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en-tête principal pour « L'emploi et le revenu en perspective »
sous-titre « L'édition en ligne »

Décembre 2002     Vol. 3, no. 12

Les hommes de 55 ans et plus : le travail ou la retraite?

Roman Habtu

La lenteur de la croissance démographique a fait de la population âgée de 55 ans et plus une importante source de main-d'ouvre potentielle. En 2001, près du tiers de la population adulte du Canada avait au moins 55 ans. La taille relative de ce groupe est appelée à augmenter à 40 % d'ici 2026, principalement parce que les enfants du baby-boom vieillissent.

L'attention du public se concentre généralement sur les personnes en emploi et celles en chômage et on accorde relativement peu d'attention aux personnes qui ne sont pas actives sur le marché du travail (voir Sources de données et définitions). Les inactifs constituent par contre une source de main-d'ouvre potentielle. Par exemple, lorsque l'économie prend de l'expansion, de nombreuses personnes qui avaient abandonné l'idée de se chercher un emploi sont réintégrées sur le marché du travail.

Tandis que les enfants du baby-boom ont été suivis par de plus petites générations, l'augmentation de la population active a été comblée par l'immigration et la participation croissante des femmes. Étant donné que les taux d'activité des femmes se rapprochent de ceux des hommes, cette source de croissance potentielle n'existe plus. Les sources qui subsistent sont l'immigration, un sujet bien étudié, et les inactifs plus âgés, un sujet qui ne l'est pas.

Quelles sont les caractéristiques des hommes de 55 ans et plus qui ne sont plus actifs sur le marché du travail et pourquoi ont-ils quitté leur dernier emploi? L'inactivité est-elle « volontaire » (retraite, obligations personnelles ou familiales) ou « involontaire » (incapacité, mise à pied ou autres conditions économiques) note 1 ? Les tendances internationales sont-elles comparables (voir Comparaisons internationales)? Ces questions abordent les inactifs plus âgés comme une source de main-d'ouvre.

L'inactivité augmente chez les hommes plus âgés

L'inactivité varie au cours du cycle de vie. Elle est habituellement élevée chez les jeunes (15 à 24 ans) qui sont aux études, et faible durant les années d'activité au travail (25 à 54 ans). L'inactivité augmente continuellement au cours des années suivantes (55 ans et plus) et dépend de divers facteurs personnels, économiques et sociaux. Si l'inactivité des jeunes est généralement temporaire, celle des travailleurs plus âgés constitue souvent un retrait permanent du marché du travail.

De 1976 à 2001, le taux d'inactivité des travailleurs âgés de 25 à 54 ans a baissé de 12 points de pourcentage (de 27 % à 15 %), majoritairement à cause de la participation accrue des femmes (graphique A). Par contre, le taux des personnes de 55 ans et plus a progressé de 5 points de pourcentage (de 69 % à 74 %).

L'inactivité croissante de la population plus âgée est due tout d'abord à la baisse de participation des hommes plus âgés. L'augmentation de l'inactivité est concentrée chez les hommes de 55 à 64 ans (graphique B). Elle est attribuable en partie à des facteurs extra-économiques, dont l'abaissement de l'âge minimal d'admissibilité aux prestations du Régime de pensions du Canada et du Régime de rentes du Québec à la fin des années 80, la récession du début des années 90 (qui a particulièrement touché les travailleurs plus âgés), la réduction des effectifs de l'État et le recours à la retraite anticipée comme mesure pour le réaménagement des effectifs (Sunter, 2001).

D'un autre côté, l'augmentation de la participation au marché du travail chez les femmes s'est étendue aux groupes d'âge plus élevé. L'inactivité a aussi baissé chez les femmes de 55 à 64 ans, alors qu'elle est restée stable chez celles de 65 ans et plus.

