Les crimes déclarés par la police en milieu rural et en milieu urbain dans les provinces canadiennes, 2017
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par Samuel Perreault
Faits saillants
- Bien que les services de police responsables de la population majoritairement rurale desservaient 16 % de la population des provinces en 2017, ces derniers ont déclaré 23 % des crimes violents, 17 % des crimes contre les biens, 27 % des délits de la route prévus au Code criminel et 23 % des autres infractions au Code criminel.
- En 2017, le taux de crimes déclarés par la police était 23 % plus élevé dans les régions rurales (6 210 affaires pour 100 000 habitants) que dans les régions urbaines (5 051 affaires pour 100 000 habitants).
- Le taux de crimes déclarés par la police au Canada a diminué de 2009 à 2017, mais une baisse plus marquée a été observée dans les régions urbaines (-19 %), comparativement aux régions rurales (-13 %). De même, depuis 2009, l’IGC a connu un recul plus prononcé dans les régions urbaines (-19 %) que dans les régions rurales (-7 %).
- Le taux de criminalité plus élevé en milieu rural était attribuable au fait qu’un petit nombre de services de police aient enregistré des taux de criminalité très élevés. En réalité, la majorité des services de police desservant une population essentiellement rurale ont affiché des taux de criminalité relativement faibles.
- Les taux de criminalité plus élevés dans les régions rurales ont été principalement observés dans les provinces des Prairies. Dans les provinces des Prairies en 2017, les taux en milieu rural étaient de 36 % à 42 % plus élevés qu’en milieu urbain.
- Des taux de criminalité plus élevés en milieu rural ont surtout été observés dans le nord des provinces. Dans le sud, le taux de criminalité en milieu rural était inférieur dans toutes les provinces, sauf en Alberta.
- Le taux de criminalité plus élevé en milieu rural était surtout attribuable au nombre élevé de voies de fait, de méfaits et d’affaires liées au fait de troubler la paix. Ces infractions courantes ont été déclarées environ deux fois plus souvent par les services de police desservant une population majoritairement rurale.
- De 2009 à 2017, les services de police ruraux ont déclaré un total de 1 078 homicides, ce qui correspond à un taux annuel moyen de 2,02 homicides pour 100 000 habitants. En comparaison, les services de police urbains ont déclaré 4 068 homicides au cours de cette période, ce qui équivaut à un taux de 1,55 homicide pour 100 000 habitants. Cependant, le taux de tentatives de meurtre était inférieur en milieu rural.
- Les infractions avec violence relatives aux armes à feu, comme le fait de décharger ou de braquer une arme à feu, ainsi que les infractions sexuelles contre les enfants comptent parmi les autres crimes violents surreprésentés en milieu rural. En revanche, un plus grand nombre de vols qualifiés et d’infractions liées à la traite des personnes ou à la marchandisation des activités sexuelles sont déclarés en milieu urbain.
- En 2017, le taux de conduite avec facultés affaiblies était environ deux fois plus élevé en milieu rural qu’en milieu urbain. L’écart était encore plus important en ce qui concerne les affaires de conduite avec facultés affaiblies causant des lésions corporelles et celles causant la mort.
La criminalité a longtemps été perçue comme un enjeu essentiellement urbain, tant dans les médias que dans la recherche. À l’inverse, les régions rurales sont plutôt associées aux paysages champêtres, à la tranquillité et à un endroit où les problèmes sociaux sont plus rares qu’en milieu urbain (Donnermeyer et autres, 2013; Allen Bouffard et Muftic, 2006; Wheisheit et autres, 1994). Plusieurs Canadiens partagent d’ailleurs cette perception : comparativement à leurs homologues des régions urbaines, les résidents des régions rurales sont, dans l’ensemble, plus susceptibles d’être satisfaits de leur sécurité personnelle et de croire que la criminalité est moins élevée dans leur voisinage qu’ailleurs au Canada (Perreault, 2017).
Pourtant, plusieurs études récentes ainsi que les statistiques déclarées par la police remettent en cause la perception selon laquelle la criminalité est concentrée dans les grandes villes (Allen, 2018; Allen et Perreault, 2015; Donnermeyer et autres, 2013; Francisco et Chénier, 2007). De récents événements très médiatisés ont également amené la question de la criminalité en milieu rural à l’avant-plan, et le sujet est devenu un important enjeu de sécurité publique. À titre d’exemple, la Saskatchewan a récemment annoncé une série de mesures pour s’attaquer à ce problème, dont la création d’une équipe de 258 policiers spécialement consacrée à la lutte contre la criminalité en milieu rural (gouvernement de la Saskatchewan, 2018). Des mesures semblables ont également été mises en œuvre en Alberta (gouvernement de l’Alberta, 2018).
Parallèlement, le besoin d’information sur la criminalité en milieu rural s’est accru. En effet, il existe peu de données détaillées à jour qui permettent d’en savoir davantage sur les tendances, la nature et l’ampleur de la criminalité en milieu rural. On analyse ces aspects dans le présent article de Juristat. Les conclusions de cet article sont fondées sur les données déclarées par la police dans le cadre du Programme de déclaration uniforme de la criminalité (DUC) et de l’Enquête sur les homicides, ainsi que sur les données autodéclarées de l’Enquête sociale générale (ESG) sur la sécurité des Canadiens (victimisation) dans les provinces canadiennesNote .
Début de l'encadré 1
Encadré 1
Définitions
Affaire criminelle : Comprend toutes les infractions au Code criminel et aux autres lois fédérales déclarées par les services de police. Les affaires sont catégorisées en fonction de l’infraction la plus grave dans l’affaire.
Taux de criminalité : Pour calculer le taux de criminalité, on fait la somme des infractions au Code criminel déclarées par la police, qu’on divise par la population. Le taux de criminalité exclut les délits de la route prévus au Code criminel et les infractions aux autres lois fédérales, comme les infractions relatives aux drogues.
Indice de gravité de la criminalité (IGC) : L’IGC tient compte du volume et de la gravité relative des crimes. On calcule l’IGC déclarée par la police en attribuant un poids à chaque infraction. Les poids de l’IGC sont fondés sur le taux d’incarcération lié à l’infraction et sur la durée moyenne de la peine d’emprisonnement prononcée par les tribunaux de juridiction criminelle à l’égard de cette infraction. Plus la peine moyenne est sévère, plus le poids attribué à l’infraction est important, ce qui signifie que les infractions plus graves ont un effet plus marqué sur l’indice. Contrairement au taux de criminalité traditionnel, l’IGC englobe toutes les infractions, y compris les délits de la route prévus au Code criminel et les infractions aux autres lois fédérales, comme les infractions relatives aux drogues. Pour calculer l’IGC, on divise la somme des infractions pondérées par la population. Comme pour les autres indices (p. ex. l’Indice des prix à la consommation), on normalise ensuite l’IGC en fonction d’une année de base, dont l’indice est « 100 », et ce, afin de simplifier la comparaison (pour l’IGC, l’année de base est 2006). Toutes les valeurs de l’IGC sont relatives à l’IGC de 2006 à l’échelle du Canada. Les valeurs de l’IGC sont disponibles à compter de 1998. Pour obtenir plus de renseignements à propos de l’IGC, voir les publications intitulées La mesure de la criminalité au Canada : présentation de l’Indice de gravité de la criminalité et des améliorations au Programme de déclaration uniforme de la criminalité (Wallace et autres, 2009), La méthodologie de l’indice de gravité de la criminalité déclarée par la police (Babyak et autres, 2009) et Mise à jour des poids de l’Indice de gravité de la criminalité déclarée par la police — Améliorations apportées à la méthodologie (Babyak et autres, 2013), de même que la vidéo intitulée La mesure de la criminalité au Canada : un aperçu détaillé de l’Indice de gravité de la criminalité (Statistique Canada, 2016a).
Auteur présumé : Un auteur présumé est une personne de 12 ans et plus à qui les services de police ont imputé une affaire criminelle en se fondant sur des éléments de preuve établissant un lien entre cette personne et le crime, que des accusations aient été portées ou recommandées ou nonNote . Plus d’un auteur présumé peut être impliqué dans une même affaire.
Région métropolitaine de recensement (RMR) et agglomération de recensement (AR) : Une RMR ou une AR est formée d’une ou de plusieurs municipalités adjacentes situées autour d’un centre de population (aussi appelé « noyau »). Une RMR doit compter au moins 100 000 habitants, dont au moins 50 000 vivent dans le noyau. Quant à l’AR, son noyau doit compter au moins 10 000 habitants. Pour faire partie d’une RMR ou d’une AR, les municipalités adjacentes doivent être fortement intégrées au noyau, le degré d’intégration étant mesuré par le débit de la migration quotidienne calculée à partir des données du recensement. Une RMR ou une AR peut être desservie par plus d’un service de police.
Région rurale et petite ville : Les services de police ruraux desservent un territoire dont la majorité de la population vit à l’extérieur d’une RMR ou d’une AR. Bien que les petites villes qui ne répondent pas aux critères d’une AR soient comprises dans cette catégorie, l’expression « région rurale » sera utilisée pour alléger le texte. Le classement des services de police (ruraux ou urbains) est établi en fonction de la majorité de la population desservie par ceux-ci et non en fonction du lieu de résidence exact de chaque Canadien. Par conséquent, les résidents d’un milieu urbain peuvent être desservis par un service de police classé dans la catégorie des services de police ruraux, et vice-versa. Afin d’assurer une certaine concision, les termes « milieu rural » (ou région rurale) et « milieu urbain » (ou région urbaine) sont utilisés pour désigner les territoires ou populations en fonction de la catégorisation des services de police les desservant. Les définitions des termes « rural » et « urbain » utilisés dans le présent rapport pourraient différer des définitions utilisées dans d’autres rapports de Statistique Canada.
Région urbaine : Les services de police urbains desservent un territoire dont la majorité de la population vit à l’intérieur d’une RMR ou d’une AR.
Nord provincial : Le Nord provincial englobe les régions septentrionales de la Colombie-Britannique, de l’Alberta, de la Saskatchewan, du Manitoba, de l’Ontario, du Québec et de Terre-Neuve-et-Labrador, selon la définition convenue dans le cadre du Forum des ministres responsables du développement du Nord et utilisée par le Centre pour le Nord du Conference Board du Canada. En général, les limites du Nord correspondent aux régions administratives provinciales. Pour obtenir plus de renseignements, veuillez consulter Statistique Canada, 2018 ou Allen et Perreault, 2015.
Fin de l'encadré 1
Le taux de criminalité et l’Indice de gravité de la criminalité sont plus élevés en milieu rural qu’en milieu urbain
La majorité des Canadiens habitent en milieu urbain et la plupart des crimes sont également commis en milieu urbain. Cependant, lorsque l’on tient compte de la taille de la population, on constate que les résidents des milieux ruraux sont, dans l’ensemble, davantage touchés par la criminalité que leurs homologues des milieux urbains. En 2017, les services de police ruraux desservaient environ 16 % de la population des 10 provinces canadiennes, mais ont déclaré 20 % de l’ensemble des infractions au Code criminel et aux autres lois fédérales. Plus précisément, ils ont déclaré 23 % des crimes violents, 17 % des crimes contre les biens, 27 % des délits de la route prévus au Code criminel, 23 % des autres infractions au Code criminel et 21 % des infractions relatives aux drogues.
Au Canada, on a habituellement recours à deux mesures officielles de la criminalité : le taux de criminalité et l’Indice de gravité de la criminalité (IGC). Le taux de criminalité mesure le volume de crimes (toutes les infractions au Code criminel, sauf les délits de la route) par rapport à la taille de la population, alors que l’IGC mesure à la fois le volume et la gravité des crimes, et ce, pour l’ensemble des infractions au Code criminel et aux autres lois fédérales.
En 2017, les services de police ruraux ont déclaré 374 441 infractions au Code criminel (sauf les délits de la route), ce qui correspond à un taux de 6 210 affairesNote pour 100 000 habitants. Ce taux était de 23 % supérieur à celui déclaré par les services de police urbains (5 051 affaires pour 100 000 habitants) (tableau 1). En tenant compte de l’ensemble des infractions aux lois fédérales, y compris les délits de la route, cet écart était encore plus prononcé. Le taux de criminalité en milieu rural était alors de 30 % supérieur à celui observé en milieu urbain (7 324 affaires pour 100 000 habitants par rapport à 5 629 affaires pour 100 000 habitants).
L’écart entre les régions urbaines et rurales est cependant plus faible lorsque l’on compare les IGC, donc lorsque l’on tient également compte de la gravité des crimes. En 2017, l’IGC en milieu urbain était de 70,1. En milieu rural, il s’est établi à 82,1, soit 17 % supérieur à celui enregistré en milieu urbain. Le fait que l’écart observé entre l’IGC des milieux rural et urbain soit plus faible que celui observé entre les taux de criminalité traditionnels indique que les crimes déclarés par la police sont plus courants en milieu rural qu’en milieu urbain particulièrement en raison des taux plus élevés de crimes mineurs.
