec des enfants n’ayant pas d’incapacité.

Données et méthodologie

Sources des données

L’EMAGJE-EPSLDI a permis de recueillir des renseignements sur les modes de garde pour les enfants âgés de 0 à 5 ans déclarés par leurs parents comme ayant une incapacité ou un problème de santé de longue durée. À l’aide d’un plan transversal, un échantillon de 20 005 enfants a été dérivé de deux sources : le Recensement de 2021 (échantillon aléatoire d’enfants âgés de 3 à 5 ans) et le fichier de l’Allocation canadienne pour enfants (pour saisir les jeunes enfants nés après la période de collecte du Recensement de 2021). Menée d’avril à juin 2023 dans les 10 provinces du Canada, l’enquête a enregistré un taux de réponse de 62 %. Un parent, un tuteur ou la personne la mieux renseignée sur les modalités de garde de l’enfant (ci-après appelé le « parent ») a répondu.

Les répondants (n = 12 411) ont indiqué quatre mesures de l’incapacité : 1) les questions filtres du module de questions d’identification des incapacités (DSQ), 2) l’indicateur mondial de limitation des activités (GALI), 3) la présence d’un problème de santé de longue durée, et 4) la présence de différents types d’incapacités^Note 32, ^Note 33. Seuls les parents d’enfants déclarés avoir un problème de santé de longue durée ou une incapacité selon au moins une mesure ont répondu à toutes les questions de l’enquête (n = 2 016) (voir l’annexe A pour une description des critères d’identification pour chacune des quatre mesures).

La présente étude portant uniquement sur les enfants ayant une incapacité dont la fréquentation de services de garde peut être restreinte en raison de leur problème de santé, l’échantillon analytique comprenait seulement les enfants ayant des limitations d’activités (selon la définition de l’indicateur GALI) ou correspondant à au moins deux des trois autres mesures (n = 1 189). Plus précisément, les enfants ont été exclus de l’échantillon s’ils étaient identifiés uniquement par les questions filtres du module DSQ, la présence d’un problème de santé de longue durée ou d’un type d’incapacité. Voir Arim et coll. (à venir) pour de plus amples renseignements sur l’échantillon de l’étude^Note 34.

Mesures

Incapacité

Tous les enfants de l’échantillon de l’étude (n = 1 189) ont été considérés comme des enfants ayant une incapacité. Les questions filtres du module DSQ ont été utilisées pour cerner les difficultés physiques (p. ex. marcher, utiliser ses doigts), sensorielles (p. ex. voir et entendre) et d’apprentissage, de mémorisation ou de concentration (ci-après appelée « d’apprentissage »). Ces questions saisissent également la présence de problèmes de santé émotionnelle, psychologique ou mentale (ci-après appelés « problèmes émotionnels ») ou de tout autre problème de santé vécu pendant six mois ou plus. La plupart des enfants (1 142 sur 1 189) ont été déterminés par les questions filtres du module DSQ.

Près de la moitié des parents ont déclaré de multiples incapacités chez leur enfant (deux ou plus des cinq types d’incapacités); les troubles d’apprentissage et les problèmes émotionnels présentant la comorbidité la plus élevée (coefficient phi = 0,39). Par conséquent, les comparaisons entre les incapacités n’étaient pas utiles. Chaque type d’incapacité a plutôt été comparé aux autres types combinés (voir l’annexe A pour de plus amples renseignements sur la détermination des cinq types d’incapacité).

Garde des enfants

Les parents ont indiqué si leur enfant fréquentait habituellement des services de garde non parentaux au cours des trois mois précédents. Dans l’affirmative, le parent a indiqué le principal type de mode de garde, notamment 1) garderie, programme préscolaire ou centre de la petite enfance (CPE); 2) garde par une personne apparentée autre qu’un parent ou tuteur; 3) service de garde en milieu familial; 4) programme de garde avant ou après l’école; 5) service de garde à domicile par une personne non apparentée; ou 6) autre. Même s’il était possible de déclarer plusieurs modes de garde (11 % de l’échantillon), le principal mode a été utilisé pour créer deux groupes : « garderie de groupe », comprenant les garderies, les programmes préscolaires, les CPE, les services de garde avant ou après l’école, et les « autres modes de garde ». Les résultats n’ont pas été désagrégés en fonction du statut de permis en raison des limites dues à la taille d’échantillon.