Les hommes de 55 à 59 ans - le point de mire

Même si la décision de prendre sa retraite est une décision personnelle fondée sur de nombreux facteurs, une tendance générale à la retraite anticipée (inactivité accrue) pourrait avoir des conséquences généralisées à mesure que la population vieillit note 2 . Le marché du travail perdrait une mine d'expérience et un apport économique potentiel si l'inactivité continue d'augmenter chez les personnes de 55 à 59 ans. Si l'inactivité était involontaire, les hommes de ce groupe d'âge feraient face à des répercussions économiques puisque l'âge minimum pour être admissible aux prestations du Régime de pensions du Canada et au Régime de rentes du Québec est de 60 ans. Selon le calcul de l'espérance de vie, un homme de 55 ans peut s'attendre à vivre, en moyenne, encore vingt ans. Même rajusté en fonction d'une éventuelle incapacité, le calcul montre qu'il a, en moyenne, encore dix ans d'espérance de vie sans incapacité note 3 .

À un âge donné, les liens avec le marché du travail diminuent de façon spectaculaire ou se rompent carrément. La plupart des personnes de 70 ans et plus entrent dans cette catégorie note 4 . On peut donc s'attendre à ce que les Canadiens plus âgés qui s'apprêtent à quitter définitivement le marché du travail comptent pour beaucoup dans l'inactivité des personnes de 55 ans et plus. Par contre, dans le groupe des 55 à 69 ans, la hausse la plus forte de l'inactivité est attribuable aux personnes de 55 à 64 ans. La proportion des hommes inactifs de 55 à 59 ans a augmenté de 2,5 points de pourcentage entre 1976 et 2001, tandis que leur part au sein de la population n'augmentait que de 0,8 point (tableau 1). La part des 60 à 64 ans au sein de la population est demeurée inchangée, mais la proportion des inactifs a augmenté de 2,2 points. Pour ceux âgés entre 65 et 69 ans, la proportion est demeurée constante.

Le taux d'inactivité des hommes de 55 à 59 ans s'est amplifié, passant de 16 % en 1976 à 28 % en 2001, après avoir atteint un sommet avec 29 % en 1998 (graphique B). En 1976, 78 000 hommes de 55 à 59 ans n'étaient pas actifs sur le marché du travail. En 2001, ce nombre avait grimpé à 220 000, ce qui est supérieur au nombre annuel moyen d'immigrants (212 000) pour la période de 1997 à 2001.

Depuis 1976, le taux d'inactivité a augmenté dans toutes les régions (graphique C). De l'est à l'ouest du pays, le taux diminue, la région de l'Atlantique enregistrant le taux le plus élevé, et les Prairies le plus faible pour 2001. Si le taux d'inactivité est influencé par les conditions du marché du travail à l'échelle régionale, il l'est aussi par une foule de facteurs personnels, économiques et sociaux.

Étant donné l'augmentation de longue date de l'inactivité des hommes de 55 à 59 ans, quelles sont leurs caractéristiques et pour quelles raisons ont-ils quitté leur dernier emploi? Les baisses récentes marquent-elles un renversement des tendances à long terme? Observe-t-on ces tendances dans d'autres pays?

La plupart ont quitté le marché du travail depuis plus d'un an

Même si les facteurs qui sous-tendent l'inactivité ont changé, la majorité des hommes inactifs de 55 à 59 ans, tant en 1989 qu'en 2001, avaient quitté leur dernier emploi plus d'un an auparavant. La proportion d'inactifs récents est passée de 26 % en 1989 à 19 % en 2001, alors que celle des hommes qui avaient travaillé au cours des 13 à 60 derniers mois est restée pratiquement inchangée (40 % en 1989 et 42 % en 2001). La proportion des inactifs de longue date a progressé légèrement (de 34 % en 1989 à 40 % en 2001).

Cette hausse pourrait révéler une tendance troublante. Les inactifs de longue date auraient quitté leur emploi entre l'âge de 50 et 54 ans, ce qui supposerait que des travailleurs relativement jeunes pourraient quitter le marché du travail durant une période de croissance démographique lente. De plus, une majorité (93%) d'hommes inactifs en 2001 ne voulaient pas de travail selon l'Enquête sur la population active note 5 . Une récente étude a aussi démontré que plus de la moitié des hommes de 55 à 59 ans ayant quitté volontairement leur emploi ne travaillaient toujours pas deux ans plus tard, ce qui donne à penser qu'ils ont quitté définitivement le marché du travail (Pyper et Giles, 2002) note 6 .

