La mesure des transferts
volontaires entre ménages au Canada
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Par Jackson Chung
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Pour en savoir plus à ce sujet
- Définition des transferts entre ménages
- Prêts et remboursements
- Réguliers et irréguliers
- Volontaires et involontaires
- Membres de la famille et toute personne
- Au pays et à l'étranger
- Déduction des transferts entre ménages du revenu disponible du donateur
- Paiements en nature et transferts de dépenses
- Importance et tendance des transferts
- Relation avec le revenu et le patrimoine
- Transferts entre ménages en proportion du revenu
- Résumé
- Sources des données et définitions
Dans la plupart des cas, les personnes qui vivent ensemble dans un ménage voient à leur propre bien-être. Toutefois, dans certains cas, des membres d'un ménage apportent une aide financière aux membres d'autres ménages. Ce genre de situation comprend le soutien que les parents apportent à leurs enfants qui étudient loin de la maison familiale, l'argent que les immigrants envoient aux membres de leur famille dans leur pays d'origine et l'aide que les personnes apportent à des amis en difficulté. Chacun de ces exemples représente un transfert entre ménages.
Les transferts entre ménages représentent un flux de ressources économiques entre des ménages. Il s'agit des sommes d'argent, des biens ou des services qu'un ménage fournit à un autre afin de l'aider à subvenir à ses besoins de consommation, sans exiger de remboursement. Le bien-être économique du bénéficiaire s'améliore grâce aux ressources économiques supplémentaires que lui fournit le donateur.
Selon les données, l'ampleur globale des transferts entre ménages est semblable à celle de l'aide sociale et environ le double du niveau des pensions alimentaires et des autres paiements ordonnés par des tribunaux1. Malgré leur importance et leurs répercussions possibles sur le bien-être économique des ménages canadiens, les transferts entre ménages ont fait l'objet de peu d'études et celles qui ont été publiées se sont concentrées sur les envois de fonds à l'étranger par des immigrants (Houle et Schellenberg, 2008).
Le présent article traite des enjeux relatifs aux concepts et à la mesure applicables aux transferts volontaires entre ménages au Canada (voir Sources des données et définitions). Il commence par l'examen des enjeux conceptuels de ces transferts. On estime ensuite l'importance et les tendances récentes des transferts entre ménages au Canada, avant de faire une analyse de la relation entre la valeur des transferts entre ménages et le revenu total des ménages. L'article se termine par un résumé et une discussion des résultats.
Définition des transferts entre ménages
Malgré les efforts consentis pour intégrer les transferts dans un plan d'ensemble du revenu des ménages (Canberra Group, 2001), il n'existe actuellement aucune mesure standard des transferts entre ménages qui soit reconnue à l'échelle internationale. Par conséquent, les transferts demeurent l'un des aspects les plus difficiles à mesurer dans le revenu des ménages. Pour déterminer ce qui devrait ou ne devrait pas entrer dans la définition du revenu, il faut analyser divers aspects des transferts. Bien que certains organismes statistiques, dont Eurostat (Eurostat, 2007) et le Australian Bureau of Statistics (Australian Bureau of Statistics, 2006), suivent de près les recommandations du Canberra Group, d'autres les adaptent en fonction de leurs propres besoins. Cette situation n'est pas surprenante étant donné le nombre de concepts qui entrent dans la définition des transferts entre ménages.
Les efforts consentis pour définir les transferts entre ménages doivent nécessairement tenir compte de plusieurs facteurs ayant trait au ménage du donateur, au ménage du bénéficiaire et à la nature des transferts. Les aspects particuliers à considérer comprennent le fait que les transferts sont versés à intervalles réguliers ou irréguliers; qu'ils sont volontaires ou involontaires; qu'ils sont faits entre des membres de la famille ou d'autres personnes; qu'ils franchissent des frontières internationales ou qu'ils doivent être déduits du revenu disponible du donateur; et qu'ils devraient comprendre les transferts en nature (non monétaires), les prêts ou les remboursements.
