Hospitalisations d'enfants et de jeunes pour blessure non intentionnelle dans les régions ayant un fort pourcentage de résidents d'identité autochtone, 2001-2002 à 2005-2006
Consulter la version la plus récente.
Information archivée dans le Web
L’information dont il est indiqué qu’elle est archivée est fournie à des fins de référence, de recherche ou de tenue de documents. Elle n’est pas assujettie aux normes Web du gouvernement du Canada et elle n’a pas été modifiée ou mise à jour depuis son archivage. Pour obtenir cette information dans un autre format, veuillez communiquer avec nous.
Pour cet article...
Les blessures non intentionnelles constituent la principale cause de décès1 et de morbidité2 chez les enfants au Canada. Outre le fait qu'elles sont associées à une hausse des coûts des soins de santé, à un plus grand nombre d'hospitalisations et à une augmentation du volume des soins dispensés par les médecins3, les blessures subies durant l'enfance ont des conséquences qui peuvent durer toute la vie4. C'est pourquoi les blessures chez les jeunes sont reconnues comme constituant un problème de santé publique. Les taux de blessures signalés chez les enfants autochtones, notamment, sont relativement élevés5-7.
Les études canadiennes consacrées aux blessures chez les populations autochtones ont porté en grande partie sur les adultes8,9. La plupart des études sur les hospitalisations à la suite de blessures ont été limitées en raison de l'absence d'indicateur d'identité autochtone dans les dossiers d'hospitalisation. Certains chercheurs qui se sont penchés sur le problème ont adopté une approche géographique, c'est-à-dire qu'ils ont examiné les hospitalisations dans les régions à fort pourcentage de résidents autochtones10-12. Il ressort de leurs travaux que les taux d'hospitalisation à la suite de blessures sont plus élevés dans le cas des résidents de ces régions.
Même si une approche fondée sur la région géographique comporte certaines limites, la présente analyse porte sur les hospitalisations pour blessure non intentionnelle chez les enfants et les jeunes des collectivités où au moins 33 % des résidents ont déclaré appartenir à un groupe autochtone. Elle a un objectif double : (1) calculer les taux d'hospitalisation pour blessure non intentionnelle selon la cause dans les régions ayant un pourcentage relativement élevé de membres des Premières nations, de Métis ou d'Inuits; (2) comparer ces taux avec ceux observés dans les régions à faible pourcentage de résidents d'identité autochtone.
Méthodes
Les données proviennent de la Base de données sur la morbidité hospitalière (BDMH) pour la période de 2001-2002 à 2005-2006; la base contient les dossiers relatifs à tous les départs de l'hôpital au Canada. Pour chaque départ, on dispose de renseignements sur l'âge et le sexe du patient, le code postal de son lieu de résidence et le diagnostic posé.
La présente analyse se limite aux établissements de soins de courte durée. Les données correspondent au nombre de départs de l'hôpital et non au nombre de personnes, considérant le fait qu'une même personne peut avoir été hospitalisée plus d'une fois. Des diagnostics multiples peuvent figurer dans le dossier de congé de l'hôpital; les dossiers visés contiennent au moins un diagnostic de blessure non intentionnelle.
Les blessures non intentionnelles désignent les blessures involontaires; sont exclues celles dont les effets indésirables sont attribuables aux médicaments ou aux soins médicaux. Elles ont été classées selon leur cause externe d'après la Classification internationale des maladies (CIM). La présente analyse s'appuie sur la version des codes de la CIM qui sont transmis par chaque province et qui sont enregistrés dans la BDMH. Les causes des hospitalisations à la suite de blessures ont été regroupées à la lumière de l'International Collaborative Effort on Injury Statistics13 : chutes, blessures liées au transport terrestre, accidents de la circulation impliquant un véhicule à moteur (sous-catégorie du transport terrestre), blessures causées par un heurt/choc, coupures et perforations, blessures attribuables à une cause naturelle ou environnementale, empoisonnements, blessures par le feu (y compris des substances brûlantes), noyades et suffocations, et autres blessures.
