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Le navettage en milieu rural

Par Spencer Harris, Alessandro Alasia et Ray D. Bollman

Adaptation de l'article « Le navettage en milieu rural : son importance pour les marchés du travail ruraux et urbains », paru dans le Bulletin d'analyse : régions rurales et petites villes du Canada.

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Pour la plupart des gens, un navetteur est une personne qui vit en périphérie et se déplace pour aller travailler dans le noyau urbain, pour ensuite revenir à la maison à la fin de la journée. Selon les recherches sur le navettage dans les grandes villes du Canada, même s'il s'agit encore d'une tendance courante, les caractéristiques du navettage deviennent plus complexes puisqu'il y a de plus en plus de déplacements d'une périphérie à une autre (Heisz et LaRochelle-Côté, 2005).

Il y a eu diverses études qui ont porté sur le navettage en milieu rural (Schindegger et Krajasits, 1997; Green et Meyer, 1997; Mitchell, 2005), mais, à l'extérieur des grandes agglomérations, on connaît moins bien les caractéristiques multidirectionnelles du navettage. Le présent article porte sur les caractéristiques multidirectionnelles du navettage dans les régions rurales. Il montre que ces caractéristiques sont plus complexes que de simples déplacements entre le noyau et la périphérie, qui sont généralement représentés comme un ensemble de cercles concentriques autour d'un noyau urbain. L'une des principales constatations est que, chez les habitants des régions rurales et des petites villes, le navettage en milieu rural et le navettage entre le milieu rural et le milieu urbain sont aussi importants l'un que l'autre. Autrement dit, les navetteurs ruraux dépendent autant du marché du travail en milieu rural qu'en milieu urbain. Les déplacements vers l'extérieur des collectivités semblent être multidirectionnels et ne se produisent pas tout simplement dans la direction périphérie-noyau urbain.

Cet article présente des données de base sur les caractéristiques et l'ampleur du navettage rural en 2001 et permet de mieux comprendre comment les collectivités rurales sont touchées à la fois par les navetteurs vers le milieu urbain et les navetteurs vers le milieu rural. Il montre aussi que les régions métropolitaines de recensement (RMR) et les agglomérations de recensement (AR) du Canada, qui sont délimitées en fonction des déplacements de navettage, constituent essentiellement des marchés du travail en vase clos. Dans l'ensemble, seulement 4 % des emplois dans ces régions urbaines sont occupés par des personnes qui font la navette à partir du milieu rural.

L'analyse se fonde sur le Recensement de la population de 2001 et ses subdivisions de recensement (SDR), qui sont classées soit en tant que parties d'un grand centre urbain (GCU), soit en tant que parties d'une région rurale ou d'une petite ville (RRPV) [Source des données et définitions]. On doit tenir compte des difficultés méthodologiques engendrées par les caractéristiques multidirectionnelles des déplacements de navettage. Bien que l'utilisation de différents découpages géographiques du recensement et de différentes définitions du navettage puisse, dans une certaine mesure, modifier ces résultats, les travaux existants qui ont porté sur les déplacements de navettage au sein des RMR ont montré également la complexité croissante des déplacements dans ces limites urbaines, de même que la croissance rapide des déplacements d'une périphérie à l'autre. Par conséquent, les constatations générales présentées dans cette analyse font état de tendances qui devraient être considérées dans des recherches ultérieures sur le navettage en milieu rural et les marchés du travail ruraux.

Où sont les travailleurs et où sont les emplois?

En 2001, sur 14,7 millions de travailleurs, 2,8 millions vivaient dans les régions rurales et les petites villes (RRPV) [tableau 1]. Sur ces 2,8 millions, environ 2,3 millions travaillaient également dans une RRPV, mais pas nécessairement dans la municipalité où ils habitaient. Par ailleurs, environ 0,4 million faisaient la navette vers une municipalité située dans un grand centre urbain (GCU).

Les travailleurs des régions rurales et des petites villes n'occupaient pas beaucoup d'emplois situés dans les grands centres urbains. Environ 96 % des emplois urbains étaient tenus par des habitants d'un GCU, soit qui vivaient dans la même municipalité, soit qui faisaient la navette à partir d'une autre municipalité d'un GCU. Moins de 4 % des emplois urbains étaient occupés par des résidents des RRPV qui faisaient la navette. Toutefois, étant donné la taille différente de la population des GCU et des RRPV, les 0,4 million de navetteurs ruraux représentaient 16 % de tous les travailleurs résidant dans les RRPV. Parallèlement, près de 164 000 navetteurs se déplaçaient d'une municipalité d'un GCU à une municipalité classée dans les RRPV. Ces travailleurs ne représentaient qu'un peu plus de 1 % des travailleurs vivant dans les GCU, mais ils occupaient environ 7 % des emplois dans les RRPV.

