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Série sur la vie avec des incapacités
La participation sociale des enfants ayant des incapacités

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par Krista Kowalchuk et Susan Crompton

Ce qu’il faut savoir au sujet de la présente étude
À propos de la population à l’étude
Le type d’incapacité est associé aux activités non sportives et la gravité, aux réseaux avec les pairs
Le fonctionnement habituel de l’enfant en ce qui a trait à la participation aux sports et aux réseaux virtuels
En général, les habiletés sociales des enfants ne sont pas associées à l’engagement social
Le soutien familial est fortement relié à la participation aux sports organisés et aux activités non sportives
Le revenu de la famille et la vie urbaine sont très étroitement liés à la participation aux sports
Les barrières environnementales sont associées à une plus faible participation aux sports organisés
Sommaire

Pour les enfants, avoir des amis, participer à des activités de groupe et se joindre à des clubs sont des façons de s’engager socialement. C’est un aspect essentiel à leur développement social et individuel1. Être engagés dans des activités parascolaires leur apporte aussi d’autres bienfaits, dont des meilleurs résultats scolaires et une réduction de leurs problèmes affectifs et comportementaux2. Toutefois, ce n’est pas toujours facile pour certains enfants de participer à ces activités, spécialement pour ceux qui ont une incapacité3.

Le développement de l’enfant est un processus complexe qui se complexifie encore plus si l’enfant a une incapacité. Dans tous les aspects de leur vie, les enfants ayant des incapacités peuvent avoir besoin d'aide pour pouvoir participer équitablement aux activités de la vie courante. Bien que nous en sachions déjà beaucoup sur l’enseignement, les aides fonctionnels et la technologie adaptative, les traitements médicaux, et le transport, les chercheurs se sont peu penchés sur les questions relatives à la participation sociale4.

La participation sociale — que nous nommerons aussi engagement social — porte sur les relations qu’a une personne avec les membres de sa famille, ses pairs, les membres de sa communauté, les institutions locales et, à plus grande échelle, la société. Des études antérieures indiquent que des enfants ayant des incapacités sont moins engagés que leurs homologues n’en ayant pas, car ils participent moins aux activités sociales5. La population étant de plus en plus éveillée à l’importance de l’intégration, on s’adapte davantage aux enfants pour leur permettre de participer à des activités parascolaires.

Le présent article permettra d’identifier les facteurs qui influencent l’engagement social des enfants de 5 à 14 ans ayant des incapacités et vivant avec leurs parents. L’accent est mis sur la participation aux activités sociales en dehors du foyer familial et des heures normales de classe. L’engagement social est mesuré par la participation à des sports organisés, à des activités organisées mais non sportives (leçons, clubs, groupes communautaires), et à des réseaux virtuels avec les pairs (téléphone, groupes de discussion et courriel). Comme il est courant dans la documentation sur le sujet, les facteurs à l’étude incluent l’effet de la condition de l’enfant sur sa façon de fonctionner dans la vie courante, ses propres habiletés sociales, le fonctionnement familial, le soutien des parents, et les barrières environnementales.

Ce qu’il faut savoir au sujet de la présente étude

Cet article porte sur la composante enfant de l’Enquête sur la participation et les limitations d’activités (EPLA). La population cible comprend 3 100 répondants, représentant un peu moins de 125 000 enfants de 5 à 14 ans ayant des incapacités et qui vivent avec leurs parents (avec un parent seul ou dans une famille biparentale). Les données ont été recueillies auprès des personnes connaissant le mieux l’enfant, généralement les parents. Strictement parlant, parce que le parent ou le tuteur de l’enfant a répondu à l’enquête au nom de l’enfant, toutes les statistiques se rapportent aux enfants ayant des incapacités dont le parent a répondu au questionnaire. Par souci de concision, toutefois, on emploiera tout simplement « enfants » dans le présent article.

Définitions des termes

Enfants ayant des incapacités / des limitations d’activités :
Les enfants de 5 à 14 ans vivant avec leurs parents ou un seul d’entre eux et dont les parents répondants ont déclaré que leur enfant avait des difficultés dans les activités de la vie courante, ou dont la condition physique ou mentale ou des problèmes de santé ont réduit la quantité et les sortes d’activités auxquelles il participe. Les réponses aux questions sur les incapacités représentent la perception du répondant de la situation et est donc subjective.

