La formation liée à l'emploi chez
les travailleurs âgés

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Par Jungwee Park

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Tout au long de leur carrière, la formation permet aux travailleurs d'augmenter leur niveau de compétences et de mettre à niveau leurs connaissances afin d'accroître leurs possibilités d'avancement, améliorer leur sécurité d'emploi ou augmenter leur salaire (Kapsalis, 1998, et Cully et coll., 2000). Les employeurs offrent de la formation pour accroître la productivité ou le rendement des employés, atteindre des buts organisationnels et investir dans leurs travailleurs pour réussir dans un environnement d'affaires imprévisible (Belcourt et coll., 2000). Étant donné la tendance au report de la retraite (Carrière et Galarneau, 2011), la formation liée à l'emploi revêt de plus en plus d'importance pour les travailleurs âgés désireux de continuer à travailler, de même que pour les employeurs aux effectifs vieillissants.

Outre l'allongement de la carrière, plusieurs autres facteurs sous-tendent une hausse de la fréquence de la formation chez les travailleurs âgés. Certaines études ont cité la formation et le maintien en poste des travailleurs âgés comme solutions aux possibles pénuries de main-d'œuvre qualifiée dans certaines industries (Zeytinoglu et coll., 2007). D'autres font valoir que le nombre potentiellement plus faible d'années restantes en emploi des travailleurs âgés ne se traduit pas nécessairement par une durée d'emploi plus courte chez un même employeur puisque les taux de maintien en poste sont plus élevés pour les employés âgés (Robson, 2001). Au Canada, les taux de roulement les plus bas ont été enregistrés chez les travailleurs âgés (Picot et coll., 2001). Qui plus est, entre la fin des années 1980 et la fin des années 1990, la durée d'occupation d'un nouvel emploi par les 55 à 64 ans s'est accrue davantage que chez les travailleurs de toute autre tranche d'âge de 10 ans1. Ainsi, les employés âgés et leurs employeurs pourraient disposer de plus de temps que par le passé pour récolter les fruits de la formation offerte ou en recouvrer les coûts.

Quoi qu'il en soit, la plupart des études font état d'un déclin de la fréquence de la formation avec l'âge (OCDE, 2006, et Cully et coll., 2000). Cela pourrait être lié à la perception d'obstacles à la formation chez les travailleurs âgés. En comparaison des travailleurs du principal groupe d'âge actif (les 25 à 54 ans), les travailleurs âgés sont proportionnellement beaucoup plus nombreux à percevoir des obstacles décisionnels les dissuadant de suivre des cours ou des programmes d'apprentissage liés à l'emploi. Ainsi, nombre d'entre eux ont pu ne pas suivre de formation liée à l'emploi par manque de confiance en soi, d'intérêt ou de motivation, même s'ils auraient souhaité ou nécessité une formation (voir Obstacles aux possibilités de formation).

Bien que l'âge soit un élément d'analyse de bien des études canadiennes, les travailleurs âgés en constituent rarement l'aspect central (Hurst, 2008; Zeytinoglu et coll., 2007; Underhill, 2006; et Knighton et coll., 2009). Lorsque l'âge est une variable prise en compte dans un modèle de la fréquence ou de l'intensité de la formation, il est présumé que les effets des autres caractéristiques sont les mêmes pour les travailleurs âgés ou plus jeunes. Ainsi, une analyse portant expressément sur les travailleurs âgés pourrait jeter de nouveaux éclairages sur le sujet.

L'Enquête sur l'accès et le soutien à l'éducation et la formation (EASEF), menée le plus récemment en 2008, fournit des renseignements détaillés sur l'éducation des adultes, y compris la formation liée à l'emploi et la formation soutenue par l'employeur (voir Source des données et définitions). Le présent article traite tout spécialement de la population des employés adultes ayant occupé un emploi ou exploité une entreprise à un moment ou un autre de la période allant de juillet 2007 à juin 2008. Les employés âgés de 55 à 64 ans sont le principal groupe ciblé par la présente analyse. Pour examiner la formation liée à l'emploi chez les travailleurs âgés au cours des précédentes années, on s'est servi des cycles de 1992 à 2003 de l'Enquête sur l'éducation et la formation des adultes (EEFA).