Scolarité

D'importants changements sont survenus au cours des 25 dernières années dans le profil éducationnel des hommes inactifs de 55 à 59 ans. Dans les années 70, l'inactivité était presque exclusivement du domaine des hommes moins éduqués (graphique D). Le taux d'inactivité des hommes de ce groupe d'âge ayant fait des études universitaires est maintenant presque à égalité à celui des hommes ayant fait des études élémentaires seulement. En 1976, l'écart entre les hommes titulaires d'un diplôme universitaire et ceux qui comptaient au plus huit années de scolarité était de plus de 50 points de pourcentage. En 2001, ce dernier était tombé à moins de 2 points de pourcentage avec 18 % des hommes inactifs de ce groupe d'âge détenant un diplôme universitaire. La même année, la proportion des hommes qui comptaient au plus huit années de scolarité était tombée à moins de 20 %, alors qu'elle atteignait près de 60 % en 1976 note 7 .

Ces améliorations reflètent l'augmentation du niveau de scolarité de la population dans son ensemble. Il se peut aussi que les travailleurs qui possèdent un niveau de scolarité élevé aient accès à une retraite plus avantageuse, ce qui rend la retraite anticipée plus attrayante note 8 . Quel que soit le motif de l'inactivité, l'augmentation de cette dernière au sein d'un groupe d'âge caractérisé par un niveau d'expérience et de scolarité élevé laisse entrevoir la perte d'une main-d'ouvre qualifiée.

Les inactifs récents

À l'heure actuelle, les inactifs récents comptent pour près de 20 % du total des inactifs. Bien qu'ils soient relativement peu nombreux, ils constituent un groupe important du point de vue analytique parce qu'on dispose de renseignements sur leur emploi antérieur et sur les raisons de leur départ note 9 . La profession, le secteur d'activité et la raison du départ peuvent donner des indices des façons de prolonger leurs liens avec le marché du travail note 10 . En outre, contrairement aux personnes qui sont inactives depuis plus longtemps, les inactifs récents pourraient être en mesure de réintégrer le marché du travail assez rapidement. Comparativement à tous les hommes inactifs de 55 à 59 ans en 2001, deux fois plus d'hommes récemment inactifs ont déclaré qu'ils désiraient un emploi.

La plupart travaillaient dans le secteur privé

La proportion d'hommes récemment inactifs et qui travaillaient auparavant dans le secteur privé a connu une augmentation supérieure à tout autre groupe au cours de la période de 1989 à 2001. Les secteurs public et privé ont perdu proportionnellement plus d'hommes âgés entre 55 et 59 ans qui sont devenus inactifs en 2001 (25 % et 61 % respectivement), que d'hommes qui ont travaillé dans ces secteurs en 2000 (17 % et 54 %). Le secteur public a été durement touché (tableau 2) note 11 . En 2001, la proportion des inactifs récents qui avaient été des travailleurs indépendants a aussi augmenté (14 %) note 12 .

La hausse de l'inactivité des anciens travailleurs indépendants a de quoi étonner puisqu'en 2000, l'âge médian de la retraite était plus élevé chez les travailleurs indépendants que chez les hommes dans l'ensemble (66,4 ans contre 61,8 ans). Le travail indépendant a augmenté au cours de la période de 1988 à 2000 chez les hommes de 54 à 58 ans (pour les années et âges pendant lesquelles les hommes récemment inactifs travaillaient). Il se peut donc que le travail indépendant aie été une transition entre l'emploi et l'inactivité. Les travailleurs plus âgés ont parfois recours au travail indépendant pour arrondir leurs revenus de pensions ou simplement pour rester sur le marché du travail avant de le quitter définitivement.

Une majorité d'inactifs récents étaient précédemment employée dans les services. Par contre, en 2001, proportionnellement plus d'hommes âgés entre 55 et 59 ans ont quitté le secteur des biens pour devenir inactifs (42%) que ceux employés dans ce secteur en 2000 (36 %). La moitié des personnes récemment inactives dans le secteur des biens, et même une proportion plus élevée (64 %) des personnes précédemment employées dans le secteur de la fabrication ont déclaré avoir quitté pour prendre leur retraite (données non-illustrées).

