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Par Sharanjit Uppal
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Au Canada, l'âge normal de la retraite reste 65 ans, c'est-à-dire que les personnes ont alors droit au plein montant des prestations de pensions de l'État si elles satisfont aux exigences en matière de travail et de résidence1. Cependant, un certain nombre de modifications stratégiques ont été apportées afin de réduire les obstacles à surmonter par les personnes âgées qui veulent rester sur le marché du travail. Ainsi, la retraite obligatoire a été abolie dans la plupart des administrations et l'exemption au titre du revenu gagné aux fins du Supplément de revenu garanti a récemment été augmentée. Outre les décideurs, l'offre de travailleurs âgés peut intéresser les employeurs qui ont, par exemple, des préoccupations quant au transfert de connaissances et à la pénurie de main-d'œuvre.
Malgré l'importance de ces questions, on sait relativement peu de choses sur l'incidence de facteurs clés tels que la scolarité, la santé et la situation financière sur l'activité des personnes âgées sur le marché du travail. D'autres études ont été consacrées à la disponibilité de main-d'œuvre au-delà de l'âge habituel de la retraite fixé à 65 ans (Duchesne, 2002 et 2004; Haider et Loughran, 2001; Walsh, 1999; Blau et Riphahn, 1999)2, mais il y a peu d'études récentes sur l'activité des personnes âgées sur le marché du travail au Canada3.
La présente étude poursuit trois grands objectifs. Premièrement, elle indique de façon détaillée les tendances en ce qui a trait à l'activité sur le marché du travail des personnes âgées en calculant le taux d'emploi chez les personnes âgées d'au moins 65 ans et en examinant leurs profils industriel et professionnel. Deuxièmement, elle examine les facteurs pouvant être liés à l'activité sur le marché du travail après l'âge de 64 ans. Enfin, elle examine l'intensité du travail et les caractéristiques associées au travail à temps plein toute l'année, dans le cas des personnes âgées. L'étude a été réalisée à partir des données du recensement, ce dernier étant la seule source de données offrant un échantillon de taille appropriée et des données suffisamment variées et complètes pour permettre un examen détaillé des travailleurs âgés.
En 2006, environ 1 personne âgée sur 10 était sur le marché du travail. L'activité était plus élevée chez les hommes (14,8 %) que chez les femmes (5,8 %). En 1981, ces taux étaient de 15,9 % dans le cas des hommes et de 5,3 % dans le cas des femmes (graphique A).
Les tendances à long terme pour ce qui est de l'emploi chez les personnes âgées peuvent être réparties en fonction de trois périodes : une période marquée par une diminution significative (de 1981 à 1986), une période au cours de laquelle le taux était relativement stable (de 1986 à 1996) et une période au cours de laquelle les taux d'emploi ont augmenté (de 1996 à 2006). Dans le cas des hommes, le taux a fléchi de 2,6 points de pourcentage entre 1981 et 1986, et cette diminution a été suivie de baisses moins importantes au cours des 10 années suivantes, pour atteindre 11,8 % en 1996. Les augmentations survenues au cours des deux années suivantes de recensement ont eu pour effet de porter le taux d'emploi des hommes âgés à près de 15 % en 2006. Pour ce qui est des femmes âgées, le taux d'emploi a oscillé entre 4 % et 6 % au cours de la période et s'est soldé par un gain de 1,4 point de pourcentage entre 2001 et 20064.
Parmi les personnes âgées occupées, celles de 65 à 69 ans représentaient 56,5 % des hommes occupés et 60,1 % des femmes occupées (en 2006), alors que celles de 70 à 74 ans représentaient 24,5 % des hommes et 23,0 % des femmes (graphique B). Les personnes âgées de 75 à 79 ans constituaient, pour leur part, 11,9 % des hommes occupés et 10,0 % des femmes occupées, alors que les personnes de 80 ans et plus représentaient environ 7 % des personnes âgées occupées.
L'activité des personnes âgées sur le marché du travail diminue généralement avec l'âge. Ainsi, les hommes âgés de 65 à 69 ans affichaient un taux d'emploi plus élevé que leurs homologues plus âgés et présentaient également la plus forte augmentation récente entre 2001 et 2006, soit 5,1 points de pourcentage (graphique C). Pendant toute la période allant de 1981 à 2006, les taux d'emploi ont grimpé beaucoup plus rapidement dans le cas des femmes âgées de 65 à 69 ans que dans celui de tout autre groupe.