Un tableau d'ensemble : les navetteurs ruraux et urbains

En 2001, environ 4,8 millions de personnes, soit un tiers de la main-d'œuvre canadienne, franchissaient une limite municipale pour se rendre au travail (tableau 2). La plupart se déplaçaient sur une distance relativement courte — seulement 13 % des navetteurs parcouraient une distance de plus de 25 kilomètres pour se rendre au travail, en excluant ceux qui restaient dans la même municipalité (Statistique Canada, 2003).

Puisque plus de 80 % de la population canadienne vivait dans des GCU en 2001 (Bollman et Clemenson, 2008), il n'est pas étonnant que la plus grande partie du navettage était concentrée dans les centres urbains et autour. Environ 3,8 millions de navetteurs se déplaçaient entre les administrations urbaines, ce qui correspondait à 78 % de tous les navetteurs au Canada. Les autres navetteurs représentaient tous les autres déplacements régionaux (urbain à rural, rural à urbain, rural à rural).

Seulement environ 164 000 personnes, soit 4 % des navetteurs qui habitaient un GCU, se déplaçaient vers une municipalité située dans une RRPV pour travailler. Voilà une vive illustration du fait que les GCU sont des marchés du travail en vase clos.

Parmi les navetteurs qui résidaient dans les RRPV, un peu plus de la moitié (447 000) se déplaçaient vers une autre municipalité classée dans les RRPV. Par conséquent, ils contribuaient à l'économie d'autres régions rurales. En comparaison, environ 444 000 travailleurs se déplaçaient d'une région rurale ou d'une petite ville vers un grand centre urbain. Cela sous-entend que les déplacements d'une région rurale à une autre représentaient une proportion significative de la main-d'œuvre dans les RRPV. Ces résultats indiquent que pour ce qui est des travailleurs faisant la navette à partir d'une RRPV, les emplois en milieu rural sont tout aussi importants que les emplois en milieu urbain.

Il y a des raisons de penser que les caractéristiques du navettage qui se dégagent de ces résultats valent également pour les autres définitions de rural. En particulier, les études qui portent sur les caractéristiques du navettage dans les RMR mettent en relief la complexité croissante de ces caractéristiques dans les agglomérations métropolitaines. Entre 1996 et 2001, l'importance économique relative des centres urbains a diminué, le nombre d'emplois dans les banlieues ayant augmenté à un rythme au moins quatre fois plus rapide que dans les noyaux urbains (Heisz et LaRochelle-Côté, 2005). Par conséquent, de plus en plus de personnes se déplaçaient à travers la ville pour se rendre dans ces banlieues. De 1981 à 2001, le nombre de travailleurs qui allaient vers les banlieues a crû de 74 % pour atteindre 1,8 million de travailleurs, tandis que le nombre de ceux qui faisaient la navette vers le noyau urbain n'a augmenté que de 28 % pour s'établir à 1,3 million (Statistique Canada, 2003). Parmi ceux qui se déplaçaient vers des municipalités voisines en 2001, environ les deux tiers provenaient d'une autre municipalité voisine et un tiers, de la municipalité du noyau urbain. Les 1,2 million de travailleurs qui faisaient la navette d'une municipalité de banlieue à une autre en 2001 ont représenté une augmentation de 91 % de 1981 à 2001.

Comme il semble que ce soient encore surtout les femmes qui s'occupent d'élever les enfants et de faire l'entretien ménager, on pourrait s'attendre à ce que moins de femmes fassent la navette et que celles qui le font parcourent de plus petites distances. Au chapitre de la proportion des déplacements, dans le cas de presque toutes les combinaisons selon l'origine et la destination, les femmes et les hommes ne différaient que par quelques points de pourcentage par rapport à l'ensemble, mais la proportion des femmes faisant la navette entre les SDR dans le même type de région était généralement plus élevée. Environ 400 000 hommes de plus que de femmes faisaient la navette (2,6 millions comparativement à 2,2 millions). Toutefois, les caractéristiques générales étaient semblables.

