Rapports sur la santé
Valeurs centiles normatives pour la condition physique des Canadiens

par Matt D. Hoffmann, Rachel C. Colley, Caroline Y. Doyon, Suzy L. Wong, Grant R. Tomkinson et Justin J. Lang

Date de diffusion : le 16 octobre 2019

DOI : https://www.doi.org/10.25318/82-003-x201901000002-fra

La condition physique comporte de nombreuses composantes (c.-à-d. capacité cardiorespiratoire [CCR], la force musculosquelettique, l’endurance, la souplesse, l’agilité, l’équilibre) qui, ensemble, décrivent la capacité d’une personne à exécuter une activité physique. De récentes recherches ont décelé des associations significatives entre condition physique et santé tout au long du cycle de vie des CanadiensNote 1Note 2,de même que des facettes de la condition physique dans l’enfance qui sont révélatrices quant aux conséquences sur la santé plus tard dans la vieNote 3.

Les valeurs centiles normatives ont été utilisées afin de faciliter l’interprétation de la performance d’une personne par rapport à une population de référence. Les normes peuvent servir à détecter les personnes ayant de faible performance auprès desquelles il faut intervenir, ainsi que celles ayant une haute performance, identifiées dans le cadre d’un programme de repérage d’espoirs sportifsNote 4.

Même si les normes ne sont pas liées à une conséquence sur la santé à la manière d’un point de découpage ou d’un seuil de démarcation (c.-à-d. une bonne performance par rapport à une norme n’est pas systématiquement synonyme de bons niveaux de condition physique), certaines études ont indiqué que les personnes dont la performance se situe dans le quintile inférieur (⋜ 20e centile) sont exposées à un risque de mauvaise santéNote 5Note 6. Des recherches plus récentes sur les points de découpage de la CCR chez les enfants et les adolescents du Royaume-Uni indiquent que les femmes du 55e centile et moins, de même que les hommes du 60e centile et moins étaient possiblement exposés à un risque de conséquences néfastes sur la santéNote 7. Les valeurs centiles normatives canadiennes en matière de condition physique permettent de mieux comprendre l’évolution de la condition physique des Canadiens avec l’âge et pourraient procurer les renseignements nécessaires pour établir des points de découpage des faibles niveaux de condition physique par groupes d’âge et sexe.

Plusieurs pays, dont le CanadaNote 8Note 9, ont établi des valeurs centiles normatives pour des mesures singulières de la condition physique dans une grande fourchette d’âgesNote 10Note 11Note 12. D’autres pays ont établi des normes exhaustives concernant plusieurs tests de condition physique, mais ces tests visent habituellement les enfants et les jeunes seulementNote 13Note 14Note 15Note 16 ou encore les adultes plus âgésNote 17Note 18. Aucune étude récente n’a mené à l’établissement de normes pour un ensemble complet de tests de condition physique chez des Canadiens de tous les âges. Cette étude vise à établir des valeurs centiles normatives pour cinq mesures de la condition physique (le Physitest aérobie canadien modifié [PACm], la force de préhension, la flexion du tronc, la hauteur et la puissance des sauts) chez les Canadiens de tous les âges, à partir d’un échantillon représentatif de l’ensemble du pays.

Données et méthodes

Participants

Des données utilisées ont été tirées d’un sous-échantillon de participants d’une grande fourchette d’âges puisé dans le cycle 5 (2016 à 2017) de l’Enquête canadienne sur les mesures de la santé (ECMS). L’ECMS est une enquête continue sur les mesures de la santé, qui sert à recueillir des données transversales sur la santé et le bien-être représentatives à l’échelle nationale auprès de Canadiens de 3 à 79 ans résidant dans les 10 provincesNote 19. Les personnes non représentées dans l’ECMS sont celles résidant dans les trois territoires, dans des réserves et des zones de peuplement autochtone, les membres des Forces canadiennes, les personnes institutionnalisées et les habitants de certaines régions éloignées. La proportion des personnes exclues de l’ECMS correspond à environ 3 % de la population cibleNote 19. Les procédures de collecte de données de l’ECMS consistent en un interview à domicile (renseignements démographiques et questionnaire sur la santé), suivi d’une visite en personne à un centre d’examen mobile où sont administrés des tests de certaines mesures physiques. Des spécialistes attestés par la Société canadienne de physiologie de l’exercice administrent tous les tests des mesures physiques. Un aperçu plus détaillé de la méthodologie d’échantillonnage et des opérations d’enquête propres à l’ECMS est présenté ailleursNote 19Note 20. Les poids de l’enquête ont été intégrés afin de tenir compte des biais de non-réponse et du plan d’échantillonnage complexe.

