Rapports sur la santé
Lien entre la ruralité, les lieux de soins et le lieu de décès des résidents d’établissements de soins de longue durée atteints de démence : étude basée sur la population

par Hanbyoul Park, Christina Milani, Peter Tanuseputro et Colleen Webber

Date de diffusion : le 17 juillet 2024

DOI: https://www.doi.org/10.25318/82-003-x202400700001-fra

Résumé

Contexte

La plupart des personnes préfèrent passer les derniers moments de leur vie ailleurs que dans le milieu hospitalier. La présente étude vise à comparer les lieux de soins au cours des 90 derniers jours de vie des résidents d’établissements de soins de longue durée (SLD) en Ontario et leur lieu de décès, selon la ruralité de ces établissements.

Données et méthodologie

La présente étude de cohorte rétrospective a été menée à l’aide de données administratives sur la santé provenant de l’ICES (anciennement l’Institute for Clinical Evaluative Sciences). La population étudiée, déterminée à l’aide d’algorithmes, comprenait tous les résidents d’établissements de SLD de l’Ontario ayant reçu un diagnostic de démence et étant décédés entre le 1er avril 2014 et le 31 mars 2019. Le lieu de décès a été classé selon les catégories suivantes : dans un hôpital de soins de courte durée, dans un établissement de SLD, dans un établissement pour maladies subaiguës ou dans la collectivité. Les lieux de soins comprenaient les visites au service d’urgence et les hospitalisations ayant eu lieu au cours des 90 derniers jours de vie. Des tests statistiques ont été utilisés pour évaluer les différences au chapitre du lieu de décès et des lieux de soins selon la ruralité.

Résultats

Parmi les 65 375 résidents d’établissements de SLD atteints de démence, 49 432 (75,6 %) sont décédés dans ces établissements. Les résidents d’établissements de SLD situés dans les régions les plus urbaines étaient moins susceptibles de mourir dans ces établissements que leurs homologues vivant dans les établissements situés en région plus rurale (risque relatif corrigé : 0,84; intervalle de confiance à 95 % : 0,83 à 0,85). Une proportion plus élevée de résidents des établissements de SLD les plus urbains ont été hospitalisés au moins une fois au cours des 90 derniers jours de leur vie, comparativement aux résidents des établissements de SLD ruraux (23,7 % par rapport à 9,9 % d’hospitalisations en soins palliatifs et 28,3 % par rapport à 15,9 % d’hospitalisations en soins non palliatifs [p < 0,001]).

Interprétation

Les personnes atteintes de démence résidant dans un établissement de SLD urbain sont plus susceptibles de recevoir des soins à l’hôpital et de mourir hors de l’établissement de SLD que leurs homologues vivant dans un établissement de SLD rural. Les conclusions de ces travaux orienteront les efforts déployés pour améliorer les soins de fin de vie offerts aux personnes âgées atteintes de démence vivant dans un établissement de SLD.

Mots-clés

démence, établissement de soins infirmiers, santé en milieu rural, soins de fin de vie, transition des soins.

Auteur

Hanbyoul Park et Peter Tanuseputro travaillent à la Faculté de médecine de l’Université d’Ottawa. Christina Milani, Peter Tanuseputro et Colleen Webber travaillent à l’Institut de recherche Bruyère, à Ottawa. Peter Tanuseputro et Colleen Webber travaillent également à l’Institut de recherche de l’Hôpital d’Ottawa, à Ottawa.

 

Ce que l’on sait déjà sur le sujet

  • La plupart des personnes préfèrent mourir ailleurs que dans le milieu hospitalier. Pourtant, bon nombre de Canadiens et de Canadiennes meurent hors de chez eux et de la collectivité.
  • Des données probantes laissent croire que les personnes vivant dans les régions rurales se heurtent souvent à des obstacles supplémentaires en fin de vie en raison de l’éloignement, de l’accès limité aux ressources et de la pénurie de personnel. Toutefois, on ne sait pas exactement à quelle fréquence les résidents des régions rurales meurent hors du milieu hospitalier, comparativement à leurs homologues des régions urbaines.

Ce qu’apporte l’étude

  • La présente étude a permis de révéler des différences entre les régions urbaines et rurales en ce qui concerne les soins de fin de vie. Les résidents atteints de démence vivant dans les établissements de soins de longue durée (SLD) situés dans les régions les plus urbaines sont plus susceptibles de mourir hors de leur établissement de SLD, d’être hospitalisés et de se rendre au service d’urgence, comparativement aux résidents d’établissements de SLD situés dans les régions moins urbaines.
  • Le présent travail de recherche permettra de mieux comprendre les différences en matière de soins de fin de vie pour les résidents atteints de démence vivant dans des établissements de SLD situés dans les régions rurales et urbaines de l’Ontario. Les résultats de l’étude contribueront à orienter les stratégies futures en matière de soins de fin de vie dans les établissements de SLD au Canada.

Introduction

Les personnes qui approchent de la mort indiquent une préférence pour les soins et la mort hors de l’hôpitalNote 1. Les raisons de cette préférence sont complexes et multifactorielles. Lorsqu’elles sont hospitalisées vers la fin de leur vie, les personnes peuvent recevoir des soins potentiellement agressifs ou inappropriés qui peuvent causer une douleur inutile et avoir une incidence négative sur leur qualité de vieNote 2. Les préférences des personnes quant au fait de mourir hors du milieu hospitalier peuvent également être liées au soutien de leur famille et de leur réseau social, aux valeurs culturelles et à la mesure dans laquelle il pourrait être possible de satisfaire leurs désirs et ceux de leurs aidants dans différents milieux de soinsNote 3. Malgré ces préférences, bon nombre de Canadiens et de Canadiennes meurent encore dans des milieux qui ne sont pas leur domicile ou leur collectivité; en 2020, 54,5 % de la population canadienne décédait à la maison ou dans un milieu communautaireNote 4. Les Canadiens et Canadiennes vivant en région rurale doivent composer avec de nombreux obstacles en matière de soins de santé qui peuvent avoir une incidence sur leurs soins de fin de vie, comme la qualité des soins reçus et l’endroit où ils meurent. Ces obstacles comprennent l’obligation de parcourir de longues distances pour accéder aux services de soins de santé en raison de la plus faible densité d’hôpitaux, de la disponibilité locale limitée de médecins et de l’accès réduit au soutien en matière de soins à domicile dans les régions ruralesNote 5, Note 6. Les soins palliatifs, une approche en matière de soins répondant aux besoins de personnes atteintes d’une maladie grave et limitant l’espérance de vie, y compris les personnes en fin de vie, sont également plus difficiles d’accès dans les régions ruralesNote 7, Note 8, Note 9. Probablement en raison de ces obstacles, les personnes en région rurale courent un risque accru d’hospitalisation au cours des derniers mois et des dernières semaines de leur vie, et sont plus susceptibles de mourir à l’hôpital que les personnes en région urbaineNote 9, Note 10, Note 11. On en sait moins sur les différences entre les régions urbaines et rurales en matière de soins de fin de vie chez les résidents d’établissements de soins de longue durée (SLD) [c.-à-d. les établissements de soins infirmiers]. Les établissements de SLD offrent des soins infirmiers, médicaux et personnels 24 heures sur 24 aux personnes dont les besoins en matière de soins ne peuvent habituellement pas être satisfaits dans la collectivité. Étant donné que la durée de survie médiane est de 18 mois après l’admission dans un établissement de SLD, il est essentiel de planifier les besoins en soins de fin de vie de ces résidentsNote 12. En région rurale, les défis associés aux soins de fin de vie des résidents d’établissements de SLD peuvent différer de ceux vécus par les personnes ne résidant pas dans de tels établissementsNote 13. Même si l’accès aux soins de santé peut être plus limité dans les régions rurales, le niveau de soins et de soutien fournis dans les établissements de SLD peut permettre aux résidents de rester dans ces établissements jusqu’à la fin de leur vieNote 14. On a également constaté que les établissements de SLD ruraux retenaient davantage les médecins, ce qui assure une plus grande continuité des soinsNote 15. Ces caractéristiques des établissements de SLD ruraux peuvent aider à améliorer la qualité des soins de fin de vie fournis aux résidents.

