Rapports économiques et sociaux
Perceptions à l’égard des valeurs partagées dans la société canadienne parmi la population immigrante

Résumé

La présente étude vise à comparer les perceptions des immigrants et des personnes nées au Canada à l’égard des valeurs démocratiques partagées, comme les droits de la personne, l’égalité des sexes et la diversité ethnique et culturelle, dans la société canadienne. Comparativement aux personnes nées au Canada, une plus grande proportion d’immigrants croient que les Canadiens partagent ces valeurs « dans une grande mesure ». Cette différence de perception variait d’une région à l’autre; elle était plus évidente dans les Prairies et moins évidente dans les provinces de l’Atlantique. La perception à l’égard des valeurs partagées était plus forte chez les immigrants récents que chez les immigrants de longue date. Alors que les personnes qui sont arrivées au Canada à l’adolescence ou à l’âge adulte avaient des perceptions plus favorables à l’égard des valeurs partagées, les immigrants qui sont arrivés pendant leur enfance avaient des perceptions à l’égard des valeurs partagées semblables à celles des personnes nées au Canada. Les immigrants de différentes catégories d’admission (réfugiés, immigrants économiques et immigrants parrainés par des membres de la famille) avaient des perceptions semblables à l’égard des valeurs partagées dans la société canadienne.

Remerciements

Les auteurs tiennent à remercier Cédric De Chardon, Feng Hou, René Houle, et Grant Schellenberg pour leurs conseils et leurs commentaires sur une version antérieure du présent document.

Auteurs

Christoph Schimmele et Max Stick travaillent à la Division de l’analyse sociale et de la modélisation de la Direction des études analytiques et de la modélisation à Statistique Canada. Maciej Karpinski et Seyba Cissokho travaillent à la Division de la recherche en politiques à Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada.

Introduction

L’intégration des immigrants est un concept multidimensionnel qui englobe les contextes économiques, sociaux et politiques et qui devrait inclure le bien-être psychologique des personnes (Harder et al., 2018). De nombreuses évaluations de l’intégration des immigrants permettent de comparer les immigrants avec les personnes nées au Canada en évaluant des indicateurs comme le niveau de scolarité, la situation par rapport au marché du travail, le revenu et la répartition géographique. Bien que ces indicateurs soient des préoccupations importantes, ils fournissent principalement des renseignements sur le capital humain des immigrants, leurs données socioéconomiques et leurs tendances en matière d’établissement. Ils fournissent moins de renseignements sur la société d’accueil et le rendement de ses établissements institutionnels en ce qui concerne les perspectives d’intégration des immigrants (Li, 2003). L’intégration réussie des immigrants est un processus bidirectionnel qui comprend l’adaptation des immigrants, d’une part, et l’acceptation sociale et l’ouverture institutionnelle dans la société d’accueil, d’autre part.

L’intégration réussie des immigrants dans la société canadienne ne devrait pas se réduire à un seul résultat (p. ex. le revenu) ou à une seule dimension (p. ex. le statut socioéconomique). Un immigrant peut être bien intégré à certains égards, mais mal intégré à d’autres (Kyeremeh et al., 2021). Par conséquent, les évaluations de l’intégration des immigrants devraient avoir une grande portée afin de fournir un compte rendu exhaustif. Les aspects psychologiques de l’intégration sont importants dans la mesure où ils permettent aux immigrants d’évaluer subjectivement leur vie après la migration et leur satisfaction à l’égard de la société d’accueil. En général, l’intégration psychologique fait référence à des facteurs comme le sentiment d’appartenance, l’identité sociale et l’attachement à la société d’accueil (Harder et al., 2018; Harles, 2004). Les liens psychologiques avec la société d’accueil se tissent lors des expériences vécues par les immigrants, en particulier par leurs perceptions de l’inclusion. Selon la perspective psychologique de l’intégration, l’accent est désormais mis sur les caractéristiques de la société d’accueil et de ses établissements institutionnels plutôt que sur celles des immigrants (p. ex. le capital humain).