Prêts et remboursements
Une des caractéristiques qui définit un transfert entre ménages est le fait qu'il est donné, sans exiger de remboursement. La Conférence internationale des statisticiens du travail recommande donc d'exclure les remboursements de prêts de la définition des transferts entre ménages. On suppose qu'un prêt et son remboursement n'entraîneraient pas un transfert net d'un ménage à l'autre (Organisation internationale du Travail, 2004).
Réguliers et irréguliers
Cette caractéristique du transfert se rapporte à la probabilité d'utilisation des fonds par le bénéficiaire. Si les fonds sont dépensés pour l'achat de biens et services immédiatement ou à court terme, ils sont considérés comme un ajout au revenu. S'ils sont mis de côté ou investis en capital, ils constituent un ajout au patrimoine. Le Canberra Group est par ailleurs d'avis que les transferts courants devraient être des montants relativement peu élevés, souvent versés régulièrement et sur lesquels les bénéficiaires peuvent compter (Canberra Group, 2001). Par contre, les transferts importants, inattendus et non renouvelables sont considérés être des transferts de capitaux puisqu'il y a plus de chances que cet argent soit épargné que dépensé. Toutefois, on pourrait prétendre que certains transferts irréguliers ou importants correspondent à la définition des transferts courants, tant que les fonds sont utilisés pour la consommation finale, au cours de la même période. Par exemple, un ménage peut apporter une aide financière occasionnelle à des personnes qui ne sont pas membres de son ménage et qui en ont besoin, comme des chômeurs temporaires. Ainsi, il est très difficile de se servir de règles pratiques relatives à la régularité et au montant des transferts pour déterminer s'il s'agit de transferts de capitaux ou de patrimoine. Il serait préférable de demander directement aux répondants si le transfert a été utilisé pour la consommation courante.
Volontaires et involontaires
Dans le présent article, un transfert entre ménages volontaire est défini en tant que paiement direct en argent entre ménages, sans obligation légale. Le montant des transferts entre ménages n'est pas déduit du revenu du donateur dans l'analyse du bien-être économique et du revenu du ménage. L'analyse présentée dans ce document est limitée par le manque d'une source de données qui combine des renseignements détaillés sur la consommation et les montants de transferts entre ménages reçus. De plus, il n'y a pas de données sur les transferts entre ménages reçus de personnes hors de la famille.
Bien que certains transferts entre ménages soient obligatoires, c'est-à-dire qu'ils découlent d'une entente juridiquement contraignante, d'autres sont volontaires. Aux fins de l'enquête, le Canberra Group laisse entendre que les transferts entre ménages juridiquement contraignants, par exemple, les paiements de pension alimentaire pour enfants et versés au conjoint, devraient être considérés comme des paiements réguliers et prévisibles, puisqu'ils ont des conséquences juridiques sur les expéditeurs lorsqu'ils omettent de les verser. À titre de comparaison, les transferts volontaires entre ménages peuvent être réguliers ou irréguliers, selon qu'ils sont versés régulièrement ou non et que les bénéficiaires peuvent s'y fier (Canberra Group, 2001).
Pour suivre les transferts involontaires, comme les paiements de pension alimentaire pour enfants et versés au conjoint ordonnés par un tribunal ou prévus dans une entente écrite, Statistique Canada utilise les données fiscales et la réception de ces transferts est comptabilisée dans le revenu total des bénéficiaires. Par ailleurs, plusieurs études ont porté sur les caractéristiques du paiement des pensions alimentaires et sur les avantages que les bénéficiaires en ont retirés (Galarneau, 1992, et Robinson, 2009). Toutefois, les transferts volontaires reçus n'ont pas été mesurés jusqu'à ce que des questions sur les transferts entre ménages soient introduites dans l'Enquête sur la dynamique du travail et du revenu (EDTR) de 2006.