Les codes postaux résidentiels figurant dans les dossiers de départ de l'hôpital ont été couplés aux aires de diffusion (AD) à l'aide du Fichier de conversion des codes postaux14. Les dossiers de congé du Québec contiennent uniquement les trois premiers caractères du code postal (qui en compte six), de sorte qu'ils sont exclus de l'étude.
Les AD dont au moins 33 % des résidents ont déclaré appartenir à un groupe autochtone lors du Recensement de 2001 étaient réputées être des régions à fort pourcentage de population d'identité autochtone10,15. Elles ont été classées selon le groupe autochtone prédominant (Premières nations, Métis ou Inuits). En moyenne, dans les AD où le groupe prédominant était les Premières nations, 76 % de la population s'est identifiée en tant que membre de ce groupe; dans les AD où le groupe des Métis prédominait, 38 % de la population a déclaré une identité métisse et dans celles où les Inuits constituaient le groupe prédominant, 79 % de la population s'est identifiée comme étant Inuit. Les autres AD ont été classées comme étant à faible pourcentage de population d'identité autochtone. Sans compter le Québec, il y avait 1 862 AD dont le groupe d'identité autochtone prédominant était les Premières nations, 135 où c'était les Métis et 69 où c'était les Inuits, tandis qu'il y avait 38 774 AD à faible pourcentage de population d'identité autochtone.
Le dénominateur des taux d'hospitalisation a été établi à partir des recensements de 2001 et de 2006. Il s'agit de la somme des populations interpolées (de 0 à 19 ans) pour chacune des cinq années de données d'hospitalisation (de 2001-2002 à 2005-2006, sans compter le Québec), selon le point médian (octobre) de l'exercice (avril à mars). Pour 2002-2003, le Nunavut n'a pas fourni de données sur les départs de l'hôpital, de sorte que les chiffres de population correspondants pour l'exercice ont été exclus de l'analyse.
En raison de la taille réduite de leur population, du taux global de non-réponse ou du dénombrement incomplet de réserves indiennes, il y a un petit nombre d'AD pour lesquelles on ne disposait pas de données détaillées sur l'âge et le sexe, qu'il aurait fallu pour produire un dénominateur complet. De manière à conserver ces AD dans l'échantillon, l'âge et le sexe ont été estimés à partir des chiffres de population d'ensemble ou de données estimatives ayant trait à la population des réserves indiennes dénombrées de façon incomplète.
Il y avait au total 117 605 cas valides d'hospitalisation pour blessure non intentionnelle aux fins de la présente analyse. Il a fallu exclure 3 320 hospitalisations pour blessure non intentionnelle à cause de codes postaux non valides ou manquants, et 327 autres parce que les données du recensement au niveau de l'AD étaient insuffisantes.
Les taux d'hospitalisation ont été normalisés selon l'âge en fonction de la population d'identité autochtone d'après le Recensement de 2001. Les taux d'hospitalisation normalisés selon l'âge (THNA) par tranche de 10 000 années-personnes à risque et les rapports de taux (RT) pour les régions à fort pourcentage de population d'identité autochtone (Premières nations, Métis, Inuits) ont été calculés comparativement à ceux observés dans les régions à faible pourcentage de population d'identité autochtone. Plus précisément, les THNA et les RT ont été calculés selon le sexe, le groupe d'âge (0 à 9 ans et 10 à 19 ans) et la cause de la blessure. Les intervalles de confiance utilisés étaient fondés sur une distribution de Poisson. Un test t a servi à déterminer si les taux d'hospitalisation pour blessure non intentionnelle dans les régions à fort pourcentage de population d'identité autochtone (Premières nations, Métis et Inuits) présentaient un écart significatif par rapport à ceux observés dans les autres régions (p<0,05). Toutes les analyses statistiques ont été effectuées au moyen de la version 9.1 du logiciel SAS.
Résultats
Taux d'hospitalisation
De 2001-2002 à 2005-2006, les hôpitaux canadiens (en excluant ceux du Québec) ont enregistré 117 605 départs de l'hôpital d'enfants et de jeunes âgés de 0 à 19 ans qui avaient été hospitalisés à la suite d'une blessure non intentionnelle (tableau 1). Les deux tiers des enfants et jeunes en question étaient de sexe masculin et 60 % avaient entre 10 et 19 ans.
