Section 4 Quelques secteurs clés pour la vitalité des communautés de langue officielle en situation minoritaire

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La Feuille de route pour la dualité linguistique canadienne 2008-2013 investit dans des secteurs prioritaires, dont les cinq suivants : la santé, la justice, les arts et la culture, le développement économique et l'immigration. Le dernier des ces secteurs a été abordé sommairement dans une section précédente et a fait l'objet d'un rapport analytique diffusé par Statistique Canada (Houle et Corbeil, 2010). Nous présentons dans cette section des statistiques portant sur les quatre autres secteurs prioritaires identifiés dans la Feuille de route. De plus, la Feuille de route comprend un appui financier à l'enseignement dans la langue de la minorité. Ce secteur d'activité a été identifié comme étant d'une grande importance pour l'avenir des minorités de langue officielle au Canada (Lord, 2008); une section y sera donc consacrée.

À partir des données de l'Enquête sur la vitalité des minorités de langue officielle et du recensement, nous présentons de l'information générale sur la présence du français et la situation des francophones dans chacun de ces secteurs.

4.1 La santé

Une langue commune entre les patients et les professionnels de la santé constitue un des éléments essentiels à l'accès aux services de soins de santé et à l'efficacité de ceux-ci. Les barrières linguistiques peuvent en effet faire en sorte que certains membres des communautés francophones en situation minoritaire soient moins bien desservis par les services de soins de santé. Dans cette optique, il importe d'examiner l'état de la situation pour les communautés francophones de la Saskatchewan en ce qui concerne certaines dimensions de l'accès aux services de soins de santé.

Lors du Recensement de 2006, 12 % des médecins travaillant en Saskatchewan, soit 130 sur un total de 1 085, ont déclaré pouvoir soutenir une conversation en français, alors que 0,9 % déclaraient l'utiliser au moins régulièrement1 dans le cadre de leur travail2. Chez les infirmières, au nombre de 14 850, ces proportions sont de 4,6 % et 0,7 % respectivement.

La proportion de médecins et d'infirmières capables de soutenir une conversation en français est beaucoup plus élevée que la part relative de la population fransaskoise. Néanmoins, les résultats de l'EVMLO révèlent que la grande majorité des francophones (95 %) de la Saskatchewan indiquent utiliser l'anglais lors des consultations avec différents professionnels de la santé à propos desquels des renseignements ont été recueillis dans le cadre de cette enquête, soit les médecins de famille, les infirmières, les professionnels de la ligne téléphonique d'information (Info-Santé) et les professionnels des autres endroits fréquentés pour obtenir des soins.

L'Enquête sur la vitalité des minorités de langue officielle révèle que 23 % des Fransaskois déclarent qu'il est important ou très important pour eux d'obtenir des services de santé en français. Néanmoins, l'utilisation de l'anglais est quasi exclusive avec le médecin de famille (93 %), avec les infirmières (88 %), de même qu'avec les professionnels et spécialistes des autres endroits fréquentés pour obtenir des soins (87 %). L'utilisation de l'anglais avec la ligne d'information téléphonique sur la santé (78 %) est toutefois un peu moins répandue. La méconnaissance du français par les professionnels de la santé, tel que perçue par les répondants, est la principale raison mentionnée par les francophones pour expliquer l'absence de services dans cette langue lors de leurs consultations. Une telle raison influe donc grandement sur la principale langue utilisée lors des échanges.

Dans l'ensemble, les résultats de l'EVMLO et du recensement permettent d'observer que la faible concentration des francophones au sein de la municipalité de résidence, la disponibilité de professionnels ayant une connaissance du français ainsi que la langue principale des demandeurs de services sont trois facteurs importants qui modulent le degré d'utilisation de l'une ou l'autre des langues avec les professionnels de la santé.

La présence de professionnels de langue française et de professionnels capables de soutenir une conversation dans la langue minoritaire est susceptible d'augmenter l'accessibilité aux services de soins de santé dans cette langue. Elle peut en effet également favoriser une plus forte présence et une utilisation plus répandue de la langue dans ce secteur clé de la sphère publique. Toutefois, l'écart observé entre la proportion de ces professionnels capables de soutenir une conversation en français et la population de francophones utilisant le français pour obtenir des services de santé donne à penser que l'offre active de services dans la langue minoritaire est possiblement un enjeu qui mériterait un examen plus attentif.