En tout, 5 786 personnes (50,2 % de femmes) âgées de 3 à 79 ans ont pris part au cycle 5 de l’ECMS. Les participants de 8 à 69 ans étaient admissibles au PACm, tandis que ceux de 6 à 79 ans l’étaient pour les tests relatifs à la force de préhension de même qu’à la hauteur et à la puissance des sauts. Les personnes âgées de 6 à 69 ans étaient admissibles au test de flexion du tronc. Après le cycle 5, les répondants qui n’avaient pas participé à ces tests de condition physique (c.-à-d. celles âgées de moins de 6 ans) ont été retirés pour laisser un sous-échantillon restant de 5 188 participants (50,1 % de femmes). Compte tenu de la petite taille de l’échantillon de jeunes et de personnes âgées ayant pris part aux tests, l’échantillon a de nouveau été restraint aux personnes âgées de 8 à 69 ans pour les tests de hauteur et de puissance des sauts. La figure 1 procure plus de renseignements concernant la taille de l’échantillon retenu pour chaque mesure de la condition physique.

Statistique Canada a obtenu l’autorisation de mener l’ECMS de la part de Santé Canada et du comité d’éthique de la recherche de l’Agence de la santé publique du CanadaNote 21. La participation à l’ECMS est volontaire, et tous les participants ont donné un consentement éclairé écrit. Les participants de 6 à 13 ans ont donné un assentiment éclairé écrit, accompagné du consentement éclairé écrit de leur parent ou tuteur.

Mesures de la condition physique

Force musculaire : la force de préhension est une évaluation de la force musculaire isométrique maximale du haut du corps. Elle est mesurée à l’aide du dynamomètre à poignée Smedley III (Takei Scientific Instruments, Japon). Dans le cadre du test, les participants se tiennent debout, le bras évalué éloigné du corps à un angle d’environ 45 degrés. La force de préhension est mesurée deux fois par main, avec alternance des bras entre les essais. Les meilleurs scores pour chaque main sont enregistrés en kilogrammes (kg) et combinés ensuite pour obtenir un score total de la force de préhensionNote 22.