Dans cette étude, nous tentons de répondre aux questions de recherche suivantes :

  1. Y a-t-il des différences dans le taux de participation à des activités de formation liée à l'emploi entre les employés âgés (55 à 64 ans) et les employés du principal groupe d'âge actif (25 à 54 ans)?
  2. Certains travailleurs âgés sont-ils plus susceptibles que d'autres de recevoir une formation liée à l'emploi soutenue par l'employeur?
  3. Comment la participation des travailleurs âgés à une formation soutenue par l'employeur a-t-elle changé au fil du temps?

Les travailleurs âgés ont suivi moins de formation liée à l'emploi

Les activités de formation liée à l'emploi peuvent être divisées en « cours » et « programmes » se rapportant à un emploi actuel ou futur. Les cours englobent des activités d'apprentissage structurées qui comprennent des ateliers, des leçons particulières et d'autres activités de formation guidée en cours d'emploi, mais qui ne mènent pas à l'obtention d'attestations d'études officielles. Les programmes d'apprentissage liés à l'emploi, en revanche, font intervenir une formation menant à des attestations officielles (Knighton et coll., 2009). Dans la présente analyse, la formation liée à l'emploi comprend les deux types d'activités — les cours et les programmes (voir Source des données et définitions)2.

Globalement, les employés plus jeunes sont proportionnellement plus nombreux que les employés âgés à déclarer avoir reçu une formation liée à l'emploi (graphique A). De juillet 2007 à juin 2008, 45 % des travailleurs de 25 à 54 ans avaient pris part à au moins un cours ou un programme d'apprentissage lié à l'emploi, comparativement à 32 % de ceux de 55 à 64 ans.

Des tendances semblables ont été observées en ce qui a trait à la formation soutenue par l'employeur3 : 38 % des travailleurs du principal groupe d'âge actif ont reçu une formation soutenue par l'employeur, comparativement à 28 % chez les travailleurs âgés (graphique B). Ces écarts entre les groupes d'âge s'observaient aussi bien chez les hommes que chez les femmes4.

En appliquant des modèles classiques prenant en compte des variables sociodémographiques et des facteurs relatifs au marché du travail5, on a constaté que les écarts de participation à la formation liée à l'emploi et à la formation soutenue par l'employeur entre les employés âgés et leurs homologues plus jeunes demeuraient significatifs. Par exemple, les employés âgés de sexe masculin étaient deux fois moins susceptibles de recevoir de la formation soutenue par l'employeur que leurs homologues du principal groupe d'âge actif (tableau 2).

Les répondants âgés ont suivi un nombre comparable de cours et de programmes

L'intensité de la formation liée à l'emploi est mesurée par le nombre d'heures passées en formation et le nombre de cours/programmes suivis. Parmi ceux et celles qui ont pris part à des activités de formation liée à l'emploi, on a observé des différences notables entre les travailleurs âgés et plus jeunes quant aux heures passées à suivre des cours, mais non au niveau des heures consacrées à des programmes de formation. En moyenne, l'effectif masculin des participants âgés a passé 34 heures à suivre des cours, comparativement à 58 heures chez les hommes plus jeunes (tableau 3). Toutefois, le nombre moyen de cours et de programmes suivis par les deux groupes d'âge était presque identique.

Dans l'ensemble, les employés âgés ont tendance à suivre des cours de plus courte durée que leurs homologues plus jeunes. D'autres mesures d'intensité ont donné des résultats comparables pour les deux groupes, malgré des différences évidentes dans la fréquence de la formation.