Les taux de criminalité en milieu rural et en milieu urbain sont inférieurs à ceux de 2009
Dans l’ensemble, les taux de criminalité en milieu urbain et en milieu rural suivent, depuis 2009, des tendances similaires : une baisse des taux a été observée jusqu’en 2014, suivie d’une légère hausse (graphique 1). Toutefois, alors que la baisse enregistrée de 2009 à 2014 a été constante en milieu urbain, celle-ci a été ponctuée de deux légères hausses en milieu rural. En revanche, le taux de criminalité en milieu rural a légèrement fléchi en 2017, alors que la hausse s’est poursuivie en milieu urbain. Comparativement à 2009, les taux de crimes déclarés par la police en 2017 étaient inférieurs de 13 % en milieu rural et de 19 % en milieu urbain.
Tableau de données du graphique 1
Année | Services de police urbains — taux de l’ensemble des infractionsTableau de Note 1 | Services de police ruraux — taux de l’ensemble des infractionsTableau de Note 1 | Services de police urbains — taux de criminalitéTableau de Note 2 | Services de police ruraux — taux de criminalitéTableau de Note 2 |
---|---|---|---|---|
taux pour 100 000 habitants | ||||
2009 | 6 927 | 8 396 | 6 199 | 7 176 |
2010 | 6 569 | 8 420 | 5 831 | 7 148 |
2011 | 6 188 | 8 109 | 5 445 | 6 798 |
2012 | 5 989 | 8 123 | 5 266 | 6 826 |
2013 | 5 535 | 7 509 | 4 852 | 6 311 |
2014 | 5 406 | 7 029 | 4 752 | 5 952 |
2015 | 5 521 | 7 263 | 4 896 | 6 218 |
2016 | 5 575 | 7 331 | 4 966 | 6 276 |
2017 | 5 629 | 7 324 | 5 051 | 6 210 |
Source : Statistique Canada, Centre canadien de la statistique juridique, Programme de déclaration uniforme de la criminalité. |
Les indices de gravité de la criminalité (IGC) ont également diminué durant la même période, tant en milieu urbain qu’en milieu rural. En 2009, l’IGC en milieu urbain et l’IGC en milieu rural étaient relativement similaires (86,9 et 88,2, respectivement). Cependant, l’IGC en milieu urbain a ensuite connu une baisse plus marquée, atteignant 70,1 en 2017 (-19 %). En milieu rural, l’IGC s’est établi à 82,1, ce qui représente une baisse plus modeste de 7 % (graphique 2).
Tableau de données du graphique 2
2009 | 2010 | 2011 | 2012 | 2013 | 2014 | 2015 | 2016 | 2017 | |
---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|
Indice de gravité de la criminalité (IGC) | |||||||||
IGC en milieu urbain | 86,9 | 81,2 | 75,3 | 72,7 | 66,1 | 64,5 | 67,5 | 68,9 | 70,1 |
IGC en milieu rural | 88,2 | 87,2 | 84,7 | 84,8 | 78,0 | 73,8 | 79,2 | 81,9 | 82,1 |
IGC avec violence en milieu urbain | 95,8 | 89,8 | 85,2 | 80,3 | 71,9 | 68,6 | 72,9 | 73,4 | 77,2 |
IGC avec violence en milieu rural | 82,7 | 81,8 | 83,6 | 84,8 | 79,1 | 75,4 | 81,0 | 87,4 | 90,2 |
Note : Les indices de gravité de la criminalité sont fondés sur l’ensemble des infractions au Code criminel, dont les délits de la route, ainsi que sur les infractions aux autres lois fédérales. L’indice de base a été établi à 100 pour l’année 2006 pour le Canada. Les services de police urbains desservent un territoire dont la majorité de la population vit à l’intérieur d’une région métropolitaine de recensement (RMR) ou d’une agglomération de recensement (AR). Les services de police ruraux desservent un territoire dont la majorité de la population vit à l’extérieur d’une RMR ou d’une AR. Une RMR ou une AR est formée d’une ou de plusieurs municipalités adjacentes situées autour d’un centre de population (aussi appelé « noyau »). Une RMR doit compter au moins 100 000 habitants, dont au moins 50 000 vivent dans le noyau. Quant à l’AR, son noyau doit compter au moins 10 000 habitants. Pour faire partie d’une RMR ou d’une AR, les municipalités adjacentes doivent être fortement intégrées au noyau, le degré d’intégration étant mesuré par le débit de la migration quotidienne calculé à partir des données du recensement. Une RMR ou une AR peut être desservie par plus d’un service de police. Les chiffres de population sont fondés sur des estimations au 1er juillet fournies par la Division de la démographie de Statistique Canada. Exclut les données du Centre canadien de police pour les enfants disparus et exploités de la Gendarmerie royale du Canada. Source : Statistique Canada, Centre canadien de la statistique juridique, Programme de déclaration uniforme de la criminalité. |
La baisse plus modeste de l’IGC par rapport à celle du taux de criminalité en milieu rural serait en partie attribuable au recul des crimes moins graves, contrairement à ce qui a été observé en milieu urbain, où l’IGC et le taux de criminalité ont connu des reculs similaires.
En résumé, à l’échelle nationale, les régions rurales ont enregistré des taux de criminalité et de gravité plus élevés que les régions urbaines en 2017, et les deux régions ont connu des baisses comparativement à 2009. Toutefois, les baisses observées dans les régions rurales étaient de moindre ampleur. La section suivante porte sur les régions rurales à l’origine des taux de criminalité généralement plus élevés dans ces régions.
Les taux de criminalité élevés en milieu rural sont surtout observés dans les Prairies
La criminalité en milieu rural est un enjeu qui, récemment, s’est surtout montré problématique dans les Prairies, comme le montrent les initiatives mises en place pour lutter contre la criminalité en milieu rural (gouvernement de la Saskatchewan, 2018; gouvernement de l’Alberta, 2018) ou la motion 167, déposée en Chambre des communes par une députée de l’Alberta (Chambre des communes du Canada, 2018).
En effet, l’enjeu de la criminalité en milieu rural touche plus particulièrement les provinces des Prairies. Dans la majorité des provinces, les taux de criminalité en milieu rural étaient, dans l’ensemble, pratiquement identiques ou inférieurs à ceux enregistrés en milieu urbain (graphique 3). Les exceptions étaient Terre-Neuve-et-Labrador, le Manitoba, la Saskatchewan et l’Alberta. Parmi les provinces où le taux était plus élevé en milieu rural, Terre-Neuve-et-Labrador a affiché le plus faible écart : le taux en milieu rural était en moyenne de 11 % supérieur à celui observé en milieu urbain. Dans les provinces des Prairies, les taux en milieu rural étaient de 36 % à 42 % plus élevés qu’en milieu urbain.
Tableau de données du graphique 3
Province | Services de police urbains | Services de police ruraux | Services de police Urbain | Services de police Rural |
---|---|---|---|---|
taux pour 100 000 habitants | % variation du taux en pourcentage de 2009 à 2017 | |||
T.-N.-L. | 5 185 | 5 765 | -27 | -3 |
Î.-P.-É. | 4 348 | 3 549 | -42 | -21 |
N.-É. | 5 211 | 4 696 | -31 | -20 |
N.-B. | 5 618 | 4 373 | -5 | -14 |
Qc | 3 357 | 3 377 | -35 | -21 |
Ont. | 3 810 | 3 703 | -20 | -21 |
Man. | 7 964 | 11 309 | -18 | -10 |
Sask. | 10 138 | 13 829 | -14 | -3 |
Alb. | 7 920 | 10 964 | 0 | -3 |
C.-B. | 7 546 | 6 418 | -16 | -33 |
All provinces | 5 051 | 6 210 | -19 | -13 |
Note : Comprend les infractions au Code criminel, sauf les délits de la route. Les services de police urbains desservent un territoire dont la majorité de la population vit à l’intérieur d’une région métropolitaine de recensement (RMR) ou d’une agglomération de recensement (AR). Les services de police ruraux desservent un territoire dont la majorité de la population vit à l’extérieur d’une RMR ou d’une AR. Une RMR ou une AR est formée d’une ou de plusieurs municipalités adjacentes situées autour d’un centre de population (aussi appelé « noyau »). Une RMR doit compter au moins 100 000 habitants, dont au moins 50 000 vivent dans le noyau. Quant à l’AR, son noyau doit compter au moins 10 000 habitants. Pour faire partie d’une RMR ou d’une AR, les municipalités adjacentes doivent être fortement intégrées au noyau, le degré d’intégration étant mesuré par le débit de la migration quotidienne calculé à partir des données du recensement. Une RMR ou une AR peut être desservie par plus d’un service de police. Les taux sont calculés pour 100 000 habitants, les chiffres de population étant fondés sur des estimations au 1er juillet fournies par la Division de la démographie de Statistique Canada. Exclut les données du Centre canadien de police pour les enfants disparus et exploités de la Gendarmerie royale du Canada. Source : Statistique Canada, Centre canadien de la statistique juridique, Programme de déclaration uniforme de la criminalité. |
C’est aussi dans ces mêmes provinces qu’on observe la plus faible baisse des taux de criminalité en milieu rural depuis 2009. Plus précisément, le taux de criminalité en milieu rural a reculé de 3 % à Terre-Neuve-et-Labrador, en Saskatchewan et en Alberta (graphique 3). La baisse en milieu rural a été un peu plus marquée au Manitoba (-10 %), mais elle est demeurée plus faible que celle des autres provinces (de -14 % à -33 %, selon la province) ou que celle enregistrée dans les régions urbaines du Manitoba (-18 %). Pour certains types de crimes, on observe même une hausse dans les régions rurales par rapport à 2009. C’est notamment le cas des crimes contre les biens en Alberta (+13 %) et des autres infractions au Code criminel à Terre-Neuve-et-Labrador (+37 %) et au Nouveau-Brunswick (+14 %) (tableau 2).
Dans la majorité des provinces, le taux de criminalité en milieu rural a suivi une tendance similaire à celle observée à l’échelle nationale : une tendance générale à la baisse jusqu’en 2014, suivie d’une hausse (tableau 3). Dans les provinces des Prairies, ainsi qu’au Nouveau-Brunswick, la hausse de 2014 à 2015 a été particulièrement marquée et s’explique en partie par une augmentation relativement élevée des crimes contre les biens. Le taux de criminalité en milieu rural observé dans ces provinces s’est toutefois stabilisé par la suite, et a même diminué dans certains cas. Il convient aussi de noter que, depuis le creux de 2014, le taux de criminalité dans ces provinces, y compris le taux de crimes contre les biens, a davantage augmenté en milieu urbain qu’en milieu rural, quoique la baisse de 2009 à 2014 a aussi été généralement plus marquée en milieu urbain qu’en milieu rural.
L’Indice de gravité de la criminalité en milieu rural est également plus élevé dans les Prairies
Les indices de gravité de la criminalité (IGC) des provinces offrent un portrait semblable à celui des et les taux de criminalité des provinces (graphique 4). Les IGC les plus élevés enregistrés en milieu rural parmi les provinces étaient aussi ceux des Prairies, bien que les écarts au chapitre de l’IGC étaient moins importants que les écarts observés entre les taux de criminalité, comparativement aux régions urbaines. En revanche, contrairement aux tendances observées dans les taux de criminalité, une hausse de l’IGC par rapport à 2009 a été enregistrée dans les régions rurales de l’Alberta (+17 %) et de la Saskatchewan (+5 %) (tableau 4). Dans de nombreuses autres provinces, notamment en Nouvelle-Écosse et au Nouveau-Brunswick, la baisse globale de l’IGC par rapport à 2009 est aussi plus modeste que la baisse du taux de criminalité observée dans ces provinces. Le fait que le taux de criminalité ait diminué dans certaines régions alors que l’IGC a augmenté ou diminué légèrement laisse croire que la nature des crimes commis n’est plus la même - il se pourrait qu’il y ait eu une baisse des taux de crimes mineurs ou qu’une augmentation des crimes graves a été enregistrée.
