Logo StatCan et la COVID-19: Des données aux connaissances, pour bâtir un Canada meilleur Changements dans les intentions d’avoir des enfants en réponse à la pandémie de COVID-19

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par Ana Fostik et Nora Galbraith

Text begins

En période de grande incertitude et de ralentissement économique, les gens ont tendance à éviter d’apporter des changements importants à leur vie, comme avoir un (autre) enfant (Sobotka et coll., 2011; Alderotti et coll., 2019). Les circonstances particulières de la pandémie de COVID-19 peuvent avoir amené certaines personnes à retarder ou à abandonner leurs projets d’avoir des enfants à cause de problèmes de santé, ou en raison des effets secondaires de la pandémie, comme la perte d’emploi, la réduction du revenu, l’incertitude financière ou le stress général. En revanche, pour d’autres, la pandémie a peut-être suscité un nouvel intérêt pour la conception d’un enfant à la suite d’une plus longue période passée à la maison et du désir d’avoir une expérience nouvelle et enrichissante. Des études récentes menées dans plusieurs pays ont révélé qu’au cours des premiers mois de la pandémie, une proportion importante de la population adulte a modifié ses intentions de fécondité en réponse à la pandémie de COVID-19 ― dans la plupart des cas, retardant ou abandonnant leurs projets d’avoir des enfants (Lindberg et coll., 2020; Luppi et coll., 2020).

Le présent article utilise les données de la première série de l’Enquête sociale canadienne – COVID-19 et bien-être (ESC-CB) pour déterminer si les personnes de 15 à 49 ans ont apporté des changements dans leurs intentions de fécondité en raison de la pandémie de COVID-19. On examine les changements dans les intentions d’avoir des enfants, y compris ceux liés au moment d’en avoir et ceux qui ont une incidence sur le nombre d’enfants désiré. Enfin, on explore dans quelle mesure les personnes présentant certaines caractéristiques sociodémographiques étaient plus ou moins susceptibles de modifier leurs projets d’avoir des enfants en réponse à la pandémie.

Que peuvent nous apprendre les intentions d’avoir des enfants concernant les répercussions de la pandémie?

Le Canada est un pays où le taux de fécondité est faible et diminue de façon constante depuis 2008. Depuis le début de la pandémie de COVID-19, cette tendance s’est intensifiée : le taux de fécondité du Canada étant passé de 1,47 enfant par femme en 2019 à un creux sans précédent de 1,40 enfant par femme en 2020Note . Également en 2020, le Canada a connu le plus faible nombre de naissances et la plus forte diminution d’une année à l’autre du nombre de naissances (-3,6 %) depuis 2006, une tendance similaire à celle observée dans plusieurs autres paysNote . Si le taux de fécondité continue de diminuer au cours des prochaines années, le Canada pourrait se joindre aux pays où les taux de fécondité sont les plus basNote , une situation associée au vieillissement rapide de la population et à une pression accrue sur le marché du travail, les systèmes de soins de santé publics et les régimes de pension.

Bien que les données sur les naissances et la fécondité de 2020 laissent supposer que la pandémie a probablement eu une incidence négative globale sur la fécondité au Canada, ces indicateurs à l’échelle de la population ne peuvent, de façon isolée, indiquer avec précision l’ampleur ou la durée possible de cette incidence. En effet, on pourrait faire valoir que la baisse du taux de fécondité en 2020 reflète simplement le maintien des tendances de longue date. De plus, ces indicateurs agrégés ne montrent pas qui a retardé ou abandonné ses projets d’avoir des enfants en réponse à la pandémie. À l’aide des renseignements tirés de l’ESC-CB sur les changements dans les intentions d’avoir des enfants en raison de la pandémie, on comprend mieux le profil des hommes et des femmes qui ont modifié leurs projets d’avoir des enfants, ainsi que les conséquences possibles à long terme de la pandémie sur les comportements en matière de fécondité dans les années à venir. Le suivi des tendances des intentions d’avoir des enfants et la compréhension des caractéristiques sociodémographiques des personnes qui ont modifié leurs projets d’avoir des enfants en raison de la pandémie peuvent contribuer à l’élaboration de politiques et de programmes à long terme visant les familles ayant de jeunes enfants, les garderies, les écoles, les collectivités et les besoins en matière de logement, particulièrement à court terme en attendant les données sur les naissances pour 2021.

