Rapports économiques et sociaux
Les immigrants qui ont fait des études universitaires arrivent-ils à se remettre d’un lent départ sur le plan économique?

Date de diffusion : le 24 mai 2023

DOI: https://doi.org/10.25318/36280001202300500003-fra

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Résumé

Selon des recherches antérieures, les immigrants qui ont fait des études universitaires ont une meilleure capacité d’adaptation au marché du travail et obtiennent de meilleurs résultats économiques, en moyenne, que leurs homologues moins scolarisés. C’est en partie pour cette raison qu’ils sont davantage sélectionnés que leurs pairs moins scolarisés. Cependant, parmi les immigrants qui ont fait des études universitaires, certains connaissent un début plutôt lent sur le plan économique au cours des premières années suivant leur arrivée au pays. Cela dit, comme peu de chercheurs se sont penchés sur la question, on ne sait pas si ces immigrants finissent par rattraper ceux qui ont un niveau de scolarité semblable et qui affichent de bons résultats économiques en début de parcours. On ne sait pas non plus s’ils obtiennent de meilleurs résultats que les immigrants moins scolarisés. La présente étude a pour but d’examiner, à l’aide des données de la Base de données longitudinales sur l’immigration, les résultats économiques à long terme des immigrants, demandeurs principaux de la catégorie économique ayant fait des études universitaires, qui ont immigré à l’âge de 20 à 44 ans au cours de la période de 1990 à 2014, selon leur niveau de revenus au cours des premières années suivant leur arrivée au pays. L’analyse révèle que, la troisième année suivant l’immigration, ceux qui n’avaient pas enregistré de revenu ou qui se trouvaient dans la catégorie des revenus les plus faibles au cours des deux premières années suivant l’immigration accusaient d’importants retards par rapport à ceux qui avaient enregistré des revenus plus élevés durant ces années. Ils gagnaient également moins, en moyenne, que les demandeurs principaux ayant fait au plus des études secondaires, bien que l’écart se refermait à compter de la septième ou la huitième année suivant l’immigration. Parmi les immigrants qui avaient fait des études universitaires, l’écart persistait entre ceux qui n’avaient enregistré aucun revenu ou de faibles revenus au départ et leurs pairs qui avaient enregistré des revenus élevés au départ, bien que cet écart diminuait considérablement au fil des années écoulées depuis l’immigration. Plus précisément, trois ans après leur arrivée au Canada, les demandeurs principaux qui avaient fait des études universitaires et qui avaient enregistré des revenus élevés au cours des premières années suivant leur admission au Canada gagnaient de 3,5 à 4,8 fois plus que leurs homologues qui n’avaient pas enregistré de revenu ou qui se trouvaient dans la catégorie des revenus les plus faibles au cours de la même période. À titre de comparaison, 15 ans après leur arrivée au pays, l’écart avait diminué, mais demeurait toutefois important : les immigrants dont les revenus étaient initialement élevés gagnaient toujours de 1,6 à 2,0 fois plus que leurs pairs dont les revenus initiaux étaient inexistants ou figuraient parmi les plus faibles. Ces tendances générales ont été observées dans différentes catégories économiques (p. ex. le Programme des travailleurs qualifiés (fédéral), les programmes provinciaux et la catégorie de l’expérience canadienne). Les analyses multivariées ont révélé que l’écart observé au cours d’une année donnée et son évolution au fil du temps était peu attribuable aux différences observées dans les caractéristiques liées aux antécédents des immigrants. D’autres facteurs étaient plutôt en cause, lesquels ne sont pas étudiés de façon empirique dans la présente étude, à savoir : 1) des caractéristiques non étudiées telles que la motivation, les compétences interpersonnelles et la qualité du programme d’études universitaires ou l’expérience professionnelle; 2) l’incapacité des immigrants à améliorer suffisamment leur capital humain en raison d’une multitude de facteurs possibles; 3) le risque de stigmatisation qui peut faire en sorte qu’une première expérience d’emploi médiocre donne lieu à des résultats économiques moins favorables à long terme. Il est probable que chacun de ces facteurs contribue à cet écart persistant.

Mots clés : études universitaires, immigrants économiques, revenus

Auteurs

Eden Crossman et Garnett Picot travaillent à la Direction générale de la recherche et de l’évaluation d’Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada. Feng Hou travaille à la Division de l’analyse sociale et de la modélisation, Direction des études analytiques et de la modélisation de Statistique Canada.

Remerciements

La présente étude a été menée en collaboration avec Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada. Les auteurs tiennent à remercier Cédric de Chardon, Christopher Hamilton, Rebeka Lee, René Morissette et Tingting Zhang pour leurs conseils et leurs commentaires sur une version antérieure de l’étude.

Introduction

Selon des recherches antérieures (Picot, Hou et Giu, 2016), les immigrants qui ont fait des études universitaires ont, en moyenne, une meilleure capacité d’adaptation au marché du travail et sont par conséquent plus susceptibles d’obtenir de meilleurs résultats économiques à long terme que leurs homologues moins scolarisés. C’est en partie pour cette raison qu’ils sont davantage sélectionnés que leurs pairs moins scolarisés. Cela dit, on ne sait pas si cette prémisse est valable pour tous les immigrants très scolarisés. Certains immigrants qui ont fait des études universitaires pourraient présenter de très mauvais résultats économiques — c.-à-d. aucun revenu ou des revenus très faibles — durant leurs premières années au Canada.

Bien que de nombreux chercheurs se soient penchés sur les résultats économiques moyens des immigrants ayant fait des études universitaires, bien peu ont étudié toute l’étendue de ces résultats. Combien affichent de très bons résultats économiques et combien en connaissent de très mauvais au cours de leurs premières années au Canada? Que réserve l’avenir sur le plan économique au Canada à ceux qui enregistrent de piètres résultats à leur arrivée? Arrivent-ils à rattraper avec le temps leurs homologues ayant initialement mieux réussi sur le plan économique?

Pour répondre à ces questions, la présente étude s’intéresse au lien entre les revenus enregistrés au cours des premières années suivant l’immigration et les revenus à plus long terme chez les immigrants ayant fait des études universitaires, en particulier parmi ceux qui ont connu un départ plus difficile sur le plan économique durant leurs premières années au Canada. L’étude porte plus précisément sur : 1) la répartition des demandeurs principaux de la catégorie économique ayant fait des études universitaires selon le niveau de revenu initial; 2) l’évolution de l’écart, au fil du temps, au chapitre des revenus entre les immigrants qui ont connu un lent départ et ceux qui ont connu un excellent départ, afin de déterminer s’il se referme ou non; 3) l’évolution de cette tendance au fil des cohortes, afin de déterminer si elle s’améliore ou non; 4) la mesure dans laquelle les caractéristiques liées aux antécédents des immigrants peuvent expliquer les écarts de revenus et la réduction possible de cet écart; 5) l’existence de divergences entre les catégories d’immigrants (c.-à-d. le Programme des travailleurs qualifiés (fédéral), les programmes provinciaux et la catégorie de l’expérience canadienne [CEC]) au chapitre des écarts de revenus et des trajectoires salariales.

Contexte

Modèle de sélection des immigrants fondé sur le capital humain

Le modèle de sélection des immigrants fondé sur le capital humain repose sur la prémisse selon laquelle les immigrants hautement qualifiés obtiennent de meilleurs résultats économiques et ont une plus grande capacité d’adaptation à l’évolution des conditions du marché du travail que leurs homologues moins qualifiés (paragraphe 12(1) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés de 2001). Le niveau de scolarité est l’un des principaux critères sur lesquels repose le potentiel d’établissement économique (Bonikowska et coll., 2015; Picot, Hou et Qiu, 2016). Les données probantes indiquent que le modèle canadien de sélection fondé sur le capital humain a été très efficace en ce qui concerne les résultats sur le marché du travail des demandeurs principaux de l’immigration économique (Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), 2019). Les études sur le sujet établissent un lien clair entre les immigrants hautement qualifiés, en particulier ceux qui ont un niveau de scolarité élevé et une bonne maîtrise de l’une des deux langues officielles, et la capacité d’intégrer le marché du travail canadien (p. ex. OCDE, 2017; Picot, Hou et Qiu, 2016).

Le modèle fondé sur le capital humain permet de prévoir des tendances cohérentes et prévisibles des comportements des immigrants sur le marché du travail au fil du temps. Les recherches montrent régulièrement que les résultats des immigrants sur le marché du travail s’améliorent avec le temps passé au Canada. Les résultats économiques moins favorables observés chez les immigrants au cours de leurs premières années au Canada sont principalement attribuables aux lacunes des nouveaux arrivants sur le plan du capital humain propre au marché du travail du pays (p. ex. connaissance limitée des langues officielles, renseignements limités sur le marché du travail, difficultés à faire reconnaître les titres étrangers) et à l’absence de réseaux professionnels et sociaux. Cela dit, au fil des années passées au Canada, les immigrants ajoutent du capital humain intérieur à leur capital humain étranger en acquérant des connaissances et des compétences sur le marché du travail local.

L’obtention d’un diplôme universitaire a toujours été un bon indicateur du capital humain et de la réussite sur le marché du travail chez les immigrants. L’un des principaux critères pour la sélection des immigrants au Canada est le niveau de scolarité. Mentionnons à ce sujet que le niveau de scolarité a augmenté beaucoup plus rapidement chez les nouveaux immigrants économiques qu’au sein de la population née au Canada au cours des dernières décennies. Le choix de ce critère repose sur la prémisse selon laquelle les immigrants qui ont un niveau de scolarité plus élevé possèdent les compétences nécessaires pour mieux s’intégrer dans l’économie du savoir du pays et s’adapter aux changements cycliques et structurels du marché du travail que leurs homologues qui ont un niveau de scolarité moins élevé. Cependant, l’avantage salarial chez les immigrants ayant fait des études universitaires a récemment changé. Picot, Hou et Qiu (2016) ont constaté que l’avantage salarial que possèdent les nouveaux immigrants titulaires d’un grade universitaire à leur arrivée au Canada par rapport à leurs homologues ayant fait au plus des études secondaires a considérablement diminué au cours des 30 dernières années. Cependant, ils ont aussi constaté que les revenus des immigrants ayant fait des études universitaires suivaient une trajectoire plus prononcée que celle des immigrants diplômés d’une école de métiers ou du secondaire, l’avantage salarial des immigrants très scolarisés augmentant significativement avec le temps passé au Canada. Cette tendance a été observée pour toutes les catégories d’immigrants et cohortes d’admission. Par conséquent, les auteurs ont laissé entendre que les résultats économiques à court terme des immigrants ne sont pas de bons prédicteurs des résultats à long terme, du moins en fonction du niveau de scolarité (p. ex. les résultats des immigrants très scolarisés continuent de s’améliorer à long terme)Note .