Tableau de données du graphique 4
Province | |||||||||||
---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|
T.-N.-L. | Î.-P.-É. | N.-É. | N.-B. | Qc | Ont. | Man. | Sask. | Alb. | C.-B. | Toutes les provinces | |
Indice de gravité de la criminalité (IGC) | |||||||||||
Services de police urbains | 65 | 48 | 66 | 72 | 57 | 55 | 112 | 128 | 103 | 91 | 70 |
Services de police ruraux | 61 | 39 | 66 | 65 | 60 | 52 | 130 | 166 | 140 | 73 | 82 |
% variation de l'IGC en pourcentage de 2009 à 2017 | |||||||||||
Services de police urbains | -24 | -37 | -30 | -1 | -32 | -21 | -18 | -13 | +2 | -19 | -19 |
Services de police ruraux | -2 | -23 | -2 | -3 | -21 | -16 | -5 | +5 | +17 | -30 | -7 |
Note : Les indices de gravité de la criminalité sont fondés sur l’ensemble des infractions au Code criminel, dont les délits de la route, ainsi que sur et les infractions aux autres lois fédérales. L’indice de base a été établi à 100 pour l’année 2006 pour le Canada. Les services de police urbains desservent un territoire dont la majorité de la population vit à l’intérieur d’une région métropolitaine de recensement (RMR) ou d’une agglomération de recensement (AR). Les services de police ruraux desservent un territoire dont la majorité de la population vit à l’extérieur d’une RMR ou d’une AR. Une RMR ou une AR est formée d’une ou de plusieurs municipalités adjacentes situées autour d’un centre de population (aussi appelé « noyau »). Une RMR doit compter au moins 100 000 habitants, dont au moins 50 000 vivent dans le noyau. Quant à l’AR, son noyau doit compter au moins 10 000 habitants. Pour faire partie d’une RMR ou d’une AR, les municipalités adjacentes doivent être fortement intégrées au noyau, le degré d’intégration étant mesuré par le débit de la migration quotidienne calculé à partir des données du recensement. Une RMR ou une AR peut être desservie par plus d’un service de police. Les chiffres de population sont fondés sur des estimations au 1er juillet fournies par la Division de la démographie de Statistique Canada. Exclut les données du Centre canadien de police pour les enfants disparus et exploités de la Gendarmerie royale du Canada. Source : Statistique Canada, Centre canadien de la statistique juridique, Programme de déclaration uniforme de la criminalité. |
Par ailleurs, alors que le taux de criminalité observé en milieu rural à Terre-Neuve-et-Labrador en 2017 était supérieur à celui enregistré en milieu urbain, le contraire a été observé pour l’IGC (graphique 4). Cette différence était attribuable au fait que les crimes très courants commis dans les régions rurales de cette province étaient relativement mineursNote . Par exemple, les voies de fait de niveau 1, les méfaits, le fait de troubler la paix et le défaut de se conformer à une ordonnance du tribunal représentaient 61 % du taux de criminalité en milieu rural pour cette province, mais seulement 24 % de l’IGC.
À l’inverse, l’IGC enregistré dans les régions rurales de la Nouvelle-Écosse était le même que celui des régions urbaines, mais il le dépassait au Québec. En Nouvelle-Écosse, l’IGC plus élevé en milieu rural était principalement attribuable au grand nombre de fraudes, une infraction dont le poids s’avère relativement élevé dans le calcul de l’IGC.
Il convient de souligner que, tant en milieu urbain qu’en milieu rural, les taux de criminalité et les IGC sont généralement plus élevés dans l’ouest du pays, plus particulièrement dans les provinces des Prairies. Puisque plus du quart (27 %) de la population rurale réside dans l’une de ces provinces, comparativement à 17 % de la population urbaine, les tendances observées dans les Prairies influencent davantage le taux de criminalité et l’IGC du Canada rural que le taux de criminalité et l’IGC du Canada urbain. Autrement dit, les Prairies ont une incidence importante sur les données de la criminalité en région rurale à l’échelle nationale.
Début de l'encadré 2
Encadré 2
Les taux de victimisation autodéclarée en milieu rural sont plus faibles qu’en milieu urbain
Au Canada, les statistiques officielles sur la criminalité sont principalement recueillies au moyen de deux enquêtes distinctes, mais complémentaires. D’une part, on trouve les données déclarées par la police, lesquelles sont recueillies au moyen du Programme de déclaration uniforme de la criminalité (DUC), un recensement annuel de toutes les infractions au Code criminel et des infractions aux autres lois fédérales portées à l’attention de la police. D’autre part, tous les cinq ans, Statistique Canada recueille de l’information sur les expériences de victimisation auprès d’un échantillon de Canadiens de 15 ans et plus dans le cadre de l’Enquête sociale générale (ESG) sur la sécurité des Canadiens (victimisation). Les données de l’ESG comprennent les crimes qui ont été signalés à la police ainsi que ceux qui ne l’ont pas été. Cependant, elles comprennent un nombre de crimes plus limité et excluent notamment les crimes visant les commerces, les institutions, les biens publics ou les crimes n’ayant pas fait de victime.
Les données de l’ESG révèlent que, dans l’ensemble, les Canadiens vivant en milieu rural sont moins susceptibles de déclarer avoir été victimes d’un crime. En 2014, lors du plus récent cycle de l’ESG sur la victimisation, près de 1 Canadien vivant en milieu rural sur 7 (14 %) a déclaré avoir été victime d’au moins un crime mesuré par l’ESGNote au cours des 12 mois précédant l’enquête. Parmi les Canadiens vivant en milieu urbain, cette proportion s’établissait à près de 1 sur 5 (19 %). Par ailleurs, cette différence s’observait dans presque toutes les provinces, à l’exception du Nouveau-Brunswick et de l’Alberta, où les taux en milieu urbain et en milieu rural étaient similaires (graphique de l’encadré 2).
Tableau de données du graphique de l’encadré 2
Province | Région urbaineTableau de Note † | Région rurale |
---|---|---|
pourcentage | ||
T.-N.-L. | 18 | 9Note * |
Î.-P.-É. | 23 | 12Note * Note E: à utiliser avec prudence |
N.-É. | 18 | 13Note * |
N.-B. | 13 | 12 |
Qc | 17 | 12Note * |
Ont. | 18 | 13Note * |
Man. | 25 | 15Note * |
Sask. | 25 | 17Note * |
Alb. | 21 | 22 |
C.-B. | 20 | 16Note E: à utiliser avec prudence |
Toutes les provinces | 19 | 14Note * |
E à utiliser avec prudence
Source : Statistique Canada, Enquête sociale générale, 2014. |
Cette apparente contradiction entre les données déclarées par la police et les données autodéclarées sur les expériences de victimisation pourrait en partie s’expliquer par les différences observées dans le nombre d’affaires signalées à la police. Par exemple, 45 % des crimes contre les ménages survenus dans les régions rurales en 2014 ont été signalés à la police, une proportion beaucoup plus élevée que celle observée dans les régions urbaines (35 %). Les taux de signalement étaient cependant similaires en ce qui a trait aux crimes violents (29 % en milieu rural et 28 % en milieu urbain) et aux vols de biens personnels (31 % et 29 %, respectivement).
Il convient de souligner que certains crimes ne sont pas compris dans les données autodéclarées sur la victimisation. C’est notamment le cas du harcèlement criminel ou des communications indécentes, de la distribution non consensuelle d’images intimes, de même que des crimes sans victime immédiate tels que le fait de troubler la paix, les infractions contre l’administration de la justice ou encore les infractions sans violence relatives aux armes. De même, les crimes visant un commerce, un bien public ou une victime de moins de 15 ans ne sont pas mesurés par l’ESG. Par conséquent, les différences relevées au chapitre de la portée et de la méthodologie des enquêtes pourraient expliquer en partie le fait que les tendances tirées des données autodéclarées sur la victimisation ne reflètent pas tout à fait les données déclarées par la police.
Fin de l'encadré 2
On observe une plus grande variation des taux de criminalité en milieu rural qu’en milieu urbain
L’une des principales difficultés rencontrées lorsque l’on analyse la nature et l’ampleur de la criminalité en milieu rural est qu’il existe une multitude de différentes réalités rurales. Certaines collectivités connaissent un déclin économique ou démographique, alors que d’autres doivent composer avec les effets d’un boom économique rapide. Certaines collectivités sont particulièrement éloignées, tandis que d’autres se trouvent relativement près de grands centres de population et ont accès à une plus grande gamme de services. Enfin, certaines collectivités autochtones — plus présentes en milieu rural qu’en milieu urbain — font également face à d’importants enjeux socioéconomiques et de sécurité.
Ces différentes réalités observées dans le contexte rural se reflètent dans les variations des taux de criminalité. Dans les régions urbaines et rurales, environ les trois quarts de la population ont été desservis par un service de police qui a enregistré un taux de criminalité inférieur à 6 000 affaires pour 100 000 habitants en 2017 (graphique 5). Toutefois, dans les régions rurales, la proportion de la population desservie par un service de police ayant enregistré un taux de criminalité relativement faible (moins de 3 000 affaires pour 100 000 habitants) était beaucoup plus élevée que dans les régions urbaines (38 % par rapport à 24 %).
Tableau de données du graphique 5
Taux de criminalité (nombre d'affaires pour 100 000 habitants) |
|||||
---|---|---|---|---|---|
Moins de 2 000 affaires | 2 000 à 2 999 affaires | 3 000 à 5 999 affaires | 6 000 à 9 999 affaires | 10 000 affaires et plus | |
pourcentage | |||||
Population urbaine | 2,8 | 20,7 | 50,9 | 21,7 | 3,8 |
Population rurale | 9,4 | 28,5 | 36,8 | 12,0 | 13,2 |
Note : Comprend les infractions au Code criminel, sauf les délits de la route. Les services de police urbains desservent un territoire dont la majorité de la population vit à l’intérieur d’une région métropolitaine de recensement (RMR) ou d’une agglomération de recensement (AR). Les services de police ruraux desservent un territoire dont la majorité de la population vit à l’extérieur d’une RMR ou d’une AR. Une RMR ou une AR est formée d’une ou de plusieurs municipalités adjacentes situées autour d’un centre de population (aussi appelé « noyau »). Une RMR doit compter au moins 100 000 habitants, dont au moins 50 000 vivent dans le noyau. Quant à l’AR, son noyau doit compter au moins 10 000 habitants. Pour faire partie d’une RMR ou d’une AR, les municipalités adjacentes doivent être fortement intégrées au noyau, le degré d’intégration étant mesuré par le débit de la migration quotidienne calculé à partir des données du recensement. Une RMR ou une AR peut être desservie par plus d’un service de police. Les taux sont calculés pour 100 000 habitants, les chiffres de population étant fondés sur des estimations au 1er juillet fournies par la Division de la démographie de Statistique Canada. Exclut les données du Centre canadien de police pour les enfants disparus et exploités de la Gendarmerie royale du Canada. Source : Statistique Canada, Centre canadien de la statistique juridique, Programme de déclaration uniforme de la criminalité. |
En comparaison, plus de 1 personne vivant en région rurale sur 8 (13 %) était desservie par un service de police dont le taux de criminalité était particulièrement élevé, soit au moins 10 000 affaires pour 100 000 habitants. En revanche, c’était le cas de 4 % des personnes vivant en région urbaine. Ce sont d’ailleurs ces collectivités affichant un taux de criminalité élevé qui entraînent un taux d’infractions en milieu rural supérieur à celui des régions urbaines. Il convient aussi de noter qu’environ 7 services de police ruraux affichant un taux de criminalité élevé sur 10 sont situés dans les provinces des Prairies.
Les taux de criminalité élevés en milieu rural sont attribuables aux taux élevés dans le Nord provincial
Dans une étude portant sur la criminalité dans le Nord provincial, Allen et Perreault (2015) ont mis en relief les conditions socioéconomiques parfois difficiles et les taux de criminalité relativement élevés dans plusieurs de ces régions. Dans l’ensemble, le taux de criminalité dans le Nord provincial était plus du double de celui observé dans le sud. Or, environ 15 % de la population rurale des provinces canadiennes vit dans les régions du nord des provinces, comparativement à 4 % de la population urbaine (voir les définitions de l’encadré 1).
L’écart entre le taux de criminalité en milieu rural et le taux de criminalité en milieu urbain est principalement attribuable aux différences observées entre les régions du sud des provinces et celles situées plus au nord. En fait, dans le sud des provinces, le taux de criminalité en milieu rural est généralement inférieur à celui en milieu urbain (4 706 affaires pour 100 000 habitants par rapport à 4 931 affaires pour 100 000 habitants). On observe cette tendance dans toutes les provinces, sauf en Alberta (graphique 6).
Tableau de données du graphique 6
Province | Services de police urbains — Sud | Services de police urbains — Nord | Services de police ruraux — Sud | Services de police ruraux — Nord |
---|---|---|---|---|
taux pour 100 000 habitants | ||||
T.-N.-L. | 5 185 | Note ...: n'ayant pas lieu de figurer | 3 586 | 23 099 |
Î.-P.-É. | 4 348 | Note ...: n'ayant pas lieu de figurer | 3 549 | Note ...: n'ayant pas lieu de figurer |
N.-É. | 5 211 | Note ...: n'ayant pas lieu de figurer | 4 696 | Note ...: n'ayant pas lieu de figurer |
N.-B. | 5 618 | Note ...: n'ayant pas lieu de figurer | 4 373 | Note ...: n'ayant pas lieu de figurer |
Qc | 3 350 | 3 517 | 2 779 | 11 097 |
Ont. | 3 711 | 6 149 | 2 857 | 7 286 |
Man. | 7 340 | 46 226 | 5 963 | 31 385 |
Sask. | 10 138 | Note ...: n'ayant pas lieu de figurer | 9 053 | 59 574 |
Alb. | 7 691 | 13 176 | 10 019 | 12 795 |
C.-B. | 7 272 | 12 788 | 5 868 | 8 448 |
Toutes les provinces | 4 931 | 8 003 | 4 706 | 14 512 |
... n'ayant pas lieu de figurer Note : Comprend les infractions au Code criminel, sauf les délits de la route. Le Nord provincial englobe les régions septentrionales de la Colombie-Britannique, de l’Alberta, de la Saskatchewan, du Manitoba, de l’Ontario, du Québec et de Terre-Neuve-et-Labrador. Les services de police urbains desservent un territoire dont la majorité de la population vit à l’intérieur d’une région métropolitaine de recensement (RMR) ou d’une agglomération de recensement (AR). Les services de police ruraux desservent un territoire dont la majorité de la population vit à l’extérieur d’une RMR ou d’une AR. Une RMR ou une AR est formée d’une ou de plusieurs municipalités adjacentes situées autour d’un centre de population (aussi appelé « noyau »). Une RMR doit compter au moins 100 000 habitants, dont au moins 50 000 vivent dans le noyau. Quant à l’AR, son noyau doit compter au moins 10 000 habitants. Pour faire partie d’une RMR ou d’une AR, les municipalités adjacentes doivent être fortement intégrées au noyau, le degré d’intégration étant mesuré par le débit de la migration quotidienne calculé à partir des données du recensement. Une RMR ou une AR peut être desservie par plus d’un service de police. Les taux sont calculés pour 100 000 habitants, les chiffres de population étant fondés sur des estimations au 1er juillet fournies par la Division de la démographie de Statistique Canada. Exclut les données du Centre canadien de police pour les enfants disparus et exploités de la Gendarmerie royale du Canada. Source : Statistique Canada, Centre canadien de la statistique juridique, Programme de déclaration uniforme de la criminalité. |
De plus, le taux de criminalité en milieu rural dans le sud des provinces a diminué à peu près au même rythme que celui en milieu urbain depuis 2009, soit une baisse de 18 % en milieu rural et une baisse de 19 % en milieu urbain.