Un examen approfondi : le navettage dans des secteurs différents des régions rurales et urbai nes

Afin d'en savoir davantage sur les déplacements selon le type de région, on a utilisé les zones d'influence métropolitaine (ZIM) pour établir une distinction entre les diverses RRPV. En outre, les villes étaient réparties en grandes RMR, petites RMR et AR. Dans l'ensemble, la proportion des navetteurs était similaire pour les GCU et les RRPV. À l'exception des ZIM forte, chaque type de région comptait moins de 40 % de travailleurs occupant un emploi dans une SDR autre que celle où ils habitaient (graphique A). Environ 50 % des travailleurs résidant dans une ZIM forte franchissaient la limite d'une SDR.

Les travailleurs ruraux faisant la navette vers les régions urbaines étaient plus susceptibles de vivre dans des municipalités situées dans des ZIM forte. Parmi les 4 605 municipalités dans les RRPV, 663 étaient dans une ZIM forte. Toutefois, ces municipalités comptaient près de 750 000 travailleurs, soit 27 % de la main-d'œuvre totale des RRPV.

Les municipalités dans les grandes RMR avaient une part plus élevée de navetteurs que les municipalités dans les petites RMR, lesquelles à leur tour en comptaient une plus forte proportion que les AR. Les grandes RMR comprennent généralement de nombreuses municipalités, mais relativement peu d'entre elles comptent de grands employeurs. Les autres municipalités sont surtout des zones résidentielles. Les RRPV présentent également une caractéristique visible. Au fur et à mesure qu'on passe des municipalités dans une ZIM forte aux municipalités dans une ZIM modérée, faible puis nulle, relativement moins de travailleurs font la navette. Encore une fois, cette constatation met en relief le rôle « nourricier » d'une ZIM forte qui, dans une perspective régionale d'ensemble, semble confirmer l'idée d'une « banlieue-dortoir » plus que tout autre type de région.

Navettage sortant : où vont les navetteurs ruraux et urbains?

Dans les grandes et les petites RMR, la proportion de navetteurs sortants qui se rendaient dans les RRPV était négligeable (graphique B). En outre, le nombre absolu de navetteurs était relativement modeste. Toutefois, une proportion beaucoup plus élevée (21 %) de navetteurs sortants dans les AR se rendaient dans une municipalité située dans une RRPV. On ne s'étonnera pas du fait que les municipalités dans une ZIM forte étaient la destination la plus fréquente pour les navetteurs sortants d'un GCU (graphique C). Toutefois, les ZIM modérée n'étaient que de quelques points de pourcentage derrière (et même à égalité dans le cas du navettage à partir des grandes RMR).

Dans les régions rurales et les petites villes, les municipalités de ZIM forte avaient la relation de navettage sortant la plus fréquente avec les régions urbaines. Plus de 80 % des navetteurs sortants qui habitaient une ZIM forte se rendaient dans une municipalité d'un GCU. Cette constatation est attribuable essentiellement à la validité de la classification des ZIM, qui est fondée sur le navettage vers la zone urbaine.

Le tableau est considérablement différent au-delà des ZIM forte. Dans les municipalités situées dans les ZIM modérée, environ 40 % des navetteurs sortants se déplaçaient vers une municipalité d'un GCU pour travailler, et 60 % se rendaient dans une autre municipalité classée dans les RRPV. Moins de 10 % des navetteurs sortants des ZIM faible et nulle se déplaçaient vers une municipalité d'un GCU pour travailler, tandis que les autres allaient vers une autre municipalité située dans une RRPV.

Navettage entrant : qui occupe les emplois ruraux et urbains?

La proportion des emplois locaux qui sont occupés par les navetteurs entrants est particulièrement élevée dans les grandes RMR (38 %), les petites RMR et les AR (près de 30 %), alors qu'elle est près de 25 % dans les ZIM forte, les ZIM modérée et les ZIM faible (graphique D). Elle est particulièrement faible dans les ZIM nulle (environ 16 %). Toutefois, pour savoir si les navetteurs entrants proviennent principalement des régions rurales ou urbaines, il faut examiner le type de région. Bien qu'il y ait certaines différences entre les GCU, la proportion des navetteurs entrants ruraux était généralement faible. Les municipalités dans les AR comptaient une plus forte proportion d'emplois occupés par des navetteurs entrants provenant des RRPV, soit environ 11 %. En revanche, seulement 4 % des emplois dans les petites RMR et moins de 2 % des emplois dans les grandes RMR étaient exercés par des navetteurs entrants provenant des RRPV.