Au total, le taux brut d'hospitalisation pour blessure non intentionnelle chez les 0 à 19 ans se chiffrait à 39,4 par tranche de 10 000 années-personnes à risque. Les taux observés étaient nettement plus élevés chez les enfants et jeunes des AD où au moins un tiers de la population avait déclaré appartenir à un groupe autochtone, s'élevant à 86,2 par tranche de 10 000 années-personnes à risque dans les régions à fort pourcentage de membres des Premières nations, à 89,2 dans celles à fort pourcentage de Métis et à 83,3 dans celles à fort pourcentage d'Inuits.
Les profils demeuraient les mêmes une fois les taux normalisés en fonction de l'âge pour rendre compte des différences de répartition selon l'âge dans chaque groupe (tableau 2). Le taux d'hospitalisation normalisé selon l'âge (THNA) chez les personnes âgées de 0 à 19 ans était de 37,1 par tranche de 10 000 années-personnes à risque dans les régions à faible pourcentage de population d'identité autochtone, de 85,9 dans celles à fort pourcentage de membres des Premières nations, de 88,2 dans celles à fort pourcentage de Métis et de 83,0 dans celles à fort pourcentage d'Inuits.
Les rapports de taux (RT) ont été calculés dans le but de comparer les taux d'hospitalisation pour blessure non intentionnelle dans les trois sous-catégories de régions à fort pourcentage de population d'identité autochtone et ceux observés dans les autres régions. Les RT dans les régions à fort pourcentage de population d'identité autochtone allaient de 2,2 à 2,4; en d'autres termes, le THNA dans ces régions était plus de deux fois supérieur à celui observé dans les régions à faible pourcentage de population d'identité autochtone.
Causes de blessure
Dans presque tous les cas, les THNA selon la cause de la blessure non intentionnelle étaient significativement plus élevés chez les enfants et les jeunes des régions à fort pourcentage de population d'identité autochtone (Premières nations, Métis et Inuits) que chez ceux des autres régions.
Les chutes constituaient la principale cause d'hospitalisation pour blessure non intentionnelle chez les enfants et les jeunes, peu importe que l'AD où ils résident soit ou non à fort pourcentage de population d'identité autochtone. Cette catégorie de blessures comprend les chutes de « plain-pied » (par exemple une personne perdant l'équilibre sur de la glace) et les chutes d'un objet (comme un meuble). Dans les régions à fort pourcentage de population d'identité autochtone, les THNA pour blessure attribuable à une chute allaient de 23,1 à 29,0 par tranche de 10 000 années personnes à risque, comparativement à 14,4 dans les autres régions.
Le transport terrestre, qui arrive au deuxième rang parmi les causes de blessures non intentionnelles ayant donné lieu à l'hospitalisation d'enfants et de jeunes, englobe les blessures associées à des véhicules à moteur ou à d'autres véhicules et qui se sont produites sur les routes ou ailleurs. Les THNA rattachés à cette catégorie de blessure étaient supérieurs à 20,0 par tranche de 10 000 années-personnes à risque dans les régions à fort pourcentage de population d'identité autochtone, contre 8,6 dans les autres régions.
En ce qui concerne les blessures non intentionnelles associées à chacune des autres causes, les THNA étaient nettement moins élevés, n'excédant jamais 8,5 par tranche de 10 000 années-personnes à risque dans le cas des enfants et jeunes vivant dans les régions à fort pourcentage de population d'identité autochtone et 4,1 chez ceux des autres régions.
