Section 1 : Violence familiale au Canada, affaires déclarées par la police, 2019

La violence familiale est un grave problème de santé publique, et elle peut se manifester sous différentes formes, y compris la violence physique et sexuelle, la violence psychologique et l’exploitation financière (Agence de la santé publique du Canada, 2014). Il s’agit d’un abus de pouvoir dans une relation de confiance et de dépendance. La violence familiale a des conséquences immédiates et à long terme pour les victimes, notamment des répercussions physiques, mentales, cognitives et financières, et le rétablissement dépend de la durée et de la gravité de la violence.

Les coûts ne sont pas seulement personnels, mais touchent aussi l’ensemble de la société. Le ministère de la Justice du Canada souligne que « des ressources importantes y sont consacrées, notamment pour les soins de santé, les coûts associés au système de justice, les pertes pour les employeurs et les entreprises, et les services sociaux et communautaires » (ministère de la Justice du Canada, 2017). Pour atténuer les répercussions sur les personnes, les familles et les collectivités, il est important de surveiller le problème de la violence familiale et d’investir dans des mesures de prévention et de soutien pour les victimes. Cela est particulièrement vrai à l’ère de la pandémie de COVID-19, période durant laquelle les Canadiens doivent respecter des règles de confinement et des protocoles de sécurité exigeant qu’ils restent à la maison et qui pourraient avoir une incidence sur leur capacité de chercher de l’aide.

Dans la présente section, la violence familiale désigne la violence commise par les conjoints et conjointes (mariés, séparés, divorcés et vivant en union libre), les parents (biologiques et adoptifs, les beaux-parents et les parents de famille d’accueil), les enfants (biologiques et adoptés, les beaux-fils et belles-filles, et les enfants en famille d’accueil), les frères et sœurs (biologiques, les demi-frères et demi-sœurs, et les frères et sœurs par alliance, par adoption et de famille d’accueil) et les membres de la famille élargie (p. ex. les grands-parents, les oncles et tantes, les cousins et cousines, et les membres d’une belle-famille). Les données portent sur les victimes âgées de 89 ans ou moinsNote  .

Une victime d’affaire de violence déclarée par la police sur quatre a été agressée par un membre de la famille

En 2019, il y a eu 399 846 victimes d’affaires de violence déclarées par la police au Canada (tableau 1.1). Le quart (26 %) d’entre elles, soit 102 316 victimes, ont été agressées par un membre de la famille. Tandis qu’un peu plus de la moitié (53 %) des victimes de violence étaient de genre féminin, cette proportion était des deux tiers (67 %) parmi les victimes de violence familiale.

Les affaires de violence familiale portées à l’attention de la police ont le plus souvent été commises par un conjoint actuel ou une conjointe actuelle (31 %) ou un parent (20 %); venaient ensuite les affaires de violence commises par un ex-conjoint ou une ex-conjointe (13 %), un frère ou une sœur (11 %) ou un enfant (11 %). Une plus grande proportion de femmes que d’hommes ont subi de la violence de la part d’un conjoint ou d’une conjointe (actuel ou ancien) (51 % par rapport à 29 %), alors qu’une proportion plus élevée d’hommes que de femmes ont été victimes de violence familiale perpétrée par une personne autre qu’un conjoint ou une conjointe (71 % par rapport à 49 %).

La violence familiale augmente pour une troisième année consécutive, et la hausse est plus prononcée chez les hommes et les garçons

De 2018 à 2019, le taux d’affaires de violence familiale déclarées par la police a augmenté de 7 % (graphique 1.1)Note  . Au cours de cette période, le taux a augmenté davantage chez les hommes et les garçons que chez les femmes et les filles (+10 % par rapport à +6 %). Bien que le taux global de violence familiale ait graduellement diminué de 2009 à 2016 (-19 %), il a affiché en 2019 une troisième augmentation annuelle consécutive, progressant de 13 % par rapport à 2016. De 2009 à 2019, les taux de violence familiale et non familiale ont affiché des baisses semblables (-9 % et -11 %, respectivement).