La plus forte proportion d'inactifs récents provenait des professions des métiers, du transport et de machinerie (29 %) suivi par les professions des ventes et services; de la transformation, de la fabrication et des services d'utilité publique (12 %); et des professions du secteur des sciences sociales, de l'enseignement et des administrations publiques (10 %). Par contre, pour quatre professions - transformation, fabrication et services d'utilité publique; métiers, transport et machinerie, professions propres au secteur primaire; sciences sociales, enseignement et administrations publiques - la proportion des inactifs récents était significativement plus élevée que leur proportion chez les personnes employées dans ces professions en 2000.

La proportion des hommes récemment inactifs dans les professions des sciences sociales, de l'enseignement et des administrations publiques peut refléter les tendances à la retraite anticipée dans le secteur public. Les trois-quarts des hommes récemment inactifs dans ces professions ont indiqué qu'ils avaient quitté leur dernier emploi pour prendre leur retraite. De plus, ces professions avaient l'âge médian de la retraite le plus bas (57,3 ans) en 2000 et comptaient l'une des plus fortes proportions d'employés de 55 ans et plus (Enquête sur la population active, 2001).

La retraite - principale raison de départ du dernier emploi

En 2001, la moitié des inactifs récents ont déclaré que la retraite était la raison de leur cessation d'emploi, contre seulement 20 % en 1976 (graphique E). La décision de prendre une retraite anticipée pourrait être influencée par un certain nombre de facteurs d'ordre personnel (santé, revenu et loisirs), économique et social (situation économique, demande de main-d'ouvre et politiques sociales). La protection en matière de pensions constituerait un élément important de cette décision; ainsi, les taux élevés offerts par les régimes de retraite à Terre-Neuve et au Labrador, de même qu'au Québec semblent liés à la tendance à quitter pour la retraite anticipée dans ces provinces (Kieran, 2001) note 13 .

Par ailleurs, les répondants qui ont invoqué la retraite comme raison pour avoir quitté leur dernier emploi étaient, selon toute vraisemblance, très instruits; or, on a démontré que la protection en matière de pensions augmentait en fonction du niveau de scolarité (Morissette et Drolet, 2001). En 2001, 18 % avaient obtenu un diplôme universitaire, mais le taux grimpait à 23 % chez les retraités, ce qui porte à croire que ce groupe bénéficiait de prestations de retraite plus élevées.

Les données fiscales montrent l'importance croissante des pensions; entre 1989 et 1999, le revenu de pension moyen pour tous les hommes de 55 à 59 ans a bondi de plus de 3 000 $, alors que le revenu d'emploi a diminué (graphique F) note 14 . Le revenu tiré d'un travail indépendant a également progressé, ce qui semble confirmer que le travail indépendant constitue un mécanisme de transition chez les hommes de ce groupe d'âge. Le revenu d'autres sources et les paiements de transferts ont aussi augmenté, alors que le revenu de placements a diminué. note 15 

Les conditions économiques sont aussi importantes

Les conditions économiques, la deuxième raison pour la cessation d'emploi (graphique E), ont été citées par plus du tiers des personnes qui étaient récemment inactives en 2001 - une proportion presque inchangée par rapport à celle de 1989, une année expansionniste. Des études récentes montrent également que chez les hommes de 50 à 65 ans, la cessation d'emploi est attribuable en bonne partie à un départ involontaire causé par une mise à pied (Rowe et Nguyen, 2002).

Parmi ceux qui, en 2001, ont quitté leur dernier emploi pour des raisons économiques, 13 % ont invoqué la situation de l'entreprise (dont la fermeture ou la vente de l'entreprise), 12 % la fin d'un emploi saisonnier et 5 % la fin d'un travail temporaire ou contractuel.

Incapacité

En 1976, chez les hommes de 55 à 59 ans, le quart des inactifs récents ont déclaré que la maladie ou l'incapacité, plutôt que la retraite, était la raison pour laquelle ils avaient quitté leur emploi (graphique E). En 2001, cette proportion avait baissé de près de la moitié pour s'établir à 12 %. Cette tendance pourrait s'expliquer entre autres par l'amélioration globale de la santé au sein de la population. Un autre facteur pourrait être lié à l'association positive entre l'éducation et la santé. Une proportion relativement faible de diplômés universitaires a invoqué l'incapacité comme raison de départ (11 % contre 18 % dans l'ensemble).