Membres de la famille et toute personne
On s'attendrait à ce que la plupart des transferts entre ménages soient reçus par les membres de la famille des donateurs et certaines enquêtes de Statistique Canada posent uniquement aux répondants des questions sur les transferts entre ménages entre des membres de la même famille. Or, les non-membres de la famille profiteraient également de transferts entre ménages, qui leur permettraient d'augmenter leur capacité de consommation. Ainsi, un instrument d'enquête complet comprendrait les transferts entre ménages versés non seulement entre les membres d'une famille, mais également entre des personnes qui ne vivent pas avec le répondant.
Au pays et à l'étranger
Certains ménages envoient des transferts entre ménages à des parents à l'extérieur du Canada. Puisque ces transferts représentent une source considérable de revenus étrangers dans les pays en développement, il est essentiel de surveiller les envois de fonds pour comprendre la macro-économie de ces pays (Houle et Schellenberg, 2008).
Déduction des transferts entre ménages du revenu disponible du donateur
Il existe au moins trois manières de traiter la déduction des transferts entre ménages du revenu disponible du donateur. Premièrement, pour éviter le compte en double au niveau agrégé, le Canberra Group recommande que le donateur déduise le transfert de son revenu disponible (Canberra Group, 2001). Deuxièmement, Becker (1974) avance que les caractéristiques pertinentes de l'environnement social d'une personne2, comme le bien-être d'un membre de la famille, peuvent être importantes pour la fonction utilitaire d'une personne, et, dans une certaine mesure, pour son bien-être économique. Selon ce point de vue, l'envoi de transferts entre ménages pour améliorer le bien-être économique d'un bénéficiaire peut avoir une utilité positive chez le donateur. Il y aurait donc lieu de croire qu'il ne faut pas déduire le montant des transferts entre ménages envoyés du revenu disponible du donateur puisqu'il offre une utilité au donateur, tout comme ce serait le cas s'il dépensait ce montant autrement. Troisièmement, on établit une distinction entre les transferts obligatoires et volontaires et on propose de ne déduire que le montant des transferts entre ménages obligatoires ou quasi obligatoires. Cette troisième possibilité a été adoptée dans une résolution de la 17e Conférence internationale des statisticiens du travail (Organisation internationale du Travail, 2004). Or, il reste à débattre de ce qui entre dans la définition d'un transfert quasi obligatoire entre ménages.
Paiements en nature et transferts de dépenses
Les paiements en nature faits sous la forme de cadeaux et de services apportent un avantage économique au bénéficiaire et, en théorie, devraient être inclus à titre de revenu. Toutefois, contrairement aux transferts d'argent, il n'existe aucune méthode uniforme et exacte pour déterminer la valeur des paiements en nature. La 17e Conférence internationale des statisticiens du travail est d'avis que la plupart des définitions opérationnelles du travail doivent exclure ce genre de transfert jusqu'à ce que des méthodes d'évaluation largement acceptées soient disponibles (Organisation internationale du Travail, 2004). Actuellement, la plupart des paiements en nature sont exclus des enquêtes de Statistique Canada.
Importance et tendance des transferts
En 2008, les ménages canadiens ont reçu d'autres ménages 8,5 milliards de dollars sous la forme de transferts volontaires entre ménages (graphique B). Ce montant est deux fois plus élevé que celui des paiements de pension alimentaire ordonnés par un tribunal et reçus par des ménages canadiens. Par ailleurs, il est comparable au montant des principaux programmes sociaux gouvernementaux, comme l'aide sociale et les prestations fiscales pour enfants.
À la fois le nombre et la proportion des ménages qui ont envoyé des transferts se sont accrus entre 1998 et 2008 (tableau 2). Le nombre des ménages qui ont envoyé des transferts volontaires entre ménages a progressé de 51 % pour passer de 3,6 millions en 1998 à 5,4 millions de ménages en 2008. La proportion des ménages qui ont envoyé des transferts a augmenté de 31 % à 41 % au cours de la même période3.