Graphique 1.1 Victimes de violence familiale et non familiale, affaires déclarées par la police, selon le genre de la victime et l'année, Canada, 2009 à 2019

Tableau de données du graphique 1.1 
Tableau de données du graphique 1.1
Sommaire du tableau
Le tableau montre les résultats de Tableau de données du graphique 1.1. Les données sont présentées selon Année (titres de rangée) et Violence familiale, Violence non familiale, victimes de genre féminin, victimes de genre masculin et total des victimes, calculées selon taux pour 100 000 personnes
unités de mesure (figurant comme en-tête de colonne).
  Violence familiale Violence non familiale
victimes de genre féminin victimes de genre masculin total des victimes victimes de genre féminin victimes de genre masculin total des victimes
taux pour 100 000 personnes
2009 411 185 299 796 998 896
2010 407 180 294 803 966 884
2011 384 174 280 742 899 820
2012 367 173 271 714 861 787
2013 343 163 254 663 773 718
2014 328 158 243 628 732 680
2015 326 159 243 649 747 697
2016 322 160 241 660 742 701
2017 332 162 247 692 755 723
2018 342 166 254 717 765 741
2019 363 183 273 771 823 797

La violence sexuelle dans la famille est plus de cinq fois plus élevée chez les femmes et les filles que chez les hommes et les garçons

En 2019, le taux d’affaires de violence familiale déclarées par la police s’est chiffré à 276 victimes pour 100 000 personnes (tableau 1.2). Les voies de faitNote  étaient le type le plus courant de violence familiale (représentant 71 % des victimes, ce qui correspond à un taux de 197 pour 100 000 personnes), suivies des autres infractions comportant de la violence ou la menace de violenceNote  (50) et des infractions sexuellesNote  (28). Des différences ont été observées entre les victimes de genre féminin et masculin : alors que les taux de voies de fait (249 par rapport à 146) et d’autres infractions comportant de la violence ou la menace de violence (70 par rapport à 30) étaient respectivement 1,7 et 2,3 fois plus élevés chez les femmes et les filles que chez les hommes et les garçons, le taux d’infractions sexuelles était 5,5 fois plus élevé chez les femmes et les filles (48 par rapport à 9).

Au total, 7 victimes de violence familiale sur 10 (71 %) ont été agressées au moyen de la force physique (tableau 1.3)Note  . De plus, 17 % des victimes ont été agressées avec la présence d’une arme, comme un couteau, une massue ou une arme à feu. Près de la moitié (46 %) des victimes de violence familiale ont subi des blessures corporelles, une proportion un peu plus élevée que celle enregistrée chez les victimes de violence non familiale (42 %)Note  . Parmi les victimes ayant subi des blessures corporelles découlant de la violence familiale, presque toutes (95 %) ont subi des blessures mineures. Les blessures corporelles découlant de la violence familiale étaient un peu plus fréquentes chez les hommes et les garçons que chez les femmes et les filles (49 % par rapport à 45 %).

Début de l’encadré 1

Encadré 1
Crimes déclarés par la police et demandes d’intervention pendant la pandémie de COVID-19

Au cours des premiers mois de la pandémie de COVID-19 au Canada, le Centre canadien de la statistique juridique et de la sécurité des collectivités de Statistique Canada a commencé à recueillir des données mensuelles auprès des services de police pour obtenir des renseignements sur certains types d’infractions au Code criminel pendant la pandémie. De plus, des renseignements ont été recueillis sur les demandes d’intervention reçues par la police, c’est-à-dire les appels à l’aide qui pouvaient ne pas être liés à un acte criminel, pendant cette période. Bien que le nombre de services de police qui ont fourni ces renseignements variait d’une période de référence à l’autre, ces données donnent un aperçu du volume et de la nature des crimes qui ont eu lieuNote  .

Les affaires criminelles déclarées par la police visées par la collecte de donnéesNote  menée de mars à octobre 2020 ont diminué de 18 % par rapport à la même période en 2019 (Statistique Canada, 2021). Par ailleurs, de mars à octobre 2020, le nombre de demandes d’interventionNote  était de 8 % supérieur à celui observé au cours de la même période de huit mois en 2019. Plus précisément, les demandes d’intervention liées à une vérification du bien-être d’un enfant ont augmenté de 17 %, ce qui représente l’écart le plus prononcé par rapport à 2019. Venaient ensuite les demandes d’intervention liées à une vérification générale du bien-être d’une personne (+13 %), à un problème de santé mentale (+12 %), à la garde d’un enfant (+12 %), à une surdose (+9 %) et à une querelle de ménage (+8 %).