Lorsqu’on observe les résultats sur le marché du travail sous forme de moyenne, on ne voit pas qu’ils varient considérablement. Certains immigrants très scolarisés affichent de bons résultats initiaux sur le marché du travail, alors que d’autres gagnent beaucoup moins que la moyenne. Une étude a révélé qu’en 2016, 35 % des immigrants récents (ceux qui étaient arrivés au Canada de 1 à 10 ans auparavant) titulaires d’un grade universitaire occupaient des emplois qui n’exigeaient pas plus qu’un diplôme d’études secondaires, comparativement à 16 % des jeunes nés au Canada (Hou, Lu et Schimmele, 2020).

Qu’arrive-t-il lorsqu’un immigrant qui a fait des études universitaires ne réussit pas sur le marché du travail au cours de ses premières années au pays? Il existe deux grandes écoles de pensée sur les trajectoires salariales à long terme qui peuvent découler de cette situation : 1) rattrapage des revenus; ou 2) des résultats toujours inférieurs en matière de revenus en raison de la stigmatisation découlant d’une mauvaise expérience initiale sur le marché du travail ou de l’hétérogénéité non observée, c.-à-d. que des caractéristiques non observées qui contribuent aux mauvais résultats initiaux ont également une incidence négative sur les résultats à long terme.

D’une part, des chercheurs avancent que la capacité d’adaptation aux besoins changeants du marché du travail favoriserait une croissance rapide des revenus. Les ensembles de compétences liées aux connaissances approfondies dans un domaine, les compétences professionnelles ou transférables et les compétences générales qu’acquièrent les immigrants au fil des années qu’ils passent au Canada peuvent contribuer à leur réussite économique. De plus, on s’attend à ce que l’enseignement supérieur permette d’acquérir des compétences souvent appelées compétences transversales (OCDE, 2017), notamment la littératie et la numératie, la résolution de problèmes, le raisonnement analytique et la pensée critique, ainsi que des compétences sociales et émotionnelles telles que la communication, le travail d’équipe, la persévérance, le sens de l’initiative, le leadership et l’organisation. Il s’agit là de compétences également essentielles à la réussite des particuliers sur le marché du travail. Ces compétences peuvent s’améliorer chez les immigrants au fil des années passées dans le pays d’accueil, ce qui peut permettre un certain rattrapage parmi les immigrants qui ont fait des études universitaires et qui ont connu un départ plus lent en matière de revenus sur le marché du travail.

D’autre part, bon nombre d’études laissent entendre que les premières expériences d’emploi des immigrants qualifiés peuvent avoir des répercussions à long terme sur leurs résultats sur le marché du travail. Ce raisonnement repose sur le principe selon lequel plus le premier emploi est exigeant, plus il permet d’accumuler des compétences et de l’expérience. Grâce à ces qualités supplémentaires, la personne sera plus à même de décrocher un deuxième emploi mieux rémunéré, lequel, à son tour, augmentera les chances de la personne de trouver un troisième emploi encore mieux rémunéré, et ainsi de suite (Belfi et coll., 2021). Belfi et coll. (2021, p. 5) affirment que [traduction] « la difficulté à trouver un premier emploi peut entraîner un effet de “stigmatisation” susceptible d’envoyer un message négatif aux futurs employeurs. En effet, certaines normes définissent la façon dont la carrière d’une personne devrait évoluer au fil du temps et les réalisations attendues selon l’étape de la carrière. Ainsi, plus une personne s’éloigne du cheminement de carrière “normal”, plus elle est susceptible d’être perçue de façon défavorable par de potentiels futurs employeurs (Verbruggen et coll., 2015). » Le principe de la dépendance vis-à-vis du cheminementNote  met en évidence l’importance des expériences initiales sur le marché du travail pour les résultats économiques à long terme, même chez les personnes ayant fait des études supérieures. Il est toutefois difficile d’établir le bien-fondé de ce principe de façon empiriqueNote .

Une étude récente a produit des résultats variables sur le lien entre une mauvaise première expérience sur le marché du travail dans le pays d’accueil et les revenus à long terme des immigrants. Zhang et Banerjee (2021) ont constaté que le travail à temps partiel était négativement associé aux trajectoires salariales à long terme, en particulier chez les immigrantes, bien qu’ils n’aient pas été en mesure d’établir une distinction entre le travail à temps partiel volontaire et involontaire. Les auteurs ont également constaté que les immigrants masculins qui étaient en inadéquation professionnelleNote  à moyen terme ont également accusé un retard à long terme au chapitre salarial. Cependant, les mois de chômage et l’exercice d’une activité professionnelle en dehors de l’activité principale durant les premières années dans le pays d’accueil n’avaient que peu d’incidence sur les résultats économiques à long terme. En fonction des résultats variables, les auteurs ont fait valoir que les difficultés initiales des immigrants concernant le travail à temps partiel ont eu un certain effet sur les résultats à long termeNote , bien que d’autres facteurs n’aient eu que peu ou pas d’effet.

Enfin, il se peut que des caractéristiques qui ne sont pas saisies ni observées dans le système de sélection, comme la motivation, les compétences en relations interpersonnelles, la qualité de l’enseignement et d’autres facteurs non observés qui ont une incidence sur les revenus, contribuent à de faibles revenus au départ, ainsi qu’à la persistance de résultats inférieurs en matière de revenus à plus long terme.

Transférabilité des titres scolaires étrangers

Les immigrants qui ont un niveau de scolarité élevé ont tendance à avoir plus de facilité à s’intégrer au marché du travail. Néanmoins, il semble qu’un vaste éventail d’études et d’expérience de travail acquises à l’étranger ne soient pas transférables au Canada, en particulier pour les immigrants provenant de pays en développement (Li et Sweetman, 2014; Picot, Hou et Crossman, 2022). Un certain nombre de raisons peuvent expliquer la non-transférabilité de la scolarisation à l’étranger. Premièrement, elle peut être de moindre qualité que l’enseignement reçu au Canada. Deuxièmement, les employeurs canadiens peuvent hésiter à prendre des risques et avoir une connaissance insuffisante des titres scolaires étrangers, ce qui fait qu’ils ne tiennent pas complètement compte de ces titres. De plus, la transférabilité des titres scolaires peut être gravement limitée par un manque de connaissance de l’une ou l’autre des langues officielles (voir p. ex. Goldmann et coll., 2011; Ferrer et coll., 2006). Troisièmement, les diplômés immigrants peuvent faire l’objet de discrimination en raison de facteurs sociodémographiques (Oreopoulos, 2011). Quatrièmement, les compétences des diplômés universitaires peuvent varier considérablement, même lorsqu’ils ont reçu un enseignement de qualité équivalente.

Pour régler les problèmes de reconnaissance des titres étrangers chez les immigrants qualifiés, le gouvernement du Canada a lancé plusieurs initiatives au cours des deux dernières décennies. Banerjee et coll. (2021, p. 359) décrivent ces initiatives, qui [traduction] « incluent des règlements visant à octroyer un accès équitable aux organismes de certification professionnelle, à la formation relais, aux programmes de mentorat et aux programmes de formation linguistique axés sur l’emploi (Reitz, Curtis et Elrick, 2014). En plus de ces efforts, le Canada a créé divers nouveaux volets d’immigration économique au fil des ans pour tenter de régler le problème de la dévalorisation des compétences, notamment la catégorie de l’expérience canadienne, le Programme des candidats des provinces et le système d’Entrée express, dont l’objectif commun est d’améliorer la sélection des immigrants de sorte qu’elle corresponde davantage aux besoins réels des employeurs. »

En 2013, le Canada a instauré l’exigence, pour les demandeurs de la catégorie du Programme des travailleurs qualifiés (fédéral), de se soumettre à une évaluation des diplômes d’études (EDE) afin de s’assurer que leur titre scolaire étranger est authentique et équivaut à un titre scolaire canadien. Banerjee et coll. (2021) ont constaté dans leur étude que cette exigence est positivement corrélée aux taux d’emploi et aux revenus des travailleurs qualifiés immigrants durant leurs premières années au Canada, tant chez les hommes que chez les femmes. Toutefois, cet effet se limitait à ceux qui n’avaient pas d’expérience de travail antérieure au Canada. L’étude a également permis de révéler que, même lorsqu’on tenait compte de l’exigence relative à l’EDE, des différences persistaient au chapitre des revenus parmi les immigrants provenant de diverses régions d’origine.

De plus, la proportion d’immigrants économiques ayant fait des études au Canada est à la hausse. Au cours de la période de 2000 à 2019, la proportion de nouveaux demandeurs principaux de l’immigration économique ayant étudié au Canada s’est accrue pour passer de 6 % à 38 % (Crossman et Hou, 2022). Comparativement aux immigrants qui n’avaient pas étudié au Canada, ceux qui avaient une expérience d’études au pays avaient tendance à être plus jeunes, plus scolarisés, plus susceptibles de parler une langue officielle et beaucoup plus susceptibles d’avoir enregistré des revenus au Canada avant leur admission au pays (Crossman et Hou, 2022). Crossman et Hou (2022) ont constaté que les avantages associés à la possession d’une expérience d’études au Canada augmentaient à long terme et que, 10 ans après l’immigration, les immigrants de la composante économique qui avaient au moins un an d’expérience d’études au Canada gagnaient plus que ceux qui n’avaient pas acquis une telle expérience.

Dans l’ensemble, le fait pour une personne d’avoir effectué des études supérieures devrait jouer un rôle clé dans son perfectionnement (l’amélioration des compétences existantes) et son recyclage (l’acquisition de nouvelles compétences) tout au long de sa vie afin d’améliorer son employabilité. En effet, on considère que les immigrants qui ont fait des études universitaires sont plus à même de s’adapter aux demandes changeantes du marché du travail. Parallèlement, les premières expériences sur le marché du travail des immigrants ayant fait des études universitaires varient, et les résultats initiaux peuvent avoir une incidence sur les résultats économique à plus long terme de ces personnes. Cette situation peut découler en partie de la transférabilité des titres scolaires étrangers, ou encore d’autres facteurs, y compris l’hétérogénéité des compétences non observées des travailleurs. La combinaison de ces facteurs nous amène aux questions suivantes : Qu’arrive-t-il aux immigrants qui ont fait des études universitaires et qui connaissent un lent départ sur le plan économique après leur arrivée au pays? Dans quelle mesure leurs résultats économiques initiaux importent-ils?

Données, mesures et méthodes

Données

La présente étude repose sur la Base de données longitudinales sur l’immigration (BDIM), qui combine les enregistrements du Fichier des immigrants reçus et les renseignements fiscaux annuels des immigrants (Statistique Canada, 2021). La base de données comprend les données des immigrants qui ont produit au moins une déclaration de revenus depuis 1982. Les enregistrements du Fichier des immigrants reçus contiennent des données sur les caractéristiques des immigrants au moment de leur admission, y compris leur niveau de scolarité, leur âge, leur catégorie d’admission (p. ex. la catégorie économique, la catégorie du regroupement familial et la catégorie des réfugiés), leur pays d’origine et leur capacité autodéclarée de parler une langue officielle. Les dossiers fiscaux fournissent des renseignements sur le revenu annuel et le lieu de résidence. Les données de la BDIM qui sont utilisées dans le cadre de l’étude couvrent les renseignements sur l’admission jusqu’à 2020 et les renseignements fiscaux jusqu’à 2019.

