Âge et gains

Par May Luong et Benoît-Paul Hébert

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À mesure que les gens vieillissent et acquièrent de l'expérience de travail, on s'attendrait à ce que leurs gains continuent d'augmenter ou du moins qu'ils demeurent stables jusqu'à la retraite. Cependant, les profils traditionnels des gains en fonction de l'âge portent à croire le contraire (graphique A). En effet, ces profils indiquent une hausse des gains dans les premières années, un sommet autour de l'âge moyen, puis un repli par la suite. Cette courbe en forme de U inversé entre l'âge et les gains, si l'on se fonde sur les gains moyens selon l'âge pour tous les travailleurs à un moment donné, se décèle dans un large éventail de données. Par exemple, les données transversales du recensement révèlent que les gains des hommes travaillant à temps plein toute l'année diminuaient après la mi-quarantaine (Saint-Pierre, 1996). On observe la même tendance en examinant les données transversales de l'Enquête sur la dynamique du travail et du revenu (EDTR).

On utilise souvent le profil des gains en fonction de l'âge pour décrire la croissance des gains au cours d'une vie (Thornton et coll., 1997). Les économistes judiciaires l'utilisent par ailleurs beaucoup pour prévoir les gains futurs lorsqu'ils calculent les pertes de gains découlant de litiges personnels. Le profil des gains en fonction de l'âge aide également à expliquer la difficulté accrue des travailleurs âgés à s'adapter lorsque survient la perte d'un emploi, puisque leurs gains plus élevés traduisent souvent des compétences propres à l'entreprise.

Toutefois, le profil traditionnel des gains en fonction de l'âge présente de nombreux problèmes, notamment l'utilisation et l'interprétation des données transversales, les problèmes de sélection, le biais attribuable aux modifications volontaires des heures de travail, et l'emploi des retraités actifs. Le présent article aborde ces problèmes plus en détail et permet d'estimer un effet de l'âge « pur ». Au moyen du panel de 1999 à 2004 de l'EDTR, l'étude réexamine l'effet de l'âge sur les gains horaires plutôt qu'annuels, de manière à tenir compte des changements quant aux heures travaillées (voir Source des données). En outre, elle s'appuie sur l'analyse multivariée pour déterminer si le vieillissement entraîne en soi une réduction des gains horaires, lorsque les autres facteurs connexes sont pris en compte.

Problèmes liés aux profils habituels des gains en fonction de l'âge

L'un des problèmes associés au profil traditionnel des gains en fonction de l'âge est que l'effet attribué à l'âge peut aussi camoufler l'effet d'autres facteurs reliés à l'âge, mais qui en sont distincts. À l'origine, la fonction des gains du capital humain a été utilisée pour expliquer le repli des gains avec l'âge en réponse à la diminution de la productivité attribuable à la détérioration du capital humain (Mincer, 1974). Toutefois, les conclusions fondées sur les données transversales peuvent confondre les différences entre les personnes à divers stades de leur vie et l'évolution de la situation des personnes au fil du temps. Pour déterminer si les gains des particuliers augmentent ou diminuent au fil du temps, il faut disposer de données longitudinales détaillées de même que de méthodes quantitatives mesurant les variations qui surviennent au cours de la vie d'une personne.

Le deuxième problème a trait à la corrélation entre l'âge et l'expérience de travail; autrement dit, plus la personne est âgée, plus elle a probablement acquis d'années d'expérience de travail. Bien que l'âge soit effectivement un facteur pertinent et aille souvent de pair avec des problèmes de santé qui effritent la réserve de capital humain, l'expérience de travail demeure un facteur dominant en ce qui concerne les gains. Cependant, pour effectuer les premières estimations du profil des gains en fonction de l'âge, il fallait calculer l'expérience de travail en soustrayant le nombre d'années d'études de l'âge, puisque l'expérience de travail n'était pas connue. De plus, les effets de l'âge et de l'expérience de travail sur les gains ont été estimés séparément plutôt que dans le même modèle (Mincer, 1974). En effet, l'âge a souvent été utilisé pour calculer par approximation les années d'expérience de travail, puisque les données administratives longitudinales et celles des enquêtes transversales ne fournissent habituellement pas de renseignements sur l'expérience de travail. Pour estimer l'effet « pur » de l'âge sur les gains, il faut tenir compte de l'expérience de travail. En outre, la majorité des recherches réalisées sur le profil des gains en fonction de l'âge tiennent compte uniquement de la scolarité et du sexe. Cependant, d'autres caractéristiques personnelles et professionnelles peuvent également jouer un rôle.