Dans les RRPV, la proportion des emplois occupés par les navetteurs entrants était généralement plus faible que dans les municipalités des GCU. En outre, les ZIM forte étaient les seules régions rurales et petites villes qui comptaient une majorité de navetteurs provenant des municipalités situées dans les GCU. Environ 16 % des emplois dans les municipalités de ZIM forte étaient occupés par des navetteurs provenant d'une municipalité d'un GCU comparativement à 9 %, par des navetteurs venant d'une SDR située dans une RRPV.

Pour d'autres types de RRPV, la majorité des navetteurs entrants provenaient d'autres municipalités de la même région. Encore une fois, cela traduit les liens étroits entre les régions rurales qui sont généralement dissimulés dans une analyse du navettage portant principalement sur les déplacements à partir des zones urbaines vers les zones rurales. Environ 20 % des emplois dans les municipalités de ZIM modérée ou faible étaient tenus par des travailleurs provenant d'une autre municipalité classée dans les RRPV.

Dans les ZIM forte, plus d'emplois étaient occupés par des navetteurs provenant des municipalités situées dans les GCU que par des navetteurs venant de tout autre type de région. En revanche, dans les ZIM modérée et faible, plus d'emplois étaient exercés par des navetteurs provenant d'une municipalité de la même catégorie de ZIM que par des navetteurs provenant de tout autre type de région. Le lien entre les municipalités de ZIM forte et les autres catégories de ZIM (et même les autres SDR de ZIM forte) était modeste comparativement au lien avec les municipalités des GCU.

Dans les municipalités de ZIM forte, seulement environ 3 % des emplois étaient occupés par des navetteurs provenant d'une ZIM modérée; de même, dans les municipalités de ZIM modérée, environ 3 % seulement des emplois étaient occupés par des navetteurs provenant d'une ZIM forte (graphique E). Par conséquent, les municipalités de ZIM modérée, faible ou nulle étaient non seulement faiblement intégrées aux municipalités des GCU, mais elles étaient aussi relativement moins intégrées aux municipalités de ZIM forte.

Les agglomérations de recensement sont le point de départ principal des navetteurs des GCU se déplaçant vers les RRPV (graphique F). À l'exception des ZIM faible, une proportion considérablement plus élevée de travailleurs dans chaque type de région rurale et de petite ville se déplaçaient d'une AR plutôt que d'une petite ou d'une grande RMR. En général, ce sont les municipalités de ZIM forte qui étaient les plus touchées par les navetteurs provenant d'une municipalité d'un GCU.

Plus de 16 % des personnes travaillant dans des municipalités de ZIM forte provenaient d'une municipalité d'un GCU — plus de la moitié d'entre elles étaient des navetteurs entrants venant d'une AR. La proportion correspondante pour les ZIM modérée, le type de région qui suit, était d'environ 7 %. (Il faut signaler toutefois que la classification des ZIM est fondée sur le nombre de navetteurs vers une RMR ou une AR, de sorte qu'on peut s'attendre à ce navettage à contresens à partir d'une RMR ou d'une AR vers des municipalités de ZIM forte.)

Conclusion

Le navettage est, dans une large mesure, un phénomène urbain. Étant donné la répartition actuelle de la population et des emplois, il n'est pas étonnant que près de 80 % du navettage se produise entre les municipalités situées dans les grands centres urbains. Les études actuelles sur le navettage dans les RMR indiquent que, même dans ces régions, les caractéristiques du navettage deviennent de plus en plus complexes en raison des déplacements croissants à partir du noyau urbain vers la périphérie et d'une périphérie à une autre.

Le navettage en milieu rural est également plus complexe que ce qu'on croyait généralement. Si l'on analyse le navettage en portant attention seulement aux déplacements à partir de la périphérie (rurale) vers le noyau (urbain), on ne tient pas compte de la moitié du navettage rural, c'est-à-dire à l'intérieur des régions rurales. Pour les navetteurs qui habitent les régions rurales et les petites villes, le navettage rural-rural est aussi important que le navettage rural-urbain. En outre, les emplois en milieu rural sont au moins deux fois plus occupés par les navetteurs entrants qui proviennent d'autres régions rurales que par les navetteurs entrants qui vivent dans les régions urbaines. Les liens entre les régions rurales semblent particulièrement forts dans les RRPV au-delà des ZIM forte. Si l'on ne tient pas compte de ce navettage à l'intérieur des régions rurales, on comprend moins bien les liens économiques entre les collectivités rurales et le degré d'intégration des marchés du travail ruraux.