PACm : Le PACm est un test sous-maximal de l’escalier qui sert à estimer la CCR d’une personne, traduits en termes opérationnels comme étant le V ˙ O 2max MathType@MTEF@5@5@+= feaagKart1ev2aqatCvAUfeBSjuyZL2yd9gzLbvyNv2CaerbuLwBLn hiov2DGi1BTfMBaeXatLxBI9gBaerbd9wDYLwzYbItLDharqqtubsr 4rNCHbGeaGqiVu0Je9sqqrpepC0xbbL8F4rqqrFfpeea0xe9Lq=Jc9 vqaqpepm0xbba9pwe9Q8fs0=yqaqpepae9pg0FirpepeKkFr0xfr=x fr=xb9adbaqaaeGaciGaaiaabeqaamaabaabaaGcbaaeaaaaaaaaa8 qaceWGwbWdayaacaWdbiaad+eapaWaaSbaaSqaa8qacaaIYaGaamyB aiaadggacaWG4baapaqabaaaaa@3BD9@ en mLk g 1 mi n 1 MathType@MTEF@5@5@+= feaagKart1ev2aqatCvAUfeBSjuyZL2yd9gzLbvyNv2CaerbuLwBLn hiov2DGi1BTfMBaeXatLxBI9gBaerbd9wDYLwzYbItLDharqqtubsr 4rNCHbGeaGqiVu0Je9sqqrpepC0xbbL8F4rqqrFfpeea0xe9Lq=Jc9 vqaqpepm0xbba9pwe9Q8fs0=yqaqpepae9pg0FirpepeKkFr0xfr=x fr=xb9adbaqaaeGaciGaaiaabeqaamaabaabaaGcbaaeaaaaaaaaa8 qacaWGTbGaamitaiaackcicaWGRbGaam4za8aadaahaaWcbeqaa8qa caGGtaIaaGymaaaakiaackcicaWGTbGaamyAaiaad6gapaWaaWbaaS qabeaapeGaai4eGiaaigdaaaaaaa@419B@ Note 23. Le test, mis au point initialement par Jetté et coll.Note 24, fut ensuite modifié par Weller et coll.Note 23 pour tenir compte des adultes plus âgés et en meilleure condition physique qui avaient tendance à obtenir des valeurs de la CCR sous-estimées par la méthode de JettéNote 23Note 25. Un aperçu détaillé du protocole du PACm est présenté ailleursNote 23Note 25. En somme, les participants ont exécuté au moins un palier d’exercice normalisé de trois minutes de montée et descente de deux marches de 20,3 centimètres (cm) à des vitesses déterminées selon leur âge et leur sexe. Les hommes en meilleure condition physique ont exécuté les deux derniers paliers d’exercice avec une marche de 40,6 cm et les femmes en meilleure condition physique, le dernier palier seulement avec cette marche. Après un palier complet d’exercice, les participants dont la fréquence cardiaque ne dépassait pas 85 % de la valeur maximale prévue pour leur âge (220 moins l’âge en années) pouvaient passer au palier d’exercice suivant. La fréquence cardiaque est mesurée à l’aide d’un moniteur de fréquence cardiaque (Polar Electro Canada Inc., Lachine, Québec, Canada). Avant de se soumettre au test, les participants ont suivi un bref protocole relatif à l’exercice de l’escalier afin de se familiariser avec son déroulement. Même si le PACm est validé seulement pour les personnes âgées de 15 à 69 ansNote 23, il a été introduit dans les cycles précédents de l’ECMS avec des personnes de 6 ans dans le cycle 1, et de 8 ans dans les cycles 2 et 5. L’application de l’équation de la SPAP-SCPE, publiée pour la première fois en 1989Note 26, a permis de prévoir la valeur du V ˙ O 2max MathType@MTEF@5@5@+= feaagKart1ev2aqatCvAUfeBSjuyZL2yd9gzLbvyNv2CaerbuLwBLn hiov2DGi1BTfMBaeXatLxBI9gBaerbd9wDYLwzYbItLDharqqtubsr 4rNCHbGeaGqiVu0Je9sqqrpepC0xbbL8F4rqqrFfpeea0xe9Lq=Jc9 vqaqpepm0xbba9pwe9Q8fs0=yqaqpepae9pg0FirpepeKkFr0xfr=x fr=xb9adbaqaaeGaciGaaiaabeqaamaabaabaaGcbaaeaaaaaaaaa8 qaceWGwbWdayaacaWdbiaad+eapaWaaSbaaSqaa8qacaaIYaGaamyB aiaadggacaWG4baapaqabaaaaa@3BD9@ Note 22.