Les taux d'emploi diminuent généralement de 40 % à 50 % chez les hommes et de 50 % à 60 % chez les femmes lorsqu'ils passent du groupe des 65 à 69 ans au groupe des 70 à 74 ans. En 2006, les hommes âgés de 70 à 74 ans affichaient à peu près le même taux d'emploi qu'en 1981, après avoir enregistré des baisses puis des augmentations. Le taux d'emploi des femmes faisant partie de ce groupe d'âge a progressé de 1,2 point de pourcentage au cours de cette période de 25 ans. Le taux d'emploi était moins élevé dans le cas des travailleurs âgés de 75 ans et plus et n'a pas varié de manière significative au cours de la même période.
Les travailleurs âgés œuvraient principalement dans quelques industries (tableau 1)5. Ainsi, on retrouvait les deux tiers des hommes âgés occupés dans trois industries, soit les services de consommation, les services aux entreprises et le secteur primaire. Les services de consommation occupaient toutefois le premier rang, puisqu'ils regroupaient 28,8 % des hommes âgés qui travaillaient en 2006. Pour ce qui est des femmes âgées, plus des deux tiers d'entre elles œuvraient dans les secteurs des services de consommation, des services aux entreprises et de la santé, dont 36,4 % dans le domaine des services de consommation.
Les hommes et les femmes âgés ne travaillaient pas nécessairement dans les mêmes industries. L'écart hommes-femmes était le plus marqué dans le secteur de la santé puisque 14,8 % des femmes occupées travaillaient dans cette industrie en 2006, comparativement à seulement 4,7 % des hommes occupés. En revanche, les hommes étaient plus susceptibles de travailler dans le secteur primaire, ainsi que dans la construction et les services publics.
En 2006, le profil industriel des travailleurs âgés était bien différent de celui des travailleurs plus jeunes. Ainsi, les hommes âgés étaient beaucoup plus susceptibles de travailler dans le secteur primaire (17,1 % des travailleurs âgés par rapport à 5,8 % des travailleurs plus jeunes), alors que les hommes âgés de 25 à 64 ans étaient beaucoup plus susceptibles d'œuvrer dans le secteur de la fabrication (17,7 % des travailleurs plus jeunes contre 8,3 % des travailleurs âgés) et dans les administrations publiques (6,5 % des travailleurs plus jeunes comparativement à 2,8 % des travailleurs âgés). Chez les femmes, celles qui étaient âgées étaient beaucoup plus susceptibles de travailler dans le secteur primaire (11,1 % des travailleuses âgées par rapport à 2,3 % des travailleuses plus jeunes) et dans le domaine des services de consommation (36,4 % des travailleuses âgées contre 28,8 % des travailleuses plus jeunes) mais moins susceptibles de travailler dans les administrations publiques (3,1 % des travailleuses âgées comparativement à 6,5 % des travailleuses plus jeunes).
Les secteurs d'activité des travailleurs âgés ont changé de manière significative entre 2001 et 2006 (tableau 2)6. Les hommes âgés œuvraient principalement dans le domaine des services de consommation au cours des deux années, mais l'emploi dans d'autres industries a fluctué considérablement au cours de la période. Le secteur primaire a enregistré le recul le plus important puisque la proportion de travailleurs âgés y a diminué de 5,6 points de pourcentage entre 2001 et 2006. Par contre, la construction et les services publics ont enregistré la plus forte augmentation (1,4 point de pourcentage). Pour ce qui est des femmes âgées occupées, le secteur de la santé est celui qui a connu la plus forte hausse au cours de la période, soit 2,3 points de pourcentage. En revanche, la proportion de femmes âgées travaillant dans le secteur primaire a fléchi de 5,6 points de pourcentage entre 2001 et 2006.
Les hommes âgés qui travaillaient étaient principalement des exploitants agricoles et des gestionnaires d'exploitations agricoles puisque 11,5 % d'entre eux exerçaient ces professions en 2006 (tableau 3). La situation était différente dans le cas des hommes âgés de 25 à 64 ans car seulement 1,6 % d'entre eux étaient des exploitants agricoles et des gestionnaires d'exploitations agricoles. La profession de vendeur et commis vendeur occupait le deuxième rang chez les hommes âgés qui travaillaient puisqu'on y retrouvait 3,8 % d'entre eux en 2006. Les troisième et quatrième professions en importance étaient celles de conducteur de camions et de concierge et concierge d'immeubles, avec 2,9 % chacune. Les femmes, quant à elles, œuvraient principalement comme vendeuses et commis vendeuses (6,6 % des travailleuses âgées comparativement à 3,8 % des travailleuses plus jeunes).