Incapacités physiques : audition, vision, mobilité, problèmes de santé chroniques, incluant asthme et allergies, maladies cardiaques, maladies rénales, cancer, diabète, épilepsie, infirmité motrice cérébrale, spina-bifida, dystrophie musculaire, migraines, arthrite ou rhumatisme, paralysie quelconque, membres ou doigts manquants, soins médicaux complexes, autres non spécifiés.

Incapacités non physiques : Langage / communication; apprentissage, déficience intellectuelle, troubles affectifs ou psychologiques; problèmes de santé chroniques non physiques incluant l’autisme, le syndrome d’alcoolisme fœtal, le trouble déficitaire de l’attention ou le trouble d'hyperactivité avec déficit de l'attention, et le syndrome de Down.

Gravité de l’incapacité : Une échelle de gravité des incapacités a été établie pour l’EPLA. Elle tient compte de l’intensité et de la fréquence des limitations d’activités déclarées par les répondants. L’échelle est divisée en quatre niveaux de gravité  : légère, modérée, grave et très grave.

Différence significative : Avant de conclure que deux estimations sont différentes, on doit déterminer si la différence entre elles est statistiquement significative et qu’elle n’est pas attribuable à une erreur d’échantillonnage aléatoire. Pour ce faire, on établit des intervalles de confiance pour les estimations en utilisant le coefficient de variance de chacune. Si les intervalles de confiance ne se chevauchent pas, on est certain à 95 % que la comparaison de ces estimations est significative. Dans le présent article, lorsqu’on utilise l’adverbe significativement, c’est en ce sens qu’on l’emploie.

Participation sociale : Dans une récente étude, des chercheurs canadiens ont fait valoir qu’il est important de garder en tête que la participation à plusieurs activités n’est pas nécessairement une meilleure mesure de l’engagement social que la participation à peu d’entre elles1. Ils soulignent qu’un enfant peut prendre part à une activité très fréquemment, tandis qu’un autre peut prendre part à plusieurs activités, mais peu souvent.

Les trois indices de participation conçus pour cette étude tiennent compte de cet argument. Chacun d’eux inclut deux ou trois types d’activités. Les enfants étaient classés comme participants s’ils avaient pris part à n’importe quel type d'activités dans les 12 mois précédant l’enquête, sans égard à la fréquence. (La fréquence varie de chaque jour à moins d’une fois par mois.)

Sports et activités physiques organisés (sports) : Participer à des sports organisés avec un entraîneur ou un instructeur; participer à d’autres activités physiques avec un entraîneur ou un instructeur, par exemple, à la danse ou à la gymnastique.

Leçons, clubs et groupes communautaires (activités organisées non sportives) : Prendre des leçons dans des activités non sportives, par exemple, en musique et en arts, participer aux activités de clubs ou de groupes communautaires, par exemple, les Scouts ou des groupes confessionnels.

Réseaux virtuels avec les pairs / réseaux : Prendre part aux groupes de discussion ou aux groupes de nouvelles, utiliser les courriels pour rester en contact avec les amis, parler au téléphone avec des amis.

Les modèles

Dans des recherches antérieures, on suggère que plusieurs facteurs peuvent influer sur l’engagement social d’un enfant ayant une incapacité. Afin d’isoler les facteurs individuels associés à l’engagement social, on a conçu des modèles de régression logistique pour chacune des activités sociales. Ces modèles nous ont permis d’estimer les chances qu’un enfant ayant une caractéristique donnée ait été un participant plutôt qu’un non-participant à une activité en éliminant l’effet des autres facteurs en présence. Les rapports de cotes ont été estimés en fonction d’une régression pondérée qui utilisait les poids de l’EPLA, avec une estimation de la variance selon la méthode du bootstrapping. La signification statistique a été calculée à p < 0,05.