V ˙ O 2max estimé ( mLk g 1 mi n 1 ) = [ 17,2 + ( 1,29 x dépense* en  O 2 )  ( 0,09 x poids en kg )  ( 0,18 x âge en années ) ], MathType@MTEF@5@5@+= feaagKart1ev2aaatCvAUfeBSjuyZL2yd9gzLbvyNv2CaerbuLwBLn hiov2DGi1BTfMBaeXatLxBI9gBaerbd9wDYLwzYbItLDharqqtubsr 4rNCHbGeaGqiVu0Je9sqqrpepC0xbbL8F4rqqrFfpeea0xe9Lq=Jc9 vqaqpepm0xbba9pwe9Q8fs0=yqaqpepae9pg0FirpepeKkFr0xfr=x fr=xb9adbaqaaeGaciGaaiaabeqaamaabaabaaGcbaaeaaaaaaaaa8 qaceWGwbWdayaacaWdbiaad+eapaWaaSbaaSqaa8qacaaIYaGaamyB aiaadggacaWG4baapaqabaGcpeGaamyzaiaadohacaWG0bGaamyAai aad2gacaWGPdGaaeiia8aadaqadaqaa8qacaWGTbGaamitaiaackci caWGRbGaam4za8aadaahaaWcbeqaa8qacaGGtaIaaGymaaaakiaack cicaWGTbGaamyAaiaad6gapaWaaWbaaSqabeaapeGaai4eGiaaigda aaaak8aacaGLOaGaayzkaaWdbiaabccacqGH9aqpcaqGGaWdamaadm aabaWdbiaaigdacaaI3aGaaiilaiaaikdacaqGGaGaey4kaSIaaeii a8aadaqadaqaa8qacaaIXaGaaiilaiaaikdacaaI5aGaaeiiaiaadI hacaqGGaGaamizaiaadMoacaWGWbGaamyzaiaad6gacaWGZbGaamyz aiaacQcacaqGGaGaamyzaiaad6gacaqGGaGaam4ta8aadaWgaaWcba Wdbiaaikdaa8aabeaaaOGaayjkaiaawMcaa8qacaqGGaGaai4eGiaa bccapaWaaeWaaeaapeGaaGimaiaacYcacaaIWaGaaGyoaiaabccaca WG4bGaaeiiaiaadchacaWGVbGaamyAaiaadsgacaWGZbGaaeiiaiaa dwgacaWGUbGaaeiiaiaadUgacaWGNbaapaGaayjkaiaawMcaa8qaca qGGaGaai4eGiaabccapaWaaeWaaeaapeGaaGimaiaacYcacaaIXaGa aGioaiaabccacaWG4bGaaeiiaiaadkoacaWGNbGaamyzaiaabccaca WGLbGaamOBaiaabccacaWGHbGaamOBaiaad6gacaWGPdGaamyzaiaa dohaa8aacaGLOaGaayzkaaaacaGLBbGaayzxaaGaaiilaaaa@95E4@

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Flexion du tronc : la flexion du tronc consiste à évaluer la souplesse du bas du dos et des ischiojambiers. La souplesse est mesurée à l’aide d’un flexomètre (FitSystems Inc., Calgary, Canada). Les participants doivent s’asseoir sur le sol, les jambes entièrement étirées devant eux et les pieds à plat contre le flexomètre. Ils doivent ensuite se pencher le plus loin possible en direction de leurs orteils tout en gardant les jambes entièrement étirées. Un toucher des orteils équivaut à un score de 26 cm. Le score le plus élevé de deux essais valides est enregistré à 0,1 cm prèsNote 22. Avant le test, les participants s’assoient en position modifiée du coureur de haies, en faisant l’étirement deux fois pour chaque jambe (en alternance) pendant 20 secondes.

Hauteur et puissance des sauts :la technique de mécanographie du saut a servi à évaluer la performance du muscle de la jambe pour ce qui est de la hauteur (cm) et de la puissance (kW) des sauts. Les tests de la plateforme de saut servent à générer des forces de réaction au sol verticales à l’aide de la plateforme mécanographique de réaction au sol Leonardo (Novotec Medical GmbH, Pforzheim, Allemagne). Le signal des capteurs de force affichait une fréquence de 400 ou de 800 Hz. Les participants ont effectué trois essais valides (maximum de cinq essais) de saut vertical unique à deux pieds avec contre-mouvement, et reçu la consigne de sauter le plus haut possible à chaque essai. Pour qu’un essai soit valide, les participants devaient effectuer un saut unique dans lequel leurs deux pieds quittaient la plateforme ensemble puis s’y reposer ensemble. Les participants avaient le droit de balancer les bras durant les sauts. L’essai dans lequel les participants ont sauté le plus haut était retenu pour les analyses de la hauteur et de la puissance des sauts. Avant les essais de saut (tests), les participants ont effectué un ou deux sauts de pratique afin de s’assurer d’une exécution adéquate et vérifier leur équilibre.