Les personnes âgées qui travaillaient étaient concentrées dans un plus petit nombre de professions que les travailleurs plus jeunes. Ainsi, les cinq principales professions réunissaient 23,7 % des hommes âgés occupés, contre 12,3 % des travailleurs de 25 à 64 ans. Cette concentration était aussi beaucoup plus élevée dans le cas des femmes âgées puisqu'on retrouvait près de 26 % des femmes occupées de 65 ans et plus dans les cinq principales professions, comparativement à environ 18 % dans le cas des femmes plus jeunes.
D'importants changements sont également survenus en ce qui a trait au profil professionnel des personnes âgées entre 2001 et 2006 (tableau 4). Premièrement, le taux de concentration a diminué au cours de la période puisque les 25 principales professions regroupaient 50,4 % des hommes qui travaillaient en 2006 (par rapport à 53,6 % en 2001). Chez les femmes, la proportion est passée de 62,3 % à 59,8 % au cours de la même période. La diminution a été particulièrement marquée dans le cas des exploitants agricoles et des gestionnaires d'exploitations agricoles. Ainsi, entre 2001 et 2006, la proportion d'hommes âgés œuvrant dans ce secteur est passée de 17,6 % à 11,5 %. Pour ce qui est des femmes, cette proportion est passée de 10,1 % à 6,1 %. La proportion de femmes âgées a augmenté dans beaucoup d'autres professions, notamment celles de vendeuses et commis vendeuses, de secrétaires (sauf les domaines juridique et médical) et d'infirmières. Le profil professionnel des travailleurs âgés est donc devenu plus varié.
Quatre facteurs peuvent revêtir une importance particulière en ce qui a trait à l'activité des personnes âgées sur le marché du travail (voir Source des données et définitions). Il s'agit de la situation financière (revenu familial autre que le revenu d'emploi personnel, ajusté en fonction de la taille de la famille), du niveau de scolarité, de l'état de santé (calculé par approximation selon les renseignements sur les limitations d'activités) et des obligations financières (calculées par approximation selon l'indicateur relatif aux paiements hypothécaires).
D'après des recherches précédentes, il n'y a pas nécessairement de lien direct entre les ressources financières et l'activité sur le marché du travail chez les travailleurs âgés. Le lien varie selon le niveau de revenu et les autres sources de revenu. À l'extrémité inférieure, on retrouve les travailleurs ayant de faibles niveaux de revenus autres que les gains personnels, qui doivent parfois travailler pour maintenir un niveau de vie minimal. À l'autre extrémité, on retrouve les travailleurs ayant des niveaux élevés de revenus autres que les gains personnels, qui sont généralement plus scolarisés et, comme le niveau de scolarité est lié positivement à l'emploi (Haider et Loughran, 2001), ils sont plus susceptibles de travailler. En outre, les travailleurs ayant des niveaux élevés de tels revenus sont plus susceptibles d'avoir un conjoint qui est également sur le marché du travail (étant donné que les gains du conjoint font partie de ces revenus). Des recherches précédentes (Blau et Riphahn, 1999; Schirle, 2008) démontrent qu'une personne au sein d'un couple est beaucoup plus susceptible de travailler si son conjoint occupe un emploi plutôt que s'il ne travaille pas. Par ailleurs, les travailleurs se situant dans les quintiles de revenu plus élevés peuvent être propriétaires d'entreprises.
Pour tenir compte de la taille du revenu et des effets de composition de celui-ci, on a examiné le revenu total et ses différentes composantes. Le revenu total, « autres revenus familiaux », est le revenu familial moins le revenu d'emploi (le cas échéant), et il est ajusté en fonction de la taille de la famille (voir Source des données et définitions). Ces autres revenus familiaux sont formés de trois grandes composantes : pensions de l'État (Régime de pensions du Canada ou Régime de rentes du Québec, Sécurité de la vieillesse et autres transferts gouvernementaux [par exemple, le Supplément de revenu garanti]), revenus personnels (régimes privés de pension, régimes enregistrés d'épargne-retraite, revenus de placements et autres revenus en espèces) et revenu d'emploi des autres membres de la famille7. Les résultats descriptifs sont présentés dans le cas des autres revenus familiaux, alors que les trois composantes sont intégrées à des modèles multivariés.
Les hommes et les femmes se situant dans les quintiles le moins élevé et le plus élevé au chapitre des autres revenus familiaux étaient plus susceptibles de travailler que leurs homologues faisant partie des deuxième, troisième et quatrième quintiles. En 2006, 18,7 % des hommes se situant dans le premier quintile et 18,3 % des hommes faisant partie du cinquième quintile étaient occupés (graphique D). Dans le cas des deuxième, troisième et quatrième quintiles, les proportions étaient de 12,7 %, 13,5 % et 14,2 % respectivement. Les tendances étaient les mêmes pour les femmes, mais à des niveaux moins élevés que dans le cas des hommes.