Le Régime de pensions du Canada (RPC) et le Régime de rentes du Québec (RRQ) constituent le plus important programme canadien de protection contre l'invalidité. À part la prestation de survivant, la prestation d'invalidité est la seule prestation du RPC qui est payable avant l'âge de 60 ans. Les travailleurs qui répondent aux exigences médicales et qui ont cotisé au RPC durant quatre des six dernières années sont éligibles. De 1981 à 2001, le taux de prestations d'invalidité du RPC (le pourcentage des bénéficiaires des prestations d'invalidité du RPC par rapport à la population active) a augmenté de plus de 2 points de pourcentage chez les hommes de 55 à 59 ans (passant de 3,5 % à 5,7 %). Cette tendance est contraire à celle des cas d'incapacité déclarés dans l'Enquête sur la population active, mais les deux taux ne sont pas comparables. Premièrement, l'EPA ne demande pas la raison pour laquelle les gens ne font pas partie de la population active, mais seulement la raison pour laquelle ils ont quitté leur dernier emploi. Deuxièmement, la proportion des bénéficiaires des prestations d'invalidité du RPC est inférieure à celle des répondants qui ont déclaré avoir quitté leur travail pour cause de maladie ou d'incapacité.

Conclusion

Les hommes de 55 à 59 ans qui ne sont plus actifs sur le marché du travail constituent une importante source potentielle de main-d'ouvre dans une ère de croissance démographique lente. La hausse de l'inactivité chez les hommes plus âgés de plus en plus qualifiés risque d'entraîner une perte économique importante. De 1976 à 2001, les cohortes récentes d'hommes inactifs possédaient des niveaux de scolarité plus élevés. La proportion de titulaires d'un diplôme universitaire a augmenté, passant de 4 % en 1976 à 18 % en 2001, alors que celle des inactifs qui comptaient au plus huit années de scolarité a chuté, passant de 57 % à 19 %.

La retraite constitue la principale raison de départ. En 2001, la moitié des hommes de 55 à 59 ans qui avaient travaillé au cours des 12 derniers mois ont déclaré que la retraite était la raison pour laquelle ils avaient quitté leur dernier emploi, alors que le tiers ont invoqué la situation économique. Moins d'inactifs qu'auparavant quittaient leur travail pour cause de maladie ou d'incapacité, cette cause d'inactivité a reculé de près de moitié entre 1976 et 2001.

De 1989 à 1999, chez tous les hommes de 55 à 59 ans, le niveau moyen et la proportion du revenu de pension ont augmenté. Ces tendances viennent corroborer les résultats donnant à penser que la retraite anticipée constitue l'une des raisons de l'inactivité.

Si une pénurie de main-d'ouvre survient au cours des prochaines années, l'effet incitatif des régimes de pensions publics et privés, des impôts implicites (par exemple, les dispositions de récupération et les facteurs d'équivalence des régimes publics) et d'autres programmes de paiements de transferts gouvernementaux devront être examinés note 16 .

 

Sources des données et définitions

L'Enquête sur la population active (EPA) est une enquête mensuelle menée auprès des ménages pour recueillir des renseignements sur l'activité des personnes de 15 ans et plus. L'EPA répartit la population en âge de travailler en trois catégories qui s'excluent mutuellement : les personnes en emploi, les chômeurs et les personnes qui ne font pas partie de la population active.

L'inactivité caractérise les personnes qui ne sont ni en emploi, ni au chômage.

Le taux d'inactivité, aussi appelé taux d'inactivité économique (voir Comparaisons internationales), comprend les personnes inactives sous forme de pourcentage des personnes du même groupe d'âge.

Les inactifs récents comprennent les personnes dont l'emploi a pris fin au cours des 12 derniers mois; les inactifs relativement récents : dont l'emploi a pris fin au cours des 13 à 60 derniers mois; et les inactifs de longue date : dont l'emploi a pris fin il y a au moins 61 mois.

Les détails recueillis par l'EPA sur les inactifs dépendent de la durée de leur inactivité. Pour ceux devenus inactifs au cours des 12 derniers mois, on recueille les raisons détaillées pour la cessation d'emploi (telles la retraite, les obligations personnelles ou familiales ou les facteurs liés à l'employeur ou à l'économie). On dispose aussi de données sur le secteur d'activité, la profession et la catégorie de travailleurs liées au dernier emploi. On dispose de données sur le niveau de scolarité de tous les répondants, quelle que soit la durée de leur inactivité.