Les rapports de taux (RT) reflètent les THNA plus élevés au regard des blessures non intentionnelles chez les enfants et les jeunes des régions à fort pourcentage de population d'identité autochtone. Bien que les RT d'ensemble liés aux hospitalisations pour blessure non intentionnelle dans les régions à fort pourcentage de population d'identité autochtone aient été légèrement supérieurs à 2,0, ils approchaient ou même dépassaient 3,0 dans le cas de certaines causes de blessure et de régions à fort pourcentage de certains groupes autochtones. C'était notamment le cas des blessures associées au transport terrestre (régions à fort pourcentage de Métis et d'Inuits), des noyades ou suffocations (régions à fort pourcentage de population d'identité autochtone de chacune des sous-catégories), des coupures ou perforations (régions à fort pourcentage de membres des Premières nations et de Métis) et des empoisonnements (régions à fort pourcentage de membres des Premières nations). En outre, les RT relatifs aux hospitalisations en raison d'une blessure attribuable au feu ou à une cause naturelle ou environnementale étaient respectivement de 4,1 et de 3,7 chez les enfants et les jeunes des régions à fort pourcentage de membres des Premières nations, et ils atteignaient près de 6,0 dans le cas des blessures attribuables à une cause naturelle ou environnementale dans les régions à fort pourcentage d'Inuits.
Les taux d'hospitalisation varient selon le groupe d'âge
Les THNA calculés pour l'ensemble des blessures non intentionnelles variaient d'un groupe d'âge à l'autre et étaient généralement plus élevés pour le groupe des jeunes de 10 à 19 ans que chez les enfants de 0 à 9 ans. Par exemple, dans les régions à fort pourcentage de Métis, le THNA associé aux jeunes de 10 à 19 ans était de 100,4 par tranche de 10 000 années-personnes à risque, comparativement à 76,9 dans le cas des enfants de 0 à 9 ans (tableau 3). Dans les régions à faible pourcentage de population d'identité autochtone, les taux correspondants étaient de 42,2 et de 32,2. Il faut dire toutefois que ce profil général cache d'importants écarts entre groupes d'âge selon la cause de la blessure.
Ainsi, dans le cas des blessures non intentionnelles attribuables à une chute, à un empoisonnement, au feu, à une cause naturelle ou environnementale et à la noyade ou à la suffocation, les THNA étaient plus élevés pour les enfants de 0 à 9 ans que pour les jeunes de 10 à 19 ans. C'était l'inverse dans le cas des blessures non intentionnelles attribuables au transport terrestre, aux heurts/chocs ainsi qu'aux coupures ou aux perforations.
Les RT établis pour les 0 à 9 ans étaient particulièrement élevés (environ 3,0) comparativement aux enfants des régions à faible pourcentage de population d'identité autochtone dans le cas des blessures associées au transport terrestre (régions à fort pourcentage de membres des Premières nations et de Métis), des empoisonnements (régions à fort pourcentage de membres des Premières nations), des blessures associées au feu (régions à fort pourcentage de membres des Premières nations), de celles attribuables à une cause naturelle ou environnementale (régions à fort pourcentage de membres des Premières nations et d'Inuits), et des noyades ou suffocations (régions à fort pourcentage de membres des Premières nations et de Métis).
Au sujet des 10 à 19 ans, les RT calculés pour les régions à fort pourcentage de membres des Premières nations étaient de 3,0 ou plus dans le cas des hospitalisations liées à un empoisonnement, à des coupures ou perforations ainsi qu'à des blessures attribuables au feu ou à une cause naturelle ou environnementale. Les RT étaient d'au moins 3,0 dans le cas des hospitalisations pour blessures involontaires associées au transport terrestre dans les régions à fort pourcentage de Métis et d'Inuits. En outre, dans les régions à fort pourcentage d'Inuits, le RT calculé à l'égard des hospitalisations à la suite de blessures non intentionnelles attribuables à une cause naturelle ou environnementale s'élevait à 7,8.
Les rapports de taux sont plus élevés chez les femmes
Peu importe que les régions soient à fort pourcentage de population d'identité autochtone ou non, les THNA pour blessure non intentionnelle étaient généralement plus élevés chez les hommes que chez les femmes (tableau 4). En revanche, les rapports de taux tendaient à être plus élevés chez les femmes, ce qui signifie que l'écart était plus prononcé dans leur cas par rapport aux régions à faible pourcentage de population d'identité autochtone. Ainsi, dans les régions à fort pourcentage de membres des Premières nations, les RT étaient de 2,6 pour les femmes et de 2,2 pour les hommes.
