Logo StatCan et la COVID-19: Des données aux connaissances, pour bâtir un Canada meilleur La COVID-19 et la suppression d’emplois : une réflexion à plus long terme

Warning Consulter la version la plus récente.

Information archivée dans le Web

L’information dont il est indiqué qu’elle est archivée est fournie à des fins de référence, de recherche ou de tenue de documents. Elle n’est pas assujettie aux normes Web du gouvernement du Canada et elle n’a pas été modifiée ou mise à jour depuis son archivage. Pour obtenir cette information dans un autre format, veuillez communiquer avec nous.

par Ping Ching Winnie Chan, René Morissette et Hanqing Qiu

Text begins

Il est encore trop tôt pour savoir combien de travailleurs canadiens perdront leur emploi, c’est-à-dire qu’ils seront mis à pied de façon permanenteNote , en raison de la pandémie de COVID-19, et ce qu’il adviendra d’eux financièrement par la suite. Certains points de repère se dégagent cependant du passé. Bien qu’ils ne permettent pas nécessairement de prédire avec exactitude les répercussions de la pandémie sur la suppression d’emplois, ils offrent une perspective à long terme à partir de laquelle on peut évaluer les prochains mouvements du marché du travail. L’objet du présent article consiste à mettre ces constatations en évidence.

Ce que nous savons jusqu’à présent

En moyenne, 12,4 % des travailleurs canadiens rémunérés âgés de 15 à 64 ans ont été mis à pied, sur une base mensuelle, depuis février 2020 (tableau 1). En comparaison, les taux moyens mensuels de mise à pied pendant les deux premiers mois suivant les ralentissements précédents du marché du travail se situaient entre 2,5 % et 3,5 %.

Au cours des trois dernières récessions (1981-1982, 1990-1992 et 2008-2009), les jeunes travailleurs, les travailleurs moins scolarisés et les travailleurs récemment embauchés étaient plus susceptibles d’être mis à pied — de manière temporaire ou permanente — que les autres employés (Chan, Morissette et Frenette, 2011). Jusqu’à présent, pendant la crise actuelle, c’est encore le cas : les taux de mise à pied depuis février 2020 ont été plus élevés chez les groupes susmentionnés que chez les autres groupes de travailleurs (tableau 1).

Au cours des trois dernières récessions, environ 45 % de tous les travailleurs mis à pied l’ont été de manière permanente (tableau 1), et le reste, de manière temporaire. Toutefois, les travailleurs mis à pied temporairement n’étaient pas à l’abri d’une perte d’emploi subséquente : environ 15 % d’entre eux ont perdu leur emploi l’année suivante.

Pour comprendre les répercussions à long terme de la pandémie de COVID-19 sur les travailleurs canadiens, il est essentiel de saisir l’ampleur des mises à pied permanentes (c.-à-d. des pertes d’emploi) auxquelles elle donnera lieu. La raison est simple : pour de nombreux travailleurs, la perte d’un emploi engendre une perte de gains non seulement à court terme, mais aussi à plus long terme (Jacobson, Lalonde et Sullivan, 1993; Morissette, Zhang et Frenette, 2007; Morissette, Qiu et Chan, 2013). De la fin des années 1970 jusqu’au début des années 2010, au moins 1 travailleur mis à pied de manière permanente sur 5 a vu ses gains réels diminuer d’au moins 25 %, même cinq ans après la perte de leur emploi (graphique 1).

Les prestations d’assurance-emploi peuvent compenser une partie de la perte de gains, mais ces prestations sont habituellement épuisées au bout d’un an. En conséquence, cinq ans après la perte d’emploi, la perte de gains des travailleurs déplacés peut seulement être atténuée par la progressivité du système fiscal et de transfert et, pour certaines personnes mariées ou vivant en union libre, par une augmentation des heures travaillées annuellement par leur conjoint (Stephens, 2002).

Ce que nous ne savons pas

Le nombre de travailleurs canadiens qui finiront par perdre leur emploi en raison de la pandémie de COVID-19 demeure inconnu, de même que la manière dont ils s’en tireront par la suite. L’ampleur des répercussions négatives de la pandémie sur les travailleurs canadiens, à plus long terme, dépend de plusieurs facteurs reliés entre eux, y compris la mesure dans laquelle elle :

  • aura une incidence sur les dépenses de consommation, tandis que les ménages tentent d’améliorer leurs finances;
  • réduira les exportations, tandis que les partenaires commerciaux du Canada prennent des mesures pour relancer leur activité économique;
  • mettra en veilleuse les investissements, tandis que les entreprises composent avec des incertitudes liées à la vitesse de la reprise et à la possibilité de confinements subséquents;
  • ralentira la création d’entreprises et augmentera la fermeture d’entreprises (p. ex. magasins de détail traditionnels);
  • incitera les entreprises à automatiser certaines tâches par l’utilisation de robots et d’algorithmes informatiques;
  • encouragera les entreprises à accroître leur capacité de télétravail et de ventes en ligne, à adopter le travail par quarts et à modifier l’environnement de travail pour protéger les travailleurs contre les vagues subséquentes du virus;
  • aura une incidence sur l’emploi en générant de nouveaux coûts opérationnels liés à la mise en œuvre de mesures sanitaires et de distanciation physique en milieu de travail;
  • réduira les prix mondiaux du pétrole et l’emploi dans le secteur de l’énergie;
  • incitera les travailleurs mis à pied à prendre leur retraite plus tôt, à améliorer leurs compétences, ou à déménager dans des régions dynamiques, tandis que la pandémie s’estompe.