En troisième lieu, les études ne considèrent souvent pas que certains travailleurs ont peut-être amorcé une transition vers la retraite. Par exemple, les travailleurs âgés peuvent réduire volontairement leurs heures de travail en vue de se diriger graduellement vers la retraite. En fait, de 1999 à 2004, 60 % des travailleurs âgés de 45 à 69 ans qui ont connu une diminution de leurs gains annuels avaient réduit leurs heures de travail. Par ailleurs, 44 % des travailleurs âgés dont les gains annuels ont grimpé avaient augmenté leurs heures de travail3. Les résultats antérieurs concernant le repli des gains annuels chez les travailleurs âgés pourraient donc traduire une diminution des heures de travail. En fait, les gains horaires des particuliers peuvent demeurer stables ou même augmenter au fil du temps, et constituent ainsi une mesure plus exacte des perspectives de gains véritables. Même selon les données transversales, le profil des gains en fonction de l'âge révèle une baisse moins marquée des gains associée au vieillissement lorsqu'on utilise les gains horaires (graphique B).

Un autre problème associé à la transition vers la retraite et son effet sur les gains se rapporte aux pensionnés actifs (qui retournent sur le marché du travail). Grâce à leurs prestations de retraite, ces travailleurs âgés peuvent se permettre de réduire leurs heures de travail ou d'accepter un nouvel emploi moins bien rémunéré que celui qu'ils occupaient avant la retraite. En effet, selon une étude basée sur les données longitudinales et un modèle à effets fixes, la baisse des gains horaires commence seulement après l'âge de 60 ans et est attribuable aux prestations de retraite. Autrement dit, les bénéficiaires de prestations de retraite qui continuaient de travailler enregistraient une réduction de leurs gains en partie en travaillant à temps partiel plutôt qu'à temps plein (Johnson et Neumark, 1996). Pour les travailleurs qui ne touchaient pas de prestations de retraite, les estimations révèlent une associationencore plus ténue entre l'âge et la diminution des gains.

Dans la présente étude, les travailleurs étaient exclus de l'échantillon dès qu'ils commençaient à toucher des prestations de retraite d'un régime de pension d'employeur, du Régime de pensions du Canada (RPC) ou du Régime de rentes du Québec (RRQ). Les prestations de la Sécurité de la vieillesse et du Supplément de revenu garanti ne sont pas prises en compte. Bien qu'un échantillon de travailleurs non retraités réduise vraisemblablement les biais provoqués par les pensionnés actifs, un certain effet de sélection peut bien subsister, puisque le RPC et le RRQ offrent des prestations réduites à compter de 60 ans, des prestations intégrales à l'âge de 65 ans, et des prestations accrues jusqu'à l'âge de 70 ans.

L'effet de sélection renvoie aux entrées et sorties du marché du travail et aux modifications de la composition de la cohorte de travailleurs âgés. En effet, une étude longitudinale (Myck, 2007) a indiqué que la tendance à cesser de travailler plus tôt chez les personnes touchant des gains élevés contribue à arquer le profil âge-gains. Pour tenir compte de ce type d'effet de sélection, le modèle a été estimé pour les adultes plus âgés travaillant à temps plein toute l'année afin de restreindre l'échantillon à une cohorte relativement homogène (graphique C). Les travailleurs à temps plein toute l'année ont en moyenne des gains horaires plus élevés que tous les autres travailleurs, et les gains les plus élevés sont observés chez ceux âgés de 65 à 69 ans4 (en raison du petit nombre d'observations dans ce groupe d'âge, cette moyenne devrait toutefois être utilisée avec prudence). Néanmoins, les données laissent supposer que les gains plus faibles des travailleurs âgés dans les profils âge-gains traditionnels sont probablement attribuables aux travailleurs âgés qui quittent leur emploi et deviennent bénéficiaires de prestations de retraite, tout en continuant de travailler pour un salaire moindre, ce qui, au bout du compte, fait baisser la moyenne chez les travailleurs âgés. Quant aux travailleurs âgés qui continuent de travailler sans interruption, ils maintiendront, en moyenne, des gains élevés selon l'échantillon utilisé.