Les personnes âgées ayant un niveau de scolarité élevé sont beaucoup plus susceptibles de continuer à travailler au-delà de l'âge habituel de la retraite (Haider et Loughran, 2001; Parries et Sommers, 1994) [graphique E]. Ainsi, en 2006, 25,2 % des hommes détenant au moins un grade universitaire étaient occupés, comparativement à 11,3 % de ceux sans diplôme d'études secondaires. Chez les femmes, les taux respectifs étaient de 14,4 % et de 3,4 %. Les taux d'emploi des personnes ayant un niveau de scolarité intermédiaire se situaient entre ces deux extrêmes. L'une des raisons expliquant le lien positif entre le niveau de scolarité et l'emploi chez les personnes âgées réside dans le fait que les emplois nécessitant un niveau de scolarité plus élevé sont généralement moins exigeants sur le plan physique (Park, 2007). Les limitations physiques associées au vieillissement sont donc moins susceptibles d'entraîner la retraite.
L'état de santé est également un facteur déterminant de l'activité des personnes âgées sur le marché du travail. Les limitations d'activités, l'un des principaux éléments de l'état de santé des personnes âgées, sont associées négativement à l'emploi chez les personnes âgées (Haider et Loughran, 2001; Parries et Sommers, 1994). En 2006, 21,8 % des hommes âgés et 24,0 % des femmes âgées ont indiqué qu'ils étaient « souvent » limités dans leurs activités quotidiennes. Par ailleurs, 26,2 % des hommes et 27,5 % des femmes ont déclaré qu'ils étaient « parfois » limités. Les limitations d'activités sont associées aux décisions en matière d'emploi (graphique F). Dans le cas des hommes, 20,1 % de ceux qui n'avaient aucune limitation étaient occupés, alors que 13,1 % de ceux qui étaient « parfois » limités et 7,3 % de ceux qui étaient « souvent » limités travaillaient. Chez les femmes, 8,9 % de celles qui n'avaient indiqué aucune limitation étaient occupées, alors que moins de 5 % de celles qui avaient une limitation quelconque travaillaient.
Enfin, les personnes âgées ayant des dettes peuvent être contraintes de rester sur le marché du travail pour acquitter leurs obligations financières8. Le recensement ne brosse pas un tableau complet de la situation financière, mais il fournit des renseignements à propos de l'emprunt hypothécaire, la principale dette de la plupart des particuliers. Ainsi, 18,8 % des hommes âgés et 16,3 % des femmes âgées ont déclaré que leur ménage effectuait des paiements hypothécaires réguliers. Par ailleurs, 20,9 % des hommes et 28,8 % des femmes n'étaient pas propriétaires de leur logement. Les autres avaient une maison qui n'était pas grevée d'une hypothèque. Dans l'ensemble, 22,1 % des hommes et 9,9 % des femmes payant une hypothèque étaient toujours sur le marché du travail (graphique G). Les personnes âgées ne payant pas d'hypothèque, qu'il s'agisse de locataires ou de propriétaires ayant acquitté leur hypothèque, étaient moins susceptibles de travailler.
Pour évaluer le lien possible entre les facteurs mentionnés précédemment et la probabilité d'occuper un emploi, on a établi un modèle logit faisant état des quatre facteurs explicatifs à titre de variables indépendantes. On a également inclus diverses variables sociodémographiques à titre de facteurs de contrôle.
Les résultats montrent que le niveau de scolarité est associé positivement à l'emploi (tableau 5). Ainsi, lorsqu'on a utilisé les femmes ayant un diplôme d'études secondaires comme groupe de référence, on a constaté que celles dont le niveau de scolarité est le moins élevé étaient moins susceptibles d'occuper un emploi. En revanche, les femmes ayant des niveaux de scolarité plus élevés étaient plus susceptibles de travailler. C'était particulièrement le cas des femmes titulaires d'un grade universitaire. En fait, le rapport de cotes9 pour ces dernières était deux fois plus élevé que pour celles ayant un diplôme d'études secondaires. Chez les hommes, ceux sans diplôme d'études secondaires ou ceux ayant un certificat d'apprenti ou un certificat d'une école de métiers étaient moins susceptibles d'occuper un emploi. Par contre, les hommes ayant un grade universitaire étaient les plus susceptibles de travailler, tout comme les femmes.