Il importe également d'examiner si les francophones qui déclarent avoir le français comme langue principale ont été plus susceptibles d'utiliser le français lors de leurs interactions avec les professionnels de la santé que ceux dont l'anglais est la langue principale. Il va en effet de soi que l'absence d'utilisation de la langue officielle minoritaire par les francophones dont le français est la langue principale, c'est-à-dire celle dans laquelle ils sont le plus à l'aise, ne dépend pas des mêmes facteurs que dans le cas des francophones qui ont effectué une substitution linguistique de telle sorte que l'anglais soit désormais la langue dans laquelle ils se sentent le plus à l'aise. Les résultats de l'Enquête sur la vitalité des minorités de langue officielle rendent compte du fait que quelque soit leur langue principale, la grande majorité des francophones (95 %) utilisent l'anglais lorsqu'ils consultent les différents professionnels de la santé. En fait, les francophones ayant le français comme langue principale sont pratiquement aussi nombreux (91 %) à utiliser l'anglais que ceux ayant l'anglais (96 %) comme langue principale lors de leurs interactions avec leur médecin de famille.

Cependant, l'information tirée de l'EVMLO démontre clairement que, chez les francophones, obtenir des services de santé dans la langue de son choix ne signifie pas nécessairement obtenir des services en français. Ainsi, dans la mesure où 67 % des francophones de la Saskatchewan ont l'anglais comme langue principale, on ne s'étonnera pas que la « langue de leur choix » pour l'obtention de services de santé ne soit pas le français.

4.2 La justice

L'examen des résultats de l'Enquête sur la vitalité des minorités de langue officielle portant sur le domaine de la justice jette également un éclairage sur l'étendue de la présence du français au sein des institutions qui assurent l'utilisation de cette langue dans la sphère publique par les francophones de la Saskatchewan. En ce sens, la mesure de l'accès aux intervenants qui sont en mesure de converser en français permet de documenter un phénomène perçu par les francophones vivant à l'extérieur du Québec comme étant très important pour le statut de cette langue et l'avenir des communautés de langue française en situation minoritaire. À cet égard le gouvernement canadien s'est engagé dans la Feuille de route à ce que les Canadiens aient un meilleur accès à des services de justice dans la langue officielle minoritaire. Dans le cas de la Saskatchewan, la Loi linguistique adoptée en 1988 autorise désormais l'adoption de nouvelles lois provinciales en anglais seulement ou dans les deux langues officielles et permet l'utilisation du français devant les tribunaux et à l'Assemblé législative. De plus, les Saskatchewanais ayant désormais droit à un procès en français devant certains tribunaux provinciaux (la Cour d'appel, la Cour provinciale, la Cour du banc de la Reine et le Tribunal de la sécurité routière), ils ont maintenant accès aux services de l'Association des juristes d'expression française de la Saskatchewan (AJEFS) qui sensibilise et informe la population à cet effet (FCFA, 2009). En outre, en ce qui concerne le droit criminel, tel que stipulé par le Code criminel du Canada, les Fransaskois, comme tous les résidents du Canada, ont le droit à un procès et à une enquête préliminaire en français.

En Saskatchewan, les résultats de l'EVMLO révèlent que l'accès à ces services en français ne semble pas très valorisé par une majorité de francophones dans la mesure où 52 % sont d'avis que, s'ils avaient à utiliser les services d'un avocat, il serait peu ou pas important que celui-ci puisse parler français. Notons que les interactions avec les instances et les représentants du système judiciaire, notamment les avocats et la police, ne sont pas très répandues dans la population. En effet, sur les quelque 12 400 adultes francophones de la Saskatchewan, 27 % ont déclaré avoir utilisé les services d'un avocat au cours des deux années précédant l'enquête tandis que 18 % on eu affaire aux services policiers, ce qui inclut la police municipale et la Gendarmerie Royale du Canada (GRC).

Parce que la barrière linguistique peut entraver l'égalité d'accès à la justice, le gouvernement canadien s'est donné comme priorité de former des professionnels qui peuvent assurer un service dans la langue officielle minoritaire. Selon le Recensement de 2006, la Saskatchewan comptait 200 avocats capables de soutenir une conversation en français, ce qui représente 13 % des avocats de la province. En ce qui a trait aux policiers, 14 % ont déclaré pouvoir soutenir une conversation en français (voir le tableau 4.1).

En plus de ces statistiques sur la disponibilité ou le bassin potentiel de professionnels du système judiciaire qui peuvent utiliser le français lorsqu'ils interagissent avec les francophones de la Saskatchewan, le tableau 4.1 rend compte de la connaissance du français par les policiers et leur utilisation de cette langue dans le cadre de leur travail. Selon le Recensement de 2006, 6 % des policiers de la Saskatchewan ont déclaré utiliser le français au moins régulièrement au travail (voir le tableau 4.1). Ce taux est bien inférieur à celui de la capacité de soutenir une conversation en français par les policiers de la province, qui lui se situe à 14 %. Il en va de même pour les avocats : leur taux d'utilisation du français au moins régulièrement au travail (6 %) est également beaucoup moindre que la proportion d'entre eux qui peuvent soutenir une conversation en français, qui est de 13 %3.