On a demandé aux parents s’ils avaient éprouvé des difficultés à trouver un service de garde (« oui », « non » ou « n’a pas recherché de mode de garde »). On a demandé aux personnes ayant recours à des services de garde : « En raison du problème de santé de cet enfant, s’est-il (elle) déjà vu(e) refuser une place dans un service de garde? » De plus, on a demandé aux parents ayant eu recours à des services de garde dans quelle mesure ils avaient fait face à des types particuliers de difficultés dans le cadre de leurs modes de garde en raison du problème de santé de leur enfant. Par exemple, les parents ont indiqué la mesure dans laquelle ils avaient eu un accès inadéquat à des services thérapeutiques, comme l’ergothérapie ou des services de soutien à l’autisme, au sein du service de garde (« pas du tout », « dans une certaine mesure », « dans une grande mesure », ou « pas pertinent à la condition de cet enfant »).

Covariables

Plusieurs caractéristiques de l’enfant et de la famille ont été prises en compte : fréquentation scolaire, région géographique de résidence (Québec par rapport aux autres provinces), revenu du ménage (supérieur ou inférieur au seuil de la mesure de faible revenu [MFR] selon les données fiscales du Fichier des familles T1 de 2021), état matrimonial ou partenaire (selon le dossier de l’Allocation canadienne pour enfants de 2023) et l’activité principale du parent (emploi rémunéré ou à son propre compte au cours des trois mois précédents ou autrement). Le Québec a été considéré séparément en raison de son programme universel de garde d’enfants existant et des taux plus élevés de fréquentation à des services de garde^Note 19. La fréquentation scolaire a été incluse, puisque les âges de début de fréquentation et les heures de fréquentation des enfants de 4 et 5 ans diffèrent selon les provinces et les territoires.

Analyses statistiques

Des statistiques descriptives ont permis d’explorer les types de modes de garde utilisés, les difficultés à trouver des services de garde et les types de difficultés rencontrées en matière de garde en raison du problème de santé de l’enfant. Elles ont également permis de savoir si le parent avait l’impression qu’une place en garderie avait été refusée à l’enfant en raison de son problème de santé. Une régression logistique multinomiale a permis de vérifier les différences dans les principaux modes de garde entre les enfants avec et sans types particuliers d’incapacité, après correction pour tenir compte de variables d’influence. Une régression logistique a examiné la probabilité relative d’avoir de la difficulté à trouver des services de garde en fonction de l’incapacité et des caractéristiques de l’enfant et de la famille. Des estimations pondérées ont été produites à l’aide de poids d’enquête et bootstrap. Les cas pour lesquels il manquait des données (<1 % pour n’importe quelle variable) ont été exclus.

Résultats

Les caractéristiques sociodémographiques des enfants ayant une incapacité âgés de 0 à 5 ans ainsi que de leurs parents et ménages sont présentées au tableau 1. Les incapacités les plus fréquemment déclarées étaient les troubles d’apprentissage (51 %) et d’autres problèmes de santé (63 %), suivis des problèmes émotionnels (29 %) et des incapacités sensorielles (19 %) et physiques (17 %). La proportion d’enfants âgés de 0 à 1 an (15 %) était plus faible dans l’EMAGJE-EPSLDI que dans la population générale d’enfants âgés de 0 à 5 ans (32 % selon l’Enquête canadienne sur les modes d’apprentissage et de garde des jeunes enfants [ECAGJE] de 2023).



Environ 6 enfants ayant une incapacité sur 10 ont été confiés à des services de garde non parentaux

Au total, 62 % des enfants ayant une incapacité ont été confiés à des services de garde, soit environ 176 000 enfants âgés de 0 à 5 ans au Canada. Plus précisément, 45 % des enfants ayant une incapacité ont été confiés à des services de garde de groupe et 17 % à un autre type de service de garde, comme un service de garde en milieu familial ou la garde par une personne apparentée, dans le cadre du principal mode de garde (tableau 2). Parmi les enfants ayant une incapacité dont le principal mode de garde était en groupe, le mode de garde avant ou après l’école était le mode de garde principal pour 10 % d’entre eux (données non présentées). Les enfants ayant une incapacité âgés de 0 à 3 ans étaient plus susceptibles d’être en service de garde que ceux âgés de 4 à 5 ans (65 % contre 58 %); 47 % des enfants de 0 à 3 ans ayant recours principalement à des services de garde de groupe, comparativement à 42 % des enfants de 4 à 5 ans (données non présentées).