Même si, d'une année à l'autre, la valeur totale des transferts entre ménages est assez variable, elle a connu une tendance à la hausse de 1998 à 2008 (graphique C)4. Après que des corrections en fonction de l'inflation aient été faites, on a constaté que les ménages canadiens avaient envoyé 46 % de plus de transferts volontaires entre ménages en 2008 qu'en 1998 (Statistique Canada, 2011). À titre de comparaison, le revenu réel des ménages a augmenté de 33 % et les dons de bienfaisance se sont accrus de 32 % au cours de la même période.
Les transferts volontaires entre ménages représentent donc un flux considérable de fonds entre les ménages et un complément important du revenu de nombreux ménages bénéficiaires.
Relation avec le revenu et le patrimoine
Les données de l'EDTR sur les transferts entre ménages envoyés et reçus permettent de comparer les transferts au revenu des donateurs et des bénéficiaires5. De même, on peut étudier le patrimoine des donateurs et des bénéficiaires à l'aide de l'Enquête sur la sécurité financière (ESF) de 2005. Puisque ces deux enquêtes sous-représentent probablement les petits transferts (voir Sources des données et définitions), les résultats représentent mieux les transferts importants que les petits transferts.
Tant l'incidence que le montant des dons volontaires entre ménages ont augmenté avec le revenu (tableau 3). Environ 7 % de tous les ménages du quartile inférieur ont envoyé de tels transferts, le montant médian étant d'environ 1 500 $. Plus de ménages ont envoyé des transferts volontaires entre ménages à mesure que le revenu augmentait. Le taux des dons atteignait 18 % dans le quartile de revenu supérieur et le don médian a plus que doublé pour se situer à 3 500 $. La relation entre le revenu et la réception de transferts entre ménages était moins évidente. Si cette relation était à l'inverse de la tendance des dons, l'incidence et le montant reçu seraient plus élevés dans le quartile inférieur et diminueraient dans chaque quartile plus haut. Même si le pourcentage des ménages ayant reçu de tels transferts était plus élevé dans le quartile inférieur, l'incidence variait beaucoup moins entre les quartiles que l'incidence des dons et elle était plus élevée dans le quartile supérieur que dans les deux quartiles du centre. Par ailleurs, le montant médian reçu était plus élevé dans les deux quartiles de revenu supérieurs que dans les deux du bas.
Les transferts entre ménages sont généralement faits par des ménages bien nantis à des ménages moins bien nantis (graphique D)6. Environ 80 % des transferts agrégés entre ménages envoyés ont été faits par des ménages dont le revenu ou le patrimoine était supérieur à la médiane. À l'inverse, la vaste majorité des transferts agrégés entre ménages étaient reçus par des ménages dont le revenu ou le patrimoine était inférieur à la médiane. Toutefois, une proportion légèrement plus élevée de transferts agrégés entre ménages étaient reçus faits par des ménages dont le revenu était supérieur à la médiane que ceux dont le patrimoine était plus élevé que la médiane.
Transferts entre ménages en proportion du revenu
L'importance des transferts entre ménages par rapport au revenu des ménages donateurs et bénéficiaires est un indice du niveau relatif des ressources transférées. L'importance relative des transferts devrait être plus élevée chez les bénéficiaires que les donateurs. Les transferts volontaires n'ont été ni soustraits du revenu des donateurs ni ajoutés au revenu des bénéficiaires dans ces calculs.
Parmi les donateurs de transferts entre ménages, le ménage médian a envoyé 3 % de son revenu (tableau 4). Parmi les ménages qui ont reçu de tels transferts, le ménage médian a reçu un montant correspondant à 5 % de son revenu.
La majorité des donateurs ont envoyé une portion relativement faible de leur revenu sous la forme de transferts volontaires entre ménages, environ les quatre cinquièmes des donateurs ayant envoyé moins de 10 %. Or, un petit nombre de donateurs (2 %) a dit avoir envoyé plus que le montant gagné en 2008. Ce petit groupe représentait environ 15 % de la valeur totale des transferts volontaires entre ménages en 2008.