Pour obtenir plus de renseignements sur l’ESC-CB et la conception de cette étude, veuillez consulter la section « Méthodologie ».

Près du quart des personnes de 15 à 49 ans ont modifié leurs projets d’avoir des enfants en raison de la pandémie

Selon les données de l’ESC-CB, près du quart (24 %)Note  des personnes de 15 à 49 ans en 2021 ont modifié leurs projets d’avoir des enfants en raison de la pandémie de COVID-19. Dans l’ensemble, 19 % des personnes ont déclaré qu’en raison de la pandémie, elles souhaitent maintenant avoir moins d’enfants que précédemment prévu ou avoir un enfant plus tard que précédemment prévu. En revanche, 4 % ont mentionné qu’elles souhaitaient maintenant avoir plus d’enfants que précédemment prévu ou en avoir plus tôt que précédemment prévu (tableau 1).


Tableau 1
Proportion de personnes âgées de 15 à 49 ans ayant changé leurs intentions d’avoir des enfants en réponse à la pandémie de COVID-19, selon le type de changement et certaines caractéristiques sociodémographiques
Sommaire du tableau
Le tableau montre les résultats de Proportion de personnes âgées de 15 à 49 ans ayant changé leurs intentions d’avoir des enfants en réponse à la pandémie de COVID-19 Type de changement dans les intentions d’avoir des enfants en réponse à la pandémie de COVID-19, Des enfants plus tard ou moins d'enfants, Des enfants plus tôt ou plus d'enfants, Aucun changement, Total, Proportion, Intervalle de confiance de 95 % , De et À, calculées selon pourcentage unités de mesure (figurant comme en-tête de colonne).
Type de changement dans les intentions d’avoir des enfants en réponse à la pandémie de COVID-19
Des enfants plus tard ou moins d'enfants Des enfants plus tôt ou plus d'enfants Aucun changement Total
Proportion Intervalle de confiance de 95 % Proportion Intervalle de confiance de 95 % Proportion Intervalle de confiance de 95 % Proportion
De À De À De À
pourcentage
Total 19,2 17,7 20,8 4,3 3,6 5,1 76,5 74,9 78,1 100,0
Sexe
Homme 18,5 16,2 21,0 3,6 2,6 4,8 78,0 75,4 80,3 100,0
Femme 19,9 17,8 22,1 5,0 4,0 6,3 75,1 72,8 77,3 100,0
A des enfants biologiques
Oui 12,3Tableau 1 Note 1 10,7 14,1 3,4Tableau 1 Note 1 2,6 4,4 84,3Tableau 1 Note 1 82,4 86,1 100,0
Non 24,7 22,4 27,3 4,9 3,9 6,2 70,4 67,8 72,8 100,0
Situation conjugale
Marié 14,2 12,3 16,3 4,4 3,3 6,0 81,4 79,1 83,5 100,0
Union libre 20,6Tableau 1 Note 2 16,7 25,0 7,3Tableau 1 Note 2 5,2 10,3 72,1Tableau 1 Note 2 67,4 76,3 100,0
Couple vivant chacun chez soi 28,6Tableau 1 Note 2 23,7 34,1 3,8 2,3 6,1 67,7Tableau 1 Note 2 62,0 72,9 100,0
Pas en couple 20,9Tableau 1 Note 2 18,1 24,0 2,9 2,0 4,3 76,2Tableau 1 Note 2 73,1 79,1 100,0
Niveau de scolarité
Études secondaires 17,1Tableau 1 Note 3 14,5 20,2 3,0Tableau 1 Note 3 1,9 4,6 79,9Tableau 1 Note 3 76,7 82,7 100,0
Études postsecondaires non universitaires 17,8Tableau 1 Note 3 15,0 21,0 4,6 3,1 6,7 77,6Tableau 1 Note 3 74,3 80,7 100,0
Études universitaires 22,0 19,6 24,6 5,3 4,2 6,6 72,7 70,0 75,3 100,0
Groupe d'âge
15 à 24 ans 21,1Tableau 1 Note 4 17,4 25,5 3,3 2,1 5,3 75,5Tableau 1 Note 4 71,1 79,5 100,0
25 à 34 ans 30,5Tableau 1 Note 4 27,4 33,8 6,3Tableau 1 Note 4 4,8 8,3 63,2Tableau 1 Note 4 59,8 66,4 100,0
35 à 49 ans 10,0 8,5 11,6 3,4 2,6 4,5 86,6 84,8 88,2 100,0
Région
Provinces de l'Atlantique 16,2Tableau 1 Note 5 12,7 20,5 3,6 2,2 6,0 80,1Tableau 1 Note 5 75,6 84,0 100,0
Québec 13,1Tableau 1 Note 5 10,8 15,9 5,0 3,4 7,3 81,8Tableau 1 Note 5 78,5 84,7 100,0
Ontario 22,4 19,6 25,6 4,6 3,4 6,2 73,0 69,7 76,0 100,0
Provinces des Prairies 20,4 17,3 23,8 3,0 2,1 4,3 76,6 73,1 79,8 100,0
Colombie-Britannique 18,5 14,8 22,9 4,2 2,5 7,1 77,3 72,7 81,3 100,0
Appartenance à une minorité visible
Minorité visible 24,7Tableau 1 Note 6 21,6 28,2 5,5 4,1 7,4 69,8Tableau 1 Note 6 66,2 73,1 100,0
Pas une minorité visible 16,5 14,9 18,2 3,7 2,9 4,7 79,9 78,0 81,6 100,0
Statut d’immigrant
Né au Canada 18,5 16,7 20,6 4,2 3,3 5,2 77,3 75,2 79,3 100,0
Né à l’extérieur du Canada 20,6 17,8 23,7 4,5 3,4 6,1 74,9 71,7 77,8 100,0
LGBTQ2+
Oui 22,4 17,1 28,9 5,6 3,2 9,6 72,0 65,5 77,7 100,0
Non 18,9 17,3 20,6 4,2 3,4 5,0 77,0 75,2 78,7 100,0