L’analyse a porté sur les demandeurs principaux de la catégorie économique qui étaient âgés de 20 à 44 ans lorsqu’ils ont immigré au Canada, et qui sont arrivés au pays entre 1990 et 2014. L’année 2014 a été sélectionnée comme dernière année d’arrivée de sorte à permettre l’étude des trajectoires salariales chez les immigrants pendant les cinq années suivant leur arrivée au Canada, à tout le moins. La limite d’âge supérieure a été choisie parce que l’analyse a permis de retrouver les trajectoires salariales des immigrants jusqu’à 20 ans après leur arrivée au Canada, et certains immigrants approcheraient alors l’âge normal de la retraite. Environ 87 % de tous les demandeurs principaux de la catégorie économique qui sont arrivés au cours de la période visée par l’étude étaient âgés de 20 à 44 ans au moment de leur admission au Canada. L’analyse a été de nouveau limitée aux immigrants qui ont produit une déclaration de revenus au cours des deux premières années suivant leur arrivée au Canada, puisque ce sont les revenus enregistrés lors de ces deux années qui ont été utilisés pour définir le niveau des revenus initiaux des immigrants. Ainsi, environ 4 % des demandeurs principaux de la catégorie économique se situant dans la fourchette d’âge et dans la période d’arrivée sélectionnée ont été exclus de l’analyse parce qu’ils n’ont pas produit de déclaration de revenus au cours des deux premières années suivant leur arrivée au pays, même s’ils l’ont fait pour les années suivantes. L’analyse des revenus au cours des années suivantes n’a porté que sur les immigrants qui ont déclaré avoir gagné au moins 500 $ (en dollars constants de 2019) au cours d’une année d’imposition donnée.

Mesures

La principale variable utilisée dans la présente étude était une combinaison de sept catégories de niveaux de scolarité et de niveaux de revenus initiaux. Cette variable a d’abord servi à classer les immigrants possédant au moins un baccalauréat à leur arrivée au Canada en cinq groupes selon leurs revenus d’emploi annuels maximums au cours des deux premières années suivant l’immigration, à savoir : aucun revenu au cours des deux premières années; revenus les moins élevés (c.-à-d. inférieurs ou égaux à la moitié du revenu médian nationalNote ); faibles revenus (c.-à-d. supérieurs à la moitié du revenu médian national, mais inférieurs ou égaux au revenu médian national); revenus élevés (c.-à-d. supérieurs au revenu médian national, mais inférieurs ou égaux au double du revenu médian national); revenus les plus élevés (c.-à-d. supérieurs au double du revenu médian national). Par la suite, les immigrants sans grade universitaire ont été répartis en deux groupes : diplôme d’études secondaires ou niveau de scolarité moins élevé; diplôme d’études postsecondaires non universitairesNote .

La variable dépendante était les revenus annuels (salaires et traitements plus revenus nets provenant d’un travail autonome) en dollars constants de 2019. La transformation logarithmique des revenus annuels a été utilisée dans l’analyse multivariéeNote .

Plusieurs variables de contrôle ont été utilisées dans la présente étude pour comparer les trajectoires salariales des immigrants selon leur niveau de revenu initial, y compris les cohortes par année d’admission, le sexe, l’âge au moment de l’admission, la connaissance des langues officielles au moment de l’admission, les niveaux de revenus enregistrés au Canada avant l’admission, le nombre d’années d’études effectuées au Canada avant l’admission, la région d’origine, la fréquentation d’un établissement d’enseignement après l’admission et la province de résidence. Les cohortes d’admission ont été codées en groupes de cinq ans dans les modèles pour les immigrants qui sont arrivés au Canada entre 1990 et 2014; en groupes de deux ans pour l’analyse des sous-groupes pour les immigrants arrivés dans les années 1990 ou 2000, et en groupes d’un an pour les immigrants arrivés de 2010 à 2014. Les immigrants ont été classés en cinq groupes de cinq années selon l’âge qu’ils avaient au moment de leur admission au pays. La connaissance des langues officielles au moment de l’admission a été déterminée en fonction de la combinaison de la langue maternelle et de la connaissance autodéclarée de l’une ou l’autre des langues officielles : anglais comme langue maternelle; français comme langue maternelle; autre langue maternelle, mais parle l’anglais; autre langue maternelle, mais parle le français; autre langue maternelle, mais parle l’anglais et le français; ne parle ni l’anglais ni le français.

Le niveau des revenus enregistrés au Canada avant l’admission au pays a été déterminé en fonction du revenu annuel maximum d’un particulier enregistré au Canada au cours des 10 années précédant l’obtention de la résidence permanente. Cette variable a été codée selon cinq niveaux par rapport au revenu d’emploi médian national (mesuré au cours de l’année précédant l’admission au pays) : aucun revenu au Canada avant l’admission au pays; supérieur à zéro et inférieur ou égal à la moitié du revenu médian national; supérieur à la moitié du revenu médian national et inférieur ou égal au revenu médian national; supérieur au revenu médian national et inférieur ou égal au double du revenu médian national; supérieur au double du revenu médian national. Le nombre d’années d’expérience d’études effectuées au Canada avant l’admission a été calculé selon la durée totale des permis d’études valides dont la personne disposait avant d’obtenir le statut de résident permanent.

Les régions d’origine ont été codées en 14 catégories, à savoir les États-Unis, l’Amérique centrale, les Caraïbes, l’Amérique du Sud, l’Europe du Nord, l’Europe de l’Ouest, l’Europe du Sud, l’Europe de l’Est, l’Afrique, l’Asie du Sud, l’Asie du Sud-Est, l’Asie de l’Est, l’Asie de l’Ouest et les autres régions. La fréquentation d’un établissement d’enseignement après l’admission a été mesurée en mois d’études postsecondaires à temps plein, d’après les crédits d’impôt pour frais de scolarité.

Méthodes

Un tableau descriptif a d’abord été créé de sorte à permettre l’analyse de la répartition du niveau de revenu initial des principaux demandeurs de la catégorie économique ayant fait des études universitaires, selon le sexe et la cohorte d’admission (années 1990, années 2000 et 2010 à 2014), et par programme d’admission (Programme des travailleurs qualifiés (fédéral), programmes provinciauxNote  et CEC) pour ce qui est de la dernière cohorte (de 2010 à 2014)Note . Les caractéristiques démographiques des immigrants selon le niveau de revenu initial ont ensuite été présentées.

Dans les analyses multivariées, un modèle de régression des moindres carrés ordinaires a été élaboré pour estimer les trajectoires salariales des immigrants à partir de la troisième année suivant l’immigration (puisque le niveau de revenu initial a été déterminé à partir des revenus des deux premières années). Le modèle contient la variable de niveau de revenu initial à sept catégories en fonction du niveau de scolarité et du niveau de revenu initial, du nombre d’années écoulées depuis l’immigration (en année individuelle), l’interaction entre le niveau de revenu initial et le nombre d’années écoulées depuis l’immigration, et les variables de contrôle sélectionnées. Les trajectoires salariales estimées selon le niveau de revenu initial ont été comparées aux trajectoires correspondantes observées. Les différences entre les trajectoires salariales observées et estimées étaient attribuables aux différences entre les groupes dans les variables de contrôle. Le modèle de régression a été estimé pour tous les demandeurs principaux de la catégorie économique qui sont arrivés au pays entre 1990 et 2014; pour les hommes et les femmes séparément; pour les trois grandes cohortes séparément; et séparément pour le Programme des travailleurs qualifiés (fédéral), les programmes provinciaux et la CEC dans le cas de la cohorte de 2010 à 2014.

Résultats

Résultats au cours des deux premières années au Canada

Tout d’abord, l’analyse présente la part de tous les immigrants économiques (demandeurs principaux, ainsi que conjoints et personnes à charge) qui ont eu de mauvais résultats économiques au cours des deux premières années suivant leur arrivée. L’objectif est de brosser un portrait global de la répartition des revenus initiaux entre tous les immigrants économiques et d’établir un certain contexte pour l’analyse subséquente de demandeurs principaux. De tous les immigrants économiques âgés de 20 à 44 ans qui ont été admis au pays entre 1990 et 2014, environ la moitié n’ont pas enregistré de revenu (19 %) ou se trouvaient dans la catégorie des revenus les plus faibles (28 %) au cours de leurs deux premières années au Canada (tableau 1). Ce dernier groupe comprend les personnes qui ont gagné jusqu’à la moitié du revenu médian annuel national. Sans surprise, la proportion des immigrants n’ayant pas travaillé au cours des deux premières années différait significativement entre les demandeurs principaux (12 %) et leurs conjoints et personnes à charge (31 %). Dans l’ensemble, un peu plus du tiers des demandeurs principaux n’avaient pas de revenu, ou se trouvaient dans la catégorie de revenus les plus faibles, comparativement aux deux tiers des conjoints et des personnes à charge. Les immigrants économiques moins scolarisés avaient tendance à avoir des résultats économiques moins favorables au cours des deux premières années : 54 % des diplômés du secondaire n’avaient pas de revenu, ou se trouvaient dans la catégorie des revenus les plus faibles, comparativement à 43 % des diplômés universitaires (tableau 1).


Tableau 1
Répartition des revenus enregistrés au cours des deux premières années suivant l’immigration parmi les immigrants économiques âgés de 20 à 44 ans au moment de l’admission qui sont arrivés au pays entre 1990 et 2014, selon le statut de demandeur et le niveau de scolarité
Sommaire du tableau
Le tableau montre les résultats de Répartition des revenus enregistrés au cours des deux premières années suivant l’immigration parmi les immigrants économiques âgés de 20 à 44 ans au moment de l’admission qui sont arrivés au pays entre 1990 et 2014 Nombre d’observations, Niveau de revenu au cours des deux premières années suivant l’immigration, Aucun revenu, Revenus les plus faibles, Faibles revenus, Revenus élevés et Revenus les plus élevés, calculées selon nombre et pourcentage unités de mesure (figurant comme en-tête de colonne).
Nombre d’observations Niveau de revenu au cours des deux premières années suivant l’immigration
Aucun revenu Revenus les plus faibles Faibles revenus Revenus élevés Revenus les plus élevés
nombre pourcentage
Tous les immigrants économiques
Total 1 702 000 19,4 27,8 26,0 19,6 7,3
Sans diplôme d’études secondaires 263 300 27,9 30,6 27,4 12,3 1,9
Diplôme d’études secondaires 126 600 21,4 32,9 27,1 15,5 3,2
Certificat d’une école de métiers 121 000 18,6 27,4 29,2 20,2 4,7
Diplôme non universitaire 201 200 17,9 29,0 29,2 19,3 4,5
Baccalauréat ou diplôme de niveau supérieur 989 900 17,2 26,2 24,4 22,1 10,1
Demandeurs principaux
Total 1 049 400 12,0 24,0 28,3 25,3 10,5
Sans diplôme d’études secondaires 109 900 15,1 25,6 35,1 20,4 3,7
Diplôme d’études secondaires 55 200 12,3 26,1 32,0 23,7 5,9
Certificat d’une école de métiers 74 900 10,9 23,0 32,6 26,6 6,9
Diplôme non universitaire 124 800 11,0 24,7 33,0 24,9 6,5
Baccalauréat ou diplôme de niveau supérieur 684 600 11,8 23,5 25,5 26,1 13,0
Conjoints et personnes à charge
Total 652 600 31,2 33,9 22,3 10,5 2,1
Sans diplôme d’études secondaires 153 400 37,1 34,1 21,8 6,4 0,6
Diplôme d’études secondaires 71 400 28,4 38,1 23,3 9,1 1,1
Certificat d’une école de métiers 46 100 31,1 34,5 23,6 9,8 1,0
Diplôme non universitaire 76 400 29,3 36,1 23,0 10,2 1,4
Baccalauréat ou diplôme de niveau supérieur 305 300 29,4 32,2 21,9 13,1 3,4

Pour évaluer la variation au fil du temps, les demandeurs principaux ont été divisés en trois cohortes d’admission : ceux qui sont arrivés dans les années 1990; ceux qui sont arrivés dans les années 2000; ceux qui sont arrivés de 2010 à 2014. Dans l’ensemble, les résultats initiaux des demandeurs principaux ayant fait des études universitaires se sont légèrement améliorés au fil du tempsNote . La proportion de demandeurs principaux sans emploi au cours des deux premières années a légèrement diminué au fil des trois cohortes, passant de 14 % pour la cohorte des années 1990 à 10 % pour la cohorte du début des années 2010 (tableau 2). Il n’y avait pas de tendance perceptible quant à la proportion de demandeurs principaux de la catégorie des revenus initiaux les plus faibles.