Dans les modèles, les facteurs à l’étude ont été divisés dans les catégories suivantes :

La condition de l’enfant : mesurée selon le type d’incapacité et la gravité de l’incapacité.
L’effet de la condition de l’enfant sur son fonctionnement : mesurée selon l’aide que l’enfant utilise dans ses activités quotidiennes; la condition de l’enfant entraîne un désavantage à l’école, la condition de l’enfant entraîne un désavantage dans les déplacements et les activités de loisir, le parent sent que l’école s’adapte à la condition ou au problème de santé de l’enfant.

Les habiletés sociales de l’enfant : mesurées selon le fait que l’enfant s’entend avec ses pairs (excluant ses frères et sœurs); l’enfant a hâte d’aller à l’école, le sexe et l’âge (puisque les enfants démontrent différentes habilités sociales selon leur stade de développement).

Le soutien de la famille : mesuré selon l’engagement des parents dans la classe de l’enfant (échanges avec le professeur, présence aux événements comme les pièces de théâtre ou la foire scientifique auquel l’enfant participe, aide lors des sorties de classe. Engagement des parents à l’école de l’enfant (aide ailleurs dans l’école, par exemple, à la bibliothèque, dans la salle d’ordinateurs, dans les réunions de comité de parents, à la campagne de financement, autres); le revenu du ménage; le lieu de résidence; et le type de famille.

Barrières environnementales : mesurées par l’existence de barrières environnementales telles que des programmes ou services non disponibles; des lieux non accessibles; un transport inadéquat ou trop onéreux, l’existence de barrières personnelles incluant la condition de l’enfant qui limite sa participation, l’enfant a besoin de quelqu’un pour l’aider à participer, il manque de matériel ou d’équipement nécessaire, l’enfant ou la famille sont trop occupés.

  1. Law, M., King, G., King, S., Kertoy, M., Hurley, P., Rosenbaum, P., Young, N., Hanna, S., et Petrenchik, T. (2006). Patterns and predictors of recreational and leisure participation for children with physical disabilities. CanChild Centre for Childhood Disability Research.

À propos de la population à l’étude

En 2006, l’Enquête sur la participation et les limitations d’activités (EPLA) a identifié environ 125 000 enfants de 5 à 14 ans ayant des incapacités et vivant avec leurs parents. Près de deux tiers de ces enfants étaient des garçons (65 %), plus de la moitié d’entre eux étaient des préadolescents entre 10 et 14 ans (57 %). Plus de 4 enfants sur 10 (44 %) avaient un degré d’incapacité considéré comme grave ou très grave.

Les types d’incapacités de ces enfants, tels que déclarés par leurs parents, couvraient un vaste éventail de limitations aussi bien physiques que non physiques, les plus fréquentes étant les troubles d’apprentissage (71 %), des incapacités physiques chroniques comme le diabète, l’asthme, ou les maladies cardiaques (62 %), des problèmes d’élocution (46 %), et des limitations non physiques chroniques, comme l’autisme, ou le trouble déficitaire de l’attention (42 %)6.

Dans le présent article, plutôt que de s’intéresser à des incapacités précises, on regroupera les incapacités en trois catégories principales : les incapacités physiques seulement (19 % des enfants dans la population à l’étude), les incapacités non physiques seulement (24 %), et les incapacités à la fois physiques et non physiques (57 %) (graphique 1).

Graphique 1 Plus de la moitié des enfants d'âge scolaire ayant des incapacités ont à la fois une incapacité physique et non physiqueGraphique 1  Plus de la moitié des enfants d'âge scolaire ayant des incapacités ont à la fois une incapacité physique et non physique

La participation des enfants à des activités en dehors de la structure habituelle du foyer et de l’école est une mesure clé de leur engagement social. Les enfants peuvent s’engager socialement et faire la connaissance de nouveaux amis grâce à plusieurs activités. Dans cette étude, nous examinons l’engagement des enfants à l’aide de trois indicateurs différents de participation sociale : les sports et les activités physiques organisés (sports); les leçons, les clubs et les groupes communautaires (activités non sportives); et l’interaction avec les pairs par courriel, groupes de nouvelles, groupes de discussion et au téléphone (réseaux). (Consulter l’encadré « Ce qu’il faut savoir au sujet de la présente étude » pour obtenir plus de renseignements.) 