Le tableau 3 présente les résultats de la régression logistique multinomiale pour les modes de garde selon le type d’incapacité. Dans les modèles non corrigés, les enfants ayant une incapacité physique et ceux ayant des troubles d’apprentissage étaient moins susceptibles que les enfants ayant d’autres types d’incapacité d’avoir recours principalement à la garde de groupe plutôt que de ne pas avoir recours à un service de garde (rapport de cotes [RC] : 0,62; intervalle de confiance [IC] à 95 % : 0,43, 0,91 et RC : 0,58; IC à 95 % : 0,44 à 0,78, respectivement). Toutefois, après correction pour tenir compte d’autres variables, on n’a constaté aucun lien significatif entre le type d’incapacité et le principal mode de garde. Selon les modèles corrigés, les enfants ayant une incapacité ne fréquentant pas l’école et dont les parents travaillaient étaient plus susceptibles d’être confiés à des services de garde. Les enfants ayant une incapacité du Québec étaient plus enclins que ceux des autres provinces à fréquenter des services de garde de groupe comme principal mode de garde.



Les parents d’enfants ayant une incapacité, en particulier ceux atteints de problèmes émotionnels, ont déclaré avoir éprouvé des difficultés à trouver des services de garde

Le tableau 4 montre que les parents de 45 % des enfants ayant une incapacité avaient de la difficulté à trouver des services de garde (52 % d’utilisateurs de services de garde et 33 % de non-utilisateurs; données non présentées). Les parents d’environ le quart des enfants ayant une incapacité n’ont pas cherché de service de garde et 32 % n’ont pas eu de difficulté à en trouver un. Parmi les enfants ayant des problèmes émotionnels, 56 % des parents avaient de la difficulté à trouver des services de garde (60 % d’utilisateurs de services de garde et 50 % de non-utilisateurs; données non présentées).



Le tableau 5 présente des modèles de régression prédisant les difficultés à trouver des services de garde. La probabilité d’avoir de la difficulté à trouver des services de garde était plus de deux fois plus élevée pour les parents d’enfants ayant des problèmes émotionnels que pour ceux d’enfants ayant d’autres types d’incapacités, même après correction pour tenir compte des covariables (RC : 2,27; IC à 95 % : 1,57, 3,27). Les parents de familles à faible revenu étaient moins enclins à déclarer avoir de la difficulté à trouver des services de garde que ceux de familles dont le revenu était supérieur au seuil de la MFR, mais ils étaient aussi plus portés à ne pas avoir cherché de services de garde (39 % contre 19 %; données non présentées).



Environ le tiers des parents d’enfants ayant une incapacité en service de garde ont déclaré avoir de la difficulté à accéder à des services thérapeutiques

Les deux principales difficultés que les parents d’enfants ayant une incapacité ont déclaré éprouver en raison du problème de santé de leur enfant étaient un accès inadéquat à des services thérapeutiques au sein des services de garde (32 %) et de la difficulté à trouver un autre mode de garde en cas de besoin (31 %) (tableau 6). Plus de la moitié des parents d’enfants ayant une incapacité physique (51 %) et d’apprentissage (50 %) ainsi que des problèmes émotionnels (56 %) ont déclaré un accès inadéquat à des services thérapeutiques au sein des services de garde. Environ 3 parents sur 5 d’enfants ayant des problèmes émotionnels (59 %) et un peu plus de la moitié des parents d’enfants ayant une incapacité physique (52 %) ont déclaré avoir de la difficulté à trouver un autre mode de garde.



Les parents d’environ 1 enfant ayant une incapacité physique ou des problèmes émotionnels en service de garde sur 4 ont déclaré que leur enfant s’était vu refuser une place en garderie

Près de 1 enfant sur 10 (9 %) ayant une incapacité en milieu de garde s’est vu refuser une place dans un mode de garde en raison de son problème de santé (graphique 1). Les parents d’enfants ayant une incapacité physique (25 %) et des problèmes émotionnels (22 %) étaient les plus susceptibles de déclarer que leur enfant s’était vu refuser une place en garderie.

Description de la graphique 1



Tableau de données du graphique 1
Sommaire du tableau
Le tableau montre les résultats de Tableau de données du graphique 1. Les données sont présentées selon Incapacité (titres de rangée) et Pourcentage et Intervalle de confiance à 95 %, calculées selon de et à unités de mesure (figurant comme en-tête de colonne).

Incapacité	Pourcentage	Intervalle de confiance à 95 %
		de	à
Échantillon complet	9	3	3
Incapacité physique	25	10	10
Incapacité sensorielle	18	9	9
Troubles d’apprentissage	14	5	5
Trouble émotionnel	22	7	7
Autres difficultés ou problèmes de santé de longue durée	10	3	3
Source : Statistique Canada, Enquête sur les modes d’apprentissage et de garde des jeunes enfants – Les enfants ayant un problème de santé de longue durée ou une incapacité, 2023.