En ce qui concerne la violence familiale, cette initiative de collecte de données porte sur trois types de crimes violents, soit les voies de fait, les agressions sexuelles et les menaces. Au cours des huit premiers mois de la pandémie, le nombre d’affaires concernant tous les types de crimes déclarés par la police et visés par l’étude ― qu’il s’agisse d’affaires de violence familiale ou non familiale ― était inférieur à celui observé pendant la même période en 2019, à l’exception des menaces proférées par un membre de la famille, qui ont augmenté de 2 % pendant la pandémie. Les menaces proférées par une personne autre qu’un membre de la famille ont quant à elles diminué de 9 %. En revanche, parmi les voies de fait et les agressions sexuelles survenues au cours des huit premiers mois de la pandémie, bien que celles qui ont été commises par un membre de la famille aient diminué comparativement à la même période en 2019 (-4 % et -10 %, respectivement), les baisses étaient encore plus prononcées parmi celles qui ont été commises par une personne autre qu’un membre de la famille (-10 % et -21 %, respectivement)Note  .

Il est important d’examiner séparément les chiffres pour les crimes déclarés par la police visés par la collecte de données, bien qu’ils affichent des tendances semblables. Les affaires commises par des personnes autres que des membres de la famille surviennent souvent en public, à l’extérieur du foyer. On s’attend donc à ce que ces affaires diminuent à mesure que les occasions se raréfient, les Canadiens réduisant leurs contacts avec les personnes de l’extérieur de leur ménage en raison des restrictions liées à la pandémie. En revanche, à mesure que les personnes passent plus de temps à la maison avec les membres de leur famille pendant la pandémie — tout en travaillant et en étudiant à la maison —, l’augmentation du stress attribuable à l’isolement social, à l’incertitude économique et à la consommation accrue d’alcool ou de drogues, entre autres, pourrait entraîner une augmentation de la violence familiale (Campbell, 2020; Usher et autres, 2020).

Cela dit, selon les données déclarées par la police pour ces types de crimes, la violence familiale n’a pas augmenté de façon importante : les voies de fait et les agressions sexuelles commises par un membre de la famille de la victime ont diminué, tandis que les menaces proférées par un membre de la famille de la victime ont légèrement augmenté. Il convient de souligner que de nombreuses victimes n’ont peut-être pas réussi à avoir de l’aide, et que les affaires de violence familiale dont sont habituellement témoins de tierces parties (comme des amis ou des enseignants) ou qui sont habituellement soupçonnées par celles-ci et signalées à la police sont plus susceptibles de passer inaperçues pendant la pandémie.

Fin de l’encadré 1

La Saskatchewan et le Manitoba affichent les plus hauts taux de violence familiale parmi les provinces

Tout comme pour la criminalité en général, ce sont les territoires qui ont affiché les taux d’affaires de violence familiale déclarées par la police les plus élevés. Parmi les provinces, les plus hauts taux de violence familiale ont été enregistrés en Saskatchewan (519 pour 100 000 personnes) et au Manitoba (417), alors que les plus faibles taux ont été observés en Ontario (173), à l’Île-du-Prince-Édouard (203) et en Nouvelle-Écosse (225) (tableau 1.4)Note  . Comparativement aux provinces, les territoires ont enregistré des taux beaucoup plus élevés, et c’est le Nunavut (3 398) qui a affiché le plus haut taux, suivi des Territoires du Nord-Ouest (2 689) et du Yukon (707).

Les femmes et les filles ont affiché un taux de violence familiale plus élevé que les hommes et les garçons, et ce, dans toutes les provinces et tous les territoires. Les écarts les plus prononcés dans les taux de violence familiale entre les femmes et les filles et les hommes et les garçons ont été observés en Ontario (239 par rapport à 106, soit un taux 2,2 fois plus élevé chez les femmes et les filles), dans les Territoires du Nord-Ouest (3 739 par rapport à 1 696, soit un taux 2,2 fois plus élevé chez les femmes et les filles) et au Québec (478 par rapport à 232, soit un taux 2,1 fois plus élevé chez les femmes et les filles).

Dans chaque province et territoire en 2019, le taux de violence familiale a augmenté par rapport à l’année précédente, sauf à l’Île-du-Prince-Édouard (-2 %)Note  . Les plus fortes hausses provinciales ont été observées en Colombie-Britannique (+25 %), à Terre-Neuve-et-Labrador (+20 %) et au Nouveau-BrunswickNote  (+11 %).