Un peu moins des deux tiers (63 %) des enfants de 5 à 14 ans ayant des incapacités étaient engagés dans une forme quelconque de sport organisé ou d’activité physique comme le soccer, le tae kwon do, la natation ou la danse. La plupart de ces enfants l'étaient au moins une fois par semaine7 (graphique 2).

Graphique 2 La majorité des enfants ayant des incapacités prennent part à des activités socialesGraphique 2 La majorité des enfants ayant des incapacités prennent part à des activités sociales

Plus de la moitié des enfants ayant des incapacités (54 %) ont pris des leçons dans un type quelconque d’activité non sportive ou étaient membres de clubs ou de groupes communautaires, une vaste majorité d’entre eux ayant pris part à ces activités chaque semaine. Et près de trois quarts des enfants ayant des incapacités (72 %) échangeaient avec leurs pairs, les trois quarts d’entre eux étant en ligne ou au téléphone au moins une fois par semaine.

Le type d’incapacité est associé aux activités non sportives et la gravité, aux réseaux avec les pairs

Pour identifier les enfants ayant des incapacités qui sont les plus susceptibles de participer à des activités sociales, les premiers facteurs à considérer sont le type et la gravité de leur incapacité. Si les enfants ayant des limitations sont incapables de se joindre à des activités ou à des événements particuliers, cela peut les empêcher de s’engager socialement avec leurs pairs et les autres. Bien qu’on puisse croire que les enfants ayant des incapacités physiques sont plus souvent exclus que ceux ayant des limitations non physiques, d’autres obstacles peuvent se dresser pour les enfants ayant des difficultés d’apprentissage ou une déficience intellectuelle. Par exemple, si l’incapacité d’un enfant l’incite à se comporter impulsivement ou l’empêche de s’exprimer adéquatement, l’enfant n’est souvent pas accepté par ses pairs8.

Les donnés de l’EPLA montrent qu’un enfant ayant des incapacités à la fois physiques et non physiques est significativement moins susceptible de prendre part aux sports organisés. Seulement 59 % de ces enfants étaient des participants, comparativement à 70 % des enfants n’ayant que des limitations physiques (tableau 1).

Tableau 1 Pourcentage d'enfants âgés de 5 à 14 ans ayant des incapacités, habitant avec leurs parents et participant à des activités sociales, 2006Tableau 1 Pourcentage d'enfants âgés de 5 à 14 ans ayant des incapacités, habitant avec leurs parents et participant à des activités sociales, 2006

De la même façon, les enfants ayant à la fois des incapacités physiques et non physiques étaient moins susceptibles de participer à des activités non sportives comme prendre des leçons ou être membres de clubs ou de groupes communautaires, puisque ces situations exigent des habiletés sociales plus sophistiquées. Ils étaient aussi moins susceptibles d’être en réseaux avec leurs pairs. 

La gravité de l'incapacité des enfants est reliée à leur participation dans deux des trois types d’activités sociales. Seulement 43 % des enfants ayant une incapacité très grave étaient branchés à des réseaux sociaux, comparativement à 86 % chez ceux ayant de légères limitations. L’écart était moins grand dans les sports organisés, mais il était toujours statistiquement significatif à 45 % par rapport à 70 % (tableau 1).

Il est utile de savoir si c'est le type d’incapacité ou la gravité de l'incapacité qui est le plus fortement associé aux chances d’être engagé socialement. Pour isoler les effets de divers facteurs, nous avons employé des modèles de régression logistique afin d’estimer les chances qu’un enfant ayant une caractéristique donnée était un participant plutôt qu’un non-participant à une activité sociale donnée. (Consulter l’encadré « Ce qu’il faut savoir au sujet de la présente étude », pour plus de renseignements sur les modèles de régression.)

Après avoir contrôlé les effets d’autres facteurs (incluant la gravité de l’incapacité), les résultats du modèle montrent que le type d’incapacité n’est pas associé à la participation à des sports organisés ou à des réseaux avec les pairs. Pour les activités non sportives, toutefois, les enfants ayant une incapacité non physique avaient significativement moins de chances d’y participer que les enfants n’ayant que des incapacités physiques (tableau 2).