Une nouvelle approche fondée sur l'analyse multivariée

Pour tenir compte des nombreux facteurs personnels, professionnels et démographiques pouvant influer sur les gains, un modèle à effets aléatoires (Frees, 2004) a été utilisé pour estimer la relation entre l'âge et les gains. Comme l'ont suggéré d'autres études (Robinson, 2003; Murphy et Welch, 1990), le modèle comprenait diverses fonctions afin d'examiner des relations linéaires ou non linéaires entre l'âge et les gains (voir Modèle statistique).

Dans l'ensemble, les coefficients pour l'âge et ses puissances se rapprochaient de zéro (tableau). Les coefficients pour l'âge au carré et l'âge à la puissance quatre étaient statistiquement significatifs comme tels. Toutefois, le test portant sur l'ensemble des coefficients affectant l'âge n'était pas statistiquement significatif, ce qui indique qu'en tenant compte des autres caractéristiques personnelles et professionnelles, l'âge d'un travailleur ne semble pas être lié aux gains à cette étape de sa carrière. Ce constat tranche avec les nombreuses études qui s'appuyaient sur des données transversales pour démontrer le repli des gains chez les travailleurs âgés avant la retraite. Cette différence découle en partie du fait que les travailleurs âgés sont exclus de l'échantillon longitudinal dès qu'ils commencent à toucher une pension, contrairement aux études précédentes5. L'utilisation des données longitudinales constitue également un autre facteur explicatif.

Bien que les résultats laissent croire qu'il n'existe pas de corrélation significative entre l'âge et les gains horaires, ils démontrent que l'expérience de travail, définie comme la somme des années de travail à temps plein pendant au moins six mois, est importante pour expliquer les variations. En effet, les résultats révèlent que, comparativement aux travailleurs qui cumulaient de 30 à 34 ans d'expérience de travail, ceux qui avaient de 0 à 4 ans d'expérience gagnaient presque 15 % de moins, ceux qui avaient de 5 à 14 ans d'expérience, 10 % de moins, et ceux qui avaient de 15 à 24 ans d'expérience, 5 % de moins6. Cependant, contrairement aux recherches précédentes qui indiquaient une baisse des gains chez les personnes les plus expérimentées, la présente étude démontre que les travailleurs qui avaient acquis de 25 à 29 années d'expérience, ou encore 35 ans d'expérience ou plus, n'étaient pas statistiquement différents de ceux qui avaient de 30 à 34 ans d'expérience de travail, ce qui pourrait signifier que les gains horaires se stabilisent après 25 années d'expérience. Dans l'ensemble, les résultats laissent supposer que l'expérience de travail est un meilleur prédicteur des gains horaires que l'âge. Cela est plausible, puisque c'est l'expérience plutôt que l'âge qui affiche un lien plus direct avec les réalisations professionnelles, lesquelles sont habituellement évaluées au moment de déterminer les promotions et les offres d'emploi.

À l'instar des autres recherches, la présente étude révèle que le sexe et la scolarité étaient nettement associés aux gains. Les résultats du modèle à effets aléatoires laissent entendre que les hommes ayant un grade universitaire gagnaient 36 % de plus que ceux détenant un certificat d'études postsecondaires non universitaires. Par ailleurs, les gains horaires des hommes qui avaient terminé leurs études secondaires n'étaient pas, de manière significative, différents de ceux des hommes qui avaient fait des études postsecondaires non universitaires; toutefois, les hommes sans diplôme d'études secondaires gagnaient 11 % de moins l'heure. Il y avait aussi un écart des gains entre les hommes et les femmes. Les femmes de tous les niveaux de scolarité gagnaient moins que leurs homologues masculins. Par exemple, celles qui détenaient un certificat d'études postsecondaires non universitaires gagnaient 15 % de moins que leurs homologues masculins.