Le logiciel Leonardo Mechanography GRFP Research EditionMD (v.4.2.b06.10f) a servi à calculer la hauteur et la puissance des sauts. Un sommaire plus détaillé du protocole de la mécanographie du saut et des calculs ayant servi à obtenir des scores de la hauteur et de la puissance des sauts est publié ailleursNote 27. Le test réalisé sur la plateforme de saut précèdent toujours le PACm, qui précède lui-même toujours le test de flexion du tronc. L’ordre d’exécution du test de force musculaire (préhension) variait, mais n’a pas influé sur l’ordre général d’exécution du test de saut, du PACm et du test de flexion du tronc.

Analyse statistique

Toutes les analyses statistiques ont été réalisées dans le logiciel R (version 3.4.3) et SAS EG 5.1 (SAS Institute Inc., Cary, NC, USA). Le progiciel GAMLSS (General Additive Model for Location Scale and Shape), version 5.1-3, a servi à calculer les courbes de centile pour chaque test de condition physique, l’âge étant une covariable stratifiée selon le sexe. GAMLSS est un prolongement de la méthode Lambda Mu Sigma (LMS) qui modélise l’aplatissement grâce à des distributions d’ensembles, en plus de l’étalement des données (L exprimé en tant que puissance Box-Cox), la médian (M) et le coefficient de variation (S)Note 28Note 29. À chaque variable de résultat de la condition physique, stratifiée selon le sexe ont été ajustées une distribution exponentielle de la puissance Box-Cox, une distribution gaussienne inverse, une distribution de Delaporte et des distributions Box-Cox, Cole et Green. Des fonctions splines pénalisées (p-splines) ont permis de lisser la tendance de l’âge pour chaque résultat de la condition physique, grâce au critère d’Akaike généralisé pour trois, cinq ou sept nœuds. Les poids de sondage de l’ECMS ont été appliqués à tous les modèles. Le critère d’information bayésien a servi à évaluer la qualité de l’ajustement afin de comparer l’ajustement des modèles. Des graphiques Worm et Q-Q ont servi à l’examen visuel. Le modèle ayant fourni le meilleur équilibre entre ajustement du modèle et lissage du modèle a été retenu. Les 5e, 10e, 20e, 30e, 40e, 50e, 60e, 70e, 80e, 90e et 95e centiles des modèles sélectionnés ont été calculés pour chaque test de condition physique. Des groupes d’âge ont été agrégés en calculant un score moyen entre les centiles par tranches d’âge de deux ans entre l’âge de 8 et 19 ans pour le PACm, le test de la hauteur du saut et celui de la puissance du saut, et entre l’âge de 6 et 19 ans pour la force de préhension et la flexion du tronc. De même, des groupes d’âge ont été agrégés en calculant un score moyen entre les centiles par tranches d’âge de cinq ans entre l’âge de 20 et 69 ans pour le PACm, la flexion du tronc, le test de la hauteur du saut et celui de la puissance du saut, et entre l’âge de 20 et 79 ans pour la force de préhension.

Résultats

Les tableaux 1 à 5 montrent les valeurs de centile selon le sexe et l’âge (P5, P10, P20, P30, P40, P50, P60, P70, P80, P90 et P95) pour cinq mesures de la condition physique. La figure 2 montre les courbes de centile pour les 10e, 50e et 90e centiles de chacune des cinq mesures de la condition physique pour les différents groupes d’âge et de sexe.