Parmi les bénéficiaires, environ les deux tiers des ménages ont dit avoir reçu des transferts correspondant à moins de 10 % de leur revenu. Par contre, environ 7 % de tous les ménages bénéficiaires ont reçu des transferts plus élevés que leur revenu7. Le ratio médian des ménages qui ont reçu plus de 100 % de leur revenu correspondait à 3,2 fois le revenu du ménage. Ces transferts constituaient 37 % de la valeur des transferts volontaires entre ménages reçus en 2008.
Résumé
Dans le présent document, nous avons examiné les enjeux relatifs aux concepts et à la mesure applicables aux transferts volontaires entre ménages. Même si la pratique varie à l'échelle internationale, le Canberra Group (Canberra Group, 2001) et la 17e Conférence internationale des statisticiens du travail (Organisation internationale du Travail, 2004) ont recommandé de mesurer et d'inclure les transferts volontaires et involontaires entre ménages dans la définition du revenu total. Depuis 2006, Statistique Canada mesure les composantes volontaires et involontaires des transferts entre ménages dans une seule enquête. Néanmoins, les transferts volontaires entre ménages continuent d'être exclus de la définition du revenu total.
En 2008, le montant des transferts volontaires entre ménages reçus par des ménages canadiens était deux fois plus élevé que la valeur totale des paiements de pension alimentaire pour enfants et versés au conjoint. Il se situait dans le même ordre de grandeur que les programmes de paiements de transfert gouvernementaux. Selon les données, tant l'incidence des transferts que le montant total transféré ont augmenté considérablement de 1998 à 2008.
Bien que le montant total transféré des ménages donateurs aux ménages bénéficiaires demeure relativement constant entre les enquêtes, l'incidence estimative des dons varie grandement, allant de 12 % à 40 %. Les séries de questions différentes et un traitement différent de la non-réponse expliquent probablement la majeure partie de cet écart. L'analyse de la répartition fait ressortir le fait que l'Enquête sur les dépenses des ménages, la source de l'estimation de 40 %, avait bien plus de chances de saisir les petits transferts entre ménages que l'Enquête sur la dynamique du travail et du revenu et l'Enquête sur la sécurité financière.
L'incidence et le montant des dons entre ménages augmentaient avec le revenu du ménage pour plus que doubler en passant du quartile inférieur au quartile supérieur. L'incidence des transferts reçus variait bien moins selon le quartile de revenu, les ménages se situant dans les quartiles de revenu supérieur et inférieur étant plus susceptibles de recevoir des transferts que ceux des deuxième et troisième quartiles.
Dans l'ensemble, les donateurs ont envoyé une médiane de 3 % de leur revenu à d'autres ménages, tandis que les bénéficiaires ont reçu un transfert médian correspondant à 5 % de leur revenu. Environ 7 % des bénéficiaires ont dit avoir reçu des transferts supérieurs à leur revenu. En outre, un peu moins de 2 % des donateurs ont mentionné avoir transféré plus que le revenu de leur ménage.
En résumé, les transferts volontaires entre ménages représentent un flux considérable de ressources économiques entre des ménages. Il serait bon de mieux comprendre la dynamique de ces transferts pour brosser un tableau plus complet du bien-être économique des ménages.
Source des données et définitions
Trois enquêtes distinctes de Statistique Canada — l'Enquête sur la dynamique du travail et du revenu (EDTR), l'Enquête sur les dépenses des ménages (EDM) et l'Enquête sur la sécurité financière (ESF) — mesurent les transferts volontaires entre ménages, chacune de manière quelque peu différente.
L'EDTR est menée tous les ans dans les 10 provinces et l'échantillon se compose de 70 000 personnes membres de 26 000 à 28 000 ménages. Les questions sur les transferts volontaires entre ménages ont été introduites en 20068. Dans l'EDTR, on définit cette forme de transfert comme un montant d'argent envoyé ou reçu par les membres de la famille qui ne vivent pas dans le ménage du répondant, ainsi que les paiements de factures faits régulièrement au nom du bénéficiaire. De 2006 à 2008, entre 791 000 et 880 000 ménages ont reçu des transferts volontaires entre ménages et entre 1,4 million et 1,6 million de ménages en ont envoyé au cours d'une année en particulier9.