Les taux de criminalité en milieu rural sont particulièrement élevés dans le nord de la Saskatchewan, du Manitoba, de Terre-Neuve-et-Labrador et du Québec
Si, dans le sud, le taux de criminalité est inférieur en milieu rural, on observe toutefois la situation inverse dans le Nord. Dans l’ensemble, le taux de criminalité des régions rurales du Nord est supérieur à celui des régions urbaines du Nord (14 512 affaires pour 100 000 habitants par rapport à 8 003 affaires pour 100 000 habitants). De plus, le taux de criminalité connaît une baisse moins rapide dans les régions rurales (-2 % depuis 2009 par rapport à -11 %). Toutefois, cette tendance est surtout attribuable aux faibles taux de criminalité observés dans les régions urbaines du nord du Québec, qui comprennent notamment de grands centres urbains tels que Saguenay. Dans une moindre mesure, cette tendance s’explique également par les taux de criminalité observés dans le nord de l’Ontario, qui compte également de grands centres urbains tels que le Grand Sudbury et Thunder Bay, dont les taux de criminalité sont relativement près de la moyenne nationale. Au Manitoba, en Alberta et en Colombie-Britannique — les trois autres provinces qui comptent des milieux urbains dans les régions du Nord —, les taux de criminalité sont plus faibles en milieu rural qu’en milieu urbain.
Les taux de criminalité dans le Nord sont particulièrement élevés dans le nord de la Saskatchewan et, dans une moindre mesure, dans le nord du Manitoba, au Labrador et dans les régions les plus au nord du Québec. Le profil sociodémographique de ces régions s’apparente à celui des territoires, où les taux de criminalité sont nettement supérieurs à la moyenne canadienne. Par exemple, on y compte plusieurs petites localités isolées, des proportions élevées d’Autochtones, une population généralement plus jeune, un nombre plus élevé de personnes dans les ménages ou encore des proportions de familles monoparentales supérieures à la moyenne (Allen et Perreault, 2015).
Début de l'encadré 3
Encadré 3
La criminalité en milieu rural dans les territoires
Les territoires diffèrent des provinces, et ils diffèrent les uns des autres à de nombreux égards. Par exemple, la population des territoires est en moyenne plus jeune que celle des provinces; cette situation s’observe surtout au Nunavut et, dans une moindre mesure, dans les Territoires du Nord-Ouest. On y trouve aussi de plus grandes proportions de personnes ayant une identité autochtone, de familles monoparentales, de personnes n’ayant pas de diplôme et de logements surpeuplés, dont la majeure partie se trouve encore une fois au Nunavut et, dans une moindre mesure, dans les Territoires du Nord-Ouest.
Ces caractéristiques ont souvent été observées de pair avec des taux de criminalité plus élevés (Allen et Perreaut, 2015; Charron et autres, 2010; Savoie, 2008). D’ailleurs, les territoires ont affiché des taux de criminalité nettement plus élevés que les provinces. Par exemple, en 2017, le taux de criminalité pour l’ensemble des territoires (32 640 affaires pour 100 000 habitants) était six fois plus élevé que celui observé pour l’ensemble des provinces (5 242 affaires pour 100 000 habitants). C’est notamment pour cette raison que les territoires ont été exclus de la présente analyse sur la criminalité en milieu rural, ceux-ci valant la peine d’être analysés séparément.
Cela dit, on observe aussi des différences entre les milieux urbains et ruraux des territoires. Dans les territoires, les milieux urbains se limitent à Whitehorse et à Yellowknife, soit les deux seules agglomérations de recensement (AR) se trouvant dans les territoires. En 2017, le taux de criminalité de ces deux AR s’établissait à 22 702 affaires pour 100 000 habitants. En comparaison, le taux enregistré pour l’ensemble des milieux ruraux des territoires était près de deux fois plus élevé, soit 40 464 affaires pour 100 000 habitants.
Ces données ne reflètent toutefois pas exactement la situation du Nunavut. Dans ce territoire, on ne trouve aucune collectivité qui répond aux critères d’une AR, mais on observe certaines différences entre les plus grandes collectivités et les plus petites. Par exemple, la capitale (Iqaluit) compte quelques milliers d’habitants, puis on y trouve des institutions du gouvernement ainsi que plusieurs services (hôpital, écoles, cour, etc.); elle est donc la collectivité du Nunavut qui se rapproche le plus d’un centre urbain.
Or, Iqaluit est la collectivité du Nunavut ayant affiché le plus haut taux de criminalité en 2017. Elle a enregistré un taux de 60 564 affaires pour 100 000 habitants, comparativement à 28 097 affaires pour 100 000 habitants dans le reste du Nunavut. De même, Rankin Inlet — la deuxième collectivité en importance au chapitre du nombre d’habitants — a également affiché un taux de criminalité relativement élevé (36 220 affaires pour 100 000 habitants).
Ces différences sont toutefois en grande partie attribuables aux taux élevés de méfaits et d’affaires liées au fait de troubler la paix. À elles seules, ces deux infractions représentaient près des trois quarts des crimes déclarés par la police à Iqaluit en 2017, et 60 % de ceux déclarés par la police à Rankin Inlet. Dans leur étude sur la criminalité dans l’Inuit Nunangat, Charron et autres (2010) ont observé des taux de criminalité plus élevés dans les collectivités ayant moins de restrictions sur l’alcool. Iqaluit et Rankin Inlet font d’ailleurs partie des rares collectivités du Nunavut à compter la présence de bars sur leur territoire, ce qui pourrait être en partie lié aux taux plus élevés de méfaits et d’affaires liées au fait de troubler la paix, soit des crimes pouvant parfois être associés au désordre public.
Outre ce facteur, certaines études ont démontré que la transformation rapide et forcée du style de vie traditionnel vers un style de vie plus occidental aurait pu mener à des pertes de repères et entraîner des changements dans les rôles sociaux et les normes sociales. Par conséquent, ces changements pourraient avoir des répercussions sur la criminalité (Charron et autres, 2010; Mancini Billson, 2006). À certains égards, Iqaluit est possiblement la localité du Nunavut ayant le plus de similarités avec les centres urbains du Sud. Par exemple, on y trouve de plus fortes proportions de non-Autochtones et de diplômés universitaires que dans le reste du territoire.
Fin de l'encadré 3
Les taux de toutes les grandes catégories de crimes sont plus élevés en milieu rural
Les milieux urbains et ruraux diffèrent à de nombreux égards, y compris en ce qui a trait à la nature des crimes qui y surviennent. Ainsi, non seulement la criminalité en milieu rural est-elle plus élevée dans l’ensemble, mais on observe aussi des différences dans le type de crimes qui y est commis. Par exemple, en 2017, le taux de crimes violents en milieu rural était de 55 % supérieur à celui enregistré en milieu urbain (graphique 7), quoique cet écart était moindre en ce qui concerne l’IGC avec violence (77,2 en milieu urbain et 90,2 en milieu rural, soit une différence de 17 %).
Tableau de données du graphique 7
Catégories d'infractions | Services de police urbains | Services de police ruraux |
---|---|---|
taux pour 100 000 habitants | ||
Crimes violents | 990 | 1 532 |
Crimes contre les biens | 3 177 | 3 355 |
Autres infractions au Code criminel | 884 | 1 324 |
Délits de la route prévus au Code criminel | 296 | 543 |
Infractions relatives aux drogues | 233 | 310 |
Infractions aux autres lois fédérales | 49 | 261 |
Note : Voir le tableau 1 pour obtenir la liste détaillée des infractions comprises dans chaque catégorie. Les services de police urbains desservent un territoire dont la majorité de la population vit à l’intérieur d’une région métropolitaine de recensement (RMR) ou d’une agglomération de recensement (AR). Les services de police ruraux desservent un territoire dont la majorité de la population vit à l’extérieur d’une RMR ou d’une AR. Une RMR ou une AR est formée d’une ou de plusieurs municipalités adjacentes situées autour d’un centre de population (aussi appelé « noyau »). Une RMR doit compter au moins 100 000 habitants, dont au moins 50 000 vivent dans le noyau. Quant à l’AR, son noyau doit compter au moins 10 000 habitants. Pour faire partie d’une RMR ou d’une AR, les municipalités adjacentes doivent être fortement intégrées au noyau, le degré d’intégration étant mesuré par le débit de la migration quotidienne calculée à partir des données du recensement. Une RMR ou une AR peut être desservie par plus d’un service de police. Les taux sont calculés pour 100 000 habitants, les chiffres de population étant fondés sur des estimations au 1er juillet fournies par la Division de la démographie de Statistique Canada. Exclut les données du Centre canadien de police pour les enfants disparus et exploités de la Gendarmerie royale du Canada. Source : Statistique Canada, Centre canadien de la statistique juridique, Programme de déclaration uniforme de la criminalité. |
Le taux des autres infractions au Code criminel — lesquelles comprennent entre autres les infractions contre l’administration de la justice, le fait de troubler la paix ou les infractions sans violence relatives aux armes — était également 50 % plus élevé en milieu rural qu’en milieu urbain.
Les différences les plus marquées avaient toutefois trait aux délits de la route prévus au Code criminel et aux infractions aux lois fédérales. Le taux de délits de la route en milieu rural était près du double de celui enregistré en milieu urbain, tandis que le taux d’infractions aux lois fédérales était plus de cinq fois supérieur à celui en milieu urbainNote .
Tant en milieu rural qu’en milieu urbain, les crimes contre les biens représentaient la principale catégorie de crimes, englobant 56 % des infractions en milieu urbain et 46 % en milieu rural. Cette catégorie de crimes affichait aussi le plus faible écart entre les taux des régions urbaines et rurales. Plus précisément, le taux de l’ensemble des crimes contre les biens en milieu rural (3 355 affaires pour 100 000 habitants) était supérieur de 6 % à celui enregistré par les services de police urbains (3 177 affaires pour 100 000 habitants).
Par ailleurs, la baisse du taux de criminalité en milieu rural par rapport à 2009 a été observée dans presque toutes les grandes catégories de crimes, dont les crimes violents (-11 %), les crimes contre les biens (-17 %), les délits de la route prévus au Code criminel (-20 %), les autres infractions au Code criminel (-8 %) et les infractions relatives aux drogues (-17 %).
Seul le taux d’infractions aux lois fédérales (autres que les infractions relatives aux drogues) a connu une hausse. Celle-ci était attribuable à un nombre exceptionnellement élevé d’infractions à la Loi sur les douanes déclarées en 2017, en raison d’un nombre plus élevé qu’à l’habitude de migrants qui traversent la frontière canado-américaineNote . De plus, malgré le recul du taux de crimes violents, l’IGC avec violence a au contraire augmenté. Ce dernier est passé de 82,7 en 2009 à 90,2 en 2017. Autrement dit, le volume de crimes violents a diminué, mais leur gravité moyenne a augmenté.
Bien que les taux de presque toutes les catégories de crimes aient reculé en milieu rural, les baisses étaient généralement plus prononcées en milieu urbain. Plus particulièrement, le taux de crimes violents en milieu urbain a diminué de 18 % et le taux de crimes contre les biens a reculé de 22 %. Seules les baisses du taux d’infractions relatives aux drogues (-14 %) et des autres infractions au Code criminel (-0,3 %) ont été plus modestes en milieu urbain qu’en milieu rural.
Crimes violents
Dans l’ensemble, le taux de crimes violents déclarés par la police était plus élevé en milieu rural qu’en milieu urbain. Derrière ce portrait global se cachent toutefois d’importantes différences : certains crimes violents sont nettement plus susceptibles de survenir en milieu rural, alors que d’autres sont beaucoup plus courants en milieu urbain.
Les voies de fait sont deux fois plus fréquentes en milieu rural qu’en milieu urbain
Tant en milieu urbain qu’en milieu rural, les voies de fait — plus particulièrement les voies de fait simples (niveau 1) — représentaient les crimes violents les plus souvent déclarés par la police (graphique 8). Cependant, les taux de voies de fait en 2017 étaient environ deux fois plus élevés en milieu rural qu’en milieu urbain, et ce, tant pour les voies de fait de niveau 1, 2 ou 3 que pour les voies de fait contre un agent de la paix (tableau 1).