Tableau 2 Rapports de cotes relatifs à la participation à des activités sociales des enfants âgés de 5 à 14 ans ayant des incapacités et vivant avec leurs parents, 2006Tableau 2 Rapports de cotes relatifs à la participation à des activités sociales des enfants âgés de 5 à 14 ans ayant des incapacités et vivant avec leurs parents, 2006

La gravité de la condition de l’enfant n’est pas associée non plus aux chances de participation aux activités sportives ou non sportives, une fois les effets des autres facteurs contrôlés (incluant le type d’incapacité). L’exception concerne les réseaux avec les pairs : comparés aux enfants ayant une incapacité légère, les enfants ayant une incapacité grave avaient moins de la moitié des chances d’être en ligne ou au téléphone avec leurs amis ou d’autres pairs9.

Le fonctionnement habituel de l’enfant en ce qui a trait à la participation aux sports et aux réseaux virtuels

Certaines conditions créent un désavantage spécifique pour un enfant. Par exemple, certains enfants peuvent avoir besoin d’aide dans leurs activités quotidiennes; pour d’autres, leur état peut leur causer des problèmes d’accès au transport ou aux activités de loisir ou encore leur imposer certaines restrictions à l’école.

Selon les données de l’EPLA, les enfants qui ont de tels désavantages étaient tout aussi susceptibles que les autres de participer à des activités non sportives, mais ils étaient significativement moins susceptibles de participer à des sports ou à des réseaux en ligne avec leurs pairs (tableau 1). Toutefois, en tenant compte des autres facteurs dans le modèle, l’effet de la condition de l’enfant sur son fonctionnement dans la vie de tous les jours n’était plus associé à sa participation dans les sports organisés.

Les résultats du modèle montrent que les enfants qui devaient recevoir de l’aide dans leurs activités courantes avaient significativement moins de chances de participer à des réseaux virtuels avec leurs pairs (tableau 2). Toutefois, lorsqu’une école s’adaptait bien à la condition de l’enfant, les chances pour que ce dernier soit « branché » augmentaient significativement lorsqu’on contrôlait l’effet des autres facteurs.

En général, les habiletés sociales des enfants ne sont pas associées à l’engagement social

La plus grande partie de l’interaction sociale des enfants se passe en classe, conséquemment c’est là qu’ils apprennent à se comporter les uns avec les autres et qu’ils développent et entretiennent leurs relations sociales. Pour cette raison, il est raisonnable de mesurer les habiletés sociales des enfants par la façon dont ils interagissent avec les autres et par le fait qu’ils soient heureux d’aller à l’école (où ils verront plusieurs de leurs amis)10.  Puisque l’âge et le sexe d’un enfant sont reliés à sa confiance en lui, nous examinerons ces caractéristiques en premier.

L’âge de l’enfant ainsi que son sexe n’étaient pas reliés à des niveaux de participation plus élevés à des sports organisés. Toutefois, les filles étaient plus susceptibles que les garçons de participer à des activités non sportives et à des réseaux virtuels avec des pairs. Aussi, la connectivité était beaucoup plus élevée chez les 10 à 14 ans (82 %) que chez les 5 à 9 ans (60 %). Ces relations sont demeurées significatives une fois contrôlé l’effet des autres facteurs11 (tableau 1). 

Les enfants ayant des incapacités qui avaient hâte d’aller à l’école la plupart du temps n’étaient ni plus ni moins susceptibles de participer aux activités parascolaires que ceux qui n’étaient pas si enthousiastes d’aller en classe. De la même manière, les enfants qui s’entendaient bien avec les autres enfants n’étaient ni plus ni moins susceptibles de participer à des activités parascolaires que ceux qui ne s’entendaient pas aussi bien avec les autres. Les réseaux virtuels avec les pairs étaient l’exception : les enfants qui s’entendaient très bien avec les autres étaient plus susceptibles d’y participer que les autres à 78 % contre 66 % (tableau 1).