Les rapports de taux pour les femmes dans les régions à fort pourcentage de population d'identité autochtone étaient particulièrement élevés (environ 3,0 ou plus) dans le cas des hospitalisations pour blessure non intentionnelle associée au transport terrestre et à la noyade ou à la suffocation. Il en allait de même dans le cas des hospitalisations pour empoisonnement, coupures ou perforations, et blessures associées au feu dans les régions à fort pourcentage de membres des Premières nations et de Métis, et des hospitalisations pour blessure associée à une cause naturelle ou environnementale dans les régions à fort pourcentage de membres des Premières nations et d'Inuits.
Discussion
La présente étude met en lumière une association entre la région géographique où vivent les enfants et les jeunes et les hospitalisations pour blessure non intentionnelle. Dans les régions où au moins 33 % des résidents ont déclaré appartenir à un groupe autochtone, le taux des hospitalisations d'enfants et de jeunes était à peu près deux fois plus élevé que dans les autres régions. Des études antérieures fondées sur des données provinciales11,12,16 ont abouti à des résultats similaires. Par exemple, il a été indiqué que les taux d'hospitalisation pour blessure chez les enfants des Premières nations dans l'Ouest canadien étaient de 1,2 à 2,9 fois plus élevés que les taux équivalents pour la population en général6. De même, en Alberta, les enfants des Premières nations étaient 1,4 fois plus susceptibles d'être hospitalisés en raison d'une blessure que les enfants non autochtones16.
Selon la présente analyse, les THNA associés à la noyade ou à la suffocation dans les régions à fort pourcentage de population d'identité autochtone étaient approximativement trois fois supérieurs à ceux observés dans les autres régions. Ce résultat concorde avec ceux d'autres recherches indiquant que le risque de blessure par noyade est plus élevé chez les peuples autochtones17. Il demeure cependant que le THNA global lié aux blessures par noyade ou par suffocation était bas comparativement à celui associé à d'autres causes de blessure, comme les chutes et le transport terrestre.
Les taux d'hospitalisation pour blessure non intentionnelle selon la cause différaient selon que le groupe prédominant dans une région était celui des membres des Premières nations, des Métis ou des Inuits. Ainsi, c'est dans les régions à fort pourcentage de résidents d'identité inuite que le THNA associé aux blessures attribuables à une cause naturelle ou environnementale était le plus élevé, ce qui peut tenir aux conditions et activités propres aux régions nordiques18. En ce qui touche les blessures associées au feu, le THNA était près de quatre fois plus élevé dans les régions à fort pourcentage de résidents s'étant identifiés comme membres des Premières nations que dans celles à faible pourcentage de population d'identité autochtone, ce qui concorde avec les observations faites dans le cadre de travaux récents6.
Les RT servant à comparer les hospitalisations pour blessure non intentionnelle entre les régions à fort pourcentage de population d'identité autochtone et les autres régions étaient souvent plus élevés pour les femmes que pour les hommes, ce profil ayant déjà été mis en lumière dans d'autres travaux11. On constate donc que, bien que les hommes soient plus susceptibles d'être hospitalisés que les femmes, c'est pour ces dernières que l'écart entre les régions à fort pourcentage de population d'identité autochtone et les autres était le plus marqué. Notamment, les RT calculés pour les femmes en ce qui touche les hospitalisations attribuables aux empoisonnements et au transport terrestre étaient plus élevés dans les régions à fort pourcentage de membres des Premières nations. Par ailleurs, toujours dans les régions à fort pourcentage de membres des Premières nations, les RT étaient plus élevés pour les enfants que pour les jeunes de 10 à 19 ans, et ce, pour la plupart des causes de blessures non intentionnelles ayant conduit à une hospitalisation.
Points forts et limites
L'un des points forts de la présente étude tient à l'utilisation de données représentatives de la population canadienne sur une période de cinq ans afin d'examiner les taux et les types d'hospitalisations pour blessure non intentionnelle chez les enfants et les jeunes vivant dans des régions à fort et à faible pourcentages d'identité autochtone, de pair avec la répartition des hospitalisations selon la cause de blessure, le groupe d'âge et le sexe.