Les femmes ont obtenu des scores de flexion du tronc nettement supérieurs à ceux des hommes (tableau 3). Chez les femmes, des hausses marquées de la hauteur des sauts apparaissent entre l’âge de 8 et 13 ans (P10 : 24 %, P50 : 25 %, P90 : 27 %; tableau 4) et, par la suite, la performance diminue avec l’âge. Les femmes affichent aussi des hausses marquées de la puissance des sauts entre l’âge de 8 et 13 ans (P10 : 67 %, P50 : 58 %, P90 : 67 %; tableau 5). Les augmentations se révélaient ensuite incrémentielles jusqu’à l’âge de 18 ans environ, après quoi, la performance diminuait avec l’âge. En ce qui a trait à la force de préhension, les femmes présentaient des hausses marquées entre l’âge de 6 et 19 ans (P10 : 235 %, P50 : 193 %, P90 : 168 %), suivies d’augmentations incrémentielles jusqu’à l’âge de 35 ans environ, puis d’une baisse graduelle avec l’âge (tableau 1).

Chez les hommes, les scores de condition physique pour la force de préhension (tableau 1), la hauteur des sauts (tableau 4) et la puissance des sauts (tableau 5) (toutes les mesures de la force et de la puissance musculaires) étaient nettement plus élevés. Les hommes ont aussi obtenu des scores de CCR (tableau 2) plus élevés, malgré de modestes écarts. Les hommes affichaient des hausses marquées de la hauteur des sauts (P10 : 60 %, P50 : 69 %, P90 : 63 %; tableau 4) et de la puissance des sauts (P10 : 233 %, P50 : 233%, P90 : 231 %; tableau 5) entre l’âge de 8 et 20 ans, suivies d’un déclin progressif de la performance au fil de l’âge. En ce qui a trait à la force de préhension, les hommes présentaient des hausses marquées entre l’âge de 6 et 20 ans (P10 : 433 %, P50 : 365 %, P90 : 330 % tableau 1), suivies d’augmentations incrémentielles jusqu’à l’âge de 30 ans environ, puis d’une baisse graduelle avec l’âge. La flexion du tronc demeure relativement stable avec l’âge chez les hommes et les femmes (tableau 3). Les scores de la CCR des hommes et des femmes diminuent de façon constante avec l’âge à partir (habituellement) de 8 ans, une baisse se faisant la plus évidente chez les femmes jusqu’à l’âge de 18 ans (tableau 2).

Discussion

Dans cette étude, des données obtenues auprès de 5 188 personnes de tous âges ont servi à calculer des valeurs centiles normatives, par groupe d’âge et par sexe, représentatives de tous les Canadiens, pour 5 tests de condition physique (force de préhension, PACm [CCR], flexion du tronc [souplesse], hauteur et puissance des sauts). Ces normes permettent d’interpréter les scores des tests de la condition physique chez les Canadiens en détectant les personnes ayant des scores plus élevés et plus faibles par rapport à la population canadienne en général. Il est important de repérer les faibles taux de condition physique, puisque la condition physique est un indice important de l’état de santé actuel et, pour les enfants et les adolescents, un éventuel prédicteur des résultats de la santé à l’âge adulte. Cette étude repose également sur l’ensemble sans cesse grandissant de documents sur les normes qui ont été publiés, portant sur une variété de mesures de la condition physique, tant à l’échelle nationale qu’internationale(p. ex.Note 30Note 8).

Les résultats de cette étude concordent en grande partie avec les constatations tirées de recherches antérieures. Selon les résultats obtenus dans cette étude, des hausses marquées de la force de préhension étaient observées dans l’enfance jusqu’à l’adolescence aux cycles 1 à 3 (2007 à 2013) de l’ECMSNote 8 et les données obtenues auprès de 2 779 165 personnes âgées de 9 à 17 ans représentant 30 pays européensNote 30. Un sous-échantillon de personnes « en bonne santé » (c.-à-d. de personnes n’ayant aucun problème de santé aigu ou chronique) qui ont participé aux cycles précédents de l’ECMS ont affiché des augmentations de la force de préhension jusqu’à l’âge de 40 à 44 ansNote 8. Ces observations diffèrent des résultats de l’étude, où les hommes du cycle 5 de l’ECMS obtenaient des scores pour la force de préhension qui commençaient généralement à atteindre un plateau ou à diminuer chez ces sujets au début de la trentaine. Ces écarts pourraient correspondre à des tendances à la baisse en matière de force de préhension, comme nous l’avons mentionné plus tôtNote 31, ou à des écarts quant à la santé des personnes ayant fait partie de l’étude de WongNote 8 des cycles 1 à 3 de l’ECMS (c.-à-d. sous-échantillon « en bonne santé ») et des personnes comprises dans cette analyse (c.-à-d. la population générale).