Les expériences des immigrants vécues après la migration sont connues pour influencer la perception qu’ont les immigrants à l’égard de la société d’accueil, ce qui aura des répercussions sur leurs identités sociales et leur bien-être subjectif (Banting et Soroka, 2012; Bilodeau et al., 2020; Houle et Schellenberg, 2010). La réceptivité de la société d’accueil à l’égard des immigrants est un facteur clé (Hou, Schellenberg, et Berry, 2016; Safi, 2010), et les expériences d’exclusion (p. ex. la discrimination) sont susceptibles d’affaiblir le sentiment d’appartenance des immigrants au Canada et à leur province de résidence (Bilodeau et al., 2022; Wu et Finnsdottir, 2021). Les expériences d’exclusion peuvent également accroître la probabilité que les immigrants adoptent des identités sociales « réactives », qui se caractérisent par un repli dans des identités co-ethniques ou pan-ethniques et un faible attachement à la société d’accueil (Schimmele et Wu, 2015). Toutefois, les perceptions quant à l’acceptation manifestée par la société d’accueil sont susceptibles d’accroître les sentiments positifs des immigrants à l’égard du Canada (White, Bilodeau et Nevitte, 2015).

La présente étude s’appuie sur les données de l’Enquête sociale générale (ESG) de 2020 pour évaluer les perceptions à l’égard des valeurs partagées dans la société canadienne parmi la population immigrante. Ces valeurs représentent les normes démocratiques qui constituent la base de l’inclusion sociale dans une société diversifiée (Henderson et McEwan, 2005; Sinha, 2015). Les perceptions des immigrants et des personnes nées au Canada ont été comparées à l’échelle nationale et dans les provinces pour tenir compte des variations régionales. La présente étude a permis d’examiner si les différences dans la perception à l’égard des valeurs partagées dépendaient de la situation des immigrants à leur arrivée, des années écoulées depuis l’immigration, de l’âge au moment de l’immigration et du groupe de population.

Données et mesures

La présente étude repose sur des données provenant de l’ESG de 2020 sur l’identité sociale. L’ESG est une enquête transversale annuelle qui recueille des renseignements sur les tendances sociales et qui surveille le bien-être des Canadiens (Statistique Canada, 2019). La population cible de l’enquête était les Canadiens âgés de 15 ans et plus vivant dans les 10 provinces du Canada; elle excluait les résidents des trois territoires et les résidents à temps plein d’établissements institutionnels ou de réserves des Premières Nations. Les données ont été recueillies d’août 2020 à février 2021. L’échantillon comptait 34 044 répondants, dont 13 931 immigrants reçus (Statistique Canada, 2021).

Pour mesurer les perceptions à l’égard des valeurs partagées, on a posé la question suivante aux répondants dans l’enquête: « Selon vous, dans quelle mesure les Canadiens partagent-ils les valeurs suivantes? ». Les valeurs énumérées étaient les droits de la personne, le respect de la loi, l’égalité des sexes, le français et l’anglais comme langues officielles du Canada (dualité linguistique), la diversité ethnique et culturelle et le respect de la culture autochtone (Premières Nations, Métis ou Inuit). Les répondants ont été invités à classer la mesure dans laquelle les Canadiens partagent ces valeurs à l’aide d’une échelle : dans une grande mesure, dans une certaine mesure, dans une faible mesure ou pas du tout. La grande majorité des répondants étaient d’avis que les valeurs étaient partagées « dans une grande mesure » ou « dans une certaine mesure ». La présente étude a permis de comparer les proportions d’immigrants et de personnes nées au Canada qui estiment que les Canadiens partagent des valeurs « dans une grande mesure ».