Statistiques de l'OCDE sur le marché du travail est une publication annuelle qui fournit des renseignements détaillés sur le marché du travail d'après les statistiques nationales des pays membres de l'OCDE. Les séries de données qu'elles présentent sont conformes aux définitions internationales adoptées par l'OIT et par l'OCDE. Néanmoins, il existe d'importantes différences conceptuelles et méthodologiques dans les statistiques compilées par les différents pays (aux États-Unis et au Royaume-Uni, par exemple, la définition de « population active » comprend les personnes de 16 ans et plus). On doit donc faire preuve de prudence lorsqu'on établit des comparaisons internationales et retenir qu'elles reflètent uniquement des tendances approximatives.

 

Comparaisons internationales

Aux États-Unis, le taux d'inactivité des personnes de 55 à 59 ans présentait une tendance semblable à celle du Canada : de 1980 à 2000, il a augmenté chez les hommes et diminué chez les femmes (graphique G). En 2000, le taux d'inactivité des hommes s'est redressé à la suite d'une période de déclin, après avoir atteint un sommet en 1994*.

Le Royaume-Uni a aussi démontré la même tendance. Entre 1984 et 2000, le taux d'inactivité global a progressé de 8 % chez les hommes de 55 à 59 ans et baissé de 6 % chez les femmes**.

En France, de 1980 à 2000, le taux d'inactivité des hommes de 55 à 59 ans est passé de 19 % à 34 %, alors qu'il a reculé chez les femmes, ce qui a réduit l'écart entre les deux.

En Allemagne, le taux des hommes de 55 à 59 ans a augmenté entre 1980 et 2000. Le taux a atteint un point culminant de 29 % en 1994 avant de poursuivre sur une ligne continue l'année suivante.

Au Japon, le taux des hommes de 55 à 59 ans est beaucoup plus faible que dans les autres pays du G-7 et le taux global a continué de reculer tant chez les hommes que chez les femmes.

En Italie, la population de référence se compose d'hommes de 50 à 59 ans, et le recul est plus récent; il fait suite à une hausse qui était presque continue depuis 1980. Bien qu'il ait baissé au cours des dernières années, le taux d'inactivité de 2000 demeure près de deux fois plus élevé que celui de 1980.

* Les États-Unis ne subissent pas les mêmes pressions démographiques que le Canada. Entre 1990 et 2000, la population des États-Unis a augmenté de 13 %, comparativement à 11 % au Canada (U.S. Census Bureau; Statistiques démographiques annuelles, 2001, Statistique Canada).

** Au Royaume-Uni, on emploie le terme « inactivité économique » à propos de la population inactive. Reconnaissant que cette population constitue une offre potentielle de main-d'ouvre, on a récemment publié une série d'articles pour attirer l'attention sur cette question (Barham, 2002).