Puisqu’il existe des techniques et protocoles différents pour mesurer la CCR O2max) (p. ex. analyses de laboratoire vs essais sur le terrain), les résultats de cette étude en matière de CCR ont été comparés à ceux d’autres études ayant fait appel au PACm. Une comparaison des scores de CCR des enfants et des adolescents à P50 issus du cycle 5 de l’ECMS avec les scores de CCR d’enfants et d’adolescents à P50 issus du cycle 1 (2007 à 2009)Note 32 a montré que les garçons des deux cycles obtenaient de meilleurs scores de CCR que les filles (même si l’écart était plus modeste au cycle 5), et que ces scores diminuaient avec l’âge chez les uns et les autres. Les filles obtenaient des scores de CCR comparables aux cycles 1 et 5, tandis que les scores de CCR des garçons accusaient un recul au cycle 5. Comme pour les constatations relatives à la CCR des garçons et des filles au cycle 5, les hommes adultes du cycle 5 affichaient des niveaux de CCR légèrement plus élevés que ceux des femmes adultes, et les niveaux de CCR des deux sexes diminuaient avec l’âge. Les niveaux de CCR des femmes adultes à P50 du cycle 5 concordaient avec ceux des femmes adultes à P50 du cycle 1, tandis que les niveaux de CCR des hommes adultes à P50 du cycle 5 semblaient inférieurs à ceux des hommes adultes à P50 du cycle 1Note 31. Il convient de souligner la présence d’une certaine difficulté entourant la mise en perspective des scores de CCR des adultes de l’étude actuelle (cycle 5) à ceux du cycle 1Note 31, compte tenu de la grande fourchette d’âges des groupes rapportée pour le cycle 1 (à savoir 20 à 39 ans, 40 à 59 ans et 60 à 69 ans).

Les constations de cette étude en ce qui a trait à la flexion du tronc vont dans le sens des études canadiennes et internationales antérieures qui montrent que les femmes ont habituellement une plus grande souplesse que les hommes, et ce, à tous les âges(p. ex.Note 16Note 30Note 31Note 32). D’autres comparaisons des scores relatifs à la flexion du tronc chez les enfants et les adolescents à P50 du cycle 5 de l’ECMS avec les enfants et les adolescents à P50 du cycle 1 (2007 à 2009)Note 32révèlent des écarts constants dans les deux cycles entre la souplesse des hommes et celle des femmes. De plus, comme l’indique la documentation antérieure sur les adultes ayant participé au cycle 1 de l’ECMSNote 31, cette étude a aussi montré que l’écart entre les sexes en matière de souplesse perdure avec l’âge. De récentes études indiquent que la souplesse n’est pas un indicateur aussi révélateur de la santé que le sont la CCR et la force musculaireNote 1Note 2, mais que la flexion du tronc fait néanmoins partie de plusieurs batteries de tests de condition physique dans le monde (p. ex. Eurofit, FitnessGram).