Notons que les données du Recensement de 2006 révèlent que le nombre de policiers qui utilisent le français dans le cadre de leur travail en Saskatchewan est supérieur au nombre de policiers francophones. Ainsi, alors que près de 145 policiers parmi l'ensemble des policiers de la province ont déclaré utiliser le français au moins régulièrement dans le cadre de leur travail, 90 policiers ont cette langue comme première langue officielle parlée (PLOP) (voir le tableau 4.1). Il en est de même pour les avocats, dont l'effectif qui communiquent au moins régulièrement en français dans le cadre de leur travail est supérieur au nombre d'avocats francophones. Un certain nombre de non-francophones ont donc déclaré le français comme langue de travail, ce qui s'ajoute au bassin déjà existant de professionnels susceptibles ou capables de fournir des services en français. Malgré cela, lors de l'utilisation des services d'un avocat, une grande proportion de francophones, soit 61 % d'entre eux, ont utilisé seulement l'anglais.

Tableau 4.1 Connaissance et utilisation de la langue minoritaire par les policiers (sauf cadres supérieurs), Saskatchewan, 2006

4.3 L'éducation

4.3.1 Chez les enfants

L'accès à l'école de langue française et la gestion des systèmes d'enseignement de la minorité francophone ont été depuis longtemps l'un des principaux chevaux de bataille des francophones à l'extérieur du Québec. Dans de nombreuses provinces, la scolarisation des francophones dans leur propre langue aura été fortement limitée du fait que la plupart des écoles françaises ne recevaient aucune aide financière de l'État, et ce, jusqu'au début des années 1970 (Corbeil, 2003).

Un statut particulier est réservé à l'école française en milieu minoritaire en raison de son rôle de vecteur de socialisation à la culture française, de transmission de la langue aux enfants et du maintien des acquis dans cette langue. L'école est un milieu francophone public qui, de pair avec les familles, peut contribuer au développement et à l'essor d'une vie communautaire francophone.

En Saskatchewan, à la suite de la Commission royale d'enquête sur le bilinguisme et le biculturalisme (1963), la loi scolaire est amendée en 1968 et l'enseignement du français est désormais autorisé dans les écoles de la province, l'instruction en français y étant proscrite depuis 1892. Par après, en 1979, un système d'écoles « désignées » est mis sur pied, assurant l'enseignement en français que ce soit par l'entremise d'écoles offrant des programmes de français régulier ou des programmes d'immersion. Trois ans plus tard, l'article 23 de la Charte des droits et libertés vient assurer certains droits scolaires aux minorités de langue officielle. Ainsi, à la suite de nombreuses démarches judiciaires poursuivies par les parents et les associations francophones, les Fransaskois obtiennent le droit à l'école française et le contrôle de leurs institutions scolaires en 1988. Néanmoins, bien que le Gouvernement de la province reconnaisse ce droit, il n'exige aucun plan d'action politique de la part du gouvernement ou de l'assemblée législative. Il faudra attendre un an de plus pour que le gouvernement octroie le droit de gestion des institutions scolaires aux francophones. Pour ajuster les politiques de la province en fonction de ce nouveau droit octroyé en 1988, le projet de loi 39 est adopté en 1993 et amende de nouveau la loi scolaire. Toutefois, les associations réclament davantage un conseil scolaire à l'échelle provinciale qui serait similaire aux conseils scolaires anglophones. Elles parviennent à créer une seule division scolaire prenant effet le 1er janvier 1999 et agglomérant à la fois le Conseil général des écoles fransaskoise et les neufs conseils scolaires fransaskois. Aujourd'hui, la Saskatchewan comprend neuf régions scolaires francophones et douze écoles. Au niveau postsecondaire, un soutien aux étudiants francophones et une programmation culturelle est assurée par l'Institut français de l'Université de Régina. De plus, l'Institut s'implique grandement de par ses recherches et son appui au développement de la communauté fransaskoise.

On comprend dès lors l'importance de pouvoir mesurer l'ampleur de la fréquentation des écoles de langue française par les enfants admissibles à les fréquenter ainsi que les facteurs qui influencent les décisions concernant la langue de scolarisation des enfants. Les données de l'Enquête sur la vitalité des minorités de langue officielle nous procurent notamment cet aperçu de la situation scolaire des enfants de parents francophones en Saskatchewan en permettant d'estimer le nombre d'enfants admissibles à l'enseignement en français qui fréquentent une école de langue française ou qui sont inscrits dans un programme d'immersion. De plus, ces données permettent d'examiner le lien entre la fréquentation d'une école de langue française et l'utilisation des langues, notamment, à la maison et avec les amis.