Tableau 2
Répartition des revenus enregistrés au cours des deux premières années suivant l’immigration parmi les demandeurs principaux de la catégorie économique ayant fait des études universitaires qui étaient âgés de 20 à 44 ans au moment de l’admission et qui sont arrivés au pays entre 1990 et 2014, selon le sexe et la cohorte d’admission
Sommaire du tableau
Le tableau montre les résultats de Répartition des revenus enregistrés au cours des deux premières années suivant l’immigration parmi les demandeurs principaux de la catégorie économique ayant fait des études universitaires qui étaient âgés de 20 à 44 ans au moment de l’admission et qui sont arrivés au pays entre 1990 et 2014 Nombre d’observations, Niveau de revenu au cours des deux premières années suivant l’immigration, Aucun revenu, Revenus les plus faibles, Faibles revenus, Revenus élevés et Revenus les plus élevés, calculées selon nombre et pourcentage unités de mesure (figurant comme en-tête de colonne).
Nombre d’observations Niveau de revenu au cours des deux premières années suivant l’immigration
Aucun revenu Revenus les plus faibles Faibles revenus Revenus élevés Revenus les plus élevés
nombre pourcentage
Tous 684 600 11,8 23,5 25,5 26,1 13,0
Genre
Hommes 446 000 11,0 21,8 23,1 27,8 16,4
Femmes 238 600 13,4 26,6 30,1 23,1 6,9
Cohortes d’admission
1990 à 1999 155 100 13,7 21,2 21,1 27,2 16,8
2000 à 2009 333 800 11,9 25,4 26,2 25,2 11,4
2010 à 2014 195 700 10,2 22,0 28,0 27,0 12,9
Programme d’admission dans la cohorte de 2010 à 2014
Programme des travailleurs qualifiés (fédéral) 62 700 14,2 24,6 23,8 24,2 13,2
Programmes provinciaux 93 100 10,3 23,2 27,8 27,4 11,3
Catégorie de l’expérience canadienne 19 300 3,4 8,7 16,1 39,2 32,6
Autres catégories économiques 20 600 3,6 20,9 52,4 21,9 1,3

Les différences au chapitre des résultats initiaux entre les catégories d’immigrants ont été évaluées grâce à la cohorte de 2010 à 2014. Les résultats initiaux étaient les moins favorables chez les travailleurs qualifiés du volet fédéral (39 % n’avaient aucun revenu ou se trouvaient dans la catégorie de revenus les plus faibles). Ils s’amélioraient légèrement parmi les candidats des provinces (34 %), et étaient les meilleurs chez les immigrants de la CEC (12 %; tableau 2)Note .

Fait intéressant, une proportion importante de demandeurs principaux a obtenu de très bons résultats économiques au cours des deux premières années suivant leur arrivée, gagnant plus de deux fois le revenu médian annuel national (catégorie des revenus les plus élevés). Toutefois, la part avec de tels résultats a diminué entre la cohorte des années 1990 et la cohorte du début des années 2010 pour passer de 17 % à 13 % (tableau 2). La CEC a généré la plus grande part des revenus les plus élevés (un tiers), suivie du Programme des travailleurs qualifiés (fédéral) (13 %) et des programmes provinciaux (11 %).

Les demandeurs principaux de la catégorie économique dont les revenus initiaux étaient faibles différaient à plusieurs égards de ceux qui avaient connu de très bons résultats initiaux (tableau 3). En effet, les personnes qui n’avaient aucun revenu, ou qui se trouvaient dans la catégorie de revenus les plus faibles avaient tendance à être plus âgées, plus susceptibles de ne parler ni l’anglais ni le français, et moins susceptibles d’avoir l’anglais ou le français comme langue maternelle. La plus grande différence entre les deux groupes était liée à l’expérience de travail au Canada avant l’admission. La proportion de demandeurs principaux possédant une telle expérience était relativement faible chez ceux qui n’avaient aucun revenu (8 %) ou qui se trouvaient dans la catégorie de revenus les plus faibles (17 %), comparativement à une proportion beaucoup plus importante chez ceux qui avaient des revenus plus élevés (33 %) et chez ceux qui se trouvaient dans la catégorie des revenus les plus élevés (49 %). Les immigrants dont les revenus initiaux étaient moins élevés étaient également moins susceptibles d’avoir de l’expérience d’études au Canada. Par ailleurs, le pays d’origine jouait également un rôle; les demandeurs principaux qui figuraient dans la catégorie des revenus initiaux les plus élevés étaient plus susceptibles de venir de l’Europe de l’Ouest et de l’Europe du Nord et moins susceptibles de venir d’Afrique, de l’Asie de l’Est et de l’Asie de l’Ouest (tableau 3).


Tableau 3
Caractéristiques sociodémographiques des demandeurs principaux de la catégorie économique ayant fait des études universitaires qui étaient âgés de 20 à 44 ans au moment de l’admission et qui sont arrivés au pays entre 1990 et 2014, selon le niveau de revenu initial
Sommaire du tableau
Le tableau montre les résultats de Caractéristiques sociodémographiques des demandeurs principaux de la catégorie économique ayant fait des études universitaires qui étaient âgés de 20 à 44 ans au moment de l’admission et qui sont arrivés au pays entre 1990 et 2014 Niveau de revenu au cours des deux premières années suivant l’immigration, Aucun revenu, Revenus les plus faibles, Faibles revenus, Revenus élevés et Revenus les plus élevés, calculées selon pourcentage et mois unités de mesure (figurant comme en-tête de colonne).
Niveau de revenu au cours des deux premières années suivant l’immigration
Aucun revenu Revenus les plus faibles Faibles revenus Revenus élevés Revenus les plus élevés
pourcentage
Hommes 59,0 60,1 58,8 69,2 81,6
Âge au moment de l’immigration
20 à 24 ans 1,1 2,1 2,5 3,5 2,1
25 à 29 ans 16,8 23,7 25,7 31,1 26,0
30 à 34 ans 31,6 33,0 32,3 31,9 33,6
35 à 39 ans 29,7 25,3 23,9 21,4 24,3
40 à 44 ans 20,9 16,0 15,5 12,1 14,0
Niveau de scolarité au moment de l’immigration
Baccalauréat 65,8 67,7 74,2 69,9 57,5
Maîtrise 28,6 28,7 23,3 25,6 31,2
Doctorat 5,6 3,7 2,5 4,5 11,3
Aptitudes autodéclarées en matière de langues officielles
Ne parle ni l’anglais ni le français 15,4 15,0 9,7 7,2 4,7
Autre langue maternelle, mais parle le français et l'anglais 21,0 18,6 14,0 12,4 8,8
Autre langue maternelle, mais parle le français 6,2 4,7 2,9 1,6 0,6
Autre langue maternelle, mais parle l’anglais 51,8 54,7 65,1 64,8 61,0
Français comme langue maternelle 2,4 4,2 4,5 6,4 5,5
Anglais comme langue maternelle 3,4 2,9 3,8 7,6 19,3
Possède une expérience de travail au Canada 7,6 17,2 26,4 32,9 49,1
A fait des études au Canada 8,2 13,4 12,9 20,2 18,0
Région d’origine
Amérique centrale 0,9 0,9 1,0 1,5 1,8
Caraïbes 0,9 1,3 1,3 1,4 1,1
Amérique du Sud 3,8 3,4 2,9 3,8 4,9
Europe de l’Ouest 1,3 2,1 2,7 5,5 7,3
Europe du Nord 3,3 2,8 2,3 3,8 9,9
Europe du Sud 0,7 0,7 0,9 1,1 1,2
Europe de l’Est 8,5 9,2 9,1 10,6 9,2
Afrique 15,9 13,9 10,7 9,1 9,1
Asie du Sud 13,1 17,2 19,5 19,7 20,1
Asie du Sud-Est 3,6 9,1 24,9 18,6 7,0
Asie de l’Est 29,6 26,8 17,3 16,4 14,2
Asie de l’Ouest 16,9 11,8 6,6 6,6 7,4
Autres régions 1,0 0,5 0,4 0,7 1,8
États-Unis 0,4 0,4 0,4 1,2 4,8
mois
Mois d’études postsecondaires au cours des deux premières années suivant l’immigration 3,2 4,2 2,0 1,0 0,5

Les personnes qui ont obtenu de faibles résultats initiaux ont-elles rattrapé celles qui ont connu un meilleur départ?

Résultats non corrigés

Les demandeurs principaux de la catégorie économique qui ont obtenu de mauvais résultats économiques à leur départ réussissent-ils à rattraper partiellement ou entièrement leurs homologues qui ont connu des résultats relativement meilleurs en début de parcours? Pour répondre à cette question, on a fait un suivi longitudinal des revenus médians de trois cohortes d’admission distinctes (les cohortes des années 1990, des années 2000 et du début des années 2010) jusqu’en 2019. On a déterminé les résultats initiaux sur le plan économique des demandeurs principaux de la catégorie économique ayant fait des études universitaires en fonction des revenus qu’ils ont enregistrés au cours des deux premières années suivant l’immigration. Cinq catégories de revenus initiaux, allant d’aucun revenu aux revenus les plus élevés (voir la section « Mesures » pour en savoir plus), ont été utilisées. De plus, on a fait le suivi des revenus médians de deux autres groupes, à savoir les demandeurs principaux de la catégorie économique qui détenaient un certificat d’études postsecondaires non universitaires et ceux qui avaient un diplôme d’études secondaires ou un niveau de scolarité inférieur au moment de leur admission au Canada.