Comme le démontre le graphique 1, les changements dans les projets en ce qui concerne le moment d’avoir des enfants étaient plus fréquents que ceux observés quant au nombre d’enfants. Dans l’ensemble, le changement le plus fréquent dans les intentions de fécondité a été de retarder le moment d’avoir des enfants : 14 % des personnes en âge de procréer ont indiqué qu’en raison de la pandémie, elles voulaient maintenant avoir un enfant plus tard que précédemment prévu. Ce constat est particulièrement significatif étant donné que le Canada est un pays où la maternité est tardive, l’âge moyen des mères à l’accouchement étant de 31,3 ans en 2020Note . Dans ce contexte, l’incidence de la maternité tardive pourrait faire en sorte que certaines femmes n’atteignent pas le nombre d’enfants désiré, et ce, en raison des limites biologiques à la procréation.

Dans l’ensemble, les hommes et les femmesNote  étaient tout aussi susceptibles d’avoir modifié leurs intentions d’avoir des enfants dans la foulée de la pandémie. Toutefois, les femmes étaient légèrement plus susceptibles que les hommes de vouloir désormais moins d’enfants en raison de la pandémie (12 % et 10 %, respectivement).

Graphique 1

Tableau de données du graphique 1 
Tableau de données du graphique 1
Sommaire du tableau
Le tableau montre les résultats de Tableau de données du graphique 1. Les données sont présentées selon En raison de la pandémie de COVID-19 (titres de rangée) et Proportion, Intervalle de confiance de 95 %, De et À, calculées selon pourcentage unités de mesure (figurant comme en-tête de colonne).
En raison de la pandémie de COVID-19 Proportion Intervalle de confiance de 95 %
De À
pourcentage
Je veux maintenant avoir plus
d’enfants que précédemment prévu
2,0 1,5 2,6
Je veux maintenant avoir un enfant
plus tôt que précédemment prévu
3,4 2,7 4,2
Je veux maintenant avoir moins
d’enfants que précédemment prévu
10,9 9,7 12,2
Je veux maintenant avoir un enfant
plus tard que précédemment prévu
14,3 13,0 15,7