En Saskatchewan, 3 820 enfants de parents francophones étaient inscrits à l'école primaire ou secondaire au moment de cette enquête. Parmi ces enfants, environ 48 % recevaient un enseignement en français, dont 32 % au sein d'une école française et 16 % au sein d'un programme d'immersion en français à l'école anglaise. Pour ce qui est du reste des enfants qui étaient inscrits à l'école primaire ou secondaire, 51 % fréquentaient une école de langue anglaise (programme régulier). Mentionnons que les résultats obtenus donnent à penser qu'il puisse y avoir un lien entre d'une part la langue dans laquelle les enfants sont scolarisés et d'autre part la proportion de couples exogames, l'opération d'un transfert linguistique vers l'anglais chez plusieurs francophones âgés de moins de 21 ans et le fait qu'une proportion importante de francophones se sentent plus à l'aise en anglais qu'en français. À titre d'exemple, des 3 450 enfants dont au moins un des deux parents est francophone, la majorité (72 %) étaient issus de familles exogames français-anglais. Parmi ceux-ci, 24 % fréquentaient une école française, 16 % un programme d'immersion d'une école anglaise et 59 % le programme régulier d'une école anglaise.

L'Enquête sur la vitalité des minorités de langue officielle met également en lumière le fait que la fréquentation de l'école de langue française et l'inscription dans un programme d'immersion française dans une école anglaise semble être un choix plus populaire chez les parents des plus jeunes enfants. Les résultats donnent en effet à penser qu'il y aurait un abandon tant de l'école française que des programmes d'immersion française au profit de l'école anglaise durant la transition entre l'école primaire et l'école secondaire. Les résultats de l'EVMLO révèlent ainsi que 50 % des enfants étaient inscrits dans une école de langue française ou dans un programme d'immersion française à l'école primaire, alors qu'ils étaient 42 % à être inscrits dans les mêmes programmes au niveau secondaire. Pour ce qui est de la proportion d'enfants inscrits au programme régulier en anglais, elle est de 49 % au primaire et de 54 % au secondaire.

Outre les caractéristiques de nature environnementale mentionnées plus haut, d'autres facteurs viennent influencer le choix de la langue de l'école fréquentée par l'enfant. En particulier, la trajectoire linguistique des parents dans leur cheminement scolaire aurait une influence importante sur le choix de la langue d'enseignement ou du système scolaire de leurs enfants. Ainsi, parmi les 1 290 enfants dont au moins un des parents a fait ses études primaires et secondaires en français, environ 58 % fréquentaient une école de langue française ou un programme d'immersion en français et environ 21 % parlaient le français à la maison.

Les données de l'EVLMO ne permettent pas de tirer des résultats statistiquement significatifs quant au lien entre la fréquentation scolaire en français des enfants et l'utilisation unique ou prédominante du français à la maison ou avec les amis, ni quant au lien entre la fréquentation scolaire en français et la capacité d'utiliser cette langue pour soutenir une conversation. On peut cependant établir un lien entre la fréquentation scolaire en français et l'utilisation du français dans divers contextes. Ainsi, la majorité des enfants qui fréquentent une école de langue française utilisent le français, seul ou avec l'anglais, lorsqu'ils parlent avec leurs amis (72 %), utilisent cette langue le plus souvent à la maison (54 %) et sont donc en mesure de l'utiliser pour soutenir une conversation dans la très grande majorité des cas (93 %).

4.3.2 Chez les adultes

4.3.2.1 Plus haut niveau de scolarité atteint

Le plus haut niveau de scolarité atteint par les francophones de la Saskatchewan en 2006 est un indicateur important des progrès réalisés depuis le Recensement de 1971, recensement mené peu après la fin des travaux de la Commission Laurendeau-Dunton. Se fondant sur les statistiques du Recensement de 1961, les travaux de cette Commission ont fait état des écarts très importants observés entre francophones et anglophones au Canada, tant en matière de scolarisation qu'en matière de situation sur le marché de l'emploi et dans diverses sphères de l'activité économique. En raison notamment de la scolarisation obligatoire jusqu'à l'âge de 16 ans et de l'importance grandissante accordée à l'éducation par les gouvernements, les employeurs et par la population dans son ensemble, les écarts entre francophones et anglophones au Canada ont fortement diminué au fil du temps.

Afin d'illustrer le phénomène, examinons d'abord les résultats présentés au graphique 4.1 qui portent sur la situation observée en 2006. On y constate que, à l'exception du fait que les anglophones (27 %) soient proportionnellement plus nombreux à détenir un diplôme d'études secondaires que les francophones (21 %), et que les francophones (17 %) soient proportionnellement plus nombreux à détenir un diplôme universitaire équivalent ou supérieur au baccalauréat que les anglophones (13 %), les écarts entre les deux groupes linguistiques en matière de scolarisation sont très faibles. Ainsi, alors que 30 % des francophones et anglophones n'ont aucun certificat ou diplôme, plus de 11 % ont un certificat ou diplôme d'apprenti et plus de 13 % d'entre eux ont un diplôme d'un collège.