La permanence de l'emploi est un autre indicateur de la qualité de l'emploi. Cependant, les résultats démontrent que les travailleurs âgés qui occupent un emploi non permanent (c.-à-d. les employés saisonniers, temporaires, contractuels, occasionnels, ou embauchés pour une durée déterminée ou par l'entremise d'une agence de placement temporaire) n'avaient pas, de manière significative, des gains différents de ceux des travailleurs âgés qui avaient un emploi permanent. S'il est vrai que les emplois permanents sont en principe plus susceptibles d'être syndiqués, ce qui entraîne habituellement un meilleur salaire, le résultat non significatif obtenu dans la présente étude découle probablement de la restriction de l'échantillon aux personnes travaillant à temps plein toute l'année. En fait, seulement environ 4 % des membres de l'échantillon occupaient un poste non permanent.

Les immigrants et les minorités visibles peuvent aussi toucher des gains moindres en raison de niveaux de départ et de taux de croissance différents pour des motifs tels que les barrières linguistiques, l'absence d'un réseau social, la non-reconnaissance des titres de compétences par les employeurs, et la discrimination. Cependant, les gains des immigrants n'étaient pas statistiquement différents de ceux des non-immigrants. Bien que les recherches existantes indiquent un écart des gains entre les nouveaux immigrants et les non-immigrants (Statistique Canada, 2008; Frenette et Morissette, 2003), les résultats de la présente étude pourraient être attribuables au fait que l'échantillon comprenait aussi les immigrants qui étaient arrivés au pays plus tôt et peut-être de pays différents. Toutefois, on a estimé que les gains des minorités visibles étaient presque de 21 % inférieurs à ceux des autres travailleurs7.

À mesure que les personnes vieillissent, elles sont plus susceptibles de développer des incapacités pouvant les empêcher de continuer leur travail. Elles peuvent alors décider de réduire leurs heures de travail, de changer d'emploi ou de se retirer de la population active, ce qui aurait probablement une incidence négative sur leurs gains. Toutefois, les résultats de l'échantillon utilisé aux fins de la présente étude n'appuient pas cette hypothèse. Cela pourrait être lié à un effet de sélection. Par exemple, les travailleurs ayant une incapacité pourraient avoir changé d'emploi ou s'être retirés du marché du travail (Pyper, 2006). Par conséquent, seuls ceux dont l'incapacité n'a pas eu d'incidence sur le rendement au travail sont peut-être restés. Étant donné que l'EDTR ne dispose pas de renseignements détaillés sur le type et la gravité des incapacités8, les personnes qui faisaient partie de l'échantillon et qui ont déclaré avoir une incapacité avaient peut-être une incapacité mineure ou moins restrictive.

Conclusion

Les profils des gains en fonction de l'âge ont grandement servi à la compréhension des gains des personnes au cours d'une vie. Cependant, ils sont souvent créés au moyen de données transversales qui comparent les gains des travailleurs de différents âges, plutôt que de suivre l'évolution des gains des travailleurs au fil du temps. Étant donné que cette méthode n'examine pas les gains d'une année à l'autre des travailleurs âgés, sa capacité d'évaluer si les gains diminuent avec l'âge des travailleurs est limitée. Au lieu de cela, l'interprétation peut donner à penser au mieux que les travailleurs âgés d'un certain âge gagnent moins, en moyenne, que les travailleurs dans la quarantaine.

La présente étude s'inspire de travaux précédents en utilisant des données longitudinales, ce qui permet d'examiner les gains au fil du temps tout en tenant compte des différences en ce qui concerne les caractéristiques personnelles, démographiques, professionnelles et d'ordre scolaire. De plus, on a utilisé les gains horaires plutôt qu'annuels pour tenir compte du changement des heures de travail au fil du temps, qui aurait une incidence sur les gains annuels et non horaires. En général, les résultats indiquent que l'âge n'avait pas d'effet significatif sur les gains horaires après la prise en compte d'autres facteurs. Ce résultat est attribuable à l'exclusion des pensionnés actifs combinée avec l'utilisation de données longitudinales. Les résultats concordent en grande partie avec ceux d'une étude antérieure, qui démontrait un lien très faible entre l'âge et les gains après exclusion des pensionnés (Johnson et Neumark, 1996).

Les résultats démontrent que les gains horaires augmentent avec l'expérience de travail, atteignant un sommet chez les personnes détenant de 25 à 29 ans d'expérience, pour se stabiliser par la suite. Par conséquent, les profils des gains horaires en fonction de l'expérience pourraient permettre d'estimer avec une plus grande exactitude l'évolution des gains des travailleurs au cours de leur vie.