Les non-parents étaient deux fois plus susceptibles de vouloir maintenant moins d’enfants ou d’avoir des enfants plus tard que prévu

Les comportements en matière de fécondité ont tendance à être liés à des caractéristiques démographiques, comme l’âge, la parité (le nombre d’enfants) et la situation conjugale. Depuis le début de la pandémie, les jeunes adultes et les personnes ayant de jeunes enfants ont fait face à des défis particuliers ― notamment une incertitude accrue liée à l’emploi (Ching et coll., 2020) et de plus grandes difficultés dans la conciliation travail-famille (Leclerc, 2020), ce qui a peut-être amené les gens à reconsidérer leurs préférences quant au nombre d’enfants désiré. On examine ensuite les variations dans la probabilité de changer ses intentions d’avoir des enfants depuis la pandémie selon le groupe d’âge, la présence d’autres enfants biologiques et la situation conjugale.

Les personnes qui n’ont actuellement pas d’enfants étaient deux fois plus susceptibles de vouloir maintenant des enfants plus tard ou d’en avoir moins que les personnes qui étaient déjà des parents (25 % par rapport à 12 %) (tableau 1). De plus, 3 personnes sur 10 (31 %) âgées de 25 à 34 ans voulaient moins d’enfants ou souhaitaient les avoir plus tard en raison de la pandémie, tandis que ces changements étaient beaucoup moins fréquents chez le groupe plus jeune en âge de procréer (15 à 24 ans) et celui le plus âgé (35 à 49 ans).

Parmi toutes les situations conjugales, les personnes vivant en couple chacun chez soi (VCCS)Note  étaient les plus susceptibles de changer leurs intentions d’avoir des enfants, soit « les avoir plus tard ou en avoir moins », en réponse à la pandémie (29 %), davantage que les personnes qui ne sont pas actuellement en couple (21 %) et deux fois plus que les personnes mariées (14 %). Les personnes VCCS ont tendance à être plus jeunes que celles faisant partie d’autres types d’unions, et parmi ces jeunes adultes, ces couples sont plus susceptibles d’avoir été formés récemment (Turcotte, 2013). Ces facteurs peuvent avoir contribué à une plus grande incertitude quant à leurs plans familiaux après le début de la pandémie.

Les personnes appartenant à des groupes désignés comme minorités visibles étaient plus susceptibles de vouloir moins d’enfants ou de souhaiter les avoir plus tard

La pandémie de COVID-19 a eu des répercussions sociales et économiques inégales sur les personnes appartenant à divers groupes de population, comme les minorités visibles, les immigrants, les Autochtones et les personnes LGBTQ2+Note , en plus d’autres caractéristiques sociodémographiques, comme le niveau de scolarité et la région, entre autres. D’autre part, les personnes appartenant à ces divers groupes de population pouvaient également être plus ou moins susceptibles d’avoir modifié leurs projets d’avoir des enfants à la suite de la pandémie.

Les personnes appartenant à des groupes désignés comme minorités visibles étaient beaucoup plus susceptibles de déclarer un changement dans leurs intentions d’avoir des enfants, soit « les avoir plus tard ou en avoir moins » (25 %) que celles qui n’appartenaient pas à de tels groupes (17 %), faisant écho à des résultats antérieurs observés aux États-Unis (Lindberg et coll., 2020). Cette différence peut en partie refléter le fait que les minorités visibles ont été touchées de façon disproportionnée par la pandémie de COVID-19, que ce soit par le chômage, les difficultés financières ou les taux de mortalité attribuables à la COVID-19 (Statistique Canada, 2021).