Graphique 4.1 Plus haut certificat, diplôme ou grade obtenu selon la première langue officielle parlée, personnes âgées de 25 ans ou plus, Saskatchewan, 2006

Les constats qui émanent de la lecture de ce dernier graphique portent sur l'ensemble de la population âgée de 25 ans et plus et, par conséquent, tiennent compte à la fois de la situation actuelle et passée des groupes linguistiques en matière de scolarisation.

Le graphique 4.2 illustre bien ce propos dans la mesure où l'on tient compte de certaines sous-populations définies par leur groupe d'âge. En portant notre attention sur le groupe des 25 à 34 ans, on constate que les anglophones affichent une proportion très supérieure à celle des francophones à ne détenir aucun certificat, diplôme ou grade. Par le fait même, on observe que les francophones sont proportionnellement beaucoup plus nombreux que les anglophones à détenir un diplôme universitaire. Les tendances sont les mêmes, quoique dans une moindre mesure, en ce qui a trait au groupe d'âge des 35 à 54 ans. Toutefois, lorsqu'on observe la tendance chez les 65 ans et plus, on remarque que les écarts en matière de scolarité entre francophones et anglophones sont désormais quasi inexistants.

Graphique 4.2 Plus haut certificat, diplôme ou grade obtenu selon la première langue officielle parlée et le groupe d'âge, Saskatchewan, 2006

4.3.2.2 Langue d'enseignement chez les adultes

Nous avons vu précédemment que, dans l'ensemble de la Saskatchewan, environ la moitié des enfants dont au moins un parent est de langue française sont inscrits dans le programme régulier d'une école primaire de langue française ou dans un programme d'immersion française. Au niveau secondaire, cette proportion est plus faible. Qu'en est-il de la langue de scolarisation des adultes ayant répondu à l'EVMLO? Aux diverses questions de l'enquête portant sur la langue dans laquelle les répondants ont effectué entièrement ou partiellement leurs études, on décèle que la présence du français varie d'un groupe d'âge à l'autre et d'un niveau de scolarité à l'autre.

Le tableau 4.2 rend compte du fait que plus de la moitié (56 %) des Fransaskois ont fait entièrement ou partiellement leurs études en français au niveau primaire. Cette proportion fléchit au fur et à mesure qu'on avance dans le parcours scolaire, pour ensuite remonter dans les programmes d'études universitaires. Ainsi, alors que 42 % des francophones ont poursuivi entièrement ou partiellement leurs études secondaires en français, cette proportion est de 54 % pour ceux qui ont poursuivi des études universitaires. Mentionnons toutefois que de tous les francophones qui résidaient en Saskatchewan en 2006 et qui avaient poursuivi des études universitaires en français, 71 % avaient complété environ la moitié ou moins de la moitié de ces études universitaires en français.

Les résultats de l'EVMLO révèlent un écart important entre les adultes de moins et de plus de 25 ans en ce qui a trait à la fréquentation d'une école primaire et secondaire en français. Ainsi, alors qu'environ 82 % des francophones de moins de 25 ans ont fréquenté l'école française au niveau primaire et 75 % au niveau secondaire, ces proportions sont moindres chez les francophones plus âgés. De fait, plus les francophones de la province sont jeunes, plus ils ont été scolarisés en français aux niveaux primaire et secondaire. Cette différence est notamment attribuable au fait que les francophones de la Saskatchewan ont de plus en plus accès à des écoles en français.

Tableau 4.2 Proportion de francophones ayant poursuivi entièrement ou partiellement leurs études en français selon le groupe d'âge et le niveau des études, Saskatchewan, 2006

4.4 Médias, arts et culture

Le soutien aux arts et à la culture est l'un des éléments clés ciblés par la Feuille de route. On y reconnaît notamment leur rôle essentiel à l'épanouissement des communautés de langue officielle en milieu minoritaire.

L'Enquête sur la vitalité des minorités de langue officielle cible six médias pour mesurer l'accès aux éléments culturels dans la langue de la minorité, soit la télévision, l'Internet, la radio, les journaux, les livres et les spectacles ou les événements artistiques. De nos jours, l'Internet et la câblodistribution facilitent l'accès à ces médias dans plusieurs langues et en provenance de nombreux pays, ce qui permet d'accroître la disponibilité des divers produits culturels de langue française à travers le pays.