Source de données et définitions

L'Enquête sur la dynamique du travail et du revenu (EDTR) vise environ 97 % de la population canadienne, sauf les résidents des territoires, des établissements institutionnels, des réserves des Premières nations et des casernes militaires. Chaque panel de répondants, soit approximativement 15 000 ménages et 30 000 adultes, est sondé pendant six années consécutives. Un nouveau panel s'ajoute tous les trois ans, ce qui fait que deux panels se chevauchent toujours. La présente étude s'appuie sur le troisième panel de l'EDTR, qui suivait les répondants de 1999 à 2004. La nature longitudinale de l'enquête permet de suivre les gains horaires et annuels des personnes pendant une période maximale de six ans d'affilée.

Puisque cette étude porte sur le profil des gains en fonction de l'âge avant la retraite, l'échantillon était restreint aux personnes âgées de 45 ans ou plus. Comme l'EDTR ne recueille pas de renseignements sur le travail auprès des personnes de 70 ans ou plus, l'échantillon était composé de personnes âgées de 45 à 69 ans.

Une analyse exploratoire au moyen de modèles séparés pour les hommes et les femmes a révélé que les écarts entre les deux sexes pouvaient facilement être modélisés comme des interactions en un seul modèle pour l'échantillon combiné.

Pour surmonter le problème de l'effet de sélection, où les travailleurs âgés ayant des gains plus élevés peuvent être plus susceptibles de quitter le marché du travail, seules les personnes qui travaillaient à temps plein toute l'année étaient incluses dans l'échantillon, ce qui a permis d'obtenir une cohorte relativement cohérente. Les personnes étaient exclues dès qu'elles touchaient des prestations de retraite (provenant d'un régime de pension d'employeur ou encore du Régime de pensions du Canada ou du Régime de rentes du Québec1), puisque ces prestations ont tendance à être versées après la retraite et que l'étude a pour objet de comprendre l'évolution des gains avant la retraite. En fait, la restriction de l'échantillon aux non-pensionnés est essentielle. Les pensionnés actifs sont différents des autres travailleurs, puisque les pensionnés qui retournent sur le marché du travail travaillent habituellement à un rythme réduit, et que leurs emplois sont aussi, en moyenne, moins bien rémunérés (Hébert et Luong, 2008). Cependant, étant donné que les pensionnés actifs touchent également des versements de pension, leur revenu total peut s'avérer équivalent ou même supérieur à leur revenu avant la retraite2.

L'échantillon final était composé de 2 102 répondants, pour un total de 9 556 observations. Le panel est déséquilibré, puisque le nombre d'observations variait d'un répondant à l'autre.

Les gains nominaux ont été convertis en dollars de 2004. Dans le cas des variables où il manquait de l'information pour un grand nombre de répondants, une catégorie distincte pour les valeurs manquantes a été ajoutée afin d'éviter que ces répondants ne soient éliminés de l'analyse multivariée.

Modèle statistique

Les données par panel de l'EDTR pour les années 1999 à 2004 ont été utilisées pour estimer les variantes du modèle à effets aléatoires

Formule

où yit représente les gains horaires composites de la personne i pendant l'année t, Age renvoie à l'âge de la personne (centré à 55 ans), β1 à β4 sont les coefficients affectant l'Age et ses puissances, xit est un vecteur des caractéristiques personnelles et professionnelles (y compris l'expérience de travail) pouvant varier ou non au fil du temps, et γ est un vecteur des coefficients de régression. Une série de variables factices (Tt) sert à tenir compte des effets propres à une année donnée. Les effets propres aux personnes sont pris en compte par la constante temporelle υi, et εit est le terme d'erreur. Les erreurs types pour les estimations des paramètres ont été calculées au moyen de la méthode bootstrap.

D'autres modèles possibles pour les données longitudinales ou les données recueillies au moyen d'un panel comprennent les modèles à effets fixes, à coefficients aléatoires et marginaux. Le modèle à effets fixes se prêtait mal à la présente étude, puisqu'il ne permet pas d'estimer l'effet des variables ne variant pas dans le temps. À l'aide d'équations d'estimation généralisées, le modèle marginal, qui correspondait de façon générale à la spécification à effets aléatoires ci-dessus, a donné lieu à des résultats très semblables. Un modèle à coefficients aléatoires exhaustif s'est avéré difficile à estimer, mais les résultats des modèles composés de sous-ensembles limités de variables concordaient avec les résultats du modèle à effets aléatoires et du modèle marginal. En outre, une régression des moindres carrés ordinaires fondée sur les données de 2004 seulement a été estimée à des fins comparatives. Dans l'ensemble, les résultats du modèle des moindres carrés ordinaires correspondaient à ceux du modèle à effets aléatoires et du modèle marginal.