Le revenu personnel et le niveau scolaire sont des facteurs liés à la participation à une formation

Des modèles de régression logistique multivariée ont été estimés pour examiner le lien entre les caractéristiques sociodémographiques et du marché du travail et la participation des travailleurs âgés à une formation soutenue par l'employeur. Le premier ensemble de modèles incluait les variables sociodémographiques et les caractéristiques de l'emploi. Ces modèles ont permis de tester les effets des conditions d'emploi, de la profession, de l'horaire de travail, de la syndicalisation et de la durée d''emploi tout en tenant compte des facteurs sociodémographiques.

Dans le deuxième ensemble de modèles, on a substitué à la variable des caractéristiques de l'emploi celle des caractéristiques du milieu de travail — un indicateur du secteur public ou du secteur privé, la taille de l'entreprise et l'industrie. Un troisième ensemble de modèles faisait entrer en ligne de compte les caractéristiques relatives à l'emploi et au milieu de travail ainsi que les facteurs sociodémographiques6. Étant donné que ces analyses reposent sur des données transversales, on ne peut faire d'inférence quant à la causalité et à l'ordonnancement des événements.

Chez les travailleurs âgés, le revenu et le niveau de scolarité étaient des corrélats importants de la formation. Comparativement aux hommes et aux femmes dont le revenu annuel personnel égalait ou dépassait 100 000 $, les personnes gagnant moins de 50 000 $ par an étaient significativement moins susceptibles de recevoir de la formation soutenue par l'employeur (tableau 4). Autrement dit, les titulaires de postes très rémunérateurs semblent bénéficier de plus de possibilités de formation liée à l'emploi, ce qui pourrait être dû à une demande accrue de compétences dans leur domaine de travail.

Lorsqu'étaient prises en considération les variables démographiques et les caractéristiques relatives à l'emploi et au milieu de travail, on constatait que les travailleuses âgées ayant fait des études postsecondaires étaient sensiblement plus susceptibles de recevoir une formation soutenue par l'employeur que celles dont le niveau de scolarité était plus bas. Les deux premiers modèles ont révélé des corrélations semblables pour les employés âgés de sexe masculin, mais pour ces derniers, les résultats de la régression n'étaient plus statistiquement significatifs lorsque l'on tenait simultanément compte des caractéristiques relatives au milieu de travail et à l'emploi, ce qui dénotait une certaine corrélation entre le niveau de scolarité et les caractéristiques du milieu de travail chez les hommes.

Sur le plan géographique, les travailleurs du Québec — tant âgés que du principal groupe d'âge actif — présentaient de plus faibles taux de participation à une formation que les travailleurs de l'Ontario, qui constituaient le groupe de référence (données non présentées)7.

Plus haut taux de participation à une formation chez les cols blancs âgés

En comparaison des cols blancs, les autres travailleurs (ceux du domaine des ventes ou des services et les cols bleus, voir Source des données et définitions) recevaient moins de formation. Les cols bleus âgés de sexe masculin étaient moins susceptibles que leurs homologues chez les cols blancs de recevoir une formation liée à l'emploi soutenue par l'employeur (rapport de cotes de 0,5), cependant cette différence perdait sa significativité lorsqu'étaient pris en considération les caractéristiques du milieu de travail. Les femmes occupant des emplois dans le secteur des ventes ou des services étaient moins susceptibles de suivre une formation soutenue par l'employeur que les cols blancs de sexe féminin.

Les femmes occupant un emploi temporaire étaient moins susceptibles de participer à une formation soutenue par l'employeur que les employées permanentes. Cette constatation porte à croire que la sécurité d'emploi des travailleuses âgées a un lien avec les opportunités de formation liée à l'emploi soutenue par l'employeur.