On a d’abord analysé tous les demandeurs principaux de la catégorie économique ayant immigré au Canada entre 1990 et 2014. Au cours de la troisième année suivant l’immigration, les revenus médians étaient les plus faibles chez les demandeurs principaux ayant fait des études universitaires qui n’avaient pas enregistré de revenu ou qui se trouvaient dans la catégorie des revenus les plus faibles (jusqu’à la moitié du revenu médian national) au cours des deux premières annéesNote . Les revenus médians de ce groupe étaient également inférieurs à ceux des demandeurs principaux admis qui possédaient un diplôme d’études secondaires ou un niveau de scolarité inférieur, ou un certificat d’études postsecondaires non universitaires (graphique 1). Toutefois, les revenus des demandeurs principaux ayant fait des études universitaires qui n’avaient aucun revenu initial ou qui se trouvaient dans la catégorie des revenus initiaux les plus faibles suivaient une trajectoire plus prononcée que celle des revenus des demandeurs principaux qui n’avaient pas fait d’études universitaires. Ainsi, même les immigrants ayant fait des études universitaires qui figuraient dans la catégorie des revenus initiaux les plus faibles semblaient mieux s’adapter aux conditions du marché du travail à long terme que les immigrants moins scolarisés. Environ huit ans après l’immigration, le revenu médian des immigrants ayant fait des études universitaires et dont les revenus initiaux étaient faibles dépassait celui des immigrants qui avaient un diplôme d’études secondaires ou un niveau de scolarité inférieur.

Graphique 1 : Revenus médians des demandeurs principaux de la catégorie économique âgés de 20 à 44 ans au moment de l’admission qui sont arrivés au pays entre 1990 et 2014, selon le niveau de revenu initial et le nombre d’années écoulées depuis l’immigration

Tableau de données du graphique 1 
Tableau de données du graphique 1
Sommaire du tableau
Le tableau montre les résultats de Tableau de données du graphique 1. Les données sont présentées selon Nombre d’années écoulées depuis l’immigration (titres de rangée) et Revenus les plus élevés, Revenus élevés, Faibles revenus, Revenus les plus faibles, Aucun revenu, Diplôme non universitaire et Études secondaires ou moins, calculées selon dollars de 2019 unités de mesure (figurant comme en-tête de colonne).
Nombre d’années écoulées depuis l’immigration Revenus les plus élevés Revenus élevés Faibles revenus Revenus les plus faibles Aucun revenu Diplôme non universitaire Études secondaires ou moins
dollars de 2019
3 104 939 56 720 31 974 16 174 11 811 32 969 28 747
4 108 081 59 785 35 073 21 608 18 886 35 224 30 723
5 111 001 62 686 37 968 26 531 23 515 37 445 32 418
6 113 182 65 232 40 551 30 645 27 773 39 082 33 524
7 115 179 67 694 42 938 34 273 30 642 40 537 34 546
8 117 068 70 128 44 775 37 008 33 278 41 743 35 341
9 119 021 72 168 46 589 39 344 35 362 42 739 35 787
10 120 122 74 034 48 301 41 450 37 291 43 597 36 234
11 120 899 75 687 49 935 43 294 38 327 44 280 36 611
12 121 144 77 532 51 525 44 883 39 753 44 697 37 014
13 121 729 78 905 52 693 46 518 40 603 45 299 37 285
14 122 470 80 315 54 159 48 242 41 213 45 787 37 718
15 123 184 81 376 55 255 49 912 41 961 46 263 38 215
16 123 200 82 210 56 102 50 681 42 123 46 701 38 272
17 123 722 82 631 56 612 50 878 42 035 46 922 38 443
18 123 234 82 576 56 192 50 798 41 490 47 027 38 574
19 123 276 82 905 55 520 50 368 40 002 46 993 38 587
20 124 178 83 424 55 692 50 229 39 922 46 721 38 878

La présente étude porte principalement sur l’écart entre les demandeurs principaux qui ont fait des études universitaires et dont les revenus au cours de leurs deux premières années au pays étaient inexistants ou faibles, et leurs homologues qui ont enregistré des revenus élevés au cours de la même période. L’écart entre ces groupes au chapitre du revenu médian (sous forme de ratio) s’est rétréci considérablement entre la troisième et la septième année après l’immigration, pour ensuite demeurer plus ou moins stable (tableau 4).


Tableau 4
Revenus médians et écarts de revenus des demandeurs principaux ayant fait des études universitaires qui étaient âgés de 20 à 44 ans au moment de l’admission, selon la cohorte d’admission
Sommaire du tableau
Le tableau montre les résultats de Revenus médians et écarts de revenus des demandeurs principaux ayant fait des études universitaires qui étaient âgés de 20 à 44 ans au moment de l’admission. Les données sont présentées selon Cohorte d’admission et nombre d’années écoulées depuis l’admission (titres de rangée) et Revenu médian selon le niveau de revenu initial, Différence en ratio, Différence en chiffres, Aucun revenu, Revenus les plus faibles, Faibles revenus, Revenus élevés, Revenus les plus élevés, Différence entre revenus élevés et aucun revenu et Différence entre revenus élevés et revenus les plus faibles, calculées selon dollars de 2019 et pourcentage unités de mesure (figurant comme en-tête de colonne).
Cohorte d’admission et nombre d’années écoulées depuis l’admission Revenu médian selon le niveau de revenu initial Différence en ratio Différence en chiffres
Aucun revenu Revenus les plus faibles Faibles revenus Revenus élevés Revenus les plus élevés Différence entre revenus élevés et aucun revenu Différence entre revenus élevés et revenus les plus faibles Différence entre revenus élevés et aucun revenu Différence entre revenus élevés et revenus les plus faibles
dollars de 2019 pourcentage dollars de 2019
1990 à 2014
3 ans 11 800 16 200 32 000 56 700 104 900 4,8 3,5 44 900 40 500
7 ans 30 600 34 300 42 900 67 700 115 200 2,2 2,0 37 100 33 400
15 ans 42 000 49 900 55 300 81 400 123 200 1,9 1,6 39 400 31 500
20 ans 39 900 50 200 55 700 83 400 124 200 2,1 1,7 43 500 33 200
1990 à 1999
3 ans 12 000 15 200 29 900 56 200 99 000 4,7 3,7 44 200 41 000
7 ans 26 000 32 500 42 200 67 100 109 900 2,6 2,1 41 100 34 600
15 ans 35 900 46 400 52 800 79 600 121 700 2,2 1,7 43 700 33 200
20 ans 39 900 50 200 55 700 83 400 124 200 2,1 1,7 43 500 33 200
2000 à 2009
3 ans 11 700 15 900 31 900 56 000 105 400 4,8 3,5 44 300 40 100
7 ans 31 500 34 400 43 100 67 900 117 200 2,2 2,0 36 400 33 500
15 ans 47 400 51 900 57 000 82 700 124 800 1,7 1,6 35 300 30 800
2010 à 2014
3 ans 11 800 17 400 33 100 58 300 110 400 4,9 3,4 46 500 40 900
7 ans 33 600 35 200 43 000 67 900 119 300 2,0 1,9 34 300 32 700

La troisième année suivant l’immigration, les revenus médians des immigrants dont les revenus initiaux étaient élevés étaient 4,8 fois plus élevés que ceux des immigrants qui n’avaient aucun revenu (au cours des deux premières années). L’écart a par la suite considérablement diminué de sorte que, la septième année, le ratio était passé à 2,2, pour ensuite demeurer autour de 2,0 la quinzième année et la vingtième année (tableau 4). De même, par rapport aux immigrants dont les revenus se trouvaient dans la catégorie des revenus initiaux les plus faibles, les revenus des immigrants dont les revenus initiaux étaient élevés étaient 3,5 fois plus élevés la troisième année, et le ratio a ensuite diminué pour s’établir à 2,0 la septième année, puis à environ 1,7 la vingtième année.

Il est aussi possible d’étudier cette tendance en examinant la différence entre les niveaux de revenus plutôt que des ratios. Cette méthode révèle elle aussi une diminution importante de l’écart entre la troisième et la septième année, mais l’écart est resté inchangé par la suite ou, par rapport aux immigrants qui n’avaient pas enregistré de revenu au cours des deux premières années suivant leur arrivée au pays, a augmenté entre la septième et la vingtième année (tableau 4).

Certaines données laissent entendre que la diminution de l’écart était légèrement plus prononcée parmi les cohortes ultérieures par rapport aux cohortes antérieures. Par exemple, parmi les immigrants de la cohorte des années 1990, la septième année suivant l’immigration, les immigrants dont les revenus initiaux étaient élevés gagnaient 2,6 fois plus que ceux qui n’avaient pas enregistré de revenu au cours des deux premières années suivant leur admission. Dans la cohorte des années 2000, ce ratio est tombé pour passer à 2,2, et à 2,0 dans la cohorte de 2010 à 2014. Une tendance semblable a été observée chez les immigrants dont les revenus initiaux étaient les plus faibles (tableau 4).

La conclusion générale qui se dégage des résultats non corrigés (réels) est la suivante : l’écart entre les revenus des demandeurs principaux de la catégorie économique qui ont fait des études universitaires et dont les revenus initiaux étaient inexistants ou faibles et ceux des autres demandeurs principaux s’est considérablement rétréci au cours des sept ou huit premières années suivant l’immigration. Après cette période, l’écart variait peu et demeurait considérable. Quinze ans après l’immigration, les immigrants dont les revenus initiaux étaient élevés gagnaient toujours de 1,6 à 2 fois plus (ou de 31 000 $ à 44 000 $ en dollars constants de 2019) que ceux qui n’avaient aucun revenu initial ou qui se trouvaient dans la catégorie des revenus initiaux les plus faibles (tableau 4). Certaines données donnent également à penser que la réduction de l’écart était un peu plus marquée parmi les cohortes plus récentes.

Analyse multivariée

L’écart observé entre les groupes au chapitre des trajectoires salariales pourrait s’expliquer en partie par les différences dans les caractéristiques et le lieu de résidence des immigrants. Pour tenir compte de ces différences, on a effectué une régression des moindres carrés ordinaires en utilisant le logarithme du revenu comme variable dépendante. La variable indépendante principale comporte sept catégories correspondant aux principaux groupes d’intérêtNote . Les trajectoires salariales ont été évaluées pour chacun des sept groupes. Les variables de contrôle comprenaient la cohorte d’admission, le sexe, l’âge au moment de l’admission, la connaissance des langues officielles au moment de l’admission, les niveaux de revenu enregistré au Canada avant l’admission au pays, le nombre d’années d’études effectuées au Canada avant l’admission, la région d’origine, la fréquentation d’un établissement d’enseignement après l’admission et la province de résidence. Le modèle comprenait également le nombre d’années écoulées depuis l’immigration et l’interaction entre cette variable et le niveau de revenu initial. On a utilisé le modèle pour produire les trajectoires salariales corrigées. Ainsi, pour une année donnée, la différence entre le logarithme du revenu non corrigé et le logarithme du revenu corrigé indique la mesure dans laquelle les variables de contrôle contribuent aux écarts de rémunération entre les groupes. Des modèles de régression ont été exécutés pour l’ensemble du groupe d’immigrants arrivés de 1990 à 2014, ainsi que pour ceux qui ont été admis dans les années 1990, 2000 et 2010 à 2014.