La présente étude a permis d’examiner les différences au chapitre de l’utilisation des soins de courte durée en fin de vie et le lieu de décès des résidents atteints de démence vivant dans les établissements de SLD ruraux, par rapport à ceux vivant dans les établissements de SLD urbains, en Ontario, au Canada. L’étude porte sur les résidents d’établissements de SLD atteints de démence pour deux raisons. Premièrement, la démence est très répandue dans les établissements de SLD; jusqu’aux deux tiers des résidents d’établissements de SLD reçoivent un diagnostic de démenceNote 16. Deuxièmement, les symptômes de démence et la trajectoire de la maladie peuvent constituer des obstacles uniques à la prestation de soins de fin de vie de grande qualité. Par exemple, les défis en matière de communication peuvent rendre difficile l’expression des besoins et des préférences des personnes atteintes de démenceNote 13. De plus, contrairement à d’autres maladies en phase terminale comme le cancer, le décès des suites de la démence peut être plus difficile à anticiper, ce qui fait en sorte qu’il est plus difficile de déterminer le moment où il faut adopter une approche palliativeNote 17.

Données et méthodologie

Plan d’étude et population

Une étude de cohorte rétrospective fondée sur la population a été menée à l’aide de données administratives couplées détenues à l’ICES, contenant des renseignements sur toute la population ontarienne inscrite à l’Assurance-santé de l’Ontario, le régime public et universel d’assurance maladie de la province. L’Assurance-santé de l’Ontario couvre tous les soins médicaux et hospitaliers nécessaires. Les coûts des soins de longue durée sont également payés par le gouvernement provincial, les résidents payant une quote-part en fonction de leur revenu. La population étudiée comprenait toutes les personnes ayant reçu un diagnostic de démence, décédées entre le 1er avril 2014 et le 31 mars 2019 et qui vivaient dans un établissement de SLD en Ontario au moins 90 jours avant leur décès. Un diagnostic de démence a été vérifié à l’aide d’un algorithme validé appliqué aux données administratives sur la santé. Plus précisément, on a déterminé qu’une personne était atteinte de démence si elle répondait à l’un des critères suivants : 1) un ou plusieurs cas d’hospitalisation pour lesquels un diagnostic de démence figurait au dossier de sortie; 2) trois visites chez le médecin ou plus au cours d’une période de deux ans, séparées d’au moins 30 jours entre chaque visite, et un diagnostic de démence figurant au dossier de la visite; 3) une ordonnance délivrée pour un inhibiteur de cholinestérases. La date du diagnostic correspond à la première occurrence de ces critèresNote 18.

Sources des données et variables

Les données administratives sur la santé de l’Ontario détenues à l’ICES ont été utilisées dans la présente étude. L’ICES est un institut de recherche indépendant à but non lucratif dont le statut juridique en vertu de la loi sur la protection des renseignements personnels en matière de santé de l’Ontario lui permet de recueillir et d’analyser des données sur les soins de santé et des données démographiques, sans consentement, aux fins d’évaluation et d’amélioration du système de santé. Le tableau A.1 dresse la liste des bases de données et de leurs descriptions. En bref, les bases de données utilisées dans la présente étude comprenaient le Système d’information sur les soins de longue durée (SISLD), qui contient des renseignements démographiques, cliniques et fonctionnels détaillés sur tous les résidents des établissements de SLD de la province. La Base de données sur les congés des patients (BDCP) de l’Institut canadien d’information sur la santé et le Système national d’information sur les soins ambulatoires (SNISA) contiennent, respectivement, des dossiers sur les hospitalisations en soins de courte durée et sur les visites au service d’urgence. De plus amples renseignements sur le lieu de décès ont été obtenus à partir du Système national d’information sur la réadaptation (SNIR), du SISLD, de la Base de données sur les chirurgies d’un jour (SDS), du Système d’information ontarien sur la santé mentale (SIOSM) et de la Base de données sur les soins à domicile. Les demandes de règlement d’honoraires des médecins ont été utilisées pour faire état des contacts avec les médecins, et la Base de données sur les personnes inscrites a fourni des renseignements démographiques et des renseignements sur le statut vital de tous les résidents.

La ruralité des établissements de SLD a été définie à l’aide de la définition de Statistique Canada, d’après le Fichier de conversion des codes postauxNote 19. Les codes postaux des établissements de SLD ont été classés comme se rapportant à un milieu urbain s’ils correspondaient à une région métropolitaine de recensement (RMR) ou une agglomération de recensement (AR). Les RMR et les AR comprennent une ou plusieurs municipalités adjacentes situées autour d’un noyau densément peuplé. Les RMR comptent une population totale d’au moins 100 000 habitants, dont au moins 50 000 doivent vivre dans le noyau, tandis que les AR doivent comprendre un noyau d’au moins 10 000 habitantsNote 19. Dans la présente étude, les établissements de SLD en milieu urbain ont été subdivisés en quatre degrés d’urbanisation  selon la taille de la population des RMR ou des AR : milieu urbain 1 (le plus urbain) [population de 1 500 000 habitants ou plus], milieu urbain 2 (population de 500 000 à 1 499 999 habitants), milieu urbain 3 (population de 100 000 à 499 999 habitants) et milieu urbain 4 (le moins urbain) [population de 10 001 à 99 999 habitants]. Les établissements de SLD situés hors des RMR ou des AR ont été classés comme étant en milieu rural.