À l’échelle des provinces, le taux de violence familiale était 2,0 fois plus élevé dans les régions rurales que dans les régions urbaines (469 par rapport à 234 pour 100 000 personnes), et cette tendance était la même pour les femmes et les filles ainsi que pour les hommes et les garçons (graphique 1.2)Note  . Dans les régions rurales, le taux de violence familiale chez les femmes et les filles était 1,8 fois plus élevé que chez les hommes et les garçons (606 par rapport à 337). Par ailleurs, l’écart entre les taux ruraux et urbains était plus prononcé pour la violence familiale que pour la violence non familiale (2,0 fois plus élevé par rapport à 1,4 fois plus élevé dans les régions rurales).

Graphique 1.2 Victimes de violence familiale et non familiale, affaires déclarées par la police, selon le genre de la victime et la région urbaine ou rurale, provinces, 2019

Tableau de données du graphique 1.2 
Tableau de données du graphique 1.2
Sommaire du tableau
Le tableau montre les résultats de Tableau de données du graphique 1.2 Violence familiale, Violence non familiale, Victimes de genre féminin, Victimes de genre masculin et Total des victimes, calculées selon taux pour 100 000 personnes unités de mesure (figurant comme en-tête de colonne).
Violence familiale Violence non familiale
Victimes de genre féminin Victimes de genre masculin Total des victimes Victimes de genre féminin Victimes de genre masculin Total des victimes
taux pour 100 000 personnes
Région urbaine 315 151 234 691 787 738
Région rurale 606 337 469 1 142 966 1 052

Le taux de violence familiale était 2,0 fois moins élevé dans les régions métropolitaines de recensementNote  (RMR), soit les plus grandes villes du Canada, que dans les régions autres que des RMR (215 par rapport à 432) (tableau 1.5)Note  . Parmi les RMR, les taux les plus élevés ont été observés à Lethbridge (383), à Trois-Rivières (360) et à Saguenay (352), alors que les taux les plus faibles ont été enregistrés à Guelph (111), à OttawaNote  (114) et à London (123).

Parmi les RMR, les écarts les plus marqués dans les taux de violence familiale chez les femmes et les filles comparativement aux hommes et aux garçons ont été enregistrés à Abbotsford–Mission (363 par rapport à 124, soit un taux 2,9 fois plus élevé chez les femmes et les filles), à Thunder Bay (406 par rapport à 140, soit un taux 2,9 fois plus élevé chez les femmes et les filles) et à Guelph (161 par rapport à 59, soit un taux 2,8 fois plus élevé chez femmes et les filles).

Tableaux de données détaillés

Tableau 1.1 Victimes de violence familiale et non familiale, affaires déclarées par la police, selon le genre de la victime et le lien de l’auteur présumé avec celle-ci, Canada, 2019

Tableau 1.2 Victimes de violence familiale et non familiale, affaires déclarées par la police, selon le genre de la victime et le type d’infraction, Canada, 2019

Tableau 1.3 Victimes de violence familiale et non familiale, affaires déclarées par la police, selon le genre de la victime, le type d’arme sur les lieux de l’affaire et le degré de gravité des blessures, Canada, 2019

Tableau 1.4 Victimes de violence familiale et non familiale, affaires déclarées par la police, selon le genre de la victime et la province ou le territoire, 2018 à 2019

Tableau 1.5 Victimes de violence familiale et non familiale, affaires déclarées par la police, selon le genre de la victime et la région métropolitaine de recensement, 2019

Références

AGENCE DE LA SANTÉ PUBLIQUE DU CANADA. 2014. Initiative de lutte contre la violence familiale.

CAMPBELL, Andrew M. 2020. « An increasing risk of family violence during the COVID-19 pandemic: Strengthening community collaborations to save lives », Forensic Science International: Reports, vol. 2.

MINISTÈRE DE LA JUSTICE DU CANADA. 2017. La violence familiale.

STATISTIQUE CANADA. 2021. « Certains crimes déclarés par la police et demandes d’intervention pendant la pandémie de COVID-19, mars 2020 à octobre 2020 », Le Quotidien, produit no 11-001-X au catalogue.

USHER, Kim, et autres. 2020. « Family violence and COVID-19: Increased vulnerability and reduced options for support », International Journal of Mental Health Nursing, vol. 29, no 4.

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