Les perceptions des immigrants et des personnes nées au Canada ont été comparées aux échelons national et provincial. Les répondants des provinces de l’Atlantique (Terre-Neuve-et-Labrador, Île-du-Prince-Édouard, Nouvelle-Écosse et Nouveau-Brunswick) ont été regroupés parce que le nombre de répondants immigrants de ces provinces était trop faible pour faire l’objet d’une analyse distincte. Les répondants qui étaient des immigrants ont été classés selon leur catégorie d’admission (réfugiés, immigrants économiques ou immigrants parrainés par des membres de la famille), leur génération (personnes âgées de 13 ans et plus [première génération] et de 12 ans et moins [première génération et demie] au moment de leur arrivée), le temps passé au Canada depuis l’immigration (0 à 5 ans, 6 à 9 ans, 10 à 19 ans et 20 ans ou plus) et leur groupe de population (Blancs, Noirs, Chinois, Asiatiques du Sud, Asiatiques du Sud-Est [y compris les Philippins], Arabes et Asiatiques occidentaux, et Latino-Américains)^Note .

Les estimations ont été calculées à l’aide de facteurs de pondération d’enquête pour tenir compte de la surreprésentation ou de la sous-représentation possible de certains groupes démographiques. Des poids bootstrap ont également été utilisés pour calculer la signification statistique afin de tenir compte du plan d’enquête complexe de l’ESG.

Les immigrants ont des perceptions favorables à l’égard des valeurs partagées dans la société canadienne

Dans la présente étude, une « forte perception à l’égard des valeurs partagées » renvoie à la conviction que les Canadiens partagent dans une grande mesure les mêmes valeurs. En 2020, les deux tiers (67 %) des immigrants ont déclaré avoir une forte perception à l’égard des valeurs partagées relatives aux droits de la personne dans la société canadienne, alors que plus de la moitié (55 %) des personnes nées au Canada ont déclaré avoir la même perception (graphique 1). Près de la moitié (47 %) des immigrants avaient une forte perception à l’égard des valeurs partagées relatives à la diversité ethnique et culturelle, ce qui représente près du double de la proportion (24 %) des personnes nées au Canada qui avaient la même croyance. La moitié (50 %) des immigrants étaient d’avis que les Canadiens partagent dans une grande mesure les valeurs relatives à l’égalité des sexes, alors que moins d’un tiers (30 %) des personnes nées au Canada étaient de cet avis. Comme l’indique le graphique 1, les autres proportions d’immigrants ayant une forte perception à l’égard des valeurs partagées (le respect de la loi, 62 %; la dualité linguistique, 42 %; et le respect de la culture autochtone, 37 %) étaient également beaucoup plus élevées que celles des personnes nées au Canada pour toutes les catégories^Note .

Tableau de données du graphique 1



Tableau de données du graphique 1
Sommaire du tableau
Le tableau montre les résultats de Tableau de données du graphique 1 Droits de la personne, Respect de la loi, Égalité des sexes, Dualité linguistique, Diversité ethnique et culturelle et Respect de la culture autochtone, calculées selon pourcentage unités de mesure (figurant comme en-tête de colonne).

	Droits de la personne	Respect de la loi	Égalité des sexes	Dualité linguistique	Diversité ethnique et culturelle	Respect de la culture autochtone
	pourcentage
Immigrant	67,1	62,0	50,3	41,9	47,1	37,1
Personnes nées au Canada	54,9	40,4	30,3	23,3	24,4	17,5
Note : Les pourcentages désignent la proportion observée d’immigrants et de personnes nées au Canada qui estimaient que les Canadiens partagent une valeur « dans une grande mesure ». Source : Statistique Canada, Enquête sociale générale de 2020.