L'EDM recueille des données sur les dépenses annuelles des ménages. Elle est menée dans les 10 provinces chaque année et dans les 3 territoires aux deux ans. Le nombre de ménages qui ont répondu a varié de 13 900 à 17 200 ménages entre 1997 et 200710. La question sur les transferts volontaires entre ménages n'a pas été posée séparément avant 199811, et il n'est pas possible de déterminer le montant reçu à l'aide de l'EDM. Dans cette enquête, un transfert volontaire entre ménages se définit comme un don en argent envoyé à une personne qui n'est pas membre du ménage. De 1998 à 2007, entre 3,6 millions et 5,4 millions de ménages ont envoyé ce genre de transferts au cours d'une année en particulier12. Grâce aux données de l'EDM, nous pouvons examiner la tendance des transferts volontaires entre ménages envoyés par des ménages canadiens au cours des 11 dernières années. Ces données permettent également d'examiner le concept, la définition et la portée de ces transferts, ainsi que de les comparer à ceux de l'EDTR et de l'ESF.
L'ESF recueille des données sur la valeur nette (le patrimoine) des familles canadiennes, y compris les actifs, les dettes, l'emploi, le revenu et l'éducation. C'est une enquête transversale hors série qui a été menée pour la dernière fois en 200513, qui a été effectuée dans les 10 provinces et à laquelle environ 5 300 familles économiques ont répondu en 2005. L'ESF de 2005 comportait des questions sur le montant des transferts volontaires entre ménages et restreignait la portée des expéditeurs et des bénéficiaires aux membres de la famille. Selon cette définition, 839 000 ménages ont reçu des transferts volontaires en 2005, tandis que 1,8 million de ménages ont envoyé de tels transferts. Les données de l'ESF permettent d'examiner la relation entre les montants des transferts volontaires entre ménages envoyés et reçus, de même que la valeur nette des familles économiques.
L'objet de chaque enquête est différent, par conséquent l'information recueillie sur les transferts entre ménages varie également. Par exemple, les données de l'ESF constituent une source principale de l'Indice des prix à la consommation, tandis que l'EDTR s'attarde surtout au bien-être économique des ménages. Par conséquent, l'EDM exige la déclaration détaillée des postes de dépense (y compris les transferts), alors que les répondants de l'EDTR peuvent donner leur meilleure estimation.
Les différences de formulation entre les enquêtes donnent aussi des estimations différentes. L'EDM mesure les « dons en argent » et il n'y a aucune restriction quant à l'usage des transferts. L'EDTR mesure l'argent envoyé ou reçu, en plus des paiements réguliers versés au nom du bénéficiaire. L'ESF mesure l'argent envoyé pour payer les frais de subsistance du bénéficiaire.
Les enquêtes définissent également de manière différente la portée des transferts volontaires entre ménages. Alors que l'EDM demande aux répondants de déclarer le montant des dons en argent envoyés aux personnes qui ne sont pas des membres de leur ménage, l'EDTR et l'ESF mesurent le montant envoyé aux membres de la famille qui ne vivent pas avec les répondants ou le montant reçu de ceux-ci. Ainsi, l'EDTR et l'ESF excluent une plus grande partie des transferts volontaires entre ménages en dehors de la relation familiale que l'EDM. Un résumé des renseignements sur les transferts entre ménages recueillis par chaque enquête figure au tableau 5.
En ce qui concerne le nombre de donateurs qui ont envoyé des transferts entre ménages, l'EDM compte trois fois plus de ménages que l'EDTR et l'ESF, alors que le montant total envoyé se situe dans le même ordre de grandeur pour les trois enquêtes (tableau 1). Pour ce qui est des bénéficiaires, l'EDTR et l'ESF comportent des nombres semblables de ménages qui ont reçu des transferts volontaires entre ménages, mais les montants totaux reçus par les ménages dans l'EDTR sont deux fois plus élevés que ceux de l'ESF.