Notes

  1. Les catégories volontaire/involontaire constituent des descriptions très générales de la situation, plutôt que des démarcations rigides. Dans la présente étude, volontaire s'entend d'une décision personnelle en réaction à une situation personnelle ou à la situation du marché du travail. La retraite est considérée comme volontaire parce qu'il n'y a pas d'âge obligatoire de la retraite au Canada, sauf pour certains petits groupes. De plus, à part les prestations d'invalidité, un travailleur n'a pas droit aux prestations des régimes de pensions publics (Régime de pensions du Canada et Régime des rentes du Québec) avant l'âge de 60 ans. Entre 60 et 64 ans, une pénalité est imposée, jusqu'à ce que les personnes de 65 ans et plus reçoivent l'intégralité des prestations de pension (Kieran, 2001). L'inactivité involontaire s'entend des facteurs indépendants de la volonté d'une personne telles l'incapacité, la mise à pied ou toute autre contrainte d'ordre économique.
  2. Avec le temps, le ratio des adultes inactifs aux adultes actifs a augmenté parce que l'espérance de vie s'est accrue (Sunter, 2001). Étant donné la lenteur de la croissance démographique, la hausse de l'inactivité des hommes de 55 à 59 ans risque d'exacerber cette situation.
  3. L'espérance de vie sans incapacité s'entend de l'espérance de vie sans limitation d'activité. D'après les résultats du recensement de 1996, on estime que chez les hommes, l'espérance de vie sans incapacité est de 65,5 ans (Rapports sur la santé, Rapport annuel 2001, nø 82-003-XIF au catalogue de Statistique Canada). Ces estimations seront mises à jour suite à la publication des résultats complets du recensement de 2001.
  4. Si bon nombre de personnes, surtout des hommes, continuent d'être au travail après 65 ans, la majorité ont cependant moins de 70 ans (Duchesne, 2002).
  5. Dans l'Enquête sur la population active, on ne demande pas la question aux personnes qui ont une incapacité permanente de travailler.
  6. L'étude est fondée sur une enquête longitudinale, l'Enquête sur la dynamique du travail et du revenu (EDTR). Emploi s'entend d'un emploi de carrière, comportant une semaine de travail de 35 heures et occupé pendant au moins huit ans.
  7. En 1990, on a révisé les questions de l'Enquête sur la population active qui portaient sur le niveau de scolarité. Il faut donc établir avec prudence les comparaisons portant sur les données d'avant et d'après 1990. Les niveaux de scolarité dans le graphique ont été inclus dans les séries précédent et suivant les révisions.
  8. Il convient de nuancer cette affirmation. Les cohortes récentes d'hommes de 55 à 59 ans qui restaient actifs sur le marché du travail possédaient aussi un niveau de scolarité élevé. Le niveau de scolarité n'est qu'un des facteurs personnels et sociaux motivant le passage à l'inactivité.
  9. Depuis le remaniement de l'Enquête sur la population active effectué en 1997, on ne dispose de renseignements détaillés sur l'emploi (profession, secteur d'activité, catégorie de travailleurs) que dans le cas des personnes ayant été au travail au cours des 12 derniers mois.
  10. Environ 60 % des travailleurs plus âgés, ceux de 50 ans et plus qui ont involontairement mis fin à leur emploi de carrière sont retournés au travail dans les 24 mois (Pyper et Giles, 2002). On peut en déduire que les inactifs récents seraient plus propices à retourner sur le marché du travail.
  11. Les inactifs récents étaient en emploi au cours des 12 derniers mois (en 2000 pour ceux qui sont récemment devenu inactifs en 2001) et qui étaient âgés d'un an de moins (donc, la référence aux personnes âgées de 54 à 58 ans pour ce groupe).
  12. Il serait intéressant de poursuivre l'analyse pour savoir si la durée de l'inactivité varie selon le type d'emploi antérieur. Une étude utilisant les données de l'EDTR révèle que les travailleurs âgés qui ont quitté un travail indépendant sont proportionnellement plus nombreux à retourner au travail dans les deux ans (Pyper et Giles, 2002).
  13. Dans le cas de Terre-Neuve et du Labrador, le taux élevé de retraites anticipées était aussi lié à un taux de chômage élevé dans cette province.
  14. Les tendances démographiques ont fait état d'une hausse de la proportion des hommes de 55 à 59 ans au sein de la population (0,3 point de pourcentage de 1989 à 1999). Toutefois, la proportion des hommes au sein de la population totale qui reçoit un revenu de pension a augmenté d'autant.
  15. Les paiements de transferts comprennent les prestations d'assurance-emploi et le revenu exempt d'impôt en 1999, et les prestations d'assurance-chômage et les allocations familiales en 1989.
  16. Pour des renseignements complets sur cette question, voir Morley Gunderson, « Programmes de la sécurité du revenu - Simulations des effets d'incitation des régimes de retraite privés et universels », rapport d'évaluation de Développement des ressources humaines Canada, mai 2001, nø SP-AH086-05-01F, http://www11.hrdc-drhc.gc.ca/edd/pdf/siepp.pdf l (consulté le 6 décembre 2002).

Documents consultés

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  • ---. 2002c. « Economic inactivity and the labour market », Labour market trends, février, 110, no 2, p. 69 à 77.
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Auteur

Roman Habtu est au service de la Division des enquêtes auprès des ménages et sur le travail. On peut la rejoindre au (613) 951-3830 ou à perspective@statcan.gc.ca.

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© Statistique Canada - Conditions d'utilisation Date de publication : 2002-12-18