Discussion

L’EMAGJE-EPSLDI a révélé que 62 % des enfants ayant une incapacité âgés de 0 à 5 ans avaient recours à des services de garde non parentaux en 2023. Parmi les enfants ayant une incapacité en service de garde, plus des deux tiers avaient recours principalement à des services de garde de groupe. Les données recueillies au cours d’une période semblable dans le cadre de l’ECAGJE indiquent que 56 % de la population canadienne générale d’enfants âgés de 0 à 5 ans fréquentaient des services de garde. Même s’il peut sembler que l’utilisation des services de garde était plus élevée chez les enfants ayant une incapacité, les analyses de suivi des deux ensembles de données ont révélé que l’EMAGJE-EPSLDI incluait une plus faible proportion d’enfants de moins d’un an, moins susceptibles d’être en service de garde, puisque les parents peuvent être en congé parental. Lorsque les enfants de moins d’un an ont été exclus des analyses, les estimations de l’utilisation des services de garde étaient semblables pour l’ECAGJE (64 %) et l’EMAGJE-EPSLDI (65 %).

La CDE, la CDPH et la Loi canadienne sur l’accessibilité soulignent l’importance de l’accès à des services sociaux et d’éducation pour jeunes enfants, y compris à des services de garde d’enfants, pour les enfants ayant une incapacité, en tant que possibilité d’interagir, de se développer et de participer activement à la société^Note 35, ^Note 36, ^Note 37, ^Note 38. Pour cette raison, il est important de surveiller l’utilisation des services de garde en ce qui concerne les enfants ayant une incapacité, en particulier parmi ceux qui sont les plus à risque de voir leur utilisation de ces services restreinte.

La nouveauté de l’ensemble de données EMAGJE-EPSLDI est la capacité d’explorer la fréquentation des services de garde selon le type d’incapacité. Initialement, les enfants ayant des troubles physiques et d’apprentissage étaient moins susceptibles de fréquenter un service de garde, en particulier de groupe. Toutefois, ces différences ont disparu après la prise en compte de facteurs connus relatifs aux enfants et à la famille associés au type d’incapacité et à la fréquentation de services de garde. Par exemple, les enfants vivant au Québec étaient plus enclins à fréquenter un service de garde, tandis que les enfants scolarisés, ceux vivant dans des familles à faible revenu et les enfants dont les parents n’étaient pas en emploi étaient moins susceptibles de fréquenter un service de garde non parentale^Note 16, ^Note 17, ^Note 18, ^Note 39.

Environ la moitié des parents d’enfants ayant une incapacité ont déclaré avoir éprouvé des difficultés à trouver des services de garde. Les parents d’enfants atteints de problèmes émotionnels étaient plus portés à déclarer de telles difficultés, même après correction pour tenir compte des covariables. Cela souligne la nécessité de faciliter l’accès équitable aux services de garde pour les enfants ayant une incapacité, notamment en relevant les défis uniques auxquels font face les enfants aux prises avec des problèmes émotionnels pour trouver des services de garde appropriés. Les parents d’enfants ayant une incapacité vivant dans des familles à faible revenu étaient moins susceptibles de déclarer des difficultés à trouver des services de garde, mais étaient également moins portés à y avoir recours; 40 % des familles à faible revenu utilisant des services de garde, comparativement à 68 % des familles au-dessus du seuil de la MFR. Les frais de garde d’enfants sont souvent un obstacle pour les familles à faible revenu, et les subventions accordées pour les réduire varient d’une province à l’autre.

La participation sociale des enfants ayant une incapacité comprend la fréquentation et la participation. Par conséquent, on ne peut présumer que la fréquentation d’un service de garde d’enfants à elle seule répond entièrement aux besoins des enfants ayant une incapacité ou de leur famille^Note 40, ^Note 41. Explorer les difficultés auxquelles les parents font face lorsqu’ils ont recours à des services de garde peut mettre en évidence les obstacles à l’inclusion. Près du tiers des parents d’enfants ayant une incapacité ont déclaré avoir de la difficulté à trouver d’autres services de garde au besoin, et près du quart ont déclaré avoir rencontré des difficultés en matière de souplesse pour respecter leur horaire. Les parents d’enfants ayant une incapacité physique et des problèmes émotionnels étaient particulièrement susceptibles de déclarer ces difficultés. Cela témoigne de la nécessité d’offrir des services de garde à court préavis ou de relève pour les enfants ayant une incapacité, et des effets possibles sur l’emploi des parents d’enfants ayant une incapacité (p. ex. moins d’heures de travail ou changement des heures de travail)^Note 14.