Le principal résultat était le lieu de décès. Comme résultat secondaire, le lieu de soins au cours des 90 derniers jours de vie, mesuré en fonction du recours à des soins de courte durée (hospitalisations et visites au service d’urgence), a également été examiné. Le lieu de décès a été classé comme ayant eu lieu dans un hôpital de soins de courte durée (comprend les décès à l’hôpital et au service d’urgence comptabilisés dans la BDCP, le SNISA et la Base de données SDS) ou dans un établissement pour maladies subaiguës (comprend les décès dans des établissements de soins continus complexes, des établissements de réadaptation ou des établissements psychiatriques comptabilisés dans le SISLD, le SNIR et le SIOSM). Tous les autres décès sont survenus dans la collectivité. Les hospitalisations ont été classées selon deux catégories : soins palliatifs ou soins non palliatifs, en fonction de la présence d’un code de diagnostic ou d’un fournisseur de services de soins palliatifs dans le dossier du BDCP, ou de la facturation des soins palliatifs par un médecin pour la personne pendant son séjour à l’hôpitalNote 18. La durée du séjour à l’hôpital a été définie selon l’écart entre le jour d’admission et celui de sortie, et elle était d’au moins une journée. On a fait état des visites au service d’urgence au cours des 90 derniers jours de vie à l’aide du SNISA.

D’autres variables de l’étude comprenaient l’âge au moment du décès, le sexe, le quintile de revenu du quartier, le type et le nombre de comorbidités et les ordres de ne pas hospitaliser et de ne pas réanimer. Le quintile de revenu du quartier a été mesuré avant l’entrée des résidents dans un établissement de SLD et en fonction du code postal de leur résidence principale précédente. Les problèmes de comorbidité ont été définis à l’aide d’une série d’algorithmes permettant de déterminer la présence de 17 problèmes de santé à l’aide des données d’hospitalisation, des dossiers de facturation des médecins et des, données sur les demandes de remboursement de médicaments sur ordonnanceNote 20, Note 21, Note 22, Note 23, Note 24, Note 25, Note 26, Note 27, Note 28, Note 29. Les problèmes de santé comprenaient les suivants : infarctus aigu du myocarde, arythmie, asthme, cancer, insuffisance cardiaque congestive, maladie pulmonaire obstructive chronique, maladie coronarienne, diabète, hypertension, maladie intestinale inflammatoire, troubles anxieux et troubles de l’humeur non psychotiques, autres problèmes de santé mentale, arthrose, ostéoporose, maladie rénale, arthrite rhumatoïde et accident vasculaire cérébral. Le nombre de comorbidités a été mesuré en fonction du nombre de ces problèmes de santé chroniquesNote 20, Note 21, Note 22, Note 23, Note 24, Note 25, Note 26, Note 27, Note 28, Note 29. On a fait état de la présence d’un ordre de ne pas hospitaliser ou de ne pas réanimer dans l’évaluation des soins de longue durée des résidents à l’aide de la base de données du SISLD.

Analyse statistique

Des statistiques descriptives, y compris la moyenne et l’écart-type, la médiane et l’écart interquartile, ainsi que des chiffres et des proportions, ont été utilisées pour décrire la population étudiée dans son ensemble et de façon stratifiée selon le degré de ruralité. Le lieu de soins et le lieu de décès ont été décrits dans leur ensemble et en fonction du degré de ruralité. Les différences relatives au lieu de décès (classé selon s’il a eu lieu au sein ou hors d’un établissement de SLD) entre les catégories de ruralité ont été évaluées au moyen d’un test du khi carré et d’un modèle de régression binomiale logarithmique multivariée. Le modèle de régression corrigé comprenait des facteurs confusionnels sélectionnés a priori, y compris l’âge, le sexe, le quintile de revenu et le nombre de problèmes de santé prévalents. Les différences dans les hospitalisations et les visites au service d’urgence entre les groupes de ruralité ont été évaluées à l’aide de tests du khi carré; la différence dans la durée de séjour à l’hôpital entre les groupes de ruralité a été évaluée à l’aide du test Kruskal-Wallis. Une valeur de p inférieure à 0,05 a été utilisée pour déterminer les résultats statistiquement significatifs. Toutes les analyses statistiques ont été effectuées au moyen de la version 9.4 de SAS (SAS Institute Inc., Cary, Caroline du Nord, États-Unis).

Facteurs d’ordre éthique

L’utilisation des données dans le cadre du présent projet a été autorisée en vertu de l’article 45 de la Loi sur la protection des renseignements personnels sur la santé de l’Ontario et ne nécessite pas d’examen par un comité d’éthique de la recherche.

Résultats

Caractéristiques de la population étudiée

Entre le 1er avril 2014 et le 31 mars 2019, 65 558 résidents atteints de démence vivant dans des établissements de SLD sont décédés en Ontario. Parmi ceux-ci, 183 résidaient dans des établissements pour lesquels des données sur la ruralité étaient manquantes ou inconnues et ont été exclus de la présente étude, ce qui laisse un total de 65 375 résidents aux fins d’analyse (tableau 1). Parmi ces 65 375 résidents, 19 754 (30,2 %) vivaient dans les établissements de SLD les plus urbains (milieu urbain 1), 11 847 (18,1 %), dans des établissements de SLD de la catégorie de milieu urbain 2, 16 736 (25,6 %), dans des établissements de SLD de la catégorie de milieu urbain 3, 8 519 (13,0 %), dans les établissements de SLD les moins urbains (catégorie de milieu urbain 4) et 8 519 (13,0 %), dans des établissements de SLD ruraux (tableau 1).