Une hypothèque peut constituer une bonne approximation du niveau d'endettement total d'un ménage. Les propriétaires ne payant pas d'hypothèque et les non-propriétaires étaient moins susceptibles de travailler que les personnes qui effectuaient des paiements hypothécaires réguliers10. Les rapports de cotes étaient de 0,45 et 0,08 plus bas respectivement chez les hommes n'ayant pas d'hypothèque et les hommes qui n'étaient pas propriétaires de leur logement. Pour ce qui est des femmes, les rapports de cotes ayant trait à ces deux catégories représentaient 0,45 et 0,21 de moins respectivement.
Les personnes âgées ayant des limitations d'activités étaient également moins susceptibles d'occuper un emploi. Ainsi, le rapport de cotes dans le cas des hommes ayant déclaré être « parfois » limités représentait 0,32 de moins que dans le cas des hommes n'ayant pas de limitation d'activités. Le rapport de cotes était encore moins élevé (0,61 de moins) chez les hommes ayant indiqué être « souvent » limités, ce qui démontre la gravité d'une incapacité. De même, le rapport de cotes représentait 0,61 de moins dans le cas des femmes ayant déclaré être souvent limitées et 0,36 de moins dans le cas des femmes parfois limitées.
Le modèle indique que les hommes se situant dans les quintiles inférieur et supérieur au chapitre des autres revenus familiaux étaient plus susceptibles d'occuper un emploi que ceux se trouvant dans le quintile intermédiaire, alors que le coefficient pour le deuxième quintile ne différait pas de manière significative de celui du quintile intermédiaire11. Si on le compare à celui du quintile intermédiaire, le rapport de cotes des hommes se situant dans le quintile inférieur représentait 0,51 de plus. Le nombre correspondant pour les hommes dans le quintile supérieur était de 0,15. De même, les femmes se trouvant dans les quintiles de revenu inférieur et supérieur étaient plus susceptibles d'occuper un emploi que les femmes se situant dans le quintile intermédiaire. Cependant, les femmes dans les deuxième et quatrième quintiles de revenu étaient moins susceptibles de travailler. Les rapports de cotes pour les femmes se situant dans les premier et cinquième quintiles représentaient respectivement 0,59 et 0,11 de plus que celui des femmes se trouvant dans le quintile intermédiaire. En revanche, les rapports de cotes pour les femmes faisant partie des deuxième et quatrième quintiles représentaient respectivement 0,07 et 0,12 de moins.
Les statistiques descriptives montrent que les hommes et les femmes se trouvant dans les quintiles de revenu inférieur et supérieur étaient plus susceptibles de travailler. Toutefois, étant donné que l'emploi était aussi lié positivement à un niveau de scolarité élevé et que les personnes se situant dans le quintile de revenu supérieur sont également plus susceptibles d'être très scolarisées, on pourrait s'attendre à ce que l'incidence de faire partie du quintile supérieur sur l'emploi soit beaucoup moins grande lorsque les variables relatives à la scolarité sont prises en considération. Cependant, même après avoir pris en compte la scolarité, les hommes se trouvant dans le quintile supérieur étaient toujours plus susceptibles de travailler que ceux qui se situaient dans le quintile intermédiaire. L'une des explications possibles est qu'un niveau élevé d'autres revenus familiaux peut indiquer que d'autres membres de la famille travaillent. En outre, la source des autres revenus peut influer sur la décision de travailler ou non.
Pour étudier l'incidence des autres revenus familiaux de façon plus détaillée, on les a répartis en trois composantes : pensions de l'État (Régime de pensions du Canada ou Régime de rentes du Québec, Sécurité de la vieillesse et autres transferts gouvernementaux [par exemple, le Supplément de revenu garanti]), revenus personnels (régimes privés de pension, régimes enregistrés d'épargne-retraite, revenus de placements et autres revenus en espèces) et un indicateur quant à la présence d'un autre membre de la famille ayant des gains d'emploi positifs. Des quintiles liés aux pensions de l'État et aux revenus personnels ont été inclus dans le modèle. Cependant, les gains d'autres membres de la famille ne pouvaient pas être répartis en quintiles étant donné que dans environ 70 % des cas, il n'y n'avait pas d'autres membres de la famille ayant des gains positifs.