Des différences dans la probabilité d’apporter des changements dans les intentions d’avoir des enfants plus tard ou d’en avoir moins ont également été constatées dans certaines régions du Canada : les personnes vivant dans l’une des provinces de l’Atlantique (16 %), et en particulier celles vivant au Québec (13 %), étaient nettement moins susceptibles d’avoir apporté ces changements que les personnes vivant en Ontario (22 %). Cette constatation peut refléter, en partie, les répercussions économiques différentielles de la pandémie entre les régions, surtout en ce qui concerne l’emploi chez les jeunes (Gellatly et McCormack, 2021) ainsi que l’abordabilité et la disponibilité des logements (Verma et Husain, 2020). Cela peut également témoigner de la situation unique du Québec au pays en ce qui concerne son programme de services de garde à frais modiques ― le facteur d’abordabilité étant un aspect important lorsqu’il s’agit de décider quand et si l’on doit avoir un enfant en période d’incertitude économique (Moyser et Milan, 2018; MacDonald et Friendly, 2020).

Contrairement aux résultats récents obtenus aux États-Unis (Lindberg et coll., 2020), ni le statut d’immigrant ni le statut LGBTQ2+ n’ont joué un rôle important dans la probabilité de modifier les intentions d’avoir des enfants. À l’avenir, il sera possible de regrouper plusieurs volets de l’ESC. Cela permettra de réexaminer ces tendances avec un échantillon de plus grande taille, ce qui facilitera une analyse plus rigoureuse des petits groupes de population, comme les personnes LGBTQ2+ et les Autochtones, ainsi qu’une désagrégation plus poussée par province et par groupe désigné comme minorité visible.

En conclusion, il a été constaté que les changements dans les intentions d’avoir des enfants plus tard ou d’en avoir moins étaient plus fréquents que les changements dans les intentions de vouloir plus d’enfants ou de les avoir plus tôt que précédemment prévu. Les personnes étaient aussi plus susceptibles d’exprimer le désir de vouloir reporter leurs projets d’avoir des enfants en raison de la pandémie que d’avoir moins d’enfants. Cela donne à penser que, malgré la baisse du taux de fécondité au Canada en 2020, la pandémie pourrait ne pas nécessairement avoir une incidence négative importante correspondante sur les niveaux de fécondité finale des femmes (c.-à-d. le taux de fécondité de la cohorte), pourvu que les personnes finissent par « rattraper leur retard » et aient le nombre d’enfants souhaités plus tard.

Il reste à voir si l’indice synthétique de fécondité du Canada pourra revenir à ses niveaux d’avant la pandémie au cours des années à venir, ou poursuivre sa tendance à la baisse observée ces dernières années. Le désir de reporter le moment d’avoir des enfants, comme l’ont déclaré 14 % des personnes en âge de procréer, pourrait poser un certain nombre de défis tant pour les personnes que pour la société. Dans le contexte canadien où la maternité est déjà tardive, reporter davantage le moment d’avoir des enfants en raison de la pandémie pourrait entraîner un nombre croissant de femmes et de couples aux prises avec des problèmes d’infertilité liée à l’âge et, par conséquent, à ne pas atteindre le nombre d’enfants désiré. Étant donné que les personnes actuellement sans enfants étaient beaucoup plus susceptibles d’avoir apporté des changements ayant une incidence négative sur leurs projets d’avoir des enfants, il pourrait y avoir une augmentation de la proportion de femmes sans enfants parmi les personnes en âge de procréer à l’avenir. Si ces intentions se traduisent par un comportement correspondant, la tendance à la baisse de la fécondité qui en découlerait pourrait avoir des répercussions à court terme, comme une diminution du nombre d’inscriptions dans les garderies et les écoles, ainsi qu’à long terme, plus importantes, sur les régimes de pension publics et la disponibilité de la main-d’œuvre en raison du vieillissement plus rapide de la population.

Méthodologie

Les résultats figurant dans le présent article proviennent du premier volet de l’Enquête sociale canadienne (ESC). L’ESC recueille de l’information sur divers sujets sociaux dont la santé, le bien-être, les répercussions de la COVID-19, les activités, l’emploi du temps et la préparation aux situations d’urgence. La population cible de cette enquête à participation volontaire comprend les personnes âgées de 15 ans et plus ne résidant pas en établissement et vivant hors réserve dans les 10 provinces canadiennes.