Les résultats de l'EVMLO révèlent que les Fransaskois, tout comme leurs homologues anglophones, sont de grands consommateurs de médias, dont le plus important est la télévision (98 %) (voir le tableau 4.3).

Tableau 4.3 Proportion de francophones selon l'utilisation de certains médias (toutes langues confondues), Saskatchewan, 2006

Les francophones de la Saskatchewan sont majoritairement portés à déclarer que la lecture des journaux (82 %), l'écoute de la télévision (75 %), de la radio (74 %), de même que la lecture de livres (72 %) et l'accès à l'Internet (68 %) se font surtout ou seulement en anglais. L'accessibilité aux médias de langue française n'est donc pas le seul facteur qui influence la consommation dans la langue de la minorité : les résultats de l'EVMLO révèlent en effet que malgré les avancées technologiques facilitant l'accès à divers médias de langue française, l'anglais prédomine lors de l'utilisation des médias.

4.5 Vie communautaire

L'implication des individus au sein de leur communauté et la participation à des activités communautaires sont généralement reconnues comme des dimensions de la vie en société qui contribuent à la création et au maintien de réseaux de soutien social. En outre, « [le] capital social (défini en termes généraux comme la participation aux réseaux sociaux) est de plus en plus considéré comme une composante clé du développement communautaire ou comme un aspect essentiel de la « capacité » d'une collectivité de se développer » (Rothwell et Turcotte, 2006 : p.1).

Les données de l'Enquête sur la vitalité des minorités de langue officielle permettent de mesurer certaines dimensions de la participation des francophones à la vie communautaire. Les statistiques concernant la participation à des activités de bénévolat, le fait d'être membre d'organismes communautaires ou de prodiguer des soins dans un contexte informel permettent en effet d'examiner dans quelle mesure les francophones s'impliquent dans la vie associative et communautaire de leur milieu de vie.

Plusieurs facteurs sociodémographiques et économiques influent sur la participation communautaire, notamment l'âge, la scolarité, le milieu de résidence, le statut socio-économique, etc. Toutefois, l'analyse de ces facteurs dépasse l'objectif du présent document.

Les résultats de l'EVMLO révèlent qu'entre le quart et le tiers des francophones de la Saskatchewan participent à l'une ou l'autre des activités pour lesquelles des données ont été recueillies dans cette enquête. Ainsi, ce sont 38 % des adultes francophones qui ont déclaré avoir été membres d'un organisme, d'un réseau ou d'une association au cours des 12 derniers mois ayant précédé l'enquête, alors que 44 % ont déclaré faire du bénévolat et 27 % ont fourni du soutien non rémunéré pour les activités de tous les jours à quelqu'un qui n'habitait pas dans leur ménage. Environ 10 % des francophones ont déclaré avoir participé aux trois types d'activités.

La langue dans laquelle se déroulent les activités communautaires des Fransaskois varie selon le type d'activité. L'anglais est cependant la langue privilégiée par les francophones dans toutes ces activités. L'anglais est surtout ou seulement utilisé par 73 % des francophones lorsqu'ils font du bénévolat, par 58 % d'entre eux lors de leur implication au sein d'organismes, de réseaux ou d'associations, et par 46 % d'entre eux lorsqu'ils donnent du soutien social pour les activités de tous les jours à des personnes qui n'habitent pas dans le ménage. Soulignons que les membres de la famille (47 %), en excluant les enfants, et les amis (28 %) sont plus souvent bénéficiaires du soutien pour les activités quotidiennes. Par conséquent, la famille et les amis semblent compter pour beaucoup dans les réseaux des francophones de la Saskatchewan. Ainsi, en cas de maladie, 30 % déclarent qu'ils se tourneraient vers leurs enfants pour du soutien et 31 % vers d'autres membres de leur famille tandis que 11 % se tourneraient vers leurs amis. L'utilisation du français dans les activités de soutien social semble donc associée principalement au domaine privé.

L'Enquête sur la vitalité des minorités de langue officielle révèle que plus de 60 % des francophones de la Saskatchewan déclarent qu'il est important ou très important pour eux que des personnes ou des organismes travaillent au développement de la communauté francophone. De plus, on constate que 30 % de ceux qui sont membres d'organismes, de réseaux ou d'associations le sont dans le but de promouvoir la communauté francophone.

4.6 Caractéristiques de l'emploi et du revenu

Tant les données du recensement que de l'Enquête sur la vitalité des minorités de langue officielle (EVMLO) permettent d'examiner dans quelle mesure les francophones de la Saskatchewan œuvrent dans des secteurs d'industrie différents ou non de ceux des anglophones. On peut y identifier les similitudes et les différences dans la répartition des groupes linguistiques entre les divers secteurs d'industrie.