Tableau de données du graphique 8
Type d’infraction | Services de police urbains | Services de police ruraux |
---|---|---|
taux pour 100 000 habitants | ||
Voies de fait simples (niveau 1) | 383 | 690 |
Menaces | 150 | 250 |
Voies de fait armées ou causant des lésions corporelles (niveau 2) | 126 | 205 |
Agression sexuelle (niveau 1) | 62 | 80 |
Vol qualifié | 71 | 18 |
Note : Les services de police urbains desservent un territoire dont la majorité de la population vit à l’intérieur d’une région métropolitaine de recensement (RMR) ou d’une agglomération de recensement (AR). Les services de police ruraux desservent un territoire dont la majorité de la population vit à l’extérieur d’une RMR ou d’une AR. Une RMR ou une AR est formée d’une ou de plusieurs municipalités adjacentes situées autour d’un centre de population (aussi appelé « noyau »). Une RMR doit compter au moins 100 000 habitants, dont au moins 50 000 vivent dans le noyau. Quant à l’AR, son noyau doit compter au moins 10 000 habitants. Pour faire partie d’une RMR ou d’une AR, les municipalités adjacentes doivent être fortement intégrées au noyau, le degré d’intégration étant mesuré par le débit de la migration quotidienne calculé à partir des données du recensement. Une RMR ou une AR peut être desservie par plus d’un service de police. Les taux sont calculés pour 100 000 habitants, les chiffres de population étant fondés sur des estimations au 1er juillet fournies par la Division de la démographie de Statistique Canada. Exclut les données du Centre canadien de police pour les enfants disparus et exploités de la Gendarmerie royale du Canada. Source : Statistique Canada, Centre canadien de la statistique juridique, Programme de déclaration uniforme de la criminalité. |
En outre, les taux de voies de fait ont affiché une plus faible baisse en milieu rural qu’en milieu urbain. Depuis 2009, le taux de voies de fait simples a diminué de 13 % en milieu rural, et de 19 % en milieu urbain. Les taux de voies de fait des niveaux 2 et 3 (voies de fait majeures) en milieu rural ont quant à eux augmenté de 3 % et 8 %, respectivement, alors qu’ils ont diminué de 14 % et 16 % en milieu urbain.
Parmi les provinces, les taux de voies de fait les plus élevés ont été enregistrés dans les milieux ruraux du Manitoba et de la Saskatchewan, alors que les plus faibles taux ont été observés dans les provinces maritimes, plus particulièrement à l’Île-du-Prince-Édouard, ainsi qu’en Ontario (tableau 5). La plus importante différence a été observée au chapitre des voies de fait graves (niveau 3), où le taux le plus élevé, enregistré au Manitoba, était de 17 foisNote supérieur au taux le plus faible, soit celui noté au Nouveau-Brunswick.
Après les voies de fait, les menaces constituaient le deuxième crime violent le plus souvent déclaré par la police, tant en milieu urbain qu’en milieu rural. Comme dans le cas des voies de fait, les taux de menaces étaient nettement plus élevés en milieu rural qu’en milieu urbain. En 2017, la police a déclaré 250 affaires de menaces pour 100 000 habitants en milieu rural, comparativement à 150 en milieu urbain.
Le taux d’agressions sexuelles augmente en milieu urbain, mais demeure stable en milieu rural
En 2017, une attention particulière a été portée aux enjeux entourant les agressions sexuelles. Plus particulièrement, les campagnes comme #MoiAussi et #EtMaintenant ont eu une grande visibilité sur les médias sociaux et traditionnels en plus de sensibiliser davantage la population à la fréquence des agressions sexuelles. Des enquêtes journalistiques ont également mis en lumière la façon dont la police classe les agressions sexuelles comme fondées ou non fondées, incitant ainsi plusieurs services de police à examiner de nouveau certains dossiers et à renouveler leur engagement à l’égard des victimes (Doolittle, 2017; Association canadienne des chefs de police, 2017; Centre canadien de la statistique juridique, 2018).
Ces événements ont vraisemblablement contribué à l’augmentation du taux d’agressions sexuelles déclarées par la police de 2016 à 2017 à l’échelle nationale (+13 %) (Allen, 2018). Or, cette augmentation s’est surtout reflétée en milieu urbain, où le taux d’agressions sexuelles déclarées par la police est passé de 54 agressions sexuelles pour 100 000 habitants en 2016 à 63 agressions sexuelles pour 100 000 habitants en 2017. En milieu rural, le taux d’agressions sexuelles en 2017 était légèrement plus élevé qu’en milieu urbain, soit 82 agressions sexuelles pour 100 000 habitants. Ce taux était presque identique à celui enregistré en 2016, mais inférieur de 4 % à celui observé en 2009 (tableau 1)Note .
Une récente étude a montré que le nombre d’agressions sexuelles déclarées par la police a augmenté de manière significative à partir du mois d’octobre 2017, soit au moment où a commencé le mouvement #MoiAussi (Rotenberg et Cotter, 2018). Il semble toutefois que le mouvement #MoiAussi ait eu un effet moins marqué en milieu rural, ce qui pourrait en partie expliquer le fait que la hausse du taux d’agressions sexuelles déclarées par la police ait été essentiellement observée en milieu urbain. En milieu urbain, le taux d’agressions sexuelles enregistré pendant les mois d’octobre, de novembre et de décembre 2017 était de 39 % supérieur à celui observé au cours de la même période un an plus tôt. En milieu rural, la hausse était deux fois moins élevée, soit de 21 %.
Parmi les provinces, les taux d’agressions sexuelles déclarées par les services de police en milieu rural en 2017 les plus élevés ont été enregistrés au Manitoba (119 affaires pour 100 000 habitants) et en Saskatchewan (111 affaires pour 100 000 habitants). En revanche, les services de police à l’Île-du-Prince-Édouard (47 affaires pour 100 000 habitants) et au Nouveau-Brunswick (54 affaires pour 100 000 habitants) ont enregistré les taux d’agressions sexuelles les plus faibles en milieu rural (tableau 5).
Début de l'encadré 4
Encadré 4
Un plus grand nombre d’affaires jugées non fondées en milieu rural
Les données sur les crimes déclarés par la police comprennent les affaires pour lesquelles la police a établi le bien-fondé, c’est-à-dire qu’elle a déterminé qu’une infraction au Code criminel avait bel et bien eu lieu. Or, parmi tous les crimes signalés à la police, un certain nombre d’entre eux sont jugés non fondés, ce qui signifie que la police a conclu après son enquête qu’aucune infraction à la loi n’avait été commise et qu’il n’y avait pas eu tentative de commettre une infraction. Diverses raisons peuvent amener la police à juger une affaire comme non fondée (voir la publication de Statistique Canada [2016b] pour obtenir de plus amples renseignements à ce sujet). En 2017, les affaires non fondées, et plus particulièrement la proportion d’affaires d’agression sexuelle jugées non fondées, ont fait l’objet d’une vaste couverture médiatique (Doolittle, 2017). À la suite du regain de l’intérêt pour les affaires jugées non fondées, plusieurs services de police ont entrepris de revoir ces dossiers. La communauté policière, de concert avec le Centre canadien de la statistique juridique, a également entrepris de revoir les façons d’analyser les données sur les affaires criminelles non fondées afin de permettre la diffusion régulière de ces donnéesNote .
Bien que les nouvelles normes ne soient pas encore complètement mises en application, Statistique Canada a néanmoins repris la diffusion des données sur les affaires non fondées. En juillet 2018, une étude révélait que plus de 1 crime violent sur 10 (12 %) en 2017 avait été jugé non fondé. La proportion d’affaires d’agression sexuelle jugées non fondées a atteint 14 %, bien que le harcèlement criminel, les communications indécentes ou harcelantes, de même que les menaces, étaient les crimes les plus susceptibles d’être jugés non fondés (Greenland et Cotter, 2018).
La proportion de crimes non fondés est plus élevée en milieu rural qu’en milieu urbain. En 2017, 1 crime violent signalé en milieu rural sur 5 (20 %) a été jugé non fondé, soit une proportion environ deux fois plus élevée qu’en milieu urbain (9 %). Le résultat était semblable à celui enregistré pour les agressions sexuelles, dont 20 % ont été jugées non fondées en milieu rural, comparativement à 12 % en milieu urbain. Dans les deux cas, les proportions étaient néanmoins plus faibles que l’année précédente (23 % et 17 %, respectivement).
Fin de l'encadré 4
Le vol qualifié, un crime urbain
Le vol qualifié est l’un des crimes violents les plus souvent déclarés par la police. Parmi les crimes les plus courants, il s’agit de celui dont la gravité est la plus élevée. Le poids du vol qualifié dans le calcul de l’Indice de gravité de la criminalité (IGC), attribué en fonction des peines prononcées par les tribunaux, est près de 18 fois supérieur à celui attribué aux voies de fait simples.
Bien qu’ils soient courants à l’échelle du pays, ces crimes sont toutefois relativement rares en milieu rural. Le taux de vols qualifiés (71 pour 100 000 habitants) enregistré en 2017 fait de cette infraction le quatrième crime violent le plus courant commis en milieu urbain. Celui-ci se classe au neuvième rang en milieu rural, où le taux est quatre fois moins élevé (18 vols qualifiés pour 100 000 habitants) (tableau 1). En milieu rural, les agressions sexuelles, le harcèlement criminel, les communications indécentes ou harcelantes et les infractions sexuelles contre les enfants, notamment, sont toutes des infractions plus souvent déclarées par la police que le vol qualifié.
Les auteurs présumés de vols qualifiés ciblent généralement des personnes inconnues, ce qui était le cas des trois quarts des vols qualifiés pour lesquels un auteur présumé a été identifié en 2017. Les vols qualifiés sont le plus souvent commis dans la rue, dans un autre lieu public ou dans un immeuble commercial. Or, comme il y a généralement moins d’étrangers dans les régions rurales, les crimes impliquant un étranger y sont beaucoup moins fréquents que dans les régions urbaines. De plus, les crimes en milieu rural sont le plus souvent commis dans un logement privé plutôt que dans un lieu public ou commercial. Ces caractéristiques pourraient expliquer en partie la plus faible fréquence des vols qualifiés en milieu rural.
En plus des vols qualifiés, les infractions relatives à la marchandisation des activités sexuelles et celles relatives à la traite des personnes sont également plus courantes en milieu urbain qu’en milieu rural. Celles-ci ont été déclarées cinq fois plus souvent par les services de police urbains que par les services de police ruraux. L’extorsion est aussi un peu plus susceptible de survenir en milieu urbain, où le taux enregistré en 2017 était environ 39 %Note plus élevé que celui en milieu rural.
Les infractions relatives aux armes à feu sont surreprésentées en milieu rural
Outre les voies de fait, les menaces et les agressions sexuelles, plusieurs autres crimes violents, bien que moins fréquents, affichaient des taux plus élevés en milieu rural qu’en milieu urbain. Plus particulièrement, le taux d’infractions avec violence relatives aux armes à feu en milieu rural, comme le fait de décharger une arme à feu ou de braquer une arme à feu, était plus de deux fois supérieur à celui en milieu urbain en 2017 (13 affaires pour 100 000 habitants par rapport à 6 affaires pour 100 000 habitants) (tableau 1). De plus, ces infractions ont connu une hausse importante en milieu rural; le taux a augmenté de 60 % de 2009 à 2017. En milieu urbain, on a aussi observé une hausse importante durant cette période, mais de moindre envergure (+38 %).
Parmi les crimes violents, cette catégorie affiche les plus grands écarts entre les provinces. Le taux des régions rurales en 2017 a atteint un maximum de 10 affaires pour 100 000 habitants dans toutes les provinces, sauf dans les Prairies. Dans les Prairies, le taux a atteint au moins 25 affaires pour 100 000 habitants dans chacune des provinces (tableau 5).
Dans certaines provinces, le taux d’infractions avec violence relatives aux armes à feu était cependant plus élevé en milieu urbain qu’en milieu rural. C’était notamment le cas en Ontario (7 affaires pour 100 000 habitants en milieu urbain par rapport à 3 affaires pour 100 000 habitants en milieu rural), à l’Île-du-Prince-Édouard (6 affaires pour 100 000 habitants par rapport à 2 affaires pour 100 000 habitants) et à Terre-Neuve-et-Labrador (9 affaires pour 100 000 habitants par rapport à 6 affaires pour 100 000 habitants).
Il est important de noter que cette catégorie de crimes ne représente qu’une petite proportion des crimes où une arme à feu était impliquée, soit les affaires où il s’agissait de l’infraction la plus grave. Par exemple, plusieurs affaires classées comme un vol qualifié ou des voies de fait peuvent avoir impliqué une arme. En 2017, la police a déclaré un total de 40 crimes violents commis à l’aide d’une arme à feu pour 100 000 habitants en milieu rural, comparativement à 31 en milieu urbain.