Les résultats de cette étude s’ajoutent également à l’accumulation constante de données sur la mécanographie du saut Leonardo en provenance du CanadaNote 9, des États-UnisNote 33, de l’EuropeNote 34Note 35 et du JaponNote 11.Les scores sur la puissance et la hauteur des sauts tirés de cette étude s’apparentaient à ceux rapportés par Gabel et coll.Note 9 à propos des Canadiens et Canadiennes de 9 à 21 ans, même s’ils ont fait appel à un autre protocole de saut. Conformément aux recherches précédentesNote 9Note 35, cette étude a révélé que les hommes obtiennent des scores de hauteur et puissance des sauts qui ne cessent d’augmenter jusqu’à la fin de l’adolescence, tandis que les scores des femmes pour la hauteur des sauts atteignent un plateau lorsqu’elles ont environ 13 ans, leurs scores de puissance des sauts n’atteignant un plateau que vers le milieu ou la fin de l’adolescence. Les hommes ont aussi des scores plus élevés que les femmes en matière de hauteur et de puissance des sauts, et les scores de sauts pour les deux sexes diminuent progressivement jusqu’à la fin de l’âge adulte. Ces résultats concordent avec ceux des études précédentes sur les sauts menées auprès d’adultesNote 33Note 34. Bien que cette étude présente les premières valeurs centiles normatives, par groupe d’âge et par sexe, représentatives de tous les Canadiens pour ce qui est de la puissance et de la hauteur des sauts, il faut comparer ces normes en matière de sauts seulement avec des données générées à partir de la plateforme mécanographique Leonardo, compte tenu des biais systématiques connus occasionnés par les données sur la hauteur des sauts obtenus à l’aide d’autres protocoles (sur le terrain) (p. ex. appareil Vertec)(p. ex.Note 36Note 37). Il faut noter que des différences quant au protocole de saut apparaissent même lors de comparaisons avec d’autres études réalisées avec la même plateforme.

Forces et limites

Cette étude comporte plusieurs forces, notamment l’utilisation d’un vaste échantillon représentatif de tous les Canadiens, le recours à des mesures objectives de la condition physique qui sont prélevées par du personnel dûment formé, des résultats présentés pour une grande fourchette d’âges et l’application de techniques d’analyse fiables qui vont au-delà de la technique LMS. Les poids de l’enquête s’appliquent aussi à toutes les analyses afin de tenir compte des biais de non-réponse et du plan d’enquête complexeNote 19Note 20.

Malgré ses forces, cette enquête n’est pas sans limites. L’ECMS comporte des critères d’admissibilité stricts relativement aux tests de la condition physique, qui pourraient avoir entraîné un biais des résultats de l’étude en ne sélectionnant pas les personnes en mauvaise condition physique, ce qui fait en sorte que les valeurs de référence sont supérieures à celles de la population générale. La nature de l’ECMS, une étude liée à la santé, pourrait également donner lieu à un taux de réponse plus élevé par les personnes en bonne santé. Cette éventuelle limite a toutefois déjà été mise à l’épreuve lors de la comparaison des taux d’obésité des Canadiens recueillis par l’ECMS dans le cadre d’une autre enquête nationale sur la santé (à savoir l’Enquête sur la santé dans les collectivités canadiennes de 2008). Les auteurs ont indiqué qu’aucune preuve ne portait à croire que la nature de l’ECMS avait une incidence sur les estimations de l’enquête chez les adultes, du moins du point de vue de l’obésitéNote 31. Le fait que l’enquête porte essentiellement sur la santé pourrait avoir eu une plus forte incidence sur le recrutement d’enfants et d’adolescents en meilleure condition physiqueNote 32. Comme il a déjà été mentionné, le PACm n’est pas validé chez les enfants de moins de 15 ans, ce qui correspond à une importante partie des recherches à venir. Enfin, en raison d’un problème avec le logiciel de mécanographie du saut, le signal émis par les capteurs de la force a été réglé à une fréquence de 400 Hz à certains moments, et de 800 Hz à d’autres. S’il est important de mentionner cette limite, la différence quant à la fréquence d’échantillonnage ne devrait pas avoir eu d’effet significatif sur les résultats.

Conclusion

Cette étude établit des valeurs centiles normatives, selon l’âge et le sexe, représentatives à l’échelle nationale, pour cinq tests de condition physique chez des Canadiens de tous les âges. Ces valeurs peuvent apporter les renseignements nécessaires dans les domaines de la santé publique et de la pratique clinique en complétant les critères de dépistage des patients. Les spécialistes en éducation physique qui entraînent des clients peuvent aussi utiliser ces résultats pour suivre les progrès accomplis annuels ou semestriels par rapport à des bandes centiles. Les recherches à venir devraient enquêter sur les points de découpage des centiles liés à la santé de ces mesures de la condition physique, par l’établissement de normes axées sur les critères.

Références
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