Les hommes et les femmes se situant dans les deux quintiles supérieurs au chapitre des pensions de l'État et des revenus personnels étaient alors moins susceptibles d'occuper un emploi que leurs homologues se trouvant dans le quintile intermédiaire lorsqu'on faisait abstraction des gains d'autres membres de la famille dans l'équation; par contre, les hommes et les femmes faisant partie des deux quintiles inférieurs pour ce qui est des pensions de l'État et des régimes privés de pension étaient toujours plus susceptibles de travailler (tableau 6). Les personnes âgées vivant avec un membre de la famille ayant des gains positifs (un conjoint dans la plupart des cas) étaient plus susceptibles de travailler, surtout les hommes. La décision de travailler en ce qui concerne les personnes se situant dans le quintile supérieur semble donc axée sur le fait que d'autres membres de la famille (principalement le conjoint) travaillent ou non alors que, dans le cas des personnes dans le quintile inférieur, cette décision est axée sur les revenus relativement peu élevés provenant des pensions de l'État et de sources privées. Les modèles comportaient également des estimations distinctes pour le groupe le moins âgé (65 à 69 ans) étant donné que ce dernier constitue la majorité des travailleurs âgés. Les conclusions demeurent inchangées12.
Le temps que les personnes âgées consacrent au travail présente également un intérêt. Une minorité significative de travailleurs âgés ont déclaré travailler à temps plein toute l'année (graphique H)13. Un peu plus de 40 % des hommes ont travaillé à temps plein toute l'année en 2005. Quant aux femmes, un peu moins d'un tiers d'entre elles ont travaillé à temps plein toute l'année en 2005 (31 %), mais une proportion équivalente (31 %) a travaillé à temps partiel pour une partie de l'année. Ces résultats sont à peu près identiques quelle que soit l'année de recensement.
La proportion de personnes âgées travaillant à temps plein toute l'année ne variait pas beaucoup selon le groupe d'âge (tableau 7). Les hommes âgés de 65 à 74 ans étaient légèrement plus susceptibles de travailler à temps plein toute l'année que ceux âgés de 75 ans et plus (41,8 % contre 40,4 %). Pour ce qui est des femmes, 30,2 % de celles âgées de 65 à 74 ans ont travaillé à temps plein toute l'année en 2005, comparativement à 32,2 % des femmes occupées âgées de 75 ans et plus.
Certaines caractéristiques personnelles et professionnelles étaient associées à une probabilité plus élevée de travailler à temps plein toute l'année. C'était le cas des femmes qui étaient des travailleuses familiales non rémunérées et des hommes qui étaient des travailleurs autonomes. Les hommes et les femmes occupant un poste de gestion étaient beaucoup plus susceptibles de travailler à temps plein toute l'année (53,0 % des hommes et 46,4 % des femmes). En revanche, les travailleurs non qualifiés étaient beaucoup moins susceptibles de travailler à temps plein toute l'année.
Les résultats de la section précédente montrent que les hommes se situant dans le quintile inférieur au chapitre des autres revenus familiaux étaient plus susceptibles d'occuper un emploi. Ils étaient non seulement plus susceptibles d'être occupés, mais également plus susceptibles de travailler de façon plus intensive puisque 50,4 % des hommes occupés et 40,2 % des femmes occupées faisant partie du quintile inférieur ont travaillé à temps plein toute l'année (graphique I).
Les résultats montrent que les hommes se situant dans le quintile supérieur étaient plus susceptibles de travailler que ceux se trouvant dans le quintile intermédiaire. Toutefois, ils étaient moins susceptibles de travailler à temps plein toute l'année, comparativement aux hommes faisant partie des autres quintiles. Les tendances étaient semblables dans le cas des femmes.
Pour vérifier la robustesse des constatations ci-dessus, on a établi un autre modèle logit pour examiner le lien entre différentes variables et la probabilité de travailler à temps plein toute l'année. Les résultats montrent que les personnes âgées qui travaillaient et qui se situaient dans le quintile de revenu inférieur étaient plus susceptibles de travailler à temps plein toute l'année que celles se trouvant dans le quintile intermédiaire, mais c'est le contraire qui se produisait dans le cas des personnes âgées faisant partie des deux quintiles supérieurs (tableau 8). Chez les hommes, le rapport de cotes associé au quintile inférieur était supérieur à celui du quintile intermédiaire (0,46 de plus).
Un niveau de scolarité plus élevé était généralement lié à une probabilité plus faible de travailler à temps plein toute l'année dans le cas des hommes, mais les résultats pour les femmes n'étaient pas aussi clairs. Ainsi, les femmes possédant un certificat d'apprenti ou un certificat d'une école de métiers étaient moins susceptibles de travailler à temps plein toute l'année que celles ayant un diplôme d'études secondaires, les résultats étant statistiquement non significatifs pour les autres niveaux. Les personnes âgées ayant des limitations d'activités étaient moins susceptibles de travailler à temps plein toute l'année que celles qui n'en avaient pas. Enfin, les personnes âgées ne payant pas d'hypothèque étaient moins susceptibles de travailler à temps plein toute l'année.