Les perceptions à l’égard des valeurs partagées variaient d’une province à l’autre

Les études fondées sur l’ESG de 2013 ont montré que les perceptions de la population générale à l’égard des valeurs partagées variaient d’une province à l’autre. Par exemple, les perceptions à l’égard des valeurs partagées sur la diversité ethnique et culturelle en Nouvelle-Écosse, au Nouveau-Brunswick, au Québec et en Saskatchewan étaient nettement moins fortes que celles de la moyenne nationale. En comparaison, les perceptions étaient plus fortes que la moyenne nationale en Ontario et en Colombie-Britannique (Sinha, 2015). Nous ignorons si une tendance similaire se manifeste parmi la population immigrante, mais des études récentes ont montré que les identités nationales et le sentiment d’appartenance des immigrants diffèrent selon les régions (Bilodeau et al., 2022; Wu et So, 2020).

Le tableau 1 présente les perceptions à l’égard des valeurs partagées pour les immigrants et les personnes nées au Canada dans chaque province. Dans toutes les provinces, une proportion beaucoup plus élevée d’immigrants ont déclaré que les Canadiens partagent leurs valeurs dans une grande mesure. Les seules exceptions à cette observation concernent les catégories des droits de la personne et de la dualité linguistique dans les provinces de l’Atlantique, où les différences entre les immigrants et les personnes nées au Canada étaient statistiquement non significatives.

Pour la plupart des valeurs, les différences entre les perceptions des immigrants et des personnes nées au Canada étaient systématiquement plus faibles dans les provinces de l’Atlantique et plus importantes en Saskatchewan et au Manitoba (tableau 1). Par exemple, les perceptions à l’égard des valeurs partagées relatives aux droits de la personne chez les immigrants (60 %) et les personnes nées au Canada (54 %) diffèrent de 6 points de pourcentage dans les provinces de l’Atlantique, ce qui constitue l’écart le plus faible. La plus grande différence entre les perceptions à l’égard des valeurs partagées relatives aux droits de la personne était de 23 points de pourcentage au Manitoba, soit de 71 % chez les immigrants et de 48 % chez les personnes nées au Canada. La différence de perception à l’égard des valeurs partagées relatives à la diversité ethnique et culturelle entre les immigrants et les personnes nées au Canada n’était que de 13 points de pourcentage dans les provinces de l’Atlantique et de 35 points de pourcentage en Saskatchewan. Dans les provinces de l’Atlantique, la différence de perception concernant le respect de la culture autochtone entre les immigrants et les personnes nées au Canada était également comparativement plus faible.



En Ontario, les différences entre les immigrants et les personnes nées au Canada en ce qui concerne la perception à l’égard des valeurs partagées ressemblaient à la tendance nationale. Au Québec, les différences de perception entre les immigrants et les personnes nées au Canada étaient plus faibles que la moyenne nationale. Les différences de perception en Alberta et en Colombie-Britannique étaient semblables à la tendance nationale.

Pour fournir un contexte aux tendances régionales des perceptions à l’égard des valeurs partagées, les immigrants de chaque province ont été comparés avec les immigrants de l’Ontario (tableau 1 de l’annexe). L’Ontario a été choisi comme groupe de référence parce qu’il est le lieu de résidence de la moitié des immigrants et qu’il a donc une influence majeure sur la tendance nationale. Les personnes nées au Canada ont également été comparées entre les provinces. Grâce à ces deux ensembles de comparaisons, il est possible de déterminer si les différences de perception entre les immigrants et les personnes nées au Canada à l’échelle provinciale sont liées aux perceptions des immigrants, aux perceptions des personnes nées au Canada ou à une combinaison des deux.

Cette analyse supplémentaire donne à penser que les différences plus faibles entre les immigrants et les personnes nées au Canada dans les provinces de l’Atlantique peuvent être expliquées en grande partie par des perceptions plus faibles chez les immigrants. Comparativement aux immigrants de l’Ontario, une proportion beaucoup plus faible d’immigrants des provinces de l’Atlantique avaient une forte perception à l’égard des valeurs partagées relatives aux droits de la personne, à la diversité ethnique et culturelle, à la dualité linguistique et au respect de la culture autochtone. Au sein de la population née au Canada, une différence non significative ou de légères différences ont été observées entre les résidents des provinces de l’Atlantique et ceux de l’Ontario. Un peu moins de personnes nées au Canada dans les provinces de l’Atlantique avaient une forte perception à l’égard des valeurs partagées relatives à la diversité ethnique et culturelle, mais un plus grand nombre d’entre elles avaient une forte perception à l’égard des valeurs partagées relatives à la dualité linguistique et au respect de la culture autochtone.