Taux de participation à une formation plus élevés chez les travailleurs des industries de service

Les travailleurs occupant un emploi dans le secteur des industries productrices de biens étaient moins susceptibles que les autres de participer à des activités de formation soutenue par l'employeur. En appliquant le troisième modèle (tableau 4) contrôlant toutes les variables, on a constaté que les hommes et les femmes âgés occupant un emploi dans les industries productrices de biens étaient moins susceptibles d'entreprendre une formation liée à l'emploi que ceux qui travaillent dans les industries de service. Cela pourrait être attribuable au très haut taux de formation de certaines industries de services comme celles des services professionnels et scientifiques, de l'information, de l'éducation et des soins de santé (Park, 2011).

Plusieurs autres caractéristiques relatives à l'emploi et au milieu de travail ont été associées de façon significative à la participation des femmes âgées à de la formation liée à l'emploi. Les employées du secteur privé étaient moins susceptibles de suivre une formation soutenue par l'employeur que celles du secteur public. Comme Barrett et coll. l'ont avancé (2009), la formation offerte par les entreprises du secteur privé a tendance à être une formation propre à l'employeur qui est étroitement liée à l'emploi occupé, tandis que les employeurs du secteur public peuvent parrainer une formation plus générale pouvant être utile à un emploi actuel aussi bien qu'à un futur emploi.

Quant à la taille de l'entreprise, les travailleuses âgées des petites entreprises (moins de 20 employés) étaient, dans une proportion supérieure à 50 %, moins susceptibles de participer à de la formation soutenue par l'employeur que celles employées par des entreprises ayant un effectif de plus de 500 personnes. Les entreprises de grande taille ont tendance à offrir davantage d'incitatifs à la formation des employés parce qu'elles peuvent mettre en commun les risques rattachés à la formation (Holtmann et Idson, 1991), tandis que les entreprises de petite taille pourraient avoir du mal à se passer de ressources aux fins de leur formation (Leckie et coll., 2001).

Participation accrue à de la formation soutenue par l'employeur avec le temps

En examinant les cycles précédents de l'Enquête sur l'éducation et sur la formation des adultes, on a observé une hausse constante de la fréquence de la formation soutenue par l'employeur chez les travailleurs âgés depuis 19938. En 2008, près de 30 % des employés âgés ont reçu une formation soutenue par l'employeur, comparativement à 10 % environ en 1991 et en 19939 (graphique C). La croissance régulière du taux de participation à la formation liée à l'emploi a été observée tant pour les travailleurs âgés que pour leurs homologues féminins.

On observe non seulement une appréciation des taux de participation des travailleurs âgés à une formation au fil du temps, mais également un rétrécissement de l'écart entre les taux de participation des jeunes travailleurs et des plus âgés. Le taux de formation des travailleurs du principal groupe d'âge a lui aussi enregistré une hausse, mais d'une plus faible ampleur. Par exemple, entre 1991 et 2008, le taux de participation des employés du groupe d'âge principal est passé de 29 % à 38 %, tandis que dans le cas des travailleurs âgés, il est passé de 12 à 28 %. En d'autres termes, si, en 1991, les travailleurs du principal groupe d'âge actif étaient deux fois et demie plus susceptibles de recevoir une formation que les employés âgés, en 2008, ce ratio avait diminué à 1,4 (graphique D).

Le niveau de scolarité est le plus important facteur d'augmentation du taux de formation au fil du temps

La croissance marquée du taux de participation des travailleurs âgés à une formation liée à l'emploi pourrait être lié aux changements au niveau de leur profil sociodémographique, telle qu'une appréciation de leur niveau de scolarité. Par exemple, de 30 % qu'ils étaient à détenir un diplôme ou un certificat d'études postsecondaires en 1991, ils sont passés à 56 % en 200810.