On observe un plus grand nombre d’infractions sexuelles contre les enfants en milieu rural qu’en milieu urbain
Les infractions sexuelles contre les enfants — par exemple l’exploitation sexuelle, les contacts sexuels, l’incitation à des contacts ou le leurre d’enfants — constituent un autre groupe de crimes pour lequel le taux enregistré en milieu rural en 2017 était nettement plus élevé que celui noté en milieu urbain. En 2017, le taux enregistré en milieu rural pour l’ensemble de ces infractions était plus du double de celui observé en milieu urbain (37 affaires pour 100 000 habitants par rapport à 18 affaires pour 100 000 habitants) (tableau 1). Cet écart est surtout attribuable au nombre relativement élevé de contacts sexuels (28 affaires pour 100 000 habitants) survenus en milieu rural, comparativement à celui déclaré par la police en milieu urbain (12 affaires pour 100 000 habitants).
Par ailleurs, bien qu’on observe quelques variations du taux d’infractions sexuelles contre les enfants en milieu rural d’une province à l’autre, le taux enregistré dans les régions rurales de chaque province demeurait supérieur à celui de l’ensemble des régions urbaines (18 affaires pour 100 000 habitants). En 2017, le plus faible taux en milieu rural a été observé à l’Île-du-Prince-Édouard (21 affaires pour 100 000 habitants) et le plus élevé a été enregistré en Saskatchewan (58 affaires pour 100 000 habitants) (tableau 5).
Le taux d’homicides est plus élevé en milieu rural, mais on dénombre davantage de tentatives de meurtre en milieu urbain
L’homicide est un crime relativement rare au Canada. Il s’agit toutefois du crime le plus grave pour lequel les sanctions les plus sévères sont prévues et, de ce fait, du crime ayant le poids le plus important dans le calcul de l’IGC. Comparativement à la plupart des autres crimes, les homicides sont presque systématiquement portés à l’attention de la police et mesurés uniformément. Ainsi, les données sur les homicides représentent une mesure efficace pour comparer la criminalité entre les différentes régions, bien qu’elles ne dressent qu’un portrait partiel.
De 2009 à 2017, les services de police ruraux ont déclaré un total de 1 078 homicides, ce qui correspond à un taux annuel moyen de 2,02 homicides pour 100 000 habitants. Durant cette période, environ quatre fois plus d’homicides ont été commis en milieu urbain, soit 4 068. En prenant en compte la taille de la population, cela correspond à un taux de 1,55 homicide pour 100 000 habitants, soit un taux de 26 % inférieur à celui enregistré en milieu rural (2,02 pour 100 000 habitants)Note . Le taux d’homicides en milieu rural était particulièrement élevé dans le Nord provincial, où le taux moyen de 2009 à 2017 s’est établi à 5,34 homicides pour 100 000 habitants. Bien que ce taux soit élevé comparativement à celui en milieu urbain, il s’agit d’un taux comparable à celui enregistré aux États-Unis, soit 5,4 homicides pour 100 000 habitants (FBI, 2018). En revanche, le taux d’homicides en milieu rural dans le Sud provincial est légèrement inférieur à celui en milieu urbain; il s’est établi en moyenne à 1,41 homicide pour 100 000 habitants de 2009 à 2017, comparativement à 1,52 en milieu urbain (graphique 9).
Tableau de données du graphique 9
Année | Services de police urbains — Sud | Services de police urbains — Nord | Services de police ruraux — Sud | Services de police ruraux — Nord |
---|---|---|---|---|
taux pour 100 000 habitants | ||||
2009 | 1,6 | 2,9 | 1,6 | 6,9 |
2010 | 1,5 | 2,5 | 1,5 | 4,6 |
2011 | 1,7 | 1,9 | 1,8 | 3,8 |
2012 | 1,5 | 2,2 | 1,4 | 4,5 |
2013 | 1,4 | 1,2 | 1,1 | 5,7 |
2014 | 1,3 | 2,5 | 1,2 | 4,7 |
2015 | 1,5 | 2,5 | 1,5 | 6,4 |
2016 | 1,6 | 2,3 | 1,3 | 4,3 |
2017 | 1,6 | 2,3 | 1,4 | 7,1 |
Note : Le Nord provincial englobe les régions septentrionales de la Colombie-Britannique, de l’Alberta, de la Saskatchewan, du Manitoba, de l’Ontario, du Québec et de Terre-Neuve-et-Labrador. Les services de police urbains desservent un territoire dont la majorité de la population vit à l’intérieur d’une région métropolitaine de recensement (RMR) ou d’une agglomération de recensement (AR). Les services de police ruraux desservent un territoire dont la majorité de la population vit à l’extérieur d’une RMR ou d’une AR. Une RMR ou une AR est formée d’une ou de plusieurs municipalités adjacentes situées autour d’un centre de population (aussi appelé « noyau »). Une RMR doit compter au moins 100 000 habitants, dont au moins 50 000 vivent dans le noyau. Quant à l’AR, son noyau doit compter au moins 10 000 habitants. Pour faire partie d’une RMR ou d’une AR, les municipalités adjacentes doivent être fortement intégrées au noyau, le degré d’intégration étant mesuré par le débit de la migration quotidienne calculé à partir des données du recensement. Une RMR ou une AR peut être desservie par plus d’un service de police. Les taux sont calculés pour 100 000 habitants, les chiffres de population étant fondés sur des estimations au 1er juillet fournies par la Division de la démographie de Statistique Canada. Exclut les données du Centre canadien de police pour les enfants disparus et exploités de la Gendarmerie royale du Canada. Source : Statistique Canada, Centre canadien de la statistique juridique, Enquête sur les homicides. |
Bien qu’un nombre proportionnellement plus élevé d’homicides aient été commis en milieu rural qu’en milieu urbain, le nombre de tentatives de meurtre était moins élevé. De 2009 à 2017, on a enregistré un taux de 1,7 tentative de meurtre pour 100 000 habitants en milieu rural, comparativement à 2,1 en milieu urbain.
Lorsque l’on tient compte des homicides et des tentatives de meurtre, on observe que les taux en milieu urbain et en milieu rural sont très similaires. Autrement dit, il est possible que les victimes de tentative de meurtre en milieu rural soient plus susceptibles de succomber à leurs blessures, notamment lorsque l’accès aux soins d’urgence est plus limité ou, de façon générale, parce que les circonstances entourant ces infractions en milieu rural seraient plus fatales.
Crimes contre les biens
Tant en milieu rural qu’en milieu urbain, les crimes contre les biens représentaient la principale catégorie d’infractions. Cette catégorie de crimes a d’ailleurs été au centre de récentes discussions sur la criminalité en milieu rural et constitue un élément important des stratégies des autorités visant à lutter contre la criminalité en milieu rural (Seiden, 2017). Comparativement aux autres types de crimes, les taux de crimes contre les biens étaient toutefois, dans l’ensemble, relativement similaires entre les milieux urbains et ruraux. Dans l’ensemble, en 2017, le taux de crimes contre les biens déclarés par la police en milieu rural était supérieur de 6 % à celui régions urbaines. À l’instar des crimes violents, il existe d’importantes différences quant à la nature de la criminalité contre les biens entre les milieux urbains et ruraux.
Le méfait est le crime le plus courant en milieu rural
Le méfait est, de loin, le crime le plus souvent déclaré par la police en milieu rural. En 2017, un peu plus de 75 000 méfaits ont été déclarés par les services de police ruraux. En comparaison, on a enregistré cette année-là 50 000 vols d’une valeur de 5 000 $ ou moins, soit le deuxième crime le plus courant en milieu rural. Le méfait est également un crime souvent commis en milieu urbain. En 2017, les 173 000 méfaits déclarés par la police en faisaient la deuxième infraction en importance. Toutes proportions gardées, les méfaits étaient au moins deux fois plus fréquents en milieu rural qu’en milieu urbain, les taux étant de 1 248 méfaits pour 100 000 habitants, comparativement à 566 méfaits pour 100 000 habitants (graphique 10).
Tableau de données du graphique 10
Type d’infraction | Services de police urbains | Services de police ruraux |
---|---|---|
taux pour 100 000 habitants | ||
Vol de 5 000 $ ou moins | 1 482 | 827 |
MéfaitTableau de Note 1 | 566 | 1 248 |
Introduction par effraction | 412 | 533 |
Fraude | 315 | 271 |
Vol de véhicules à moteur | 226 | 259 |
Source : Statistique Canada, Centre canadien de la statistique juridique, Programme de déclaration uniforme de la criminalité. |
Bien que les méfaits puissent être des infractions graves, certains reflètent des actes de plus faible gravité pouvant parfois être traités au moyen de règlements municipaux plutôt qu’en vertu du Code criminel, surtout en milieu urbain où de tels règlements sont en vigueur. Pour cette raison, il se pourrait que l’étendue des méfaits puisse être légèrement sous-estimée en milieu urbain. D’ailleurs, les auteurs présumés de méfaits en milieu urbain étaient plus susceptibles de voir des accusations être portées contre eux que leurs homologues en milieu rural (39 % des auteurs présumés en milieu urbain par rapport à 11 % de ceux en milieu rural). Ainsi, il est probable que plusieurs cas parmi les moins graves survenus en milieu urbain, soit les moins susceptibles de mener à des accusations, aient plutôt été traités par d’autres moyens et ne figurent donc pas dans les statistiques.
Par ailleurs, une grande variation des taux de méfaits a été observée entre les différentes régions rurales au pays. Plus précisément, le taux le plus élevé, enregistré en Saskatchewan, était 12 fois supérieur à celui noté au Québec (3 894 méfaits pour 100 000 habitants par rapport à 326 méfaits pour 100 000 habitants) (tableau 5). Dans l’ensemble, les taux les plus élevés ont été enregistrés dans les provinces des Prairies ainsi qu’à Terre-Neuve-et-Labrador. Cependant, il est possible que les différences dans les pratiques d’application de la loi, comme le recours ou non à des règlements municipaux, expliquent en partie cet écart. Par exemple, seulement 8 % des auteurs présumés de méfaits des régions rurales de la Saskatchewan ont été inculpés, comparativement à 43 % au Québec.
Le nombre d’introductions par effraction et de vols de véhicules à moteur est le plus élevé dans les régions rurales de l’Alberta
Les introductions par effraction et les vols, en particulier les vols de véhicules à moteur, sont devenus une importante source de préoccupation dans les régions rurales (Seiden, 2017). Par conséquent, ces infractions figurent au cœur des discussions sur la criminalité en milieu rural. En général, les taux d’introductions par effraction étaient 29 % plus élevés dans les régions rurales que dans les régions urbaines en 2017 (533 affaires pour 100 000 habitants par rapport à 412 affaires pour 100 000 habitants). De même, les taux de vols de véhicules à moteur étaient 15 % plus élevés en milieu rural, soit 259 affaires pour 100 000 habitants, comparativement à 226 affaires pour 100 000 habitants en milieu urbain (tableau 1).
Comme pour la plupart des crimes contre les biens, les taux d’introductions par effraction et de vols de véhicules à moteur étaient plus élevés dans les provinces des Prairies, en particulier en Alberta. En 2017, la police a déclaré 978 introductions par effraction pour 100 000 habitants dans les régions rurales de l’Alberta. Il s’agit d’un taux quatre fois plus élevé que dans les régions rurales de l’Île-du-Prince-Édouard, la province où le taux d’introductions par effraction en milieu rural est le plus faible, et 48 % plus élevé que dans les régions urbaines de l’Alberta. De même, la police a déclaré 747 vols de véhicules à moteur pour 100 000 habitants dans les régions rurales de l’Alberta, un taux 12 fois plus élevé que celui enregistré dans les régions rurales de l’Île-du-Prince-Édouard et 38 % plus élevé que dans les régions urbaines de l’Alberta.
Le vol de 5 000 $ ou moins est plus fréquent en milieu urbain, tandis que le vol de plus de 5 000 $ est plus courant en milieu rural
Contrairement au milieu rural, où le crime le plus courant est le méfait, le crime le plus souvent commis en milieu urbain est le vol de 5 000 $ ou moins. En 2017, les services de police urbains ont déclaré plus de 450 000 vols de ce type, ce qui représentait près de la moitié des crimes contre les biens en milieu urbain. Cela représente un taux de 1 482 vols de 5 000 $ ou moins pour 100 000 habitants. En comparaison, ce taux était près de deux fois moins élevé en milieu rural, soit 827 affaires pour 100 000 habitants. En revanche, le taux de vols de plus de 5 000 $ était légèrement plus élevé dans les régions rurales (50 affaires pour 100 000 habitants par rapport à 46 affaires pour 100 000 habitants). Le vol à l’étalage et le vol dans des véhicules à moteur étaient beaucoup plus fréquents en milieu urbain qu’en milieu rural. Comme ces types de vols sont souvent de valeur relativement faible, ils ont surtout contribué au taux de vols de 5 000 $ ou moins.
Bien que les vols étaient, dans l’ensemble, plus fréquents en milieu urbain, le taux de possession de biens volés était près de deux fois plus élevé en milieu rural qu’en milieu urbain. Cette différence pourrait s’expliquer par les taux plus élevés de vols de plus de 5 000 $ et d’introductions par effraction en milieu rural.