Le tableau A.1 de l’annexe présente les coefficients utilisés dans le modèle pour tous les demandeurs principaux de la catégorie économique qui ont immigré au pays entre 1990 et 2014. Le signe et l’importance des coefficientsNote  étaient conformes aux attentes, sauf peut-être pour les coefficients de la variable de la région d’origineNote .

Le logarithme du revenu corrigé des demandeurs principaux ayant fait des études universitaires qui n’avaient aucun revenu initial ou qui se trouvaient dans la catégorie des revenus initiaux les plus faibles était initialement inférieur au logarithme du revenu corrigé de leurs homologues ayant un diplôme d’études secondaires. Cependant, la trajectoire salariale était plus prononcée chez ceux qui avaient fait des études universitaires. Huit ou neuf ans après l’immigration, les revenus des demandeurs principaux ayant fait des études universitaires qui se trouvaient dans la catégorie des revenus initiaux les plus faibles dépassaient les revenus moyens de leurs homologues ayant un diplôme d’études secondaires ou un niveau de scolarité inférieur (graphique 2), et finissaient par rattraper le logarithme du revenu moyen des immigrants qui détenaient un certificat d’études postsecondaires non universitaires (à l’exception de ceux dont les revenus initiaux étaient inexistants).

Graphique 2 : Logarithme du revenu corrigé chez les demandeurs principaux de la catégorie économique âgés de 20 à 44 ans au moment de l’admission qui sont arrivés au pays entre 1990 et 2014, selon le niveau de revenu initial et le nombre d’années écoulées depuis l’immigration

Tableau de données du graphique 2 
Tableau de données du graphique 2
Sommaire du tableau
Le tableau montre les résultats de Tableau de données du graphique 2. Les données sont présentées selon Nombre d’années écoulées depuis l’immigration (titres de rangée) et Revenus les plus élevés, Revenus élevés, Faibles revenus, Revenus les plus faibles, Aucun revenu, Diplôme non universitaire et Études secondaires ou moins, calculées selon points logarithmiques unités de mesure (figurant comme en-tête de colonne).
Nombre d’années écoulées depuis l’immigration Revenus les plus élevés Revenus élevés Faibles revenus Revenus les plus faibles Aucun revenu Diplôme non universitaire Études secondaires ou moins
points logarithmiques
3 11,38 10,82 10,29 9,75 9,47 10,29 10,21
4 11,37 10,85 10,37 9,99 9,87 10,35 10,27
5 11,37 10,89 10,45 10,16 10,06 10,40 10,31
6 11,40 10,92 10,51 10,27 10,19 10,45 10,35
7 11,41 10,96 10,57 10,36 10,28 10,49 10,38
8 11,43 10,99 10,61 10,42 10,35 10,52 10,41
9 11,45 11,02 10,66 10,48 10,40 10,55 10,43
10 11,47 11,05 10,69 10,53 10,45 10,58 10,45
11 11,47 11,07 10,73 10,57 10,47 10,60 10,46
12 11,48 11,09 10,76 10,60 10,51 10,61 10,47
13 11,48 11,10 10,78 10,63 10,53 10,62 10,48
14 11,50 11,12 10,80 10,67 10,55 10,64 10,50
15 11,51 11,13 10,82 10,69 10,57 10,65 10,51
16 11,51 11,14 10,83 10,71 10,58 10,66 10,52
17 11,52 11,15 10,84 10,72 10,59 10,67 10,52
18 11,51 11,15 10,85 10,71 10,58 10,68 10,53
19 11,51 11,16 10,84 10,72 10,57 10,68 10,53
20 11,51 11,17 10,87 10,74 10,57 10,68 10,54

En ce qui concerne les variations au fil du temps de l’écart de revenus entre les demandeurs principaux de la catégorie économique ayant fait des études universitaires dont les revenus initiaux étaient faibles et ceux dont les revenus initiaux étaient élevés, les résultats corrigés fondés sur l’ensemble des demandeurs principaux qui ont immigré entre 1990 et 2014 ont révélé que, trois ans après l’immigration, les demandeurs dont les revenus initiaux étaient élevés gagnaient 1,08 point logarithmique (ou 194 %) de plus que ceux dont les revenus initiaux étaient les plus faibles (tableau 5). La septième année, l’écart avait considérablement diminué pour s’établir à 0,60 point logarithmique (ou 83 %), et il a continué de reculer pour se fixer à 0,45 point logarithmique (56 %) la quinzième année et à 0,43 point logarithmique (54 %) la vingtième année.


Tableau 5
Estimation du logarithme du revenu et des écarts de logarithme du revenu des demandeurs principaux de la catégorie économique ayant fait des études universitaires qui étaient âgés de 20 à 44 ans au moment de l’admission, selon la cohorte d’admission
Sommaire du tableau
Le tableau montre les résultats de Estimation du logarithme du revenu et des écarts de logarithme du revenu des demandeurs principaux de la catégorie économique ayant fait des études universitaires qui étaient âgés de 20 à 44 ans au moment de l’admission. Les données sont présentées selon Cohorte d’admission et nombre d’années écoulées depuis l’admission (titres de rangée) et Logarithme du revenu selon le niveau de revenu initial, Différence dans le logarithme du revenu, Aucun revenu, Revenus les plus faibles, Faibles revenus, Revenus élevés, Revenus les plus élevés, Différence entre revenus élevés et aucun revenu et Différence entre revenus élevés et revenus les plus faibles, calculées selon points logarithmiques unités de mesure (figurant comme en-tête de colonne).
Cohorte d’admission et nombre d’années écoulées depuis l’admission Logarithme du revenu selon le niveau de revenu initial Différence dans le logarithme du revenu
Aucun revenu Revenus les plus faibles Faibles revenus Revenus élevés Revenus les plus élevés Différence entre revenus élevés et aucun revenu Différence entre revenus élevés et revenus les plus faibles
points logarithmiques
1990 à 2014
3 ans 9,47 9,75 10,29 10,82 11,38 1,36 1,08
7 ans 10,28 10,36 10,57 10,96 11,41 0,68 0,60
15 ans 10,57 10,69 10,82 11,13 11,51 0,56 0,45
20 ans 10,57 10,74 10,87 11,17 11,51 0,60 0,43
1990 à 1999
3 ans 9,42 9,66 10,21 10,77 11,33 1,35 1,11
7 ans 10,11 10,25 10,50 10,89 11,36 0,79 0,64
15 ans 10,39 10,56 10,72 11,03 11,40 0,64 0,47
20 ans 10,46 10,63 10,76 11,05 11,38 0,58 0,42
2000 à 2009
3 ans 9,44 9,71 10,27 10,81 11,38 1,36 1,09
7 ans 10,27 10,33 10,55 10,94 11,40 0,67 0,61
15 ans 10,61 10,67 10,80 11,11 11,47 0,50 0,44
2010 à 2014
3 ans 9,44 9,79 10,33 10,82 11,30 1,39 1,04
7 ans 10,36 10,40 10,60 10,96 11,32 0,60 0,55

Les résultats corrigés étaient semblables pour les trois cohortes, à savoir celle des années 1990, celle des années 2000 et celle des années 2010 à 2014 (tableau 5).

Il est tout à fait plausible que certains demandeurs principaux de la catégorie économique obtiennent de faibles résultats au cours des deux premières années suivant leur arrivée et qu’ils continuent d’afficher un écart important au chapitre des revenus par rapport aux autres demandeurs principaux en raison des différences entre les deux groupes en ce qui a trait à la connaissance des langues officielles au moment de l’admission, à l’expérience de travail au Canada avant l’admission, au lieu de résidence et à d’autres caractéristiques. La différence entre les résultats corrigés et non corrigés pour tout écart entre les revenus indique dans quelle mesure les variables de contrôle tiennent compte de l’écart observé au départ (tableau 6).


Tableau 6
Différences entre les écarts observés et corrigés dans le logarithme du revenu des demandeurs principaux de la catégorie économique ayant fait des études universitaires qui n’avaient aucun revenu initial, ou qui avaient un revenu très modeste au départ, comparativement à ceux qui avaient un revenu élevé
Sommaire du tableau
Le tableau montre les résultats de Différences entre les écarts observés et corrigés dans le logarithme du revenu des demandeurs principaux de la catégorie économique ayant fait des études universitaires qui n’avaient aucun revenu initial. Les données sont présentées selon Cohorte d’admission et nombre d’années écoulées depuis l’admission (titres de rangée) et Écart observé dans le logarithme du revenu, Écart corrigé dans le logarithme du revenu, Différence entre les écarts observés et corrigés, Différence en pourcentage de l’écart non corrigé, Différence entre revenus élevés et aucun revenu et Différence entre revenus élevés et revenus les plus faibles, calculées selon points logarithmiques et pourcentage unités de mesure (figurant comme en-tête de colonne).
Cohorte d’admission et nombre d’années écoulées depuis l’admission Écart observé dans le logarithme du revenu Écart corrigé dans le logarithme du revenu Différence entre les écarts observés et corrigés Différence en pourcentage de l’écart non corrigé
Différence entre revenus élevés et aucun revenu Différence entre revenus élevés et revenus les plus faibles Différence entre revenus élevés et aucun revenu Différence entre revenus élevés et revenus les plus faibles Différence entre revenus élevés et aucun revenu Différence entre revenus élevés et revenus les plus faibles Différence entre revenus élevés et aucun revenu Différence entre revenus élevés et revenus les plus faibles
points logarithmiques pourcentage
1990 à 2014
3 ans 1,57 1,28 1,36 1,08 0,21 0,20 13 16
7 ans 0,83 0,72 0,68 0,60 0,15 0,12 18 16
15 ans 0,67 0,53 0,56 0,45 0,11 0,08 17 15
20 ans 0,71 0,51 0,60 0,43 0,11 0,08 15 15
1990 à 1999
3 ans 1,52 1,28 1,35 1,11 0,17 0,17 11 13
7 ans 0,92 0,74 0,79 0,64 0,13 0,10 15 14
15 ans 0,77 0,56 0,64 0,47 0,13 0,09 17 16
20 ans 0,71 0,51 0,58 0,42 0,13 0,09 18 17
2000 à 2009
3 ans 1,56 1,28 1,36 1,09 0,19 0,19 12 15
7 ans 0,80 0,72 0,67 0,61 0,13 0,11 16 15
15 ans 0,60 0,51 0,50 0,44 0,10 0,08 17 15
2010 à 2014
3 ans 1,63 1,27 1,39 1,04 0,25 0,24 15 19
7 ans 0,79 0,72 0,60 0,55 0,19 0,17 24 23

Pour illustrer ce calcul, il convient de mentionner que, la troisième année, les revenus non corrigés des demandeurs principaux de la catégorie économique ayant fait des études universitaires qui se trouvaient dans la catégorie des revenus initiaux les plus faibles étaient inférieurs de 1,28 point logarithmique aux revenus de leurs homologues dont les revenus initiaux étaient élevés (tableau 6). Les résultats corrigés pour cette même comparaison ont indiqué un écart de 1,08 point logarithmique. Par conséquent, la différence observée au chapitre des écarts entre les revenus corrigés et non corrigés (0,20 point logarithmique) indique que 16 % de l’écart entre les revenus était attribuable aux variables de contrôle (c.-à-d. 0,20/1,28). Le reste de l’écart était attribuable à des facteurs inconnus qui ne sont pas inclus dans la régression.