On s'est servi de la méthode de décomposition de Blinder-Oaxaca pour estimer dans quelle mesure la différence observée dans le temps est attribuable à certaines caractéristiques socioéconomiques (tableau 5). Il existe une différence de 16 points de pourcentage entre le taux de participation des employés âgés à de la formation soutenue par l'employeur entre 1991 et 2008. Les différences au niveau des caractéristiques socioéconomiques des travailleurs âgés entre ces deux années expliquent environ 10 points de pourcentage — ou 61 % — de cet écart global. La plus grande part de l'écart est attribuable au niveau de scolarité puisqu'on lui attribue 5 points de pourcentage sur l'écart global, tandis que la profession, l'industrie et la durée d'emploi dans le secteur public/privé expliquent respectivement 1,8, 1,5 et 1,6 point de pourcentage respectivement. En d'autres termes, plus de la moitié de l'augmentation du taux de participation à de la formation soutenue par l'employeur en 2008 était associée au changement de caractéristiques des travailleurs âgés et de leur milieu de travail — en particulier à des niveaux de scolarité plus élevés et des effectifs plus nombreux dans le secteur public, les industries de service et les emplois de col blanc.

En revanche, plus du tiers (39 %) de l'augmentation ne peut s'expliquer par les changements de conditions socioéconomiques. Il s'est donc aussi produit une hausse de la participation des travailleurs âgés à de la formation sans égard à leurs caractéristiques personnelles, d'emploi ou de milieu de travail.

Conclusion

Compte tenu des récentes tendances économiques, la formation liée à l'emploi revêt de plus en plus d'importance pour les employés âgés qui veulent continuer de travailler. À mesure que ces travailleurs reportent leur retraite (Carrière et Galarneau, 2011), leur taux de formation augmente, ce qui les aide à rester employables et productifs.

Pour les employeurs, le maintien en poste de travailleurs âgés représente une solution au vieillissement de l'effectif, en particulier lorsqu'il y a pénurie d'employés qualifiés. Les données indiquent que la durée d'occupation de l'emploi chez les travailleurs âgés nouvellement embauchés augmente également, de sorte que les employeurs ont plus de temps pour récupérer le coût de la formation en réalisant des gains de productivité.

Il ressort de cette étude que les travailleurs âgés demeurent significativement moins susceptibles de suivre une formation liée à l'emploi que leurs homologues du principal groupe d'âge actif, même après la prise en compte des facteurs reliés au marché du travail et des variables sociodémographiques.

Le taux de participation à de la formation était significativement plus faible chez les employés âgés touchant un salaire annuel moins élevé, ayant un faible niveau de scolarité, occupant un emploi temporaire, exerçant un emploi de col bleu ou dans le domaine des services et travaillant dans le secteur privé, en particulier dans les industries productrices de biens.

Cela dit, l'écart de formation entre les jeunes travailleurs et les employés âgés s'est rétréci avec le temps, alors que les taux de participation des travailleurs âgés à la formation ont plus que doublé entre 1991 et 2008. Le ratio entre le taux de formation des travailleurs du principal groupe d'âge actif et des plus âgés s'est établi à 1,4 en 2008, comparativement à 2,5 en 1991. Bien que près des deux tiers de l'augmentation du taux de participation des travailleurs âgés à la formation soit attribuable aux changements de leur niveau de scolarité et des caractéristiques de leur milieu de travail, une tendance générale à la hausse se dessine clairement à cet égard pour les employés âgés.

Obstacles aux possibilités de formation

Dans l'EASEF de 2008, on demandait aux répondants s'il y avait une formation qu'ils auraient souhaité recevoir, mais qu'ils n'ont pas suivie et s'il y avait une formation qu'ils auraient dû recevoir, mais qu'ils n'ont pas obtenue. Le besoin ou la volonté de suivre une formation peut être considéré comme l'indication d'une personne disposée ou prête à participer à une activité de formation (Knighton et coll., 2009). Dans cette section, les travailleurs âgés faisant partie des deux précédents groupes ont été réunis afin d'examiner les obstacles perçus à la formation liée à l'emploi. Nous abordons aussi les raisons pour lesquelles un travailleur ne suit pas de formation.