En Saskatchewan, les différences les plus importantes entre les immigrants et les personnes nées au Canada semblent tenir compte des perceptions des deux groupes. Par exemple, les immigrants de la Saskatchewan étaient proportionnellement plus nombreux à avoir de fortes perceptions à l’égard des valeurs partagées relatives à l’égalité des sexes et à la dualité linguistique que les immigrants de l’Ontario. En revanche, les personnes nées au Canada en Saskatchewan sont proportionnellement moins nombreuses à avoir de fortes perceptions à ces égards comparativement à leurs homologues de l’Ontario. Les perceptions à l’égard des valeurs partagées relatives aux droits de la personne, à la diversité ethnique et culturelle et au respect de la culture autochtone étaient similaires chez les immigrants de la Saskatchewan et ceux de l’Ontario. Toutefois, les personnes nées au Canada dans cette province avaient des perceptions beaucoup plus faibles comparativement à leurs homologues de l’Ontario.

Au Manitoba, les perceptions des immigrants étaient semblables à celles des immigrants de l’Ontario pour toutes les valeurs partagées, à l’exception de la dualité linguistique, pour laquelle les immigrants du Manitoba avaient des perceptions beaucoup plus fortes. Comparativement à l’Ontario, les résidents du Manitoba nés au Canada avaient des perceptions beaucoup plus faibles des valeurs partagées relatives aux droits de la personne, au respect de la loi, à la dualité linguistique et au respect de la culture autochtone.

Les immigrants de toutes les catégories d’admission ont une perception favorable à l’égard des valeurs partagées

Au Canada, les immigrants sont admis en fonction de leur capital humain et des critères du marché du travail (immigrants économiques), par le biais du parrainage d’un membre de la famille, ou en tant que réfugiés. La manière dont les immigrants entrent au Canada a été reconnue comme une source possible de différenciation dans leur acculturation (Hou, Schellenberg, et Berry, 2016).



Dans chaque catégorie d’admission, une proportion beaucoup plus élevée d’immigrants que de personnes nées au Canada ont déclaré avoir une forte perception à l’égard des valeurs partagées dans la société canadienne, malgré quelques variations. En ce qui concerne les perceptions à l’égard des valeurs partagées relatives à la diversité ethnique et culturelle, la différence entre les immigrants économiques et les personnes nées au Canada était plus faible que les différences entre les immigrants des autres catégories d’admission et les personnes nées au Canada. La différence entre les immigrants économiques et les personnes nées au Canada était également comparativement plus faible en ce qui concerne les perceptions à l’égard des valeurs partagées relatives au respect de la culture autochtone. Dans les autres cas, les immigrants des trois catégories d’admission avaient des perceptions similaires à l’égard des valeurs partagées.

Les immigrants récents ont les perceptions les plus favorables à l’égard des valeurs partagées

Les perceptions des immigrants à l’égard des valeurs partagées dans la société canadienne peuvent changer en fonction du temps passé dans le milieu d’établissement, car il faut du temps et de l’expérience pour comprendre les convictions des Canadiens à l’égard de leurs valeurs. Le nombre d’années écoulées depuis qu’un immigrant a obtenu le droit de vivre au Canada de façon permanente est appelé « années écoulées depuis l’admission ».