Autres infractions au Code criminel
La catégorie des autres infractions au Code criminel comprend l’ensemble des infractions prévues au Code criminel qui ne sont ni des crimes violents ni des crimes contre les biens. On compte parmi ces infractions des crimes gravesNote , comme les infractions liées au terrorismeNote , le trafic d’armes et la pornographie juvénile, de même que des crimes moins graves comme le fait de troubler la paix et le défaut de comparaître. Bien que les délits de la route (tels que la conduite avec facultés affaiblies) ne soient pas compris dans le calcul du taux de criminalité traditionnel ni dans la catégorie standard des « autres infractions au Code criminel », ils constituent néanmoins des infractions prévues au Code criminel et sont également analysés dans cettte section. À l’instar de ce qui a été observé pour les crimes violents, les taux pour l’ensemble de ces crimes sont nettement supérieurs en milieu rural. On observe toutefois d’importantes différences et variations selon les crimes et les provinces.
Un plus grand nombre d’infractions contre l’administration de la justice sont commises en milieu rural
La catégorie des infractions contre l’administration de la justice englobe un ensemble d’infractions criminelles liées au respect des procédures et des conditions imposées à un accusé par le système de justice. On y trouve, entre autres, des infractions telles que le défaut de comparaître, l’évasion, le fait de se trouver illégalement en liberté, le défaut de se conformer à une ordonnance du tribunal ou le manquement aux conditions de la probation. Dans l’ensemble, le taux pour ces infractions était, en 2017, légèrement plus élevé en milieu rural qu’en milieu urbain (682 affaires pour 100 000 habitants par rapport à 565 affaires pour 100 000 habitants) (graphique 11).
Tableau de données du graphique 11
Type d’infraction | Services de police urbains | Services de police ruraux |
---|---|---|
taux pour 100 000 habitants | ||
Infractions contre l’administration de la justice | 565 | 682 |
Fait de troubler la paix | 193 | 469 |
Conduite avec facultés affaiblies | 147 | 367 |
Défaut de s’arrêter ou de demeurer sur les lieux | 105 | 85 |
Infractions relatives aux armes | 41 | 52 |
Note : Les services de police urbains desservent un territoire dont la majorité de la population vit à l’intérieur d’une région métropolitaine de recensement (RMR) ou d’une agglomération de recensement (AR). Les services de police ruraux desservent un territoire dont la majorité de la population vit à l’extérieur d’une RMR ou d’une AR. Une RMR ou une AR est formée d’une ou de plusieurs municipalités adjacentes situées autour d’un centre de population (aussi appelé « noyau »). Une RMR doit compter au moins 100 000 habitants, dont au moins 50 000 vivent dans le noyau. Quant à l’AR, son noyau doit compter au moins 10 000 habitants. Pour faire partie d’une RMR ou d’une AR, les municipalités adjacentes doivent être fortement intégrées au noyau, le degré d’intégration étant mesuré par le débit de la migration quotidienne calculé à partir des données du recensement. Une RMR ou une AR peut être desservie par plus d’un service de police. Les taux sont calculés pour 100 000 habitants, les chiffres de population étant fondés sur des estimations au 1er juillet fournies par la Division de la démographie de Statistique Canada. Exclut les données du Centre canadien de police pour les enfants disparus et exploités de la Gendarmerie royale du Canada. Source : Statistique Canada, Centre canadien de la statistique juridique, Programme de déclaration uniforme de la criminalité. |
Plusieurs études ont révélé que les personnes vivant en milieu rural, surtout celles vivant en région isolée et éloignée des grands centres, faisaient face à des défis supplémentaires à l’égard de certaines de ces infractions, notamment en raison de l’accès plus difficile ou limité aux différents éléments du système de justice (Sénat du Canada, 2016; Aylwin et Moore, 2015; Nuffield, 2003). Plus précisément, les distances et l’accès plus limité aux divers moyens de transport peuvent rendre plus difficile la comparution en cour d’un accusé vivant en région éloignée, ce qui augmente la probabilité d’être accusé de défaut de comparaître. Les données policières reflètent cependant mal cette réalité; le taux d’affaires liées au défaut de comparaître en milieu urbain était légèrement plus élevé qu’en milieu rural (92 affaires pour 100 000 habitants par rapport à 74 affaires pour 100 000 habitants). Or, le lieu de cette infraction est souvent établi en fonction du lieu où se trouve la cour, et non de celui où habite l’accusé. Comme la majorité des institutions judiciaires se trouvent en milieu urbain, c’est également souvent à cet endroit que sont consignées ces infractions.
Néanmoins, on note que les taux d’affaires liées au défaut de comparaître sont nettement plus élevés dans le Nord provincial, tant en milieu urbain (163 affaires pour 100 000 habitants dans le Nord par rapport à 89 dans le Sud) qu’en milieu rural (187 affaires pour 100 000 habitants dans le Nord par rapport à 53 dans le Sud). Il est probable que les institutions dans le Nord soient davantage appelées à desservir des personnes habitant dans des collectivités éloignées et isolées que les institutions dans le Sud.
Comme c’est le cas des affaires liées au défaut de comparaître, les crimes d’évasion et les crimes liés au fait de se trouver illégalement en liberté sont aussi influencés par l’emplacement des institutions judiciaires, notamment les pénitenciers, les prisons et les maisons de transition, qui se trouvent souvent en milieu urbain. Pour ces deux infractions, le taux enregistré en milieu urbain était plus du double de celui en milieu rural.
En revanche, ce sont les infractions liées au défaut de se conformer à une ordonnance et au manquement aux conditions de la probation qui expliquent qu’un taux plus élevé d’infractions contre l’administration de la justice a été enregistré en milieu rural, comparativement à celui en milieu urbain. Ces infractions représentent plus des trois quarts des infractions contre l’administration de la justice, et les taux de ces deux infractions sont plus élevés en milieu rural. L’écart était surtout marqué pour les affaires liées au défaut de se conformer à une ordonnance, pour lesquelles le taux était, en 2017, de 424 affaires pour 100 000 habitants en milieu rural, comparativement à 301 affaires pour 100 000 habitants en milieu urbain. À l’instar de ce qui a été noté pour les affaires liées au défaut de comparaître, il peut parfois être plus difficile de respecter certaines conditions en milieu rural, surtout dans les petites collectivités isolées, par exemple l’interdiction de voyager à l’extérieur d’un certain rayon ou périmètre (Comités du Sénat du Canada, 2016) ou encore les ordonnances de restriction, de protection ou de non-communication.
La proportion d’infractions liées au fait de troubler la paix est plus de deux fois supérieure en milieu rural
Dans l’ensemble, le fait de troubler la paix est la deuxième infraction la plus courante de la catégorie des autres infractions au Code criminel, se classant juste après le défaut de se conformer à une ordonnance. En milieu rural, il s’agit cependant de l’infraction la plus fréquente parmi les autres infractions au Code criminel. En 2017, la police a déclaré un peu plus de 28 000 affaires liées au fait de troubler la paix en milieu rural, ce qui représente un taux de 469 affaires pour 100 000 habitants. Ce taux est plus du double de celui enregistré en milieu urbain cette année-là (193 affaires pour 100 000 habitants). En revanche, le taux a davantage diminué en milieu rural, soit une baisse de 30 % depuis 2009, comparativement à un recul de 23 % en milieu urbain (tableau 1).
Le fait de troubler la paix est une infraction qui est, la plupart du temps, relativement mineureNote . Ainsi, il est possible que, comme les méfaits, cette infraction soit parfois traitée au moyen de règlements municipaux, particulièrement en milieu urbain et, par conséquent, qu’elle ne figure pas dans les présentes statistiques déclarées par la police. D’ailleurs, le fait de troubler la paix est l’un des crimes pour lesquels les plus fortes variations ont été observées d’une province à l’autre. Plus particulièrement, le taux enregistré dans les régions rurales du Manitoba en 2017 (1 535 affaires pour 100 000 habitants) était 53 fois plus élevé que celui observé dans les régions rurales du Québec (29 affaires pour 100 000 habitants) (tableau 5).
Enfin, comme pour le méfait, un grand nombre d’auteurs présumés ne voient aucune accusation être déposée ou recommandée contre eux. En 2017, 96 % des auteurs présumés d’une infraction liée au fait de troubler la paix n’ont pas été inculpés. Cette proportion était à peu près la même en milieu urbain et en milieu rural.
Le taux d’infractions sans violence relatives aux armes en milieu rural est supérieur à celui en milieu urbain
La catégorie des infractions sans violence relatives aux armes regroupe un ensemble d’infractions, comme l’entreposage non sécuritaire, la possession d’armes contraire à une ordonnance, l’exportation ou l’importation non autorisée d’armes ou encore le trafic d’armes. Tout comme les infractions avec violence relatives aux armes à feu, le taux de ces infractions était plus élevé en milieu rural (52 affaires pour 100 000 habitants) qu’en milieu urbain (41 affaires pour 100 000 habitants), bien que la différence était moins importante que dans le cas des infractions avec violence (tableau 1).
Cependant, l’écart entre les taux des milieux urbains et ruraux observé à l’échelle du pays est surtout attribuable aux taux élevés dans les Prairies, tant en milieu rural qu’en milieu urbain. Comme les Prairies comptent une part plus importante de la population rurale que de la population urbaine, le taux de l’ensemble du Canada rural est davantage influencé par les Prairies que le taux de l’ensemble du Canada urbain. Ainsi, à l’échelle des provinces, le taux en milieu rural était supérieur à celui en milieu urbain au Nouveau-Brunswick, au Québec, en Ontario et en Alberta seulement.
On observe sept fois plus d’affaires de conduite avec les facultés affaiblies causant la mort en milieu rural qu’en milieu urbain
Les milieux urbains et ruraux offrent des environnements très différents en ce qui a trait aux déplacements. Selon les données de l’Enquête sociale générale de 2014 sur la victimisation, presque tous les ménages possèdent au moins un véhicule à moteur en milieu rural, alors que cette proportion atteint les trois quarts dans les plus grands centres urbains. En milieu rural, la voiture est souvent la seule option pour les déplacements alors qu’en milieu urbain, même les personnes qui possèdent une voiture peuvent compter sur de nombreuses autres options (Perreault, 2016; Paré et Larochelle, 2004).
Ces différences se reflètent dans les taux de conduite avec facultés affaiblies, qui sont généralement deux fois et demie plus élevés en milieu rural qu’en milieu urbain. Cependant, cet écart était légèrement inférieur en ce qui a trait à la conduite avec les facultés affaiblies par la drogue, soit 15 affaires pour 100 000 habitants en milieu rural, comparativement à 8 affaires pour 100 000 habitants en milieu urbain. Il est possible que moins d’experts en reconnaissance des drogues puissent êntre disponibles en milieu rural (Perreault 2016; Asbridge et Ogilvie 2015), ce qui pourrait expliquer en partie l’écart moins important observé pour la conduite avec les facultés affaiblies par la drogue. De plus, depuis 2009, le taux de conduite avec les facultés affaiblies par la drogue a crû plus rapidement en milieu urbain (+151 %) qu’en milieu rural (+70 %) (tableau 1).
La différence entre les taux de conduite avec facultés affaiblies enregistrés en milieu urbain et ceux enregistrés en milieu rural s’accentue lorsque l’on tient compte des infractions les plus graves, soit celles causant des lésions corporelles ou celles causant la mort. En 2017, le taux de conduite avec facultés affaiblies causant des lésions corporelles était trois fois et demie plus élevé en milieu rural qu’en milieu urbain, et le taux de conduite avec facultés affaiblies causant la mort était sept fois plus élevé. Les plus grandes distances parcourues par les automobilistes et les limites de vitesse parfois plus élevées sur les routes rurales pourraient en partie expliquer les écarts importants entre les taux d’affaires de conduite avec facultés affaiblies les plus graves (Perreault, 2016; Paré et Larochelle, 2004).
Parmi les provinces, la Saskatchewan affichait le taux de conduite avec facultés affaiblies en milieu rural le plus élevé (939 affaires pour 100 000 habitants), suivie de l’Alberta (597 affaires pour 100 000 habitants) et du Manitoba (588 affaires pour 100 000 habitants). En comparaison, le taux le plus faible a été enregistré en Ontario (187 affaires pour 100 000 habitants), suivi de Terre-Neuve-et-Labrador (192 affaires pour 100 000 habitants).
Comme c’était le cas pour la conduite avec facultés affaiblies, le taux de conduite dangereuse en milieu rural était, dans l’ensemble, plus du double de celui enregistré en milieu urbain en 2017. En revanche, le taux d’infractions liées au défaut d’arrêter ou de demeurer sur les lieux d’un accident était généralement plus élevé en milieu urbain, sauf pour les cas les plus graves — ceux causant des lésions corporelles ou la mort —, pour lesquels les taux étaient à peu près les mêmes en milieu urbain et en milieu rural.
Infractions aux autres lois fédérales
Drogues : production en milieu rural, importation et exportation en milieu urbain
Parmi les lois fédérales autres que le Code criminel, la Loi réglementant certaines drogues et autres substances (infractions relatives aux drogues) est celle pour laquelle la police déclare le plus grand nombre d’infractions. En 2017, les services de police ont déclaré un peu plus de 71 000 infractions relatives aux drogues en milieu urbain (233 affaires pour 100 000 habitants) et près de 19 000 infractions en milieu rural (310 affaires pour 100 000 habitants) (tableau 1). Le taux plus élevé en milieu rural était principalement attribuable au taux plus élevé de possession de cannabis, soit l’infraction relative aux drogues la plus fréquente (graphique 12). L’écart observé entre les taux des milieux urbains et ruraux au chapitre des infractions relatives aux drogues risque donc de s’amenuiser à la suite de la légalisation du cannabis entrée en vigueur au mois d’octobre 2018Note .