Cela dit, il convient de souligner certaines limites. D'abord, étant donné l'absence d'indicateurs d'identité autochtone dans la BDMH, c'est au moyen d'une mesure indirecte d'ordre géographique que l'on a subdivisé les AD selon qu'elles étaient à fort ou à faible pourcentage de population d'identité autochtone. Il faut donc parler ici d'étude écologique, les résultats présentés se rapportant à des régions géographiques; les associations observées ne s'appliquent pas forcément au niveau des personnes. Il faut aussi mentionner que l'on ne disposait pas de renseignements sur le lieu géographique où les blessures sont survenues.
Le seuil servant à déterminer si une AD était à fort pourcentage de population d'identité autochtone a été fixé à 33 %10. Dans les régions à fort pourcentage de résidents d'identité inuite, le seuil de 33 % a donné lieu à la sélection d'AD dont 93 % des résidents d'identité autochtone, en moyenne, étaient âgés de moins de 20 ans (tableau A en annexe). Dans les régions à fort pourcentage de résidents s'identifiant en tant que membres des Premières nations et Métis, ce même seuil a mené à la sélection d'AD dont 86 % et 67 %, respectivement, des résidents d'identité autochtone avaient moins de 20 ans19. (Un seuil plus élevé aurait conduit à une perte importante de régions à fort pourcentage de Métis.) Par conséquent, les constatations ne sont pas représentatives des populations s'identifiant en tant que membres des Premières nations, Métis ou Inuit au Canada.
Les régions à fort pourcentage de membres des Premières nations, de Métis et d'Inuits telles que définies dans notre étude présentent des différences au chapitre de l'emplacement urbain ou rural, de la taille de la population et des caractéristiques socioéconomiques, soit autant de facteurs ayant été associés aux taux de blessure19,20. Par exemple, 100 % de la population vivant dans les AD à forte proportion de résidents d'identité inuite se situaient dans des zones à faible influence métropolitaine ou sans influence métropolitaine, comparativement à 8 % pour les AD à faible proportion de résidents d'identité autochtone (tableau A en annexe). De même, 27 % de la population des AD à forte proportion de résidents d'identité inuite vivaient dans des logements surpeuplés, comparativement à 3 % dans les régions à faible proportion de résidents d'identité autochtone. De plus, les dossiers d'hospitalisation ne contenaient pas d'information sur les caractéristiques au niveau des personnes et des familles, comme le revenu, le niveau de scolarité et les comportements individuels pouvant influer sur le risque de blessure.
Des recherches antérieures ont montré que les blessures subies par des membres des Premières nations tendent à être plus graves8,12. Bien que les blessures prises en compte dans la présente analyse aient été suffisamment graves pour entraîner une hospitalisation, le degré de gravité précis de ces blessures n'a pas été évalué. Inutile de préciser que les blessures ayant causé le décès avant l'admission à l'hôpital n'ont pas été prises en compte ici.
Les résultats ne sont pas représentatifs de l'ensemble du pays, la province de Québec ayant dû être exclue de l'étude en raison de renseignements incomplets à propos des codes postaux.
Enfin, certaines causes de blessure chez certains groupes autochtones comportaient un petit nombre d'unités.
Conclusion
Les taux d'hospitalisation pour blessure non intentionnelle chez les enfants et les jeunes des régions à fort pourcentage de population d'identité autochtone étaient plus élevés que dans les autres régions, et ce, pour toutes les causes de blessures prises en compte dans la présente analyse. Si les chutes et le transport terrestre étaient les causes les plus courantes de blessures donnant lieu à une hospitalisation, peu importe la catégorie de région, les écarts observés dans les taux d'hospitalisation entre les régions à fort pourcentage de population d'identité autochtone et les autres régions étaient souvent plus marqués dans le cas des causes moins fréquentes ( p. ex., feu, cause naturelle ou environnementale, noyade et suffocation). L'ampleur de l'écart entre les deux catégories de régions variait selon que la région était à fort pourcentage de membres des Premières nations, de Métis ou d'Inuits.
- Date de modification :