Notes

  1. Bien que la Sécurité de la vieillesse soit également considérée comme un régime de pension de l'État, tous les Canadiens en bénéficient, peu importe qu'ils aient ou non déjà fait partie de la population active. L'exclusion des prestataires de la SV exclurait presque toutes les personnes de plus de 65 ans de l'échantillon.
  2. En utilisant les données de l'EDTR, on constate que les gains horaires moyens des pensionnés actifs n'étaient pas statistiquement différents de ceux de l'année précédente (alors que les personnes avaient encore une vie professionnelle active). Toutefois, leurs gains annuels sont passés de 46 500 $ à 38 400 $, tandis que leur revenu annuel total a augmenté, passant de 47 300 $ à 57 500 $ pendant la période d'enquête. Ces différences entre les gains annuels et le revenu total étaient statistiquement significatives au niveau de 5 %.
  3. Enquête sur la dynamique du travail et du revenu, panel 3, de 1999 à 2004.
  4. Les gains horaires moyens des personnes de 65 à 69 ans travaillant à temps plein toute l'année, sauf les pensionnés actifs, étaient statistiquement différents de ceux des personnes de 60 à 64 ans.
  5. Le modèle des moindres carrés ordinaires donnait des résultats semblables lorsque les pensionnés actifs étaient exclus de l'échantillon. Quant ces derniers y étaient inclus, l'effet de l'âge n'était pas significatif dans le modèle à effets aléatoires mais l'était dans le modèle des moindres carrés ordinaires lorsqu'on utilisait les données transversales de 2004, ce qui laisse supposer que la combinaison des pensionnés actifs dans l'échantillon et l'utilisation de données longitudinales entraîne une relation négative entre l'âge et les gains horaires.
  6. Les différences en pourcentage ont été obtenues au moyen d'une exponentiation des coefficients.
  7. Il aurait été intéressant d'étudier l'interaction entre le statut d'immigrant et l'appartenance à une minorité visible, mais cela n'a pas été possible en raison de la taille insuffisante de l'échantillon dans chacune des cellules.
  8. Dans l'EDTR, on détermine que les répondants ont une incapacité s'ils répondent par l'affirmative à au moins une des questions au sujet de difficultés à accomplir des activités quotidiennes, de troubles physiques ou mentaux ou de problèmes de santé qui réduisent le nombre ou le type d'activités qu'ils peuvent effectuer dans une ou plusieurs situations différentes (p. ex., à la maison ou au travail).

Documents consultés

  • FREES, Edward W. 2004. Longitudinal and Panel Data: Analysis and Applications in the Social Sciences, New York, Cambridge University Press.
  • FRENETTE, Marc, et René MORISSETTE. 2003. Convergeront-ils un jour? Les gains des travailleurs immigrants et de ceux nés au Canada au cours des deux dernières décennies, no 11F0019MIF au catalogue de Statistique Canada, Ottawa, 23 p., « Direction des études analytiques : documents de recherche », no 215, (consulté le 17 décembre 2008).
  • HÉBERT, Benoît-Paul, et May LUONG. 2008. « Emploi de transition », L'emploi et le revenu en perspective, vol. 9, no 11, novembre, no 75-001-XIF au catalogue de Statistique Canada, p. 5 à 13, (consulté le 5 janvier 2009).
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  • ROBINSON, Helen. 2003. « Are you experienced? British evidence on age-earnings profiles », Applied Economics, vol. 35, no 9, p. 1101 à 1115.
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Auteurs

May Luong est au service de la Division de l'analyse des enquêtes auprès des ménages et sur le travail. On peut la joindre au 613-951-6014. Benoît-Paul Hébert est au service de Ressources humaines et Développement social Canada. On peut communiquer avec lui au 613-957-6771, ou l'un ou l'autre à perspective@statcan.gc.ca.

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