Tableau 1
Caractéristiques des résidents d’établissements de soins de longue durée de l’Ontario atteints de démence, dans l’ensemble et stratifiées selon la ruralité
Sommaire du tableau
Le tableau montre les résultats de Caractéristiques des résidents d’établissements de soins de longue durée de l’Ontario atteints de démence. Les données sont présentées selon Variable (titres de rangée) et Total
N = 65 375, Milieu urbain 1
(population de
1 500 000
habitants ou plus)
N = 19 754, Milieu urbain 2
(population de
500 000 à
1 499 999 habitants)
N = 11 847, Milieu urbain 3
(population de
100 000 à
499 999 habitants)
N = 16 736, Milieu urbain 4
(population de
10 001 à
99 999 habitants)
N = 8 519 et Milieu rural
(population de
10 000 habitants
ou moins)
N = 8 519(figurant comme en-tête de colonne).
Variable Total
N = 65 375
Milieu urbain 1
(population de
1 500 000
habitants ou plus)
N = 19 754
Milieu urbain 2
(population de
500 000 à
1 499 999 habitants)
N = 11 847
Milieu urbain 3
(population de
100 000 à
499 999 habitants)
N = 16 736
Milieu urbain 4
(population de
10 001 à
99 999 habitants)
N = 8 519
Milieu rural
(population de
10 000 habitants
ou moins)
N = 8 519
Sexe
Femmes (%) 65,6 65,6 65,0 66,7 65,8 64,0
Âge au moment du décès
Moyenne 87,8 88,2 87,8
87,64
87,6 87,4
ET 7,3 7,3 7,2 7,3 7,1 7,3
Quintile de revenu du quartier avant l’entrée dans l’établissement de SLD
Revenu manquant (%) 0,7 0,6 0,5 0,9 1,2 0,4
Premier quintile (%) 28,9 32,2 22,5 27,8 30,9 29,8
Deuxième quintile (%) 21,9 23,0 23,4 22,7 16,2 21,6
Troisième quintile (%) 17,8 15,6 21,7 17,4 17,4 18,7
Quatrième quintile (%) 16,7 14,6 15,7 17,0 21,4 17,7
Cinquième quintile (%) 14,0 13,9 16,3 14,2 12,9 11,7
Cancer (%) 54,9 54,0 55,8 56,2 54,3 53,9
Insuffisance cardiaque congestive (%) 27,0 27,9 25,7 26,4 27,5 27,8
Nombre de problèmes de santé prévalents
Aucun (%) 0,8 0,6 1,1 0,8 0,8 1,1
Un (%) 2,6 2,1 3,1 2,5 2,9 3,2
Deux (%) 6,3 5,0 7,2 6,6 6,9 7,0
Trois (%) 11,4 9,5 12,5 12,2 12,2 12,2
Quatre (%) 15,6 14,1 16,3 16,2 16,7 16,8
Cinq (%) 17,3 17,2 17,6 17,1 17,1 17,5
Six ou plus (%) 45,9 51,6 42,2 44,7 43,8 42,2
Directives anticipées :
réanimation (ne pas réanimer) [%]
10,2 14,2 8,4 8,6 8,8 8,2
Directives anticipées :
hospitalisation (ne pas hospitaliser) [%]
5,2 17,2 4,8 4,4 3,3 3,4

L’âge moyen de la population était de 87,8 ans (écart-type [ET] de 7,3), et il allait de 87,4 ans (ET de 7,3) dans les établissements de SLD ruraux à 88,2 ans (ET de 7,3) dans les établissements de SLD les plus urbains (p < 0,001). Environ les deux tiers (65,6 %) des résidents des établissements de SLD étaient de sexe féminin. La répartition selon le sexe différait selon les groupes de ruralité. Les établissements de SLD les plus ruraux affichaient la plus faible proportion de résidents de sexe féminin (64,0 %), tandis que les établissements de SLD de la catégorie de milieu urbain 3 enregistraient la plus forte proportion (66,7 %) [p < 0,001]. Dans l’ensemble, une proportion plus élevée de résidents se trouvaient dans le quintile de revenu au niveau du secteur le plus faible (28,9 %), comparativement à ceux qui se trouvaient dans le quintile de revenu le plus élevé (14,0 %); les niveaux de revenu variaient beaucoup entre les groupes de ruralité (p < 0,001). De plus, 35 909 résidents (54,9 %) avaient des antécédents de cancer, 17 681 (27,0 %) avaient une insuffisance cardiaque congestive et 30 010 (45,9 %) avaient au moins six problèmes de santé comorbides autres que la démence. Une grande différence existait dans la prévalence de ces problèmes de santé entre les catégories de ruralité (p < 0,001). Enfin, les ordres de ne pas hospitaliser et de ne pas réanimer différaient de manière importante entre les catégories de ruralité, les résidents des établissements de SLD les plus urbains ayant le pourcentage le plus élevé d’ordres de ne pas hospitaliser (14,2 %) et de ne pas réanimer (17,2 %), comparativement aux résidents des établissements de SLD ruraux (8,2 % à 8,8 % d’ordres de ne pas hospitaliser et 3,3 % à 4,8 % d’ordres de ne pas réanimer) [p < 0,001].

Lieu de décès

Au sein de cette population, 49 432 résidents (75,6 %) sont décédés dans un établissement de SLD, 14 054 (21,5 %), dans un hôpital de soins de courte durée, 1 450 (2,2 %), dans la collectivité et 439 (0,7 %), dans un établissement pour maladies subaiguës (tableau 2). Les résidents d’un établissement de SLD de la catégorie de milieu urbain 1 affichaient la plus faible proportion de décès dans un établissement de SLD (66,3 %), tandis que les autres groupes de ruralité affichaient une proportion plus élevée de décès dans un établissement de SLD (78,4 % dans la catégorie de milieu urbain 3, 79,5 % dans la catégorie de milieu rural, 80,6 % dans la catégorie de milieu urbain 4 et 80,7 % dans la catégorie de milieu urbain 2) [p < 0,001].


Tableau 2
Lieu de décès des personnes atteintes de démence vivant dans les établissements de soins de longue durée de l’Ontario
Sommaire du tableau
Le tableau montre les résultats de Lieu de décès des personnes atteintes de démence vivant dans les établissements de soins de longue durée de l’Ontario. Les données sont présentées selon Variable (titres de rangée) et Total
N = 65 375, Milieu urbain 1
(population de
1 500 000 habitants ou plus)
N = 19 754, Milieu urbain 2
(population de
500 000 à
1 499 999 habitants)
N = 11 847, Milieu urbain 3
(population de
100 000 à
499 999 habitants)
N = 16 736, Milieu urbain 4
(population de
10 001 à
99 999 habitants)
N = 8 519 et Milieu rural
(population de
10 000 habitants
ou moins)
N = 8 519(figurant comme en-tête de colonne).
Variable Total
N = 65 375
Milieu urbain 1
(population de
1 500 000 habitants ou plus)
N = 19 754
Milieu urbain 2
(population de
500 000 à
1 499 999 habitants)
N = 11 847
Milieu urbain 3
(population de
100 000 à
499 999 habitants)
N = 16 736
Milieu urbain 4
(population de
10 001 à
99 999 habitants)
N = 8 519
Milieu rural
(population de
10 000 habitants
ou moins)
N = 8 519
Lieu de décès
Établissement de soins de longue durée (%) 75,6 66,3 80,7 78,4 80,6 79,5
Hôpital de soins de courte durée 21,5 30,4 17,1 18,6 16,7 17,5
Établissement pour maladies subaiguës (%) 0,7 1,2 0,5 0,5 0,2 0,3
Collectivité (%) 2,2 2,1 1,7 2,4 2,4 2,7

Après correction pour tenir compte des facteurs confusionnels, les résidents des établissements de SLD les plus urbains étaient moins susceptibles de mourir dans un tel établissement que les résidents des établissements de SLD ruraux (risque relatif [RR] : 0,84; intervalle de confiance [IC] à 95 % : 0,83 à 0,85) [tableau 3]. Les différences dans les RR entre les autres groupes urbains et les résidents ruraux n’étaient pas statistiquement significatives (milieu urbain 2 [RR : 1,01; IC à 95 % : 1,00 à 0,02], milieu urbain 3 [RR : 0,99; IC à 95 % : 0,98 à 1,00], milieu urbain 4 [RR : 1,00; IC à 95 % : 0,99 à 1,02]). Les résultats des modèles non corrigés étaient semblables à ceux du modèle corrigé, ce qui laisse croire que les effets de confusion des covariables prises en compte étaient faibles.