L'analyse sommaire des données du Recensement de 2006 révèle que la population francophone de la Saskatchewan est proportionnellement plus nombreuse que celle des anglophones à œuvrer dans certains secteurs, soit ceux des services d'enseignement et de l'agriculture, foresterie, pêche et chasse. Dans ces deux secteurs, on retrouve en effet respectivement 14,7 % et 14,6 % des francophones de la province, comparativement à 7,7 % et 11,3 % des anglophones (voir le graphique 4.3). Ces derniers, pour leur part, sont proportionnellement plus nombreux à occuper des emplois dans le secteur de l'hébergement et services de restauration (7,2 %), comparativement à 4,1 % des francophones de la province, et dans le secteur du commerce de détail où les anglophones et les francophones représentent respectivement 11,2 % et 8,0 %. Dans les autres grands secteurs d'industrie, on n'observe que très peu d'écarts entre les deux groupes.

Graphique 4.3 Proportion de travailleurs selon le secteur d'industrie et la première langue officielle parlée, Saskatchewan, 2006

Tableau 4.4 Répartition des travailleurs francophones selon le secteur d'industrie, Saskatchewan, 2006

4.6.1 Utilisation de la langue française au travail selon le secteur d'industrie

Parmi l'ensemble des travailleurs de la Saskatchewan âgés de 15 ans ou plus, 1,2 % utilisent le français le plus souvent ou régulièrement dans le cadre de leur travail. Chez les personnes ayant seulement le français comme première langue officielle parlée, cette proportion atteint 35 %, soit 16 % le plus souvent et 19 % régulièrement (c'est-à-dire moins souvent que la langue prédominante).

L'examen du tableau 4.4 a révélé que les francophones œuvraient dans certains secteurs spécifiques. Par exemple, les secteurs de l'enseignement ainsi que de l'agriculture, foresterie, pêche et chasse regroupent près du tiers (29 %) des travailleurs francophones de la province. Or, qu'en est-il de l'utilisation du français par les francophones au sein des différents secteurs d'industrie? On ne s'étonnera guère que les travailleurs francophones du secteur de l'enseignement soient un des groupes de travailleurs qui utilisent le plus le français dans le cadre de leur emploi : on en compte 45 % qui l'utilisent le plus souvent alors que 13 % déclarent en faire une utilisation régulière (voir le graphique 4.4). Les francophones des secteurs de l'industrie de l'information et de l'industrie culturelle, lesquels ne représentent que 2 % des travailleurs francophones de la province, arrivent bon deuxièmes avec des proportions respectives de 46 % et 7 %, suivis des travailleurs du secteur des autres services. Ces derniers utilisent le plus souvent le français au travail dans une proportion de 30 % alors que 18 % en font une utilisation régulière. Toutefois, ce sont les francophones du secteur de l'administration publique qui sont proportionnellement les plus nombreux à faire usage du français régulièrement au travail, dans une proportion de 39 %.

Graphique 4.4 Utilisation du français le plus souvent ou régulièrement au travail par les francophones selon le secteur d'industrie, Saskatchewan, 2006

4.6.2 Écarts différentiels de revenu

Historiquement, les francophones au Canada ont été désavantagés sur le plan économique. Les Fransaskois ne faisaient pas exception. Dans la mesure où le niveau de revenu des individus est fortement tributaire de leur niveau de scolarité, de leur profession et du secteur d'industrie dans lequel ils œuvrent (pour ne nommer que ces facteurs), on peut croire que les mutations importantes qu'ont connues les communautés francophones de la Saskatchewan au cours des dernières décennies ont eu des répercussions majeures sur leur niveau de revenu.

L'analyse des facteurs ayant influencé l'évolution des écarts différentiels de revenu entre les groupes linguistiques dépasse l'objet et la portée du présent rapport. Toutefois, les statistiques du Recensement de 2006 portent à croire que la situation des Fransaskois s'est beaucoup améliorée au fil du temps.

Les statistiques de 2006 révèlent que les personnes ayant le français comme première langue officielle parlée ont des revenus moyen et médian supérieurs à ceux des anglophones. Ainsi, les hommes ayant le français comme seule première langue officielle parlée (PLOP) ont un revenu moyen supérieur de plus de 9 000 $ à celui des hommes du groupe PLOP anglais. En ce qui a trait au revenu médian, celui des hommes francophones est de près de 3 000 $ supérieur à celui des anglophones. Chez les femmes, les revenus moyen et médian des francophones sont supérieurs à ceux des anglophones de près de 2 000 $ et de 2 300 $ respectivement (voir le tableau 4.5). Quant aux revenus moyens et médians des personnes ayant et le français et l'anglais comme premières langues officielles parlées, ils sont, pour la plupart, inférieurs à ceux des francophones et des anglophones. Par exemple, les revenus médians des francophones sont supérieurs à ceux des personnes de PLOP français et anglais, par un écart de 6 000 $ chez les hommes et de 9 000 $ chez les femmes. Cependant, notons qu'en Saskatchewan les hommes de PLOP français et anglais ont un revenu moyen supérieur à celui des anglophones de l'ordre de plus de 3 500 $.