Les modèles ont été estimés de nouveau après avoir réparti les autres revenus familiaux en fonction des pensions de l'État, des revenus personnels et d'un indicateur quant à la présence d'un autre membre de la famille ayant des gains positifs. Les hommes se situant dans les deux quintiles inférieurs dans le cas des pensions de l'État et des revenus personnels étaient plus susceptibles de travailler à temps plein toute l'année et ceux se trouvant dans les deux quintiles supérieurs l'étaient moins, comparativement aux hommes du quintile intermédiaire (tableau 9). Pour ce qui est des femmes, cette conclusion était valable uniquement pour les revenus personnels.
Dans le cas des revenus provenant d'une pension de l'État, les femmes faisant partie des deux quintiles inférieurs et du quintile supérieur étaient plus susceptibles de travailler à temps plein toute l'année que celles se trouvant dans le troisième quintile. Les hommes et les femmes dont un autre membre de la famille avait des gains positifs étaient plus susceptibles de travailler à temps plein toute l'année.
Lorsque les modèles ont été établis de façon à inclure uniquement les personnes âgées de 65 à 69 ans, les conclusions sont demeurées inchangées dans le cas des hommes mais l'une des conclusions concernant les pensions de l'État a changé dans le cas des femmes — le coefficient pour le cinquième quintile n'était pas statistiquement significatif14.
La plupart des personnes âgées prennent leur retraite à l'âge de 65 ans, mais bon nombre d'entre elles continuent de travailler au-delà de cet âge. Cette situation est attribuable non seulement à l'abolition de la retraite obligatoire, mais également à l'amélioration du niveau de scolarité et de l'état de santé au fil du temps, ce qui permet aux gens de travailler plus longtemps.
Fondée sur les données du recensement du Canada, la présente étude a permis d'examiner les tendances de l'activité sur le marché du travail chez les personnes âgées d'au moins 65 ans de 1981 à 2006. Les données du Recensement de 2006 ont également été utilisées pour examiner les facteurs liés à l'emploi à cet âge. Les résultats montrent que le taux d'emploi chez les personnes âgées s'est accru au cours des dernières années, après avoir diminué dans les années 1980 et au début des années 1990. Ainsi, entre 1996 et 2006, le taux est passé de 11,8 % à 14,8 % dans le cas des hommes et de 4,0 % à 5,8 % dans le cas des femmes.
Bon nombre de personnes ayant également travaillé l'année précédente avaient travaillé à temps plein toute l'année (41,6 % des hommes et 30,6 % des femmes). Les personnes âgées occupées œuvraient principalement dans le domaine des services de consommation et avaient un profil professionnel moins varié que les jeunes travailleurs.
Cette étude a aussi examiné, à l'aide de modèles, l'effet de nombreux facteurs associés à l'activité des personnes âgées sur le marché du travail. Les hommes et les femmes se situant dans les quintiles inférieur et supérieur au chapitre des autres revenus familiaux étaient plus susceptibles d'occuper un emploi que ceux se trouvant dans le quintile intermédiaire, mais le lien était plus important dans le cas des personnes faisant partie du quintile inférieur. Les personnes dans le quintile inférieur étaient non seulement plus susceptibles de travailler, mais elles travaillaient également de façon plus intensive. Cependant, une analyse détaillée des sources de revenu a montré que celles-ci n'avaient pas toutes la même incidence sur la probabilité de travailler en ce qui concerne les personnes âgées. Les sources de revenu personnelles et les pensions de l'État étaient associées négativement à l'activité sur le marché du travail, alors que les gains des membres de la famille (principalement le conjoint) étaient liés positivement à l'activité sur le marché du travail. Un niveau de scolarité plus élevé, l'absence de limitations d'activités et les paiements hypothécaires étaient d'autres facteurs liés à une probabilité plus élevée de travailler. Dans l'ensemble, ces résultats donnent à penser que certaines personnes âgées restent sur le marché du travail par choix, mais bon nombre d'entre elles le font vraisemblablement par nécessité. Par ailleurs, l'intensité du travail dans le cas des personnes ayant des contraintes financières est, de façon significative, plus élevée.