La perception à l’égard des valeurs partagées était la plus forte chez les immigrants récents (tableau 3). Parmi les immigrants établis de 0 à 5 ans plus tôt, 77 % ont déclaré que les Canadiens partagent dans une grande mesure les valeurs relatives aux droits de la personne. Parmi les immigrants qui étaient arrivés au Canada 6 à 9 ans auparavant, 71 % ont déclaré avoir cette perception. Pour les deux groupes, une proportion beaucoup plus élevée avait une forte perception à l’égard des valeurs partagées comparativement à ceux qui avaient immigré 20 ans ou plus avant (immigrants de longue date). En fait, 62 % des immigrants de ce groupe avaient une forte perception à l’égard des valeurs partagées relatives aux droits de la personne. En ce qui concerne la diversité ethnique et culturelle, plus de la moitié (56 %) des immigrants établis au Canada depuis 9 ans ou moins avaient une forte perception à l’égard des valeurs partagées, soit environ 17 points de pourcentage de plus (39 %) que pour les immigrants de longue date. Les deux tiers des immigrants établis au Canada depuis 9 ans ou moins avaient une forte perception à l’égard des valeurs partagées relatives à l’égalité des sexes, comparativement aux deux cinquièmes des immigrants de longue date.



Comparativement aux immigrants de longue date, les immigrants établis au Canada depuis 10 à 19 ans avaient également des perceptions beaucoup plus fortes à l’égard des valeurs partagées, bien que les différences soient plus faibles que celles observées chez les immigrants récents.

Au fil des années passées au Canada, les immigrants avaient des perceptions à l’égard des valeurs partagées qui se rapprochaient un peu plus de la moyenne des personnes nées au Canada; ces perceptions étaient tout de même plus favorables. La proportion d’immigrants de longue date qui avaient une forte perception à l’égard des valeurs partagées relatives aux droits de la personne était supérieure de 7 points de pourcentage à celle des personnes nées au Canada. La différence entre les immigrants de longue date et les personnes nées au Canada était encore plus grande en ce qui concerne les perceptions à l’égard des valeurs partagées relatives à l’égalité des sexes (11 points de pourcentage) et à la diversité ethnique et culturelle (15 points de pourcentage).

L’âge au moment de l’immigration influence les perceptions à l’égard des valeurs partagées

La proportion de répondants estimant que les Canadiens partagent dans une grande mesure les mêmes valeurs était beaucoup plus élevée chez ceux qui sont arrivés au Canada à l’adolescence ou à l’âge adulte (immigrants de première génération) que chez ceux qui sont arrivés pendant l’enfance (immigrants de la première génération et demie) (tableau 3). Alors que 70 % des immigrants de la première génération étaient d’avis que les Canadiens partagent dans une grande mesure les valeurs relatives aux droits de la personne, 57 % des immigrants de la première génération et demie avaient cette perception. Environ 52 % des immigrants de première génération étaient d’avis que les Canadiens partagent dans une grande mesure les valeurs relatives à la diversité ethnique et culturelle, comparativement à 32 % des immigrants de la première génération et demie. En ce qui concerne l’égalité des sexes, 56 % des immigrants de première génération étaient d’avis que les Canadiens partagent cette valeur dans une grande mesure, comparativement à 31 % des immigrants de la première génération et demie.

Les proportions d’immigrants de première génération ayant de fortes perceptions à l’égard des valeurs partagées étaient entre 15 et 27 points de pourcentage supérieures à celles enregistrées chez les personnes nées au Canada. En revanche, les différences entre les immigrants de la première génération et demie et les personnes nées au Canada étaient négligeables ou faibles, sauf en ce qui concerne les perceptions à l’égard des valeurs partagées relatives à la diversité ethnique et culturelle. La proportion de personnes ayant une forte perception à l’égard des valeurs partagées était dans ce cas supérieure de près de 8 points de pourcentage pour les immigrants de la première génération et demie.