Trois principaux types d'obstacles à la participation à une formation liée à l'emploi ont été relevés, soit les obstacles liés à la situation, ceux liés aux établissements et ceux liés aux attitudes (ou obstacles psychologiques) (Sussman, 2002). Les obstacles liés à la situation sont associés aux circonstances de la vie à un moment donné —personne trop occupée au travail, contraintes financières, responsabilités familiales ou inaccessibilité des services de garde d'enfants, et problèmes de langue ou de santé. Les obstacles liés aux établissements consistent en des pratiques et des procédures établies qui excluent ou découragent la participation, comme des droits de scolarité élevés, des conditions préalables à l'admission, un nombre limité de cours offerts et des cours dispensés à des heures ou à des endroits peu pratiques pour le répondant. Les obstacles liés aux attitudes sont rattachés aux attitudes et opinions à l'égard de l'apprentissage ainsi qu'aux perceptions de l'apprenant (Cross, 1981).

Par rapport à la jeune population active, les employés âgés étaient moins susceptibles de percevoir la présence d'obstacles à l'accès à la formation. Environ 19 % des femmes et 13 % des hommes chez les employés âgés de 55 à 64 ans percevaient des obstacles à la formation liée à l'emploi (tableau 1). Ces proportions étaient moindres que celles des travailleurs du principal groupe d'âge actif, en l'occurrence 33 % des femmes et 29 % des hommes.

Chez les travailleurs âgés n'ayant pas reçu une formation liée à l'emploi malgré leur besoin ou leur volonté d'en suivre une, les obstacles liés à la situation représentaient les motifs les plus souvent invoqués pour n'avoir pas suivi de cours ou de programme d'apprentissage. Dans un cas sur cinq, les répondants ont déclaré des problèmes d'horaire et, dans près d'un cas sur quatre, le répondant se disait trop absorbé par son travail. Toutefois, la part des travailleurs ayant signalé la présence d'obstacles liés à la situation et aux établissements était significativement moins élevée chez les travailleurs âgés que chez les travailleurs plus jeunes.

D'autre part, les travailleurs âgés percevaient plus souvent des obstacles liés aux attitudes que leurs homologues du groupe d'âge principal. Pour ce qui est de la répartition entre les sexes, 35 % des hommes et 27 % des femmes chez les travailleurs âgés percevaient des obstacles liés aux attitudes, comparativement à des proportions respectives de 22 % et 20 % chez les employés du principal groupe d'âge actif. Le manque d'assurance, d'intérêt ou de motivation ont notamment été invoqués comme d'importants obstacles à la formation liée à l'emploi chez les travailleurs âgés.

Enfin, une proportion relativement élevée de travailleurs âgés (33 % des hommes et 29 % des femmes) a sélectionné « autre » comme raison des obstacles. Ainsi, d'autres obstacles perçus par de nombreux employés âgés ne se sont pas retrouvés dans les catégories de réponses de l'enquête.

Source des données et définitions

La principale source de données aux fins de cet article est l'Enquête sur l'accès et le soutien à l'éducation et la formation (EASEF). Il s'agit d'une nouvelle enquête réalisée auprès de 72 000 ménages; l'EASEF conjugue trois enquêtes menées antérieurement, soit l'Enquête sur les approches en matière de planification des études, l'Enquête sur la participation aux études postsecondaires et l'Enquête sur l'éducation et la formation des adultes (Statistique Canada, 2008). Ces données ont été recueillies entre juin et octobre 2008. La plupart des questions de l'enquête se rapportent aux activités menées entre juillet 2007 et juin 2008. L'information recueillie dans le cadre de cette enquête comprend des données sur la fréquence et l'intensité de la participation des adultes à une formation liée à l'emploi, sur le profil du soutien de l'employeur à la formation et sur les obstacles empêchant les intéressés de recevoir la formation qu'ils souhaitent ou qu'ils ont besoin de suivre. L'Enquête comporte également de l'information sur le marché du travail et sur d'autres caractéristiques personnelles.