Une fois considéré tous les autres facteurs, s’entendre avec les autres n’était plus significatif pour ce qui est d’entretenir des réseaux en ligne, mais cela demeurait associé à de plus faibles chances de participer à des sports. En revanche, les enfants qui aiment aller à l’école avaient significativement moins de chances d’être « connectés » à des pairs (tableau 2).

Le soutien familial est fortement relié à la participation aux sports organisés et aux activités non sportives

Le soutien psychologique qu’offrent les parents aux enfants est un important facteur prédisant à quel point ces derniers seront engagés socialement. En encourageant leurs enfants dans les choses qui les intéressent, les parents leur donnent confiance en eux et jouent un rôle clé pour leur permettre de s’engager encore plus12. Toutefois, il est important de mentionner qu’une trop grande implication d’un parent pourrait être néfaste : un rapport publié en 2006 souligne que les parents d’enfants ayant des incapacités ont tendance à intervenir lorsque l’enfant joue avec d’autres enfants et que cela peut nuire à leurs amitiés.13 

Les résultats de l’EPLA montrent que les enfants dont les parents étaient très engagés dans ce qui se passait en classe étaient plus susceptibles de participer à la fois aux sports organisés et aux activités non sportives (l’engagement en classe signifie échanger avec le professeur de l’enfant, assister à des pièces de théâtre, des foires de sciences auxquelles l’enfant a participé, et aider lors de sorties de groupe). Le degré d’engagement des parents est demeuré significatif une fois les autres facteurs du modèle pris en compte. Les enfants ayant un parent actif en classe avaient trois fois plus de chances de participer aux sports et près de deux fois plus de chances de participer à des activités non sportives (tableau 2).
 
Avoir un parent qui s’implique dans l’école était aussi associé à une plus grande participation sociale, bien que le lien n’ait pas été aussi fort (cela inclut l’aide ailleurs dans l’école comme à la bibliothèque, à la salle d’ordinateurs, les rencontres du comité de parents, les campagnes de financement et d’autres activités). Les enfants dont les parents étaient engagés à l’échelon de l’école avaient des chances significativement plus élevées de participer à des sports organisés et à des activités non sportives.

En revanche, le soutien parental en classe et à l’école n’était pas significativement associé au fait que l’enfant participe à des réseaux virtuels avec des pairs.

Le revenu de la famille et la vie urbaine sont très étroitement liés à la participation aux sports

Le fait de vivre dans une famille biparentale peut faire en sorte qu’un enfant ayant des incapacités puisse plus facilement s’engager socialement puisque les deux parents peuvent l’aider en ce sens. Par exemple, ils peuvent le conduire à une activité, lui fournir l’aide nécessaire lorsqu’il se joint à des activités, etc. Cependant, l’état matrimonial de ses parents n’est pas significativement associé à sa participation sociale.

Par contre, le revenu de la famille est un autre type de soutien matériel très lié à l’engagement dans les sports organisés. Lorsque le revenu familial dépassait 90 000 $, les enfants étaient beaucoup plus susceptibles de participer aux sports organisés que si le revenu familial était de moins de 30 000 $ (76 % comparé à 54 %). Le revenu continue d’être très fortement lié à la participation sportive, même après avoir tenu compte des autres facteurs : les chances de participer étaient d'environ du double au triple pour les enfants ayant une incapacité vivant dans des familles dont le revenu était supérieur à 60 000 $. Le revenu familial n’a toutefois pas de lien avec la participation des enfants aux activités non sportives ou avec leur connectivité avec leurs pairs (tableau 2).

Un autre élément du soutien matériel, particulièrement pour les enfants ayant des incapacités, consiste en la proximité de la famille aux services. Les enfants ayant des incapacités vivant dans des régions urbaines avaient des chances significativement plus élevées de participer à des sports organisés et à des activités physiques que ceux vivant dans les régions rurales. Ce constat peut refléter une plus grande offre de programmes et d’installations pouvant accommoder les enfants ayant des incapacités dans les villes. Toutefois, le lieu de résidence n’était pas significatif ni pour les leçons, ni pour la participation à des clubs et à des groupes, ni pour entretenir des réseaux en ligne. 