Environ 1 parent d’enfants ayant une incapacité sur 3 a déclaré un accès inadéquat à des services thérapeutiques au sein des services de garde, en particulier pour les enfants ayant une incapacité physique, des problèmes émotionnels et des troubles d’apprentissage. Cela souligne l’importance de la collaboration entre les fournisseurs de services de garde, les professionnels de la santé et les parents pour assurer la prestation efficace de services thérapeutiques au sein des services de garde.

Les parents d’environ 1 enfant ayant une incapacité sur 10 en service de garde ont déclaré s’être vu refuser une place en garderie en raison du problème de santé de leur enfant. Même si ces constatations peuvent refléter les perceptions des parents et que la raison réelle du refus puisse différer, les enfants ayant une incapacité physique et ceux ayant des problèmes émotionnels ont été le plus souvent déclarés comme s’étant vu refuser cet accès. Cela donne à penser que les prestataires de services de garde sont moins en mesure de prendre en charge les enfants ayant ce type d’incapacité. Les efforts déployés récemment pour accroître la capacité du système de garde d’enfants grâce au financement d’infrastructures pourraient aider à cet égard, en particulier pour les enfants ayant une incapacité physique (p. ex. rampes, toilettes accessibles). Toutefois, pour les enfants atteints de troubles émotionnels, une formation spécialisée et du personnel ou des mesures de soutien supplémentaires peuvent être nécessaires. Avec un soutien adéquat, les fournisseurs de services de garde peuvent jouer un rôle important dans la prestation de services de santé mentale pour les enfants ayant des problèmes émotionnels ou comportementaux^Note 42.

Forces et limites

L’EMAGJE-EPSLDI est la première enquête canadienne représentative axée sur l’utilisation des services de garde d’enfants en ce qui concerne les enfants ayant une incapacité; toutefois, elle présente plusieurs limites. Les comparaisons avec les enfants en développement normal sont limitées, car l’enquête a exclu les enfants n’ayant pas d’incapacité. Un biais de non-réponse est possible, car la probabilité de réponse peut avoir varié selon la gravité de l’incapacité de l’enfant et sa fréquentation de services de garde. Les renseignements déclarés par le parent peuvent faire l’objet d’un biais de remémoration et d’une interprétation subjective. De plus, les limites de la taille de l’échantillon ont réduit la précision des estimations et le pouvoir statistique, ce qui empêche des analyses de suivi des raisons pour lesquelles des enfants ayant une incapacité se sont vu refuser une place en garderie.

Conclusion

La fréquentation de services de garde d’enfants est un moyen principal par lequel les enfants peuvent participer à des programmes stimulants pour le développement et à des activités sociales dans leur collectivité; expériences qui sont particulièrement importantes pour les jeunes enfants ayant une incapacité. Les résultats de l’enquête EMAGJE-EPSLDI suggèrent qu’environ 6 enfants ayant une incapacité sur 10 ont été confiés à des services de garde en 2023; 45 % d’entre eux fréquentant un mode de garde principal de groupe. Toutefois, les parents d’environ la moitié de ces enfants ont éprouvé des difficultés à trouver des services de garde; bon nombre d’entre eux ont également éprouvé des difficultés au sein des services de garde, comme les coûts accrus des services de garde et la difficulté de trouver une personne responsable des enfants ayant la formation et le soutien nécessaires pour en faire bénéficier leur enfant. À mesure que les provinces et les territoires continuent de mettre en œuvre un système d’AGJEC, il est important d’entreprendre des recherches pour comparer les pratiques actuelles et orienter les prochains plans d’action afin de promouvoir l’inclusion réussie des enfants ayant une incapacité.

Remerciements

Cette étude a été financée par Emploi et Développement social Canada (EDSC). Les auteurs tiennent à remercier les examinateurs internes et les réviseurs d’EDSC et de Statistique Canada pour leurs commentaires éclairés et constructifs. De plus, nous sommes reconnaissants envers un groupe d’experts en incapacité infantile et en garde d’enfants qui ont contribué de façon précieuse à l’élaboration de l’Enquête sur les modes d’apprentissage et de garde des jeunes enfants – Les enfants ayant un problème de santé de longue durée ou une incapacité.