L'enquête porte sur les personnes âgées de 25 à 64 ans aux fins d'analyse, avec une taille d'échantillon de 16 900 représentant une population de 18,3 millions de personnes (la taille de l'échantillon d'employés est de 11 300). La taille de l'échantillon des 55 à 64 ans est de 4 900 (2 300 employés), ce qui représente une population de 3,9 millions de personnes.

Tailles des échantillons pour les cycles antérieurs de l'EEFA :

  • EEFA de 1992 - 32 200 (55 à 64 ans, N=5, 200)
  • EEFA de 1994 - 29 500 (4 900)
  • EEFA de 1998 - 23 700 (3 800)
  • EEFA de 2003 - 24 200 (4 900).

Compte tenu de la complexité de la conception de l'Enquête, on a eu recours à une estimation bootstrap pour déterminer les écarts des pourcentages et des rapports de cotes.

Les activités de formation liée à l'emploi sont les activités menées aux fins de perfectionnement ou d'amélioration des compétences utilisées dans le cadre d'un emploi présent ou futur plutôt que par intérêt personnel ou pour d'autres raisons non rattachées à l'emploi. Les activités de formation peuvent prendre la forme de cours et d'ateliers n'aboutissant pas à l'obtention d'attestations d'études officielles, ou encore de programmes d'apprentissage dispensés au sein de systèmes officiels d'éducation qui mènent à des attestations d'études officielles, notamment les attestations d'études primaires et secondaires et les attestations d'études postsecondaires, comme les diplômes et les grades universitaires et collégiaux.

La formation liée à l'emploi soutenue par l'employeur est une activité de formation liée à l'emploi que parraine l'employeur. Le soutien de l'employeur consiste en une ou plusieurs des mesures ci-après : fournir la formation; payer la formation (soit directement, soit au moyen d'un remboursement à l'employé); autoriser un horaire de travail souple permettant à l'employé de suivre la formation; fournir le transport aller-retour au lieu où est dispensée la formation. L'EASEF a recueilli des données sur le soutien de l'employeur à une activité de formation choisie au hasard plutôt que sur le parrainage de toutes les activités de formation. Les cycles de l'EEFA étaient basés sur toutes les activités de formation qui ont été suivies. En 2003 et en 2008, les questions portant sur le soutien de l'employeur n'ont été posées qu'aux répondants qui avaient suivi des cours ou une formation en rapport avec un emploi présent ou futur (formation liée à l'emploi); dans les cycles antérieurs de cette enquête, il y avait une série de questions qui portaient sur la participation à toute activité d'éducation ou de formation qu'elle fût ou non liée à l'emploi.

La définition d'un employé repose sur le concept d'une catégorie de travailleurs. Parmi les personnes ayant occupé un emploi ou exploité une entreprise à un moment ou un autre durant l'année antérieure à l'enquête, celles qui étaient des employés du secteur public ou qui travaillaient au sein d'entreprises du secteur privé ont été considérées comme les employés. Les travailleurs autonomes et les personnes travaillant sans rémunération dans une entreprise familiale ont été exclus de l'analyse.

Les professions ont été réparties en trois groupes :

  • les cols blancs (professions en gestion; affaires, finances, administration; sciences naturelles et appliquées; santé; sciences sociales, éducation, services gouvernementaux et religion; arts, culture, loisirs et sports);
  •  les emplois de la vente et des services;
  • les cols bleus (métiers, transport et machinerie; secteur primaire; transformation, fabrication et services publics).

Les secteurs d'activité ont été répartis en deux catégories :

  • les industries productrices de biens, notamment l'agriculture, la foresterie, la pêche, l'extraction minière, l'extraction de pétrole et de gaz; les services publics; la construction; la fabrication;
  • les industries de service, soit le commerce; le transport et l'entreposage; les finances et les assurances; les services immobiliers, location et baux; les services professionnels, scientifiques et techniques; l'éducation; les soins de santé et l'aide sociale; les arts, les spectacles et les loisirs, les services d'hébergement et d'alimentation, ainsi que l'administration publique.