Selon une analyse de la répartition, l'EDM permet probablement de mieux déterminer les petits transferts que les autres enquêtes. Le transfert médian envoyé entre ménages est de 2 200 $ dans l'EDTR, de 2 000 $ dans l'ESF et de 500 $ dans l'EDM (graphique A). Dans l'EDM, 40 % des ménages ont déclaré avoir envoyé des transferts entre ménages volontaires, comparativement à moins de 15 % d'entre eux dans l'EDTR et dans l'ESF. Cependant, les ménages du 10 % le plus élevé ont envoyé des dons similaires selon les trois enquêtes.
Les trois courbes montrent que la majeure partie du montant des transferts volontaires entre ménages est envoyée par un faible pourcentage des ménages, moins de 5 % de tous les ménages ayant envoyé plus de 5 000 $ pendant l'année de référence, ce qui signifie que le total estimatif du montant de ces transferts est influencé de manière disproportionnée par un petit nombre de ménages. Il est possible que certains de ces ménages aient déclaré par erreur des héritages et des legs comme des transferts entre ménages plutôt que des transferts de capitaux. Un plafond de 200 000 $ est établi pour les transferts entre ménages dans le questionnaire de l'EDTR. Par ailleurs, il n'existe aucune limite du genre dans l'EDM et l'ESF.
Notes
- Selon les calculs de l'Enquête sur la dynamique du travail et du revenu de 2008.
- Comme il le laisse entendre dans son concept du « revenu social », défini comme étant la somme du revenu d'une personne et la valeur monétaire, selon elle, des caractéristiques pertinentes d'autres personnes (Becker, 1974).
- Les poids bootstrap de l'EDM ont été appliqués aux années de référence disponibles.
- Des tests nous indiquent que les fluctuations se concentrent dans la partie supérieure de la distribution. L'augmentation sur la période est de même importance, mais plus lisse, si on exclut les 1 %, 5 % et 10 % de la partie supérieure des expéditeurs de fonds.
- Le concept du revenu de l'EDTR comprend les transferts involontaires, tels que les pensions alimentaires, et exclut les transferts volontaires.
- Les chiffres de l'ESF s'appliquent aux familles économiques puisque les chiffres au niveau du ménage ne sont pas disponibles.
- Les transferts volontaires entre ménages dont le montant dépassait 100 % du revenu du ménage bénéficiaire peuvent être l'indice d'une forte dépendance à l'égard de l'argent envoyé par des membres ne vivant pas dans le ménage ou de transferts de capitaux déclarés par erreur par les répondants.
- L'EDTR comporte des données sur les paiements de pension alimentaire pour enfants et versés au conjoint depuis 1998.
- Les poids bootstrap mis au point par Statistique Canada pour l'EDTR ont été appliqués afin de mesurer la variance et les erreurs-types dans l'Enquête sur la dynamique du travail et du revenu de 2006, 2007 et 2008.
- La taille de l'échantillon a diminué de 28 % en 2008.
- Avant 1998, la question sur les transferts volontaires entre ménages était combinée à celle sur les paiements de pension alimentaire pour enfants ou versés au conjoint et sur l'allocation de séparation.
- Les poids bootstrap mis au point par Statistique Canada pour l'EDM de 2002 à 2008 ont été appliqués afin de mesurer la variance et les erreurs-types.
- Les données sur les actifs, les dettes et la valeur nette reposent sur les données recueillies pendant la période de référence de 2005. Les questions sur le revenu sont fondées sur les données de 2004.
Documents consultés
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HOULE, René, et Grant SCHELLENBERG. 2008.« Les habitudes de transfert de fonds chez les nouveaux immigrants au Canada », Direction des études analytiques : documents de recherche, no 312, produit no 11F0019M au catalogue de Statistique Canada, Ottawa, 43 p., (site consulté le 26 avril 2011).
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Auteur
Jackson Chung travaille à la Division de la statistique du revenu. On peut communiquer avec lui au 613-951-4005 ou à perspective@statcan.gc.ca.
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