Tableau 3
Modèle de régression binomiale logarithmique pour le lieu de décès, modélisation du risque de décès à l’intérieur ou à l’extérieur d’un établissement de soins de longue durée
Sommaire du tableau
Le tableau montre les résultats de Modèle de régression binomiale logarithmique pour le lieu de décès Risque relatif non corrigé, Risque relatif corrigé, Risque
relatif et Intervalle de
confiance à 95 %(figurant comme en-tête de colonne).
Risque relatif non corrigé Risque relatif corrigéTableau 3 Note 1
Risque
relatif
Intervalle de
confiance à 95 %
Risque
relatif
Intervalle de
confiance à 95 %
de à de à
Milieu urbain 1
(population de 1 500 000 habitants ou plus)
par rapport au milieu rural
0,82 0,83 0,85 0,84 0,83 0,85
Milieu urbain 2
(population de 500 000 à 1 499 999 habitants)
par rapport au milieu rural
1,02 1,00 1,03 1,01 1,00 1,02
Milieu urbain 3
(population de 100 000 à 499 999 habitants)
par rapport au milieu rural
0,99 0,97 1,00 0,99 0,98 1,00
Milieu urbain 4
(population de 10 001 à 99 999 habitants)
par rapport au milieu rural
1,01 1,00 1,03 1,00 0,99 1,02

Lieux de soins

Au sein de la population étudiée, 10 669 résidents d’établissements de SLD (16,3 %) ont eu au moins une hospitalisation en soins palliatifs au cours des 90 derniers jours de leur vie (tableau 4). Au fur et à mesure de l’augmentation de la ruralité, la proportion de ces résidents hospitalisés pour recevoir des soins palliatifs au cours de leurs 90 derniers jours de vie diminuait, passant d’un maximum de 23,7 % pour les résidents des établissements de SLD les plus urbains à un minimum de 9,9 % pour les résidents d’établissements de SLD ruraux (p < 0,001). La durée de séjour médiane à l’hôpital pour recevoir des soins palliatifs était de 5 jours (écart interquartile : 2 à 10 jours). Les personnes vivant dans les établissements de SLD les plus urbains affichaient la durée de séjour la plus longue (médiane de 6 jours [écart interquartile : 3 à 12 jours]) par rapport à une médiane de 4 jours (écart interquartile : 2 à 8 jours) pour tous les autres groupes de ruralité (p < 0,001).


Tableau 4
Lieu de soins au cours des 90 derniers jours de vie pour les personnes atteintes de démence vivant dans des établissements de soins de longue durée en Ontario
Sommaire du tableau
Le tableau montre les résultats de Lieu de soins au cours des 90 derniers jours de vie pour les personnes atteintes de démence vivant dans des établissements de soins de longue durée en Ontario. Les données sont présentées selon Variable (titres de rangée) et Total
N = 65 375, Milieu urbain 1
(population de
1 500 000 habitants ou plus)
N = 19 754, Milieu urbain 2
(population de
500 000 à
1 499 999 habitants)
N = 11 847, Milieu urbain 3
(population de
100 000 à
499 999 habitants)
N = 16 736, Milieu urbain 4
(population de
10 001 à
99 999 habitants)
N = 8 519 et Milieu rural
(population de
10 000 habitants
ou moins)
N = 8 519(figurant comme en-tête de colonne).
Variable Total
N = 65 375
Milieu urbain 1
(population de
1 500 000 habitants ou plus)
N = 19 754
Milieu urbain 2
(population de
500 000 à
1 499 999 habitants)
N = 11 847
Milieu urbain 3
(population de
100 000 à
499 999 habitants)
N = 16 736
Milieu urbain 4
(population de
10 001 à
99 999 habitants)
N = 8 519
Milieu rural
(population de
10 000 habitants
ou moins)
N = 8 519
Au moins une hospitalisation en
soins palliatifs au cours des 90 derniers jours de vie
Oui (nombre) 10 669 4 684 1 767 2 449 925 844
Oui (%) 16,3 23,7 14,9 14,6 10,9 9,9
DS totale (jours) des personnes hospitalisées en soins palliatifs au cours des 90 derniers jours de vie
Médiane 5 6 4 4 4 4
Premier quartile 2 3 2 2 2 2
Troisième quartile 10 12 8 8 8 8
Au moins une hospitalisation en soins non palliatifs
au cours des 90 derniers jours de vie
Oui (nombre) 12 795 5 588 1 764 2 713 1 378 1 352
Oui (%) 19,6 28,3 14,9 16,2 16,2 15,9
DS totale (jours) des personnes hospitalisées en
soins non palliatifs au cours des 90 derniers jours de vie
Médiane 5 6 5 5 5 5
Premier quartile 3 3 3 2 2 2
Troisième quartile 10 11 9 8 8 9
Visite au SU au cours des 90 derniers jours de vie
Oui (nombre) 12 155 3 997 1 975 2 946 1 558 1 679
Oui (%) 18,6 20,2 16,7 17,6 18,3 19,7

De même, 12 795 résidents d’établissements de SLD (19,6 %) ont eu au moins une hospitalisation en soins non palliatifs au cours de leurs 90 derniers jours de vie (tableau 4). Les résidents des établissements de SLD les plus urbains affichaient la plus forte proportion à cet égard (28,3 %); les autres groupes présentaient des proportions plus faibles relativement semblables, variant de 14,9 % dans la catégorie de milieu urbain 2 et de 15,9 % dans la catégorie de milieu rural à 16,2 % dans les catégories de milieux urbains 3 et 4 (p < 0,001). La durée de séjour médiane à l’hôpital pour recevoir des soins non palliatifs était de cinq jours (écart interquartile : 3 à 10 jours) [tableau 3]. La plus longue durée de séjour pour recevoir des soins non palliatifs correspondait à la catégorie de milieu urbain 1 (médiane de 6 jours [écart interquartile : 3 à 11 jours]); elle était plus courte dans tous les autres groupes de ruralité (catégorie de milieu urbain 2 : médiane de 5 jours [écart interquartile : 3 à 9 jours]; catégorie de milieu urbain 3 : médiane de 5 jours [écart interquartile : 2 à 8 jours]; catégorie de milieu urbain 4 : médiane de 5 jours [écart interquartile : 2 à 8 jours]; catégorie de milieu rural : médiane de 5 jours [écart interquartile : 2 à 9 jours] [p < 0,001]) [tableau 4].