Tableau 4.5 Revenu moyen et revenu médian des hommes et des femmes selon la première langue officielle parlée, Saskatchewan, 2006

À la lumière du contexte historique décrit plus haut, on sait que le revenu médian des deux groupes linguistiques est fonction de l'âge. Les statistiques présentées aux graphiques 4.5-a et 4.5-b rendent compte du fait que chez les personnes âgées entre 25 et 64 ans, les francophones ont un revenu médian supérieur à celui des anglophones, tant chez les hommes que chez les femmes. Quoique les écarts de revenu soient moins importants chez ces dernières. En revanche, chez les 15 à 24 ans et chez les 65 ans et plus, le revenu médian des hommes anglophones est supérieur à celui des francophones, soit de près de 900 $ et de 2 600 $ respectivement. Chez les femmes, alors que les francophones âgées entre 15 et 24 ans ont un revenu médian supérieur à celui des anglophones de l'ordre de 1 700 $, les écarts sont quasi inexistants chez celles âgées de 65 ans ou plus.

Plusieurs facteurs permettent d'expliquer l'écart différentiel de revenus entre francophones et anglophones. Bien que les résultats portant sur l'ensemble de la population révèlent que, tant chez les hommes que chez les femmes, les revenus moyens des francophones sont supérieurs à ceux des anglophones, la source de ces écarts réside en partie dans un certain nombre de caractéristiques qui distinguent ces deux populations. Par exemple, nous avons en effet pu constater préalablement que la population francophone de moins de 65 ans de la Saskatchewan est plus scolarisée que la population anglophone. La structure par âge de la population est également un facteur qui influe sur les revenus moyens et médians de cette population.

En approfondissant l'analyse des résultats du recensement, notamment en utilisant la technique de l'analyse statistique multivariée, on constate que la scolarité, le type de lieu de résidence, le secteur d'industrie et le statut d'immigrant y jouent un rôle important et permettent d'expliquer une partie de ces écarts. Ainsi, si les francophones et les anglophones avaient exactement le même profil en ce qui a trait à ces caractéristiques – ce qui n'est pas le cas –, on constaterait que les hommes anglophones âgés entre 25 et 64 ans affichent un revenu moyen inférieur à celui des francophones de 3 600 $ pour le groupe des 25 à 44 ans et de 2 500 $ pour celui des 45 à 65 ans. Pour ce qui est de l'écart entre les revenus moyens des hommes de 15 à 24 ans et de 65 ans et plus, les anglophones ont, en isolant l'influence de ces mêmes caractéristiques, des revenus similaires à ceux des francophones. Chez les femmes, les analyses multivariées révèlent que les revenus des francophones de 45 ans ou plus sont supérieurs à ceux des anglophones, soit de 700 $ pour celles âgées de 45 à 64 ans et de 2 200 $ pour celles de 65 ans ou plus. Pour ce qui est des femmes âgées de moins de 45 ans, les revenus moyens des francophones sont pratiquement identiques à ceux des anglophones. C'est donc dire que les caractéristiques socioéconomiques incluses dans le modèle d'analyse multivariée parviennent à expliquer la majeure partie des écarts salariaux réels observés entre anglophones et francophones puisque ces derniers s'avèrent en effet être nettement supérieurs à ceux obtenus au moyen de l'analyse multivariée. La situation observée chez les hommes âgés entre 45 et 64 ans et chez les femmes âgées de 65 ans ou plus est néanmoins différente puisque l'écart obtenu au moyen des régressions multivariées est légèrement supérieur à l'écart réel observé.

Graphique 4.5-a Revenu médian des femmes selon le groupe d'âge et la première langue officielle parlée, Saskatchewan, 2006

Graphique 4.5-b Revenu médian des hommes selon le groupe d'âge et la première langue officielle parlée, Saskatchewan, 2006


Notes

  1. C'est-à-dire soit le plus souvent soit régulièrement.
  2. Voir à ce propos le tableau 2.1 du document Professionnels de la santé et minorités de langue officielle au Canada : 2001 et 2006 (Blaser, 2009 : p.23).
  3. Tout comme dans le cas des professionnels de la santé, l'utilisation du français par les avocats et les policiers dépend de plusieurs facteurs, dont la proportion de francophones dans un milieu donné. L'analyse de ces facteurs dépasse toutefois le cadre du présent portrait statistique.
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