Notes

  1. Selon les données de l'Enquête sur la population active, de 1987 à 1989 et de 1997 à 1999, le taux de croissance de la durée moyenne d'occupation d'un emploi (en mois) chez les travailleurs âgés de 55 à 64 ans a été de 49 %, comparativement à des taux respectifs de 35 %, 27 % et 38 % chez les 25 à 34 ans, 35 à 44 ans et 45 à 54 ans (Picot et coll., 2001). En outre, cette analyse révèle que 30 % des travailleurs âgés de 55 à 64 ans ont déclaré une durée d'occupation de leur emploi de plus de 20 ans (52 % ont déclaré une durée supérieure à 10 ans), comparativement à une proportion de 23 % des 45 à 54 ans (45 % pour une durée d'occupation supérieure à 10 ans).
  2. Bien que certaines études utilisant les données de l'EASEF de 2008 portaient sur les cours de formation (Knighton et coll., 2009; et Park, 2011), notre analyse englobe les deux pour faciliter la comparaison avec les études antérieures qui combinent des cours et des programmes comme Sussman, 2002; Peters, 2004; et Underhill, 2006.
  3. La majeure partie de la formation (83 %) a été, au moins en partie, soutenue par l'employeur (Park, 2011).
  4. Il n'y avait pas d'écarts statistiquement significatifs de participation à une formation entre les 55 à 59 ans et les 60 à 64 ans.
  5. Les variables de contrôle comprenaient le niveau de scolarité, le revenu personnel, l'appartenance à une minorité visible, l'état matrimonial, la région géographique, l'incapacité, la durée d'occupation de l'emploi, le type de l'emploi (temps plein ou partiel), le statut d'employé permanent, la syndicalisation, la profession exercée, la taille de l'entreprise, le secteur professionnel (public/privé) et le secteur d'activité.
  6. En alternant l'inclusion des caractéristiques de l'emploi et des caractéristiques du milieu de travail entre les modèles, on peut mieux déterminer si une question de colinéarité entre les deux se pose.
  7. Outre le modèle élaboré pour la participation des travailleurs âgés à de la formation soutenue par l'employeur, on s'est livré à une analyse de régression distincte pour l'ensemble des activités de formation liée à l'emploi. Des constatations similaires ont été faites. Les résultats détaillés concernant les activités globales de formation liée à l'emploi peuvent être obtenus auprès de l'auteur.
  8. La formation soutenue par l'employeur procure des données plus comparables au fil des cycles que les activités générales de formation liée à l'emploi. Les cycles précédents mesuraient différemment les cours et programmes liés à l'employeur et ceux qui ne l'étaient pas.
  9. À noter que les années d'enquête sont différentes des années de référence. Par exemple, l'EEFA de 2003 demandait aux répondants s'ils avaient poursuivi des études ou suivi une formation en 2002.
  10. Au cours de la même période, la proportion des travailleurs du principal groupe d'âge qui détenaient un diplôme ou certificat d'études postsecondaires est passée de 46 % à 69 %.

Documents consultés

BARRETT, Alan, Séamus MCGUINNESS, Martin O'BRIEN et Philip O'CONNELL. 2009. Immigrants and Employer-Provided Training, Institute for the Study of Labor (IZA) Discussion PaperNo. 4425, Bonn, Allemagne, Institute for the Study of Labor, 29 p., (site consulté le 12 avril 2012).

BELCOURT, Monica, Philip C. WRIGHT et Alan M. SAKS. 2000. Managing Performance Through Training and Development, deuxième édition, Nelson Series in Human Resources Management, Scarborough, Ontario, Nelson, 372 p.

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Auteur

Jungwee Park travaille à la Division de la statistique du travail. On peut le joindre au 613­951­4598 ou à perspective@statcan.gc.ca.

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