La proportion de résidents ayant effectué au moins une visite au service d’urgence au cours des 90 derniers jours de leur vie était la plus élevée chez les résidents des établissements de SLD les plus urbains (20,2 %) et plus faible chez ceux de tous les autres établissements de SLD moins urbains (catégorie de milieu urbain 2 : 16,7 %; catégorie de milieu urbain 3 : 17,6 %; catégorie de milieu urbain 4 : 18,3 %; catégorie de milieu rural : 19,7 %) [p < 0,001] [tableau 4].

Discussion

Dans la présente étude fondée sur la population portant sur les résidents d’établissements de SLD atteints de démence, les résidents des établissements les plus urbains étaient moins susceptibles de 16 % de mourir dans leur établissement de SLD, comparativement à ceux vivant dans des établissements ruraux. Le lieu de décès ne différait pas entre les résidents ruraux et les résidents des autres groupes urbains. Les résidents des établissements de SLD les plus urbains étaient également plus susceptibles d’avoir été admis à l’hôpital pour recevoir des soins palliatifs ou non palliatifs au cours des 90 derniers jours de leur vie et d’y avoir séjourné plus longtemps que les résidents des établissements de SLD moins urbains. Par ailleurs, les résidents des établissements de SLD les plus urbains étaient plus enclins à se rendre au service d’urgence que les résidents des établissements de SLD des groupes moins urbains, même si les différences étaient plus faibles que celles observées pour les hospitalisations. Ces résultats indiquent que les résidents des établissements de SLD des régions les plus urbaines de l’Ontario sont plus portés à recevoir des soins à l’hôpital et à mourir hors de leur établissement de SLD, comparativement aux résidents des établissements de SLD ruraux.

Ces conclusions sont contraires à celles d’études antérieures ayant révélé que les personnes résidant dans les régions rurales étaient plus susceptibles de mourir à l’hôpital et affichaient des taux d’hospitalisation plus élevés et des durées de séjour plus longues, comparativement aux personnes vivant dans les régions urbainesNote 9, Note 10, Note 11. Toutefois, ces études n’étaient pas axées précisément sur la population résidant dans des établissements de SLD ni sur les personnes atteintes de démence. Ces résultats laissent croire que deux répercussions sont possibles : les différences observées entre les régions urbaines et rurales en matière de soins de fin de vie peuvent varier entre les personnes vivant dans des établissements de SLD et celles vivant dans la collectivité, et entre les personnes atteintes de démence et celles qui ne le sont pas. Malgré la nécessité d’effectuer d’autres recherches pour bien comprendre ces conclusions, elles peuvent avoir d’importantes répercussions sur la prestation de services. Les efforts visant à réduire l’hospitalisation en fin de vie doivent peut-être être adaptés de façon unique au contexte de soins (c.-à-d. la collectivité ou les établissements de SLD), à la présence de démence et au degré de ruralité.

Ces résultats peuvent s’expliquer par l’observation selon laquelle les régions urbaines comptent une plus forte densité d’hôpitaux de soins de courte durée et de médecins par rapport aux régions ruralesNote 5, Note 6. La proximité géographique des hôpitaux dans de nombreuses régions urbaines peut accroître la probabilité que les résidents des établissements de SLD urbains soient transférés à l’hôpital, car les transferts sont perçus comme potentiellement moins contraignants. En revanche, les fournisseurs peuvent être moins susceptibles d’envoyer à l’hôpital les résidents des établissements de SLD ruraux, car une hospitalisation peut les conduire loin de leur collectivité et de leur réseau de soutien. Ces différences au niveau de l’accès aux hôpitaux pourraient expliquer les taux d’hospitalisation plus élevés et les durées de séjour plus longues observés dans les régions urbaines par rapport aux régions rurales.

La planification et la prestation de soins de fin de vie de grande qualité devraient être un élément clé des soins de longue durée. La pandémie de COVID-19, qui a touché de façon disproportionnée les résidents des établissements de SLD au Canada, a mis en évidence la vulnérabilité de cette population et les lacunes dans la prestation de soins de grande qualité, y compris pour les résidents qui approchent de la mort. La présente étude fournit d’autres données probantes laissant croire qu’il pourrait être nécessaire d’améliorer les soins de fin de vie dans les établissements de SLD. Dans l’ensemble, les décès à l’hôpital et le recours à des soins de courte durée au cours des 90 derniers jours de vie étaient courants chez les résidents d’établissements de SLD atteints de démence, environ 1 personne sur 5 s’étant rendu au service d’urgence, ayant été hospitalisé ou étant mort à l’hôpital. L’un des principaux défis en matière de planification de fin de vie est lié à la fois au pronostic de l’espérance de vie et à la détermination des personnes approchant de la mort. Cela est particulièrement vrai dans le cas des personnes atteintes de démence, pour lesquelles il peut être difficile de prédire l’évolution de la maladieNote 21. L’intégration d’une approche palliative des soins dans tous les aspects de la prestation des soins peut aider à répondre aux besoins des résidents des établissements de SLD et à réduire le recours à des soins de courte durée inutiles, voire potentiellement dangereux.

Points forts et limites

À la connaissance des auteurs, il s’agit de la première étude portant sur le recours aux soins de santé de fin de vie et le lieu de décès des résidents des établissements de SLD de l’Ontario atteints de démence. Dans le cadre de la présente recherche, on a utilisé des bases de données administratives sur la santé se rapportant à tous les résidents des établissements de SLD de l’Ontario, ce qui a réduit au minimum le risque de biais de sélection dans les résultatsNote 30. Les constatations sont probablement généralisables à d’autres provinces du Canada et à des secteurs de compétence ayant une structure et une organisation de SLD semblables. De plus, l’évaluation de multiples niveaux d’urbanisation, plutôt que l’utilisation d’une mesure dichotomique de la ruralité (région urbaine ou rurale), a mené à l’observation suivante : malgré les différences observées entre les résidents des établissements de SLD les plus urbains et ceux des établissements de SLD ruraux en ce qui concerne les lieux de soins et le lieu de décès, les résidents d’établissements de SLD moins urbains (milieu urbain 2, 3 et 4) sont relativement semblables à ceux des établissements de SLD ruraux dans ces résultats.