Les barrières environnementales sont associées à une plus faible participation aux sports organisés

Les barrières environnementales peuvent jouer un rôle clé dans le niveau d’engagement qu’auront les enfants ayant des incapacités. Par exemple, si une activité telle que le baseball ou le hockey n’est pas adaptée pour eux, il est possible qu’ils n’y participeront pas. De même, si un enfant n’a pas accès à un transport adéquat, cela peut l’empêcher de participer à des événements ou à des activités14. Tandis que les enfants ayant des limitations physiques peuvent perdre des occasions de prendre part à des activités physiques, ceux qui ont des incapacités non physiques peuvent être exclus en raison de troubles cognitifs qui entraînent des interactions inappropriées avec les pairs15.

Nous avons identifié deux catégories de barrières environnementales : les barrières sociales qui incluent les programmes ou installations non disponibles localement, les problèmes de transport et les coûts élevés et les barrières personnelles, cela inclut les besoins en équipement spéciaux ou en aide d’autrui pour participer à une activité, ainsi que les limitations engendrées par la condition de l’enfant.

Comme on pouvait s’y attendre, l’EPLA montre que les enfants ayant des incapacités sont moins susceptibles de participer aux sports organisés s’ils font face à des barrières environnementales. Moins de la moitié des enfants qui ont indiqué des barrières sociales ou personnelles y ont participé, comparativement aux deux tiers des autres enfants ayant des incapacités. Après avoir tenu compte des autres facteurs, les barrières environnementales sont demeurées significatives seulement en ce qui a trait à la participation aux sports. Cela signifie que les enfants qui faisaient face à la fois à des barrières sociales et personnelles avaient moins de chances de participer à des sports organisés.

Les enfants étaient aussi moins susceptibles de maintenir des relations en ligne s’ils faisaient face à des barrières environnementales pour accéder à Internet ou pour parler au téléphone. Toutefois, ces facteurs n’étaient plus significatifs une fois qu’on tenait compte des autres variables du modèle.

Sommaire

On met plus d’efforts pour accommoder les enfants ayant des incapacités dans plusieurs activités parascolaires comme les sports organisés, les clubs et les groupes. Les données de l’Enquête sur la participation et les limitations d’activités montrent que, selon le type d’activité, du quart à la moitié des enfants ayant des incapacités n’y participent jamais.

La participation d’un enfant aux activités en dehors de la maison et de l’école est une mesure clé de son niveau d’engagement social. Dans la  présente étude, on estime qu’environ les deux tiers des enfants de 5 à 14 ans ayant des incapacités et vivant avec leurs parents participaient à des sports organisés et à des activités physiques; un peu plus de la moitié d’entre eux prenaient part à des activités structurées non sportives comme prendre des leçons, se joindre à des clubs ou à des groupes communautaires et un peu moins des trois quarts communiquaient avec leurs pairs sur des réseaux virtuels, soit en ligne ou au téléphone.

Les modèles de régression suggèrent que le type d’incapacité d’un enfant est significativement associé seulement à la participation à des activités non sportives. De même, la gravité de leurs limitations était significativement liée seulement au maintien de réseaux virtuels avec leurs pairs. Le soutien des parents à l’école a fait augmenter les chances qu’un enfant participe à des sports organisés ainsi qu’à des activités non sportives, mais non à des réseaux virtuels avec les pairs.

D’autres facteurs associés aux chances qu’un enfant prenne part à des activités sociales ont tendance à varier selon l’activité. Avoir un revenu familial plus élevé, vivre en région urbaine, et bien s’entendre avec les autres enfants était positivement associé à la participation sportive, tandis que les barrières environnementales et le fait d’avoir entre 10 et 14 ans y étaient négativement associés. Il y avait une association positive entre le fait d’être une fille et de prendre part aux activités organisées non sportives.

Possiblement parce que les réseaux virtuels avec les pairs ne nécessitent pas l’intervention d’instructeurs et d’entraîneurs, les facteurs associés à la participation à cette activité sont quelque peu différents. Les enfants avaient des chances plus élevées de participer à des réseaux avec les pairs s'ils étaient une fille, s'ils avaient de 10 à 14 ans et s'ils fréquentaient une école qui s’adaptait à leur condition.