La présente étude a été réalisée à l'aide des données du recensement sur les hommes et les femmes âgés de 65 ans et plus, pour les années 1981, 1986, 1991, 1996, 2001 et 2006. Le recensement a été utilisé comme source de données principalement en raison de la nécessité de procéder à une analyse détaillée et de prélever un échantillon relativement vaste pour divers sous-groupes. Le recensement est effectué une fois tous les cinq ans. Les quatre cinquièmes des ménages reçoivent le questionnaire abrégé, qui renferme des renseignements de base seulement. Les autres ménages (20 %) reçoivent le questionnaire complet, qui renferme non seulement des renseignements de base, mais également des questions beaucoup plus détaillées portant sur différents aspects, notamment l'activité sur le marché du travail. Les résultats pour cet échantillon de 20 % sont ensuite pondérés pour représenter l'ensemble des Canadiens.
Personne occupée : une personne est considérée comme occupée si elle avait un emploi au cours de la semaine de référence (semaine précédant le recensement); c'est le cas, notamment, des personnes temporairement absentes pendant toute la semaine pour cause de vacances, de maladie, de conflit de travail, de congé de maternité ou de congé parental, de conditions météorologiques défavorables, d'incendie, d'obligations familiales ou pour toute autre raison.
Taux d'emploi : nombre de personnes occupées en pourcentage de la population visée.
Employé : une personne rémunérée pour le travail accompli au moyen de salaires, traitements, pourboires ou commissions.
Travailleur autonome : inclut les personnes qui avaient un emploi au cours de la semaine de référence et qui étaient des travailleurs autonomes sans aide rémunérée et non constitués en société, des travailleurs autonomes avec aide rémunérée et non constitués en société, ou des travailleurs rémunérés propriétaires d'une entreprise constituée en société avec ou sans aide rémunérée.
Travailleur familial non rémunéré : une personne travaillant sans rémunération pour un parent dans une entreprise ou une ferme familiale.
Travail : d'après les données antérieures à l'année de recensement, puisque les données sur les semaines travaillées se rapportent à l'année précédente. Une personne est considérée comme un travailleur à temps plein toute l'année si elle a travaillé entre 49 et 52 semaines à temps plein (30 heures ou plus par semaine).
Autres revenus familiaux : cette variable est calculée en soustrayant d'abord le revenu d'emploi personnel (le cas échéant) du revenu total de la famille économique et en effectuant un ajustement en fonction de la taille de la famille en divisant celle-ci par un facteur de redressement tenant compte des besoins relativement moins grands des autres membres de la famille. Les quintiles de revenu sont ensuite calculés à l'aide des autres revenus familiaux ajustés. Il convient de signaler que les renseignements sur les variables relatives au revenu visent l'année précédant l'année de recensement.
Niveau de scolarité : les niveaux de scolarité sont établis en fonction de la variable relative au plus haut certificat, diplôme ou grade. Les diverses catégories sont regroupées en fonction de cinq niveaux. Le niveau le moins élevé, soit le niveau 1, est inférieur à un diplôme d'études secondaires ou l'équivalent. Le niveau 2 vise un diplôme d'études secondaires ou l'équivalent. Le niveau 3 vise un certificat ou diplôme d'une école de métiers, ou un certificat d'apprenti inscrit. Le niveau 4 vise un certificat ou diplôme d'un collège, d'un cégep ou d'un établissement autre qu'une université à la suite d'un programme de formation d'une durée de trois mois à moins d'un an, un certificat ou diplôme d'un collège, d'un cégep ou d'un établissement autre qu'une université à la suite d'un programme de formation d'une durée d'un an à deux ans, un certificat ou diplôme d'un collège, d'un cégep ou d'un établissement autre qu'une université à la suite d'un programme de formation d'une durée de plus de deux ans, ou un certificat ou diplôme inférieur au baccalauréat. Le niveau le plus élevé, soit le niveau 5, inclut le baccalauréat, le certificat ou diplôme supérieur au baccalauréat, les diplômes en médecine, art dentaire, médecine vétérinaire ou optométrie, une maîtrise, ou un doctorat.
Limitations d'activités : les variables ayant trait aux limitations parfois ou souvent présentes sont fondées sur les questions suivantes du recensement, qui portent sur les problèmes de santé qui durent depuis six mois ou plus ou qui sont susceptibles de durer six mois ou plus :
Paiements hypothécaires : la variable est « oui » dans le cas de paiements hypothécaires ou de versements effectués de façon régulière pour rembourser un emprunt, « aucun » s'il n'y a pas de versements; « sans objet » si la personne n'est pas propriétaire du logement. Outre les renseignements sur la valeur du logement et les paiements hypothécaires, le recensement n'inclut pas d'autres critères permettant de mesurer la richesse d'une personne.
Profession : selon la Classification nationale des professions (520 professions)
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Sharanjit Uppal est au service de la Division de la statistique du travail. On peut le joindre au 613-951-3887 ou à perspective@statcan.gc.ca.