Tableau de données du graphique 12
Type d’infraction | Services de police urbains | Services de police ruraux |
---|---|---|
taux pour 100 000 habitants | ||
Possession de cannabis | 97 | 145 |
Trafic, production ou distribution de cannabis | 22 | 44 |
Possession de méthamphétamine ou d’ecstasy | 26 | 21 |
Possession de cocaïne | 20 | 18 |
Trafic, production ou distribution de cocaïne | 16 | 28 |
Note : Les services de police urbains desservent un territoire dont la majorité de la population vit à l’intérieur d’une région métropolitaine de recensement (RMR) ou d’une agglomération de recensement (AR). Les services de police ruraux desservent un territoire dont la majorité de la population vit à l’extérieur d’une RMR ou d’une AR. Une RMR ou une AR est formée d’une ou de plusieurs municipalités adjacentes situées autour d’un centre de population (aussi appelé « noyau »). Une RMR doit compter au moins 100 000 habitants, dont au moins 50 000 vivent dans le noyau. Quant à l’AR, son noyau doit compter au moins 10 000 habitants. Pour faire partie d’une RMR ou d’une AR, les municipalités adjacentes doivent être fortement intégrées au noyau, le degré d’intégration étant mesuré par le débit de la migration quotidienne calculé à partir des données du recensement. Une RMR ou une AR peut être desservie par plus d’un service de police. Les taux sont calculés pour 100 000 habitants, les chiffres de population étant fondés sur des estimations au 1er juillet fournies par la Division de la démographie de Statistique Canada. Exclut les données du Centre canadien de police pour les enfants disparus et exploités de la Gendarmerie royale du Canada. En 2017, les infractions à la Loi sur les douanes figuraient parmi les infractions aux lois fédérales les plus souvent déclarées par la police. Toutefois, cette situation est propre à l’année 2017 et ne concorde pas avec les tendances habituelles en matière de criminalité. Par conséquent, les infractions à la Loi sur les douanes ne figurent pas dans le présent graphique. Source : Statistique Canada, Centre canadien de la statistique juridique, Programme de déclaration uniforme de la criminalité. |
Bien que le taux d’infractions relatives aux drogues plus élevé en milieu rural soit essentiellement attribuable à la possession de cannabis, les taux d’affaires liées au trafic, à la production ou à la distribution de la plupart des drogues étaient également plus élevés en milieu rural. Cette différence s’explique surtout par le fait que la production de drogues soit plus souvent déclarée par les services de police des régions rurales. Plus précisément, le taux de production de cannabis en 2017 était cinq fois plus élevé en milieu rural (19 affaires pour 100 000 habitants) qu’en milieu urbain (4 affaires pour 100 000 habitants). En général, les taux d’affaires liées au trafic étaient aussi supérieurs en milieu rural. En revanche, le taux de l’ensemble des infractions relatives à l’importation ou à l’exportation de drogues était sept fois plus élevé en milieu urbain (13 affaires pour 100 000 habitants par rapport à 2 affaires pour 100 000 habitants).
En plus des infractions relatives à l’importation ou à l’exportation de drogues, les taux de possession de toutes les drogues autres que le cannabis enregistrés en milieu rural étaient aussi inférieurs à ceux en milieu urbain. La possession d’héroïne est l’infraction ayant affiché la différence de taux la plus importante en 2017, le taux étant inférieur de 77 % en milieu rural. Les taux d’affaires de possession de méthamphétamine ou d’ecstasy (-19 %), de cocaïne (-8 %) et d’autres drogues (-12 %) étaient aussi plus faibles en milieu rural qu’en milieu urbain (tableau 1).
Enfin, il convient de noter que, comparativement à d’autres types d’infractions, les taux d’infractions relatives aux drogues peuvent être influencés par les pratiques policières, notamment par les priorités des différents services de police et par les opérations antidrogues menées par ceux-ci. Ainsi, certaines variations des taux des différentes régions et au fil du temps pourraient être attribuables aux pratiques d’application de la loi.
Le taux d’infractions aux lois fédérales est cinq fois plus élevé en milieu rural qu’en milieu urbain
Dans l’ensemble, le taux d’infractions aux lois fédérales autres que le Code criminel et que la Loi réglementant certaines drogues et autres substances était, en 2017, cinq fois plus élevé en milieu rural qu’en milieu urbain. Cependant, la différence était beaucoup plus faible en ce qui concerne les infractions à la Loi sur le système de justice pénale pour les adolescents, qui est en quelque sorte l’équivalent des infractions contre l’administration de la justice chez les adolescents. Le taux de ces infractions était 13 % plus élevé en milieu rural qu’en milieu urbain.
En 2017, la différence des taux entre les milieux urbains et ruraux était en grande partie attribuable à un nombre particulièrement élevé d’infractions à la Loi sur les douanes. Bien que ce nombre élevé soit exceptionnel — en raison de l’afflux plus important qu’à l’habitude de migrants à la frontière canado-américaine en 2017Note —, les taux d’infractions à plusieurs autres lois fédérales étaient, eux aussi, nettement plus élevés en milieu rural qu’en milieu urbain. Plus particulièrement, le taux d’infractions à la Loi sur les armes à feu était six fois plus élevé en milieu rural qu’en milieu urbain, alors que le taux d’infractions à la Loi sur la marine marchande du Canada et à la Loi sur l’accise était quatre fois plus élevé.
Perceptions de la police dans les régions rurales
Les Canadiens vivant dans les régions rurales affichent des niveaux de confiance semblables à ceux de leurs homologues vivant en milieu urbain à l’égard de la police locale
Le maintien de l’ordre dans un vaste territoire à faible densité démographique peut poser certains défis pour les services de police qui desservent des régions rurales, plus particulièrement pour répondre rapidement aux appels (Weisheit et autres, 1994). Malgré ces difficultés, et malgré des taux de criminalité généralement plus élevés, les données autodéclarées de l’Enquête sociale générale de 2014 sur la victimisation révèlent que les résidents des régions rurales ou des petites villes avaient des niveaux de confiance semblables à ceux des résidents des régions urbaines à l’égard de la police locale. Dans l’ensemble, 45 % des CanadiensNote ont dit avoir une grande confiance en leur service de police local, et une proportion semblable a déclaré avoir une certaine confiance. Ces proportions étaient presque identiques dans les régions rurales et urbaines (tableau 6).
Toutefois, ce n’était pas le cas dans toutes les provinces. En Alberta, les résidents des régions rurales étaient moins susceptibles de déclarer avoir une grande confiance en leur service de police local que leurs homologues vivant en milieu urbain (39 % par rapport à 48 %). La situation était semblable au Nouveau-Brunswick (59 % par rapport à 49 %). En revanche, les résidents des régions rurales de l’Île-du-Prince-Édouard étaient plus susceptibles que leurs homologues vivant en milieu urbain de déclarer avoir une grande confiance en leur service de police local (65 % par rapport à 51 %). En Alberta, les résidents des régions rurales étaient nettement moins susceptibles que leurs homologues vivant en milieu urbain de déclarer que la police locale faisait du bon travail lorsqu’il s’agit de faire respecter la loi (50 % dans les régions rurales par rapport à 61 % dans les régions urbaines) et de répondre rapidement aux appels (47 % par rapport à 56 %). Il convient aussi de souligner qu’en Saskatchewan, alors que les résidents des régions rurales ont déclaré des niveaux de confiance en leur service de police local semblables à ceux de leurs homologues vivant en milieu urbain, ils étaient moins susceptibles de déclarer que la police faisait du bon travail lorsqu’il s’agit de faire respecter la loi (48 % par rapport à 57 %) et de répondre rapidement aux appels (44 % par rapport à 50 %) (tableau 6).
Résumé
Dans l’ensemble, les services de police desservant une population majoritairement rurale ont enregistré en 2017 un taux de criminalité de 23 % supérieur à celui observé par les services de police desservant une population majoritairement urbaine. Cette différence était un peu plus marquée pour les crimes violents et les autres infractions au Code criminel, telles que le fait de troubler la paix ou les infractions contre l’administration de la justice. Bien qu’ils n’entrent pas dans le calcul du taux de criminalité, les taux de délits de la route prévus au Code criminel ainsi que des infractions aux autres lois fédérales étaient également plus élevés en milieu rural qu’en milieu urbain.
Certaines infractions étaient particulièrement surreprésentées en milieu rural en 2017. C’était notamment le cas des voies de fait, des infractions sexuelles commises contre des enfants, des méfaits et du fait de troubler la paix. En revanche, les vols qualifiés et les vols de moins de 5 000 $ étaient plus fréquents en milieu urbain. Le taux d’homicides de 2009 à 2017 était également plus élevé en milieu rural, quoique le taux de tentatives de meurtre était plus élevé en milieu urbain.
La criminalité en milieu rural n’a pas la même envergure partout, et diffère selon l’emplacement géographique. Plus précisément, les taux de criminalité les plus élevés ont surtout été observés dans les provinces des Prairies et, dans une moindre mesure, à Terre-Neuve-et-Labrador. Dans les autres provinces, le taux de criminalité en milieu rural était soit à peu près identique, soit inférieur à celui en milieu urbain. Les taux de criminalité les plus élevés ont aussi été observés dans le Nord provincial. Dans le Sud, les taux observés dans chaque province étaient plus faibles en milieu rural qu’en milieu urbain, sauf en Alberta. En fait, une plus grande proportion de la population rurale habite un territoire où le taux de criminalité est relativement faible, comparativement à la population urbaine. En revanche, on trouve aussi une plus grande proportion de la population rurale habitant un territoire où le taux de criminalité est très élevé. Autrement dit, l’enjeu de la criminalité en milieu rural touche plus particulièrement une petite proportion de la population rurale, surtout dans les Prairies ou le Nord provincial.
Cette analyse a permis de fournir un portrait global et à jour de l’ampleur de la criminalité en milieu rural. Il en ressort que, pour ce qui est de la criminalité, la ruralité au Canada varie grandement quant aux crimes, mais aussi à de nombreux autres égards, notamment sur le plan sociodémographique, économique et géographique. Par exemple, certaines régions peuvent avoir une population vieillissante alors que d’autres, au contraire, ont une population très jeune. Certaines régions rurales connaissent une baisse de la vitalité économique, tandis que d’autres connaissent une croissance très rapide, parfois liée à l’extraction de ressources. Certaines régions rurales se trouvent relativement près de centres urbains et ont plus facilement accès aux services et au marché du travail, alors que d’autres sont éloignées, isolées, voire inaccessibles par la route. Certaines régions rurales ont une vocation essentiellement touristique, alors que d’autres ont davantage une vocation agricole. Enfin, certaines régions rurales comptent plusieurs collectivités où vit une population majoritairement autochtone, dont certaines font face à des enjeux importants en matière de sécurité et de criminalité.
Ainsi, il est possible que l’un ou plusieurs de ces facteurs soient associés à la criminalité en milieu rural, d’une façon ou d’une autre. L’analyse des causes de la criminalité en milieu rural ne faisait pas partie des objectifs de ce rapport, mais de futures études pourraient s’y pencher afin de jeter un éclairage supplémentaire sur la criminalité en milieu rural. Plus particulièrement, le Centre canadien de la statistique juridique prévoit la diffusion prochaine d’une analyse des crimes déclarés par les services de police desservant des populations majoritairement autochtones.
Tableaux de données détaillés
Description de l’enquête
Programme de déclaration uniforme de la criminalité
Le Programme de déclaration uniforme de la criminalité (DUC) a été mis sur pied en 1962 avec la collaboration et l’aide de l’Association canadienne des chefs de police. L’enquête vise les crimes signalés à la police et dont le bien-fondé a été établi au moyen d’une enquête. Les données proviennent de tous les services de police fédéraux, provinciaux et municipaux au Canada et concernent les infractions au Code criminel et aux autres lois fédérales.
Les données agrégées recueillies dans le cadre du Programme DUC représentent pratiquement 100 % de la charge de travail de l’ensemble des services de police au Canada. Une affaire peut comprendre plusiers infractions. Afin d’assurer la comparabilité des données, les chiffres figurant dans le présent article sont fondés sur l’infraction la plus grave dans l’affaire, qui est déterminée d’après une règle de classification normalisée utilisée par tous les services de police.
Les données du Programme DUC servent à calculer le taux de criminalité traditionnel ainsi que l’Indice de gravité de la criminalité. Ces deux mesures sont fondées sur le compte agrégé des affaires criminelles. Une affaire criminelle comprend une ou plusieurs infractions liées qui sont commises au cours d’un seul événement criminel, et qui ont été signalées à la police et corroborées par celle-ci. Lorsqu’un même événement criminel compte plus d’une victime, une affaire agrégée distincte est consignée pour chaque victime. À titre d’exemple, un seul événement dans lequel trois victimes sont agressées au même moment et au même endroit est considéré dans les statistiques agrégées comme trois affaires de voies de fait.
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