Krista Kowalchuk est une analyste de l’Enquête sur la participation et les limitations d’activités de la Division de la santé et Susan Crompton est analyste principale à la revue Tendances sociales canadiennes.

Notes

  1. Law, M., King, G., King, S., Kertoy, M., Hurley, P., Rosenbaum, P., Young, N., Hanna, S., et Petrenchik, T. (2006). Patterns and predictors of recreational and leisure participation for children with physical disabilities. CanChild Centre for Childhood Disability Research.
  2. Guèvremont, A., Findlay, L., et Kohen, D. (2008). Activités parascolaires organisées des enfants et des jeunes au Canada. Rapport sur la santé 19(3), 69-74. No 82-003-XWF au catalogue de Statistique Canada.
  3. King, G., Law, M., King, S., Fownbaum, P., Kertoy, M., et Young, N. (1999). The participation of children with disabilities. CanChild Centre for Childhood Disability Research.
  4. Hanley, L. (2003). Recherche sur l’inclusion sociale au Canada : Enfants et jeunes. Ottawa : Conseil canadien de développement social.
  5. Hanley. (2003). Guèvremont et al. (2008). Un rapport de Statistique Canada publié en 2008 montre que 86 % des enfants et des jeunes de 6 à 17 ans ont participé à au moins une activité parascolaire au moins une fois par mois, les sports organisés étant plus courants que les activités non sportives comme les leçons (musique, arts plastiques, art dramatique, etc.) et le fait d’être membres de clubs et de groupes communautaires.
  6. Statistique Canada. (2007, 3 décembre). Enquête sur la participation et les limitations d’activités. Le Quotidien. No 11-001-XWF au catalogue de Statistique Canada. Chez près de trois quarts des enfants ayant des incapacités, on en a diagnostiqué plus d’une.
  7. Bien sûr, plusieurs enfants prenaient part à des activités physiques non organisées (c.-à-d. n’exigeant pas d’entraîneur, d’instructeur ou de surveillant). Les deux tiers des enfants de 5 à 14 ans ayant des incapacités et vivant dans une famille monopararentale ou biparentale ont pris part à de telles activités. Parmi ces enfants, 74 % y ont participé au moins une fois par semaine.
  8. Bortoli, A., et Brown, M. P. (2002) The significance of attention during social engagement (décembre). Document présenté à la conférence de l’ Australian Association for Research in Education (AARE), Brisbane, Australie.
  9. Law, M., Finkelman, S., Hurley, P., Rosenbaum, P., King, S., King, G., et Hanna, S. (2004). Participation of children with physical disabilities: relationships with diagnosis, physical function, and demographic variables. Scandinavian Journal of Occupational Therapy, 11(4), 156-162. Dans une étude sur les enfants ayant des incapacités physiques, des chercheurs canadiens ont trouvé que la catégorie de diagnostic de la condition de l’enfant n’avait pas une incidence significative sur la participation à des activités quotidiennes, après avoir pris en compte l’âge, le sexe, le fonctionnement physique. Ils suggèrent que d’autres caractéristiques personnelles, familiales et environnementales sont d’importants indices de la participation.
  10. On rappelle aux lecteurs que ces réponses ont été données par le parent et non l’enfant.
  11. Bortoli et Brown. (2002). Les recherches ont démontré que les réseaux sociaux des enfants non handicapés sont constitués principalement d’amis du même sexe, tandis que ceux des enfants ayant une incapacité (garçons ou filles) sont principalement constitués d’amies filles. Une explication possible est que les filles sont plus susceptibles que les garçons d’avoir des amis ayant une incapacité.
  12. King, G., et al. (1999).
  13. Thomas, P., Roller, S., Scharnhorst, A., Cunningham, S., et Warschausky, S. (2006). Study explores how children with disabilities make friends: How can parents and school personnel help? Focus on Results, (mars). Michigan Department of Education.
  14. Hanvey, L. (2002). Les enfants ayant une déficience et leurs familles au Canada, (novembre). Document de travail commandité par l’Alliance nationale pour les enfants pour la première table ronde nationale sur les enfants ayant une déficience.
  15. Thomas et al. (2006).