En ce qui concerne l’écart entre les demandeurs qui n’avaient aucun revenu initial et ceux dont les revenus initiaux étaient élevés, la proportion de l’écart attribuable aux variables de contrôle a été évaluée pour certaines années suivant l’admission (tableau 6). La part de l’écart observé qui était attribuable aux variables de contrôle variait de 11 % à 24 %. Les mêmes calculs ont été effectués relativement à l’écart entre les demandeurs principaux de la catégorie économique ayant fait des études universitaires dont les revenus initiaux étaient faibles et ceux dont les revenus initiaux étaient élevés. Dans ce cas, la part de l’écart observé qui était attribuable aux variables de contrôle variait de 13 % à 23 %. En aucun cas, les variables de contrôle n’étaient à l’origine d’une grande proportion de l’écart au cours d’une année donnée depuis l’immigration dans une cohorte donnée; les écarts entre les revenus étaient plutôt en majeure partie attribuables à d’autres facteurs inconnus.

En ce qui concerne l’évolution de l’écart au fil du temps, les résultats étaient semblables pour les écarts entre les revenus observés et corrigésNote  (tableau 6). Cela indique que les différences au chapitre des caractéristiques entre les demandeurs dont les revenus initiaux étaient faibles et ceux dont les revenus initiaux étaient élevés ont eu peu d’effet sur la réduction des écarts, et que la réduction partielle des écarts était principalement liée à d’autres facteurs inconnus.

De plus, selon les résultats corrigés, un écart important persistait entre les résultats, même après la prise en compte des différences dans les caractéristiques liées aux antécédents des immigrants mentionnées plus tôt.

Les analyses ci-dessus ont également été effectuées séparément pour les demandeurs principaux de la catégorie économique de sexe masculin et de sexe féminin qui sont arrivés au pays entre 1990 et 2014, et les tendances générales étaient semblables chez les hommes et chez les femmes, à quelques différences mineures près. L’écart au chapitre du logarithme du revenu observé entre les demandeurs qui n’avaient aucun revenu au cours des deux premières années suivant l’immigration et ceux qui avaient des revenus élevés au cours de la même période était plus important, mais s’est rétréci plus rapidement au fil du temps chez les femmes que chez les hommes. Chez les femmes, les variables de contrôle sélectionnées étaient à l’origine de 10 % à 13 % des écarts entre les revenus observés entre celles qui n’avaient aucun revenu initial ou qui se trouvaient dans la catégorie des revenus les plus faibles et celles qui avaient enregistré des revenus initiaux élevés, selon le nombre d’années écoulées depuis l’immigration. Chez les hommes, les proportions correspondantes étaient un peu plus élevées, allant de 13 % à 19 %.

Différences au chapitre des écarts entre les revenus selon la catégorie d’admission

Les trajectoires salariales varient selon la catégorie économique. Des recherches antérieures ont révélé que les travailleurs qualifiés du volet fédéral avaient tendance à gagner moins que les candidats des provinces au départ, mais à les dépasser quelques années après l’immigration. Les candidats de la CEC avaient quant à eux des revenus plus élevés que ceux des deux autres catégories au départ, et cet avantage avait tendance à persister au fil du temps (Hou, Crossman et Picot, 2020). La présente section vise à déterminer si la tendance des immigrants, dont les revenus étaient inexistants ou faibles au départ, à rattraper ceux dont les revenus initiaux étaient élevés, variait selon la catégorie économique, et si les variables de contrôle jouaient un rôle différent d’une catégorie économique à l’autre pour expliquer l’écart entre les revenus.

Dans l’ensemble, parmi la cohorte de 2010 à 2014 de demandeurs principaux de la catégorie économique âgés de 20 à 44 ans au moment de leur immigration, les trajectoires salariales pour les trois catégories économiques ressemblaient à celles vues précédemment. Dans les trois catégories, les demandeurs principaux qui n’avaient aucun revenu ou qui se trouvaient dans la catégorie des revenus les plus faibles au cours des deux premières années suivant l’admission n’ont pas rattrapé les revenus moyens de leurs homologues ayant un diplôme d’études secondaires ou un niveau de scolarité inférieur ni ceux de leurs homologues ayant un diplôme d’études postsecondaires non universitaires au cours des sept années suivant l’immigration (tableau 7), la période la plus longue pouvant faire l’objet d’un suivi fiable pour cette cohorte. Toutefois, dans les trois catégories, l’écart au chapitre des revenus entre les demandeurs ayant fait des études universitaires dont les revenus initiaux étaient nuls ou faibles et ceux dont les revenus initiaux étaient élevés s’est considérablement rétréci avec le nombre d’années écoulées depuis l’immigration. Par exemple, trois ans après l’immigration, parmi les demandeurs principaux du Programme des travailleurs qualifiés (fédéral), les revenus non corrigés (réels) de ceux qui avaient des revenus initiaux élevés étaient supérieurs de 1,28 point logarithmique (260 %) à ceux des immigrants dont les revenus initiaux étaient les plus faibles. L’écart diminuait ensuite pour s’établir à 0,71 point logarithmique sept ans après l’immigration (103 % soit environ le double). Une tendance semblable a été observée dans les deux autres catégories, c’est-à-dire les programmes provinciaux et la CEC (tableau 7). Cela dit, un écart important subsistait sept ans après l’immigration chez les demandeurs des trois programmes. Quelques différences ont toutefois été observées selon la catégorie de l’immigration économique. L’écart au chapitre des revenus initiaux (mesuré au début de la troisième année) entre les demandeurs principaux ayant fait des études universitaires qui avaient connu un bon départ et ceux qui avaient connu un moins bon départ était le plus important parmi les demandeurs des programmes provinciaux, suivi de ceux du Programme des travailleurs qualifiés (fédéral). Les demandeurs de la CEC affichaient le plus mince écart au chapitre des revenus initiaux entre ces groupes (tableau 7).


Tableau 7
Logarithme du revenu et écarts dans les logarithmes du revenu des demandeurs principaux de la catégorie économique ayant fait des études universitaires qui étaient âgés de 20 à 44 ans au moment de l’admission, selon la catégorie économique, pour les arrivées de 2010 à 2014
Sommaire du tableau
Le tableau montre les résultats de Logarithme du revenu et écarts dans les logarithmes du revenu des demandeurs principaux de la catégorie économique ayant fait des études universitaires qui étaient âgés de 20 à 44 ans au moment de l’admission. Les données sont présentées selon Catégorie économique et nombre d’années écoulées depuis l’admission (titres de rangée) et Logarithme du revenu selon le niveau de revenu initial, Différence dans le logarithme du revenu, Aucun revenu, Revenus les plus faibles, Faibles revenus, Revenus élevés, Revenus les plus élevés, Diplôme non universitaire, Études secondaires ou moins, Différence entre revenus élevés et aucun revenu et Différence entre revenus élevés et revenus les plus faibles(figurant comme en-tête de colonne).
Catégorie économique et nombre d’années écoulées depuis l’admission Logarithme du revenu selon le niveau de revenu initial Différence dans le logarithme du revenu
Aucun revenu Revenus les plus faibles Faibles revenus Revenus élevés Revenus les plus élevés Diplôme non universitaire Études secondaires ou moins Différence entre revenus élevés et aucun revenu Différence entre revenus élevés et revenus les plus faibles
points logarithmiques
Programme des travailleurs qualifiés (fédéral)
Données observées
3 ans 9,35 9,64 10,28 10,92 11,61 10,43 10,52 1,57 1,28
5 ans 9,98 10,11 10,48 10,99 11,58 10,59 10,70 1,01 0,89
7 ans 10,25 10,35 10,63 11,06 11,60 10,70 10,82 0,81 0,71
Données corrigées
3 ans 9,46 9,76 10,32 10,89 11,45 10,43 10,47 1,43 1,12
5 ans 10,08 10,20 10,51 10,95 11,42 10,58 10,64 0,87 0,75
7 ans 10,35 10,42 10,65 11,02 11,44 10,69 10,75 0,67 0,60
Programmes provinciaux
Données observées
3 ans 9,16 9,57 10,25 10,87 11,58 10,32 10,39 1,72 1,30
5 ans 9,90 10,05 10,42 10,93 11,57 10,44 10,51 1,03 0,89
7 ans 10,19 10,27 10,52 10,98 11,57 10,53 10,56 0,80 0,71
Données corrigées
3 ans 9,43 9,80 10,33 10,79 11,20 10,33 10,35 1,36 1,00
5 ans 10,09 10,21 10,48 10,85 11,19 10,43 10,46 0,76 0,65
7 ans 10,37 10,42 10,60 10,93 11,22 10,54 10,53 0,56 0,51
Catégorie de l’expérience canadienne
Données observées
3 ans 9,68 9,74 10,29 10,91 11,65 10,61 10,74 1,23 1,17
5 ans 10,13 10,18 10,45 10,98 11,64 10,70 10,82 0,86 0,80
7 ans 10,38 10,38 10,51 11,03 11,71 10,76 10,87 0,65 0,65
Données corrigées
3 ans 9,85 9,98 10,50 10,96 11,40 10,66 10,74 1,11 0,97
5 ans 10,30 10,37 10,65 11,02 11,40 10,75 10,82 0,72 0,65
7 ans 10,54 10,57 10,72 11,07 11,46 10,81 10,86 0,54 0,50

Fait peut-être plus intéressant, la proportion de l’écart de revenu attribuable aux variables de contrôle était la plus élevée dans les programmes provinciaux (tableau 7). Pour cette catégorie, de 21 % à 30 % de l’écart de revenu observé (en logarithme) était attribuable aux variables de contrôle. Dans le cas des demandeurs du Programme des travailleurs qualifiés (fédéral) et de la CEC, la part de l’écart observé attribuable aux variables de contrôle se situait entre 9 % et 18 % et entre 10 % et 23 %, respectivement. Ainsi, bien que l’écart de revenu observé dans les programmes provinciaux était plus important, un pourcentage plus élevé de cet écart s’expliquait par les variables de contrôle. Par conséquent, les écarts corrigés (qui tiennent compte des variables de contrôle relatives aux caractéristiques liées aux antécédents des immigrants) étaient semblables pour les trois catégories. Les divergences entre les catégories quant à l’importance et à la trajectoire de l’écart de revenu étaient principalement liées aux disparités dans les caractéristiques observées des immigrants sélectionnés dans chacune des catégories. En particulier, les écarts de revenus plus importants entre les demandeurs des programmes provinciaux qui avaient connu un meilleur départ et ceux qui en avaient connu un moins bon étaient principalement attribuables à des différences plus marquées dans les caractéristiques, comme la connaissance des langues officielles au moment de l’admission, la région d’origine et l’expérience de travail au Canada avant l’admission. Cette plus grande variabilité dans les caractéristiques des immigrants admis au pays dans le cadre des programmes provinciaux a donné lieu à de plus grands écarts de revenus entre ceux qui ont connu un bon départ et ceux qui en ont eu un moins bon.