Les perceptions à l’égard des valeurs partagées dans la société canadienne sont systématiquement plus fortes chez les immigrants des différents groupes de population

Les immigrants de tous les groupes de population sélectionnés avaient systématiquement des perceptions plus fortes à l’égard des valeurs partagées que la moyenne des personnes nées au Canada, mais l’importance de la différence variait selon les groupes (tableau 4). Les perceptions à l’égard des valeurs partagées relatives à la diversité ethnique et culturelle sont particulièrement intéressantes. Environ 60 % des immigrants originaires de l’Asie du Sud, 58 % de ceux originaires de l’Asie du Sud-Est et 45 % de ceux originaires de la Chine avaient une forte perception à l’égard des valeurs partagées relatives à la diversité ethnique et culturelle, comparativement à 24 % de la population née au Canada. Les proportions d’immigrants appartenant à la catégorie des Noirs (57 %), des Arabes et des Asiatiques occidentaux (48 %) et des Latino-Américains (48 %) étaient également beaucoup plus élevées que la moyenne des personnes nées au Canada. Parmi les immigrants issus de groupes de population non blancs, la proportion de répondants ayant une forte perception à l’égard des valeurs partagées relatives aux droits de la personne variait de 63 % (Chinois) à 78 % (Sud-Asiatiques) et, en ce qui concerne l’égalité des sexes, de 50 % (Chinois) à 62 % (Sud-Asiatiques).



Selon le groupe de population, la proportion d’immigrants ayant déclaré une forte perception à l’égard des valeurs partagées relatives à la diversité ethnique et culturelle était entre 10 et 36 points de pourcentage supérieure à celle des personnes nées au Canada. Des écarts entre les groupes et les personnes nées au Canada ont également été constatés en ce qui concerne les perceptions à l’égard des valeurs partagées relatives à l’égalité des sexes (entre 7 et 32 points de pourcentage) et aux droits de la personne (entre 5 et 23 points de pourcentage). Ces différences entre les groupes d’immigrants et la moyenne des personnes nées au Canada sont illustrées dans le graphique 2. En ce qui concerne les perceptions à l’égard des valeurs partagées relatives au respect de la loi, à la dualité linguistique et au respect de la culture autochtone, les différences entre les immigrants et les personnes nées au Canada étaient également très variées.

Tableau de données du graphique 2



Tableau de données du graphique 2
Sommaire du tableau
Le tableau montre les résultats de Tableau de données du graphique 2 Droits de la personne, Égalité des sexes et Diversité ethnique et culturelle, calculées selon pourcentage unités de mesure (figurant comme en-tête de colonne).

	Droits de la personne	Égalité des sexes	Diversité ethnique et culturelle
	pourcentage
Blancs	4,5	6,6	9,7
Noirs	15,5	31,6	32,9
Chinois	7,6	19,6	20,6
Sud-Asiatiques	22,8	31,9	35,7
Asiatiques du Sud-Est	17,4	27,4	34,0
Arabes ou Asiatiques occidentaux	17,2	24,9	23,6
Latino-Américains	16,3	24,6	23,8
Source : Statistique Canada, Enquête sociale générale de 2020.

Les immigrants blancs avaient la perception la plus faible selon laquelle les Canadiens partagent dans une grande mesure les mêmes valeurs. Comme l’illustre le graphique 2, les différences entre les immigrants blancs et la moyenne des personnes nées au Canada en ce qui concerne les perceptions à l’égard des valeurs partagées étaient considérablement plus faibles que celles observées chez les immigrants des autres groupes de population. Cela a été observé pour les six valeurs. Les différences relativement plus faibles entre les immigrants blancs et les personnes nées au Canada peuvent être liées à des facteurs comme le nombre d’années écoulées depuis l’immigration. Plus des deux tiers des immigrants blancs interrogés dans le cadre de la présente étude étaient des immigrants de longue date^Note . Comme il est mentionné précédemment, la proportion d’immigrants ayant une forte perception à l’égard des valeurs partagées était beaucoup plus faible chez les immigrants de longue date que chez les immigrants récents. Néanmoins, les immigrants blancs avaient des perceptions beaucoup plus fortes à l’égard des valeurs partagées que les personnes nées au Canada.