Les données de la première enquête de la série de l’ESC, qui portait sur la COVID-19 et le bien-être (ESC-CB), ont été recueillies entre avril et juin 2021. Un échantillon stratifié de 20 000 logements a été sélectionné de façon probabiliste. Au sein d’un ménage, des renseignements ont été recueillis auprès d’un membre du ménage sélectionné au hasard et âgé de 15 ans et plus. Le taux de réponse pour le premier volet de la série de l’ESC-CB est estimé à 58,9 %.

Dans le cadre de cette étude, les principaux résultats ont été tirés d’un module du questionnaire de l’ESC-CBNote  qui demandait aux répondants si une série d’énoncés liés à leurs intentions d’avoir des enfants étaient vrais ou faux. Ce module a été adapté à partir d’une enquête récente du Guttmacher Institute aux États-Unis (Lindberg et coll., 2020).

Une fraction des répondants en âge de procréer (5 %) a été retirée du sous-échantillon analytique en raison de la non-réponse ou des incohérences dans les variables indiquant des changements dans les intentions d’avoir des enfants en réponse à la pandémie (ils voulaient maintenant des enfants plus tard et souhaitaient en avoir plus tôt que précédemment prévu, ou ils en voulaient moins et un plus grand nombre), soit parce qu’elles correspondaient simultanément à des combinaisons de changements positifs et négatifs en matière de fécondité (souhaiter avoir un plus grand nombre d’enfants et vouloir les avoir plus tard, ou vouloir moins d’enfants et les avoir plus tôt). Bien que cette dernière possibilité soit valide sur le plan analytique, la rareté de ces occurrences nous empêche de les inclure dans l’analyse. Suite à la sélection des répondants en âge de procréer (15 à 49 ans) et à la suppression des incohérences, le sous-échantillon analytique représentait environ 15 804 000 personnes. Les caractéristiques sociodémographiques du sous-échantillon sont résumées dans le tableau 2.


Tableau 2
Certaines caractéristiques du sous-échantillon analytique, fréquence pondérée et pourcentage pondéré
Sommaire du tableau
Le tableau montre les résultats de Certaines caractéristiques du sous-échantillon analytique Fréquence pondérée, Pourcentage pondéré, Estimation, Intervalle de confiance de 95 %, De et À, calculées selon nombre et pourcentage unités de mesure (figurant comme en-tête de colonne).
Fréquence pondérée Pourcentage pondéré
Estimation Intervalle de confiance de 95 %
De À
nombre pourcentage
Total 15 804 000 100,0 100,0 100,0
Sexe
Homme 7 866 000 49,8 49,0 50,5
Femme 7 938 000 50,2 49,5 51,0
A des enfants biologiques
Oui 7 036 000 44,6 43,2 46,0
Non 8 737 000 55,4 54,0 56,8
Situation conjugale
Marié 5 750 000 36,5 35,1 37,9
Union libre 2 583 000 16,4 15,1 17,8
Couple vivant chacun chez soi 1 703 000 10,8 9,6 12,1
Pas en couple 5 731 000 36,3 34,7 38,0
Niveau de scolarité
Études secondaires 5 675 000 35,9 34,6 37,3
Études postsecondaires non universitaires 4 024 000 25,5 24,2 26,8
Études universitaires 6 104 000 38,6 37,4 39,9
Groupe d'âge
15 à 24 ans 4 203 000 26,6 26,0 27,2
25 à 34 ans 4 801 000 30,4 29,7 31,0
35 à 49 ans 6 800 000 43,0 42,2 43,8
Région
Provinces de l'Atlantique 929 000 5,9 5,7 6,1
Québec 3 334 000 21,1 20,3 21,9
Ontario 6 343 000 40,1 39,4 40,9
Provinces des Prairies 3 048 000 19,3 18,8 19,8
Colombie-Britannique 2 150 000 13,6 13,2 14,1
Appartenance à une minorité visible
Minorité visible 5 203 000 32,9 31,2 34,7
Pas une minorité visible 10 601 000 67,1 65,3 68,8
Statut d’immigrant
Né au Canada 10 920 000 69,1 67,3 70,8
Né à l’extérieur du Canada 4 884 000 30,9 29,2 32,7
LGBTQ2+
Oui 1 373 000 8,7 7,6 9,9
Non 14 431 000 91,3 90,1 92,4

Références

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