L’une des limites du présent article est l’utilisation de bases de données secondaires. La nature des données secondaires est que les données n’ont pas été recueillies pour répondre à la question de recherche et, par conséquent, certaines variables n’étaient pas disponibles pour l’analyseNote 31. Par exemple, les données administratives sur la santé excluent les renseignements sur la résidence dans un établissement de soins palliatifs, ce qui fait qu’il est impossible de faire état de la résidence dans un établissement de soins palliatifs en fin de vie. Toutefois, comme l’Ontario ne compte que 300 lits dans les établissements de soins palliatifs, ils sont un lieu de soins peu courant, en particulier pour les résidents d’établissements de SLD ou les personnes atteintes de démenceNote 32. De plus, d’importantes covariables n’étaient pas disponibles dans les données administratives, y compris la religion, l’origine ethnique, la défense des intérêts familiaux, le soutien social et le soutien d’aidants à la fin de la vie. Ces facteurs peuvent avoir une incidence sur les préférences des personnes en matière de soins de fin de vie et de recours aux soins de santé, et ils peuvent différer entre les résidents d’établissements de SLD urbains et ceux d’établissements de SLD ruraux. Par ailleurs, la présente analyse ne fournit pas de renseignements sur les préférences des résidents d’établissements de SLD en matière de soins de fin de vie; certains pourraient avoir souhaité recevoir des soins à l’hôpital et y mourir. Il peut y avoir de la confusion non contrôlée dans les résultats en raison de l’incapacité de mesurer ces caractéristiques et de les corriger. Dans la présente étude, on a également eu recours à une cohorte de personnes décédées, une approche courante dans les études sur les soins de fin de vie. Toutefois, cela comporte des limites, car on suppose une mort prévue. Certains résidents d’établissements de SLD se sont peut-être rendus à l’hôpital sans savoir qu’ils approchaient de la fin de leur vie. Même si le recours aux soins de courte durée et le lieu de décès peuvent être différents pour les résidents d’établissements de SLD clairement reconnus comme proches de la mort, une telle cohorte est difficile à cerner à l’aide de données administratives sur la santéNote 33, Note 34. L’étude était également limitée aux résidents d’établissements de SLD atteints de démence; les résultats peuvent ne pas être généralisables aux résidents d’établissements de SLD qui ne sont pas atteints de démence. Enfin, le résultat secondaire relatif au lieu de soins n’a été analysé qu’à l’aide d’analyses descriptives et bivariées. D’autres recherches sont nécessaires pour étudier ces résultats plus en détail par rapport à la ruralité des établissements de SLD.

En conclusion, la présente étude a révélé des différences entre les régions urbaines et rurales en ce qui concerne les soins de fin de vie. Les résidents atteints de démence vivant dans des établissements de SLD situés dans les régions les plus urbaines sont plus susceptibles de mourir hors de ces établissements, d’être hospitalisés et de se rendre au service d’urgence, comparativement à leurs homologues vivant en région rurale. Ces résultats contribueront à l’amélioration des soins pour les résidents d’établissements de SLD atteints de démence. Ils fournissent des renseignements pouvant orienter les futures stratégies de fin de vie et politiques en matière de santé, en mettant l’accent sur la nécessité d’accroître le soutien pour qu’il y ait des soins de fin de vie adaptés au contexte particulier des établissements de SLD.

Disponibilité des données

L’ensemble de données de la présente étude est conservé en toute sécurité dans un format encodé à l’ICES. Même si les ententes juridiques de partage de données entre l’ICES et les fournisseurs de données (p. ex. les organismes de soins de santé et le gouvernement) interdisent à l’ICES de rendre l’ensemble de données accessible au public, l’accès peut être accordé à ceux qui répondent à des critères prédéterminés d’accès confidentiel, disponibles à l’adresse www.ices.on.ca/DAS (courriel : das@ices.on.ca). Le plan de création et le code analytique sous-jacent de l’ensemble de données au complet sont accessibles auprès des auteurs sur demande, mais il faut bien comprendre que les programmes informatiques pourraient être fondés sur des modèles de codage ou des macros uniques à l’ICES et sont, par conséquent, inaccessibles ou pourraient nécessiter des modifications.

Remerciements

La présente étude a reçu le soutien de l’ICES, qui est financé par une subvention annuelle des ministères de la Santé et des Soins de longue durée de l’Ontario. Certaines parties du matériel sont fondées sur des données et des renseignements compilés et fournis par le ministère de la Santé de l’Ontario et l’Institut canadien d’information sur la santé. Les analyses, les conclusions, les opinions et les déclarations présentées dans le document n’engagent que les auteurs et ne reflètent pas celles des sources de financement et de données; aucune approbation n’est prévue ou ne devrait être sous-entendue. Certaines parties du présent rapport sont fondées sur des renseignements sur les décès provenant du Bureau du registraire général de l’Ontario, dont la source initiale est ServiceOntario. Les points de vue exprimés dans le rapport sont ceux des auteurs et ne reflètent pas nécessairement ceux du Bureau du registraire général de l’Ontario ni du ministère des Services au public et aux entreprises. Le présent document repose sur des données adaptées du Fichier de conversion des codes postaux de Statistique Canada, qui est fondé sur des données obtenues avec l’autorisation de la Société canadienne des postes, et des données adaptées du Fichier de conversion des codes postaux du ministère de la Santé de l’Ontario, qui contient des données copiées avec l’autorisation de la Société canadienne des postes et de Statistique Canada. Les auteurs tiennent à remercier Jahanara Begum de l’ICES d’avoir accédé aux données de l’organisation pour eux.

Financement

La présente étude a été financée par les Instituts de recherche en santé du Canada.

Conflits d’intérêts

Les auteurs déclarent n’avoir aucun conflit d’intérêts par rapport au contenu de l’article.

Contributions des auteurs

Tous les auteurs ont contribué à l’élaboration, à la conception et aux méthodes de l’étude. Tous les auteurs ont interprété les résultats. Hanbyoul Park a rédigé l’article et tous les auteurs ont révisé de façon critique le contenu intellectuel important. Tous les auteurs ont approuvé la version définitive et accepté d’être responsables de tous les aspects de l’article.