Conclusion

Comparativement aux moyennes des personnes nées au Canada, les immigrants avaient généralement des perceptions plus fortes selon lesquelles les Canadiens partagent des valeurs relatives aux droits de la personne, au respect de la loi, à l’égalité des sexes, à la dualité linguistique, à la diversité ethnique et culturelle et au respect de la culture autochtone. Autrement dit, une proportion beaucoup plus élevée d’immigrants que de personnes nées au Canada ont déclaré que les Canadiens partagent ces valeurs dans une grande mesure. Les immigrants récents avaient des perceptions particulièrement favorables, et la proportion de ceux qui croyaient que les Canadiens partagent dans une grande mesure les mêmes valeurs a progressivement diminué au fil du temps. Les immigrants arrivés au pays à l’adolescence ou à l’âge adulte avaient également des perceptions plus fortes à l’égard des valeurs partagées que les personnes nées au Canada, mais les immigrants arrivés au Canada pendant l’enfance avaient des perceptions similaires à celles des personnes nées au Canada.

Les immigrants ont un double cadre de référence pour leurs perceptions : leur pays d’origine et la société d’accueil (Röder et Mühlau, 2012). La plupart des immigrants émigrent dans un nouveau pays pour avoir un meilleur avenir et pour bénéficier de meilleures conditions nationales, ce qui renforce leurs évaluations subjectives de la société d’accueil (Hendriks, 2015). Chez les immigrants récents, les perceptions à l’égard des valeurs partagées semblent être fondées sur des comparaisons avec les conditions dans leur pays d’origine, mais ce cadre de référence est moins important pour les immigrants de longue date. Au fur et à mesure que les immigrants s’acculturent pour se conformer aux normes prévalant dans le pays d’accueil, leurs évaluations prennent en compte ces nouvelles conditions et attentes (Hendriks et Burger, 2020). Par conséquent, les perceptions des immigrants à l’égard des valeurs partagées deviennent progressivement moins favorables au fil du temps.

Une explication similaire peut être donnée pour l’absence de différence de perception à l’égard des valeurs partagées entre les immigrants arrivés au pays au cours de l’enfance (la première génération et demie) et les personnes nées au Canada. Les immigrants arrivés pendant l’enfance et ceux arrivés à un âge plus avancé se distinguent par leur principal lieu de socialisation et d’éducation (c’est-à-dire le pays d’origine ou le pays d’accueil), ce qui a une incidence sur leurs attentes personnelles (Wu, Schimmele, et Hou, 2012). Les personnes ayant immigré durant l’enfance sont plus susceptibles de se servir des normes du pays d’accueil comme cadre de référence pour leurs perceptions, puisque ce groupe a été éduqué et socialisé dans le pays d’accueil et a également une connaissance limitée des conditions dans leur pays d’origine à utiliser comme cadre de référence secondaire pour évaluer la société canadienne (Röder et Mühlau, 2012).

Comparativement aux personnes nées au Canada, les immigrants de certains groupes de population se sentent fréquemment « mal à l’aise ou pas à leur place » au Canada en raison de leur ethnicité, de leur culture, de leur race ou de la couleur de leur peau (Wu, Schimmele, et Hou, 2012). Cette expérience devrait vraisemblablement avoir une incidence négative sur leurs perceptions de la société d’accueil. Malgré cela, les immigrants issus de ces groupes de population avaient des perceptions comparativement plus favorables à l’égard des valeurs partagées que les immigrants blancs ou les personnes nées au Canada, notamment en ce qui concerne les perceptions à l’égard des valeurs partagées relatives à la diversité ethnique et culturelle. Toutefois, les perceptions à l’égard des valeurs partagées variaient entre les immigrants des différents groupes de population.



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