Tableau 1
Certaines statistiques — ralentissements actuel et précédents du marché du travail
Sommaire du tableau
Le tableau montre les résultats de Certaines statistiques — ralentissements actuel et précédents du marché du travail. Les données sont présentées selon Ralentissement du marché du travail (titres de rangée) et Taux mensuel moyen de mises à pied, calculées selon pourcentage unités de mesure (figurant comme en-tête de colonne).
Ralentissement du marché du travail Taux mensuel moyen de mises à pied
1981 à 1982 1990 à 1992 2008 à 2009 Février-mars et mars-avril 2020
pourcentage
Dans l’ensemble 3,5 3,4 2,5 12,4
Hommes 3,9 4,1 3,3 12,2
Femmes 2,9 2,5 1,8 12,6
Groupe d’âge
15 à 24 5,2 4,8 4,1 25,1
25 à 44 2,9 3,1 2,1 10,7
45 à 64 2,8 2,9 2,3 9,9
Niveau de scolarité
Inférieur au baccalauréat 3,8 3,8 3,0 15,1
Baccalauréat ou niveau supérieur 1,2 0,8 1,1 7,2
Ancienneté dans l'emploi
Moins de 2 ans 6,2 6,2 4,3 17,7
2 à 5 ans 2,5 2,2 2,0 13,2
Plus de 5 ans 1,3 1,4 1,4 8,2
Travailleurs mis à pied de manière permanente en pourcentage de l’ensemble des travailleurs mis à pied 46,2 46,4 44,6 Note ...: n'ayant pas lieu de figurer
Pourcentage de travailleurs mis à pied temporairement qui ont perdu leur emploi l’année suivante 15,2 16,4 15,4 Note ...: n'ayant pas lieu de figurer

Graphique 1 Pourcentage de travailleurs mis à pied de manière permanente dont les gains réels 5 ans après la perte d’emploi sont au
moins 25 % inférieurs à ceux de l’année précédant la perte d’emploi, 1979 à 2011

Tableau de données du graphique 1 
Tableau de données du graphique 1
Sommaire du tableau
Le tableau montre les résultats de Tableau de données du graphique 1 Toutes les industries, Hommes et Femmes, calculées selon pourcentage unités de mesure (figurant comme en-tête de colonne).
Toutes les industries
Hommes Femmes
pourcentage
1979 41,7 37,4
1980 41,4 37,3
1981 38,8 36,7
1982 36,6 34,4
1983 27,3 31,0
1984 22,3 28,7
1985 23,3 28,2
1986 29,3 31,7
1987 33,4 31,0
1988 36,1 32,8
1989 37,4 35,6
1990 36,6 36,1
1991 33,6 36,1
1992 26,4 32,2
1993 22,3 29,6
1994 20,4 27,2
1995 19,8 24,8
1996 21,3 24,0
1997 20,9 23,7
1998 22,3 24,9
1999 22,3 27,0
2000 22,3 25,8
2001 23,2 26,1
2002 22,1 26,8
2003 20,9 25,8
2004 25,2 26,7
2005 23,8 27,0
2006 23,1 26,5
2007 22,4 26,7
2008 22,2 27,6
2009 22,7 26,8
2010 20,7 26,6
2011 22,7 26,4

Références

Chan, W., R. et M. Frenette. 2011. « Les travailleurs mis à pied au cours des trois dernières récessions : Qui étaient-ils et quels résultats ont-ils obtenus? » Direction des études analytiques : documents de recherche, no 337. Produit no 11F0019M au catalogue de Statistique Canada. Ottawa : Statistique Canada.

Jacobson, L.S., R.J. Lalonde et D.G. Sullivan. 1993. « Earnings Losses of Displaced Workers ». American Economic Review 83 (4) : 685 à 709.

Morissette, R., X. Zhang et M. Frenette. 2007. « Les pertes de gains des travailleurs déplacés : données canadiennes d’une importante base de données sur les fermetures d’entreprises et les licenciements collectifs ». Direction des études analytiques : documents de recherche, no 291. Produit no 11F0019M au catalogue de Statistique Canada. Ottawa : Statistique Canada.

Morissette, R., H. Qiu et P.C.W. Chan. 2013. « The Risk and Cost of Job Loss in Canada, 1978-2008 ». Canadian Journal of Economics 46 (4) : 1480 à 1509.

Stephens, M. 2002. « Worker Displacement and the Added Worker Effect ». Journal of Labor Economics 20 (3) : 504 à 537.

Date de modification :