Annexe A.1
Description des bases de données de l’ICES
Sommaire du tableau
Le tableau montre les résultats de Description des bases de données de l’ICES. Les données sont présentées selon Secteur des soins de santé (titres de rangée) et Description et utilisation de la base de données(figurant comme en-tête de colonne).
Secteur des soins de santé Description et utilisation de la base de données
Utilisation des soins de santé
Hôpitaux de soins de courte durée Base de données sur les congés des patients (BDCP) de l’Institut canadien d’information sur la santé
Description : Préparée par des analystes formés, la BDCP contient les dossiers des congés de tous les patients hospitalisés pour recevoir des soins de courte durée en Ontario.
Utilisation : Cette source de données a été utilisée pour déterminer les renseignements sur les décès liés à des soins de courte durée et les hospitalisations en soins palliatifs de courte durée au cours des 90 jours précédant le décès. Elle a également été utilisée pour faire état de la présence de maladies chroniques et de comorbidités en fonction des codes de diagnostic figurant aux dossiers; ces variables ont été utilisées comme facteurs confusionnels potentiels dans l’analyse.
Services d’urgence Système national d’information sur les soins ambulatoires (SNISA)
Description : Le SNISA contient des renseignements sur les visites aux services d’urgence. Les données comprennent les caractéristiques démographiques des patients, les dates et les heures de début et de fin des visites, les diagnostics, les procédures et les interventions effectuées pendant les visites, les fournisseurs de services médicaux et l’issue des visites.
Utilisation : Cette source de données a été utilisée pour déterminer les renseignements sur les visites aux services d’urgence au cours des 90 derniers jours de vie avant le décès.
Demandes de règlement des honoraires des médecins Base de données sur l’historique des demandes de règlement à l’Assurance-santé de l’Ontario
Description : La Base de données sur l’historique des demandes de règlement à l’Assurance-santé de l’Ontario contient des données sur les demandes de remboursement pour tous les services fournis par les médecins de l’Ontario, y compris en milieu hospitalier et en consultation externe. Chaque demande de règlement représente un service unique fourni par le médecin, déterminé par le code de frais et un code de diagnostic.
Utilisation : Cette source de données a été utilisée pour déterminer les décès dans la collectivité et les hospitalisations en soins palliatifs à partir des factures des médecins. Les données sur les demandes de règlement des honoraires des médecins ont également été utilisées pour faire état de la présence de maladies chroniques et de comorbidités en fonction des codes de diagnostic figurant aux dossiers; ces variables ont été analysées comme facteurs confusionnels.
Soins de longue durée (SLD) Système d’information sur les soins de longue durée (SISLD)
Description : Le SISLD contient des renseignements sur les résidents de plus de 600 établissements publics de soins de longue durée en Ontario et est mis à jour tous les trois mois. Ses données comprennent des données administratives sur les décès dans les établissements de SLD, les séjours en établissement de SLD (p. ex. les dates d’admission et de sortie) et les caractéristiques démographiques des résidents.
Utilisation : Cette source de données a été utilisée pour mesurer les décès dans les établissements de SLD et déterminer les caractéristiques démographiques de la population étudiée.
Soins continus complexes ou
soins aux malades chroniques
Système d’information sur les soins de longue durée (SISLD)
Description : Le SISLD comprend des renseignements fondés sur la population pour tous les patients occupant un lit pour recevoir des soins continus complexes en Ontario. Ces personnes sont généralement considérées comme n’étant pas dans un état grave, mais ayant tout de même besoin de traitement (p. ex. de réadaptation) dans un établissement institutionnel.
Utilisation : Cette source de données a été utilisée pour mesurer les décès dans les établissements pour maladies subaiguës.
Réadaptation Système national d’information sur la réadaptation (SNIR)
Description : Le SNIR vise à recueillir, à analyser et à fournir rapidement des renseignements exacts sur la réadaptation des patients hospitalisés. Il est compilé par l’Institut canadien d’information sur la santé et contient des données sur les clients, y compris des caractéristiques démographiques, recueillies auprès des établissements et des programmes participants de réadaptation pour adultes hospitalisés.
Utilisation : Cette source de données a été utilisée pour mesurer les décès dans les établissements pour maladies subaiguës.
Soins à domicile Base de données sur les soins à domicile (BDSD)
Description : La BDSD contient des renseignements sur les services (p. ex. les dates de début et de fin des services, le type de service, y compris les soins à domicile en fin de vie, et les fournisseurs) pour tous les soins à domicile financés par la province offerts en Ontario.
Utilisation : Cette source de données a été utilisée pour mesurer les décès dans la collectivité.
Soins ambulatoires Base de données sur les chirurgies d’un jour (SDS)
Description : La Base de données SDS contient des données au niveau des patients pour les établissements de chirurgie d’un jour en Ontario. Chaque dossier correspond à une chirurgie d’un jour ou à un séjour d’un jour lié à une intervention. Chaque ensemble de données contient des cas provenant d’un exercice financier.
Utilisation : Cette source de données a été utilisée pour mesurer les décès dans les établissements de soins de courte durée.
Santé mentale Système d’information ontarien sur la santé mentale (SIOSM)
Description : Le SIOSM contient des données sur tous les patients qui occupent un lit dans les hôpitaux psychiatriques désignés pour adultes hospitalisés, y compris les établissements psychiatriques généraux et provinciaux et les établissements psychiatriques spécialisés. Le SIOSM contient également des renseignements démographiques et cliniques sur toutes les admissions pour des raisons de santé mentale, y compris les dates d’admission et de sortie, les raisons de l’admission et les diagnostics.
Utilisation : Cette source de données a été utilisée pour mesurer les décès dans les établissements pour maladies subaiguës.
Population et caractéristiques démographiques
Caractéristiques démographiques Base de données sur les personnes inscrites (BDPI)
Description : La BDPI est une base de données provenant de l’ICES qui contient des renseignements démographiques sur toutes les personnes ayant déjà détenu une carte Santé de l’Ontario, y compris leur date de naissance, leur date de décès, leur sexe et les dates de début et de fin de leur admissibilité à l’Assurance-santé de l’Ontario.
Utilisation : Cette source de données a été utilisée pour déterminer l’admissibilité de la population étudiée au moyen de dossiers sur la couverture d’assurance maladie provinciale au cours de la dernière année de vie et pour mesurer les caractéristiques des personnes décédées, y compris l’âge au moment du décès, le sexe et le quintile de revenu, utilisées comme facteurs confusionnels.
Recensement Fichier de conversion des codes postaux (FCCP)
Description : La macro du FCCP convertit tous les codes postaux canadiens en régions géographiques normalisées de Statistique Canada. À partir d’un ensemble de données comprenant des codes postaux, cette macro établit des liens avec les fichiers du FCCP pour trouver d’autres identificateurs géographiques du recensement, comme l’aire de diffusion ou le secteur de dénombrement, la division de recensement, la latitude et la longitude, ainsi qu’un indicateur urbain ou rural et un quintile de revenu du quartier.
Utilisation : Cette source de données a été utilisée pour définir les groupes de ruralité.
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