Conclusion

Environ le tiers des demandeurs principaux de la catégorie économique ayant fait des études universitaires n’avaient aucun revenu ou se trouvaient dans la catégorie des revenus les plus faibles au cours des deux premières années suivant l’immigration. Le présent article visait à déterminer si ce groupe a pu combler l’écart de revenus par rapport aux revenus de leurs homologues ayant des revenus plus élevés à leurs débuts au Canada, ainsi qu’aux demandeurs principaux de la catégorie économique qui sont moins scolarisés.

Les résultats ont montré que la trajectoire salariale des demandeurs principaux ayant fait des études universitaires qui n’avaient aucun revenu initial ou qui se trouvaient dans la catégorie des revenus les plus faibles était plus prononcée que celle des demandeurs principaux moins scolarisés, ce qui laisse croire à une meilleure capacité d’adaptation au marché du travail, même chez les immigrants ayant fait des études universitaires qui avaient les résultats économiques les moins favorables au départ. Les revenus des demandeurs principaux ayant fait des études universitaires dont les résultats économiques étaient les moins favorables au départ ont dépassé, en quelques années, les revenus moyens de leurs homologues qui avaient comme plus haut niveau de scolarité un diplôme d’études secondaires. Lorsque seuls les demandeurs principaux de la catégorie économique ayant fait des études universitaires étaient pris en compte, l’écart de revenu initial entre ceux qui se trouvaient dans la catégorie des résultats initiaux les plus faibles et ceux qui ont connu de meilleurs résultats au départ diminuait au moins de moitié en sept ou huit ans. Cependant, d’importants écarts de revenus subsistaient entre les demandeurs qui avaient connu de bons résultats au départ et ceux qui en avaient connu des moins bons. Ces constatations générales s’appliquent autant aux immigrants admis au pays par l’entremise du Programme des travailleurs qualifiés (fédéral) qu’à ceux admis dans le cadre de programmes provinciaux et de la CEC. Toutefois, l’écart de revenu initial entre les immigrants ayant fait des études universitaires qui avaient connu un bon départ et ceux qui avaient connu un moins bon départ était plus important parmi les demandeurs des programmes provinciaux que parmi ceux du Programme des travailleurs qualifiés (fédéral) et de la CEC.

L’analyse a en outre permis de révéler que seule une faible proportion des écarts de revenus et de la tendance de ces écarts à converger était attribuable aux caractéristiques observées des demandeurs principaux de la catégorie économique au moment de l’admission pour lesquelles des données étaient disponiblesNote . La persistance des écarts de revenus pourrait plutôt être attribuable à un certain nombre de facteurs non observés ayant une incidence sur les demandeurs principaux ayant fait des études universitaires dont les revenus étaient nuls ou faibles au cours des deux premières années suivant leur admission au pays, à savoir : 1) des caractéristiques non étudiées telles que la motivation, les compétences interpersonnelles et la qualité du programme d’études universitaires ou l’expérience professionnelle; 2) l’incapacité des immigrants à améliorer suffisamment leur capital humain en raison d’un éventail de facteurs possibles; 3) le risque de stigmatisation qui peut faire en sorte qu’une première expérience d’emploi médiocre donne lieu à des résultats économiques moins favorables à long terme. Il est probable que chacun de ces facteurs contribue à l’écart et à sa perpétuation. Dans l’ensemble, les résultats indiquent qu’il existe un lien entre les résultats initiaux des demandeurs principaux de la catégorie économique ayant fait des études universitaires et leurs résultats à plus ou moins long terme, puisque l’écart entre ceux qui avaient connu un bon départ sur le plan économique et ceux qui en avaient connu un moins bon persistait, bien qu’il ait considérablement rétréci.

Annexe


Tableau A.1 de l’annexe
Coefficients des modèles de régression prédisant le logarithme du revenu chez les demandeurs principaux de la catégorie économique âgés de 20 à 44 ans au moment de l’admission, selon la cohorte d’admission
Sommaire du tableau
Le tableau montre les résultats de Coefficients des modèles de régression prédisant le logarithme du revenu chez les demandeurs principaux de la catégorie économique âgés de 20 à 44 ans au moment de l’admission 1990 à 2014, 1990 à 1999, 2000 à 2009 et 2010 à 2014, calculées selon Coefficient et Erreur-type unités de mesure (figurant comme en-tête de colonne).
1990 à 2014 1990 à 1999 2000 à 2009 2010 à 2014
Coefficient Erreur-type Coefficient Erreur-type Coefficient Erreur-type Coefficient Erreur-type
Âge au moment de l’admission (référence : 40 à 44 ans)
20 à 24 ans 0,168Note *** 0,002 0,199Note *** 0,002 0,152Note *** 0,003 0,019Note *** 0,005
25 à 29 ans 0,195Note *** 0,001 0,225Note *** 0,001 0,188Note *** 0,001 0,035Note *** 0,003
30 à 34 ans 0,161Note *** 0,001 0,184Note *** 0,001 0,151Note *** 0,001 0,032Note *** 0,002
35 à 39 ans 0,102Note *** 0,001 0,115Note *** 0,001 0,092Note *** 0,001 0,038Note *** 0,003
Langue officielle (référence : anglais comme langue maternelle)
Ne parle ni l’anglais ni le français -0,340Note *** 0,001 -0,433Note *** 0,002 -0,252Note *** 0,003 -0,244Note *** 0,005
Autre langue maternelle, mais parle le français et l’anglais -0,160Note *** 0,002 -0,147Note *** 0,003 -0,153Note *** 0,003 -0,129Note *** 0,005
Autre langue maternelle, mais parle le français -0,233Note *** 0,002 -0,262Note *** 0,003 -0,216Note *** 0,003 -0,235Note *** 0,006
Autre langue maternelle, mais parle l’anglais -0,223Note *** 0,001 -0,229Note *** 0,002 -0,209Note *** 0,002 -0,135Note *** 0,004
Français comme langue maternelle -0,054Note *** 0,002 -0,009Note * 0,004 -0,055Note *** 0,004 -0,068Note *** 0,006
Revenus enregistrés au Canada avant l’admission (référence : non)
> 0 et <= 50 % du revenu médian national -0,078Note *** 0,001 -0,087Note *** 0,002 -0,070Note *** 0,002 -0,058Note *** 0,003
> 50 % du revenu médian national, <= revenu médian national -0,094Note *** 0,001 -0,113Note *** 0,002 -0,076Note *** 0,002 -0,051Note *** 0,002
> revenu médian national, <= double du revenu médian national 0,109Note *** 0,001 0,132Note *** 0,002 0,097Note *** 0,002 0,135Note *** 0,003
> double du revenu médian national 0,440Note *** 0,002 0,499Note *** 0,004 0,421Note *** 0,003 0,459Note *** 0,004
Nombre d’années d’études au Canada (référence : aucune)
Plus de 0 à moins de 1 an 0,006Note ** 0,002 0,010Note *** 0,003 -0,016Note ** 0,005 0,036Note *** 0,008
De 1 an à moins de 2 ans 0,051Note *** 0,002 0,051Note *** 0,003 0,052Note *** 0,004 0,049Note *** 0,005
De 2 ans à moins de 3 ans 0,127Note *** 0,002 0,136Note *** 0,003 0,120Note *** 0,003 0,094Note *** 0,005
De 3 ans à moins de 4 ans 0,149Note *** 0,002 0,169Note *** 0,003 0,138Note *** 0,004 0,116Note *** 0,005
De 4 ans à moins de 5 ans 0,190Note *** 0,002 0,249Note *** 0,004 0,177Note *** 0,004 0,149Note *** 0,005
5 ans ou plus 0,138Note *** 0,002 0,191Note *** 0,003 0,118Note *** 0,003 0,133Note *** 0,004
Région d’origine (référence : États-Unis)
Amérique centrale 0,131Note *** 0,004 0,136Note *** 0,006 0,149Note *** 0,006 0,064Note *** 0,011
Caraïbes 0,098Note *** 0,003 0,060Note *** 0,005 0,164Note *** 0,006 0,023Note * 0,010
Amérique du Sud 0,226Note *** 0,003 0,184Note *** 0,005 0,268Note *** 0,006 0,148Note *** 0,010
Europe de l’Ouest 0,117Note *** 0,004 0,092Note *** 0,005 0,120Note *** 0,006 0,115Note *** 0,010
Europe du Nord 0,121Note *** 0,003 0,118Note *** 0,005 0,174Note *** 0,005 0,059Note *** 0,009
Europe du Sud 0,281Note *** 0,004 0,353Note *** 0,005 0,202Note *** 0,007 0,140Note *** 0,012
Europe de l’Est 0,198Note *** 0,003 0,276Note *** 0,005 0,155Note *** 0,005 0,044Note *** 0,010
Afrique 0,134Note *** 0,003 0,195Note *** 0,005 0,117Note *** 0,005 0,012 0,009
Asie du Sud 0,047Note *** 0,003 0,076Note *** 0,005 0,052Note *** 0,005 -0,041Note *** 0,009
Asie du Sud-Est 0,169Note *** 0,003 0,202Note *** 0,005 0,147Note *** 0,005 0,042Note *** 0,009
Asie de l’Est 0,062Note *** 0,003 0,077Note *** 0,005 0,053Note *** 0,005 -0,144Note *** 0,009
Asie de l’Ouest 0,054Note *** 0,003 0,034Note *** 0,005 0,074Note *** 0,005 0,067Note *** 0,009
Autres régions -0,006 0,004 0,022Note *** 0,005 0,053Note *** 0,007 0,029Note * 0,012
Région de résidence (référence : Colombie-Britannique)
Territoires 0,330Note *** 0,007 0,325Note *** 0,012 0,357Note *** 0,012 0,224Note *** 0,015
Région de l’Atlantique 0,065Note *** 0,003 0,042Note *** 0,005 0,077Note *** 0,004 -0,005 0,006
Québec -0,088Note *** 0,001 -0,089Note *** 0,002 -0,079Note *** 0,002 -0,114Note *** 0,003
Ontario 0,071Note *** 0,001 0,097Note *** 0,001 0,053Note *** 0,001 0,008Note ** 0,002
Manitoba 0,077Note *** 0,002 0,072Note *** 0,004 0,094Note *** 0,003 -0,035Note *** 0,004
Saskatchewan 0,166Note *** 0,002 0,170Note *** 0,006 0,197Note *** 0,004 0,048Note *** 0,004
Alberta 0,237Note *** 0,001 0,214Note *** 0,002 0,293Note *** 0,002 0,084Note *** 0,003
Femmes -0,205Note *** 0,001 -0,200Note *** 0,001 -0,193Note *** 0,001 -0,253Note *** 0,002
Mois d’études à temps plein -0,071Note *** 0,000 -0,064Note *** 0,000 -0,074Note *** 0,000 -0,078Note *** 0,000

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