Les RMR et les AR semblent bien délimiter des marchés du travail en vase clos. Seulement 4 % des emplois dans les grands centres urbains sont occupés par des navetteurs provenant des RRPV (ces derniers représentant 16 % des travailleurs qui vivent dans les RRPV). De même, les RRPV qui sont classées comme des ZIM forte représentent exactement la ceinture de démarcation entre les GCU et les RRPV. Les caractéristiques du navettage d'une zone rurale à une autre démontrent que des fonctions différentes — résidence, loisirs et travail — sont de plus en plus séparées dans l'espace et peuvent entraîner dans chaque cas un déplacement dans une direction différente (Persson et coll., 1997).

À l'échelle régionale, l'analyse des déplacements est une condition préalable à la détermination des régions fonctionnelles qui ont des liens économiques forts et qui ont un bassin commun de main-d'œuvre. Ces régions constituent une unité d'analyse territoriale importante et le point de mire de la mise en œuvre de politiques. Les prochains travaux de recherche devront délimiter davantage les marchés du travail ruraux, ce qui aidera à mieux comprendre les données que permet d'obtenir la classification courante des ZIM. De toute évidence, certaines régions rurales sont très liées aux marchés du travail urbains, mais la plupart des collectivités rurales et la moitié des navetteurs ruraux comptent sur d'autres marchés du travail ruraux.

Source des données et définitions

La présente analyse se fonde sur les subdivisions de recensement (SDR) du Recensement de la population de 2001. Les données sur la situation géographique (les coordonnées du centre géographique) et la classification de la SDR selon le type de zone (codes de ZIM) proviennent de Statistique Canada (2002b). Pour plus d'information sur les données relatives au lieu de travail et au lieu de résidence, voir Statistique Canada (2002a).

Un navetteur est une personne qui déclare un lieu de résidence dans une SDR et un lieu de travail dans une SDR différente qui est située à moins de 250 kilomètres. Comme le long questionnaire du recensement ne permet de recenser qu'un cinquième des ménages, les exigences de confidentialité et de fiabilité obligent à exclure les déplacements lorsqu'il y a moins de 20 navetteurs entre deux SDR (p. ex., pour un échantillon de moins de quatre navetteurs). L'analyse porte essentiellement sur la nature des marchés du travail et leurs liens avec le navettage quotidien. Pour cette raison, la définition de navetteur est limitée à quiconque travaille dans un rayon de 250 kilomètres de son lieu de résidence — plus expressément, seulement les déplacements de navettage entre les paires de SDR dont les centres géographiques sont distants de moins de 250 kilomètres.

Ce seuil de distance n'exclut que 0,7 % de tous les déplacements de navetteurs figurant dans la base de données. Les personnes qui vivent et travaillent dans des municipalités éloignées de plus de 250 kilomètres sont un groupe marginal qui pourrait comprendre des personnes qui travaillent à un endroit de façon temporaire ou saisonnière mais qui indiquent quand même leur lieu de résidence initial, ou des travailleurs qui se déplacent constamment (par exemple, les mineurs ou les travailleurs de la construction qui sont sur un lieu de travail pour une durée de 7 à 10 jours et qui ensuite retournent à la maison pour plusieurs jours).

La définition de navettage suppose que le travailleur franchit les limites d'une SDR lorsqu'il se rend au travail. Par conséquent, cette définition ne comprend pas les personnes qui se rendent au travail dans les limites de la même SDR, mais qui pourraient quand même parcourir une assez longue distance pour aller travailler. Par ailleurs, cette définition comprend les personnes qui se déplacent sur une courte distance, mais qui franchissent quand même les limites d'une SDR. Cette analyse vise à rendre compte des déplacements multidirectionnels (de-à). Il faut donc à cette fin qu'un espace continu soit réparti en unités géographiques distinctes. C'est pourquoi il y a aussi une certaine approximation des déplacements réels.

Une subdivision de recensement (SDR) est une municipalité (c.-à-d. une localité constituée en personne morale, une municipalité rurale, une ville, etc., selon la loi provinciale) ou son équivalent (les réserves indiennes, les établissements indiens et les territoires non organisés). Dans le Recensement de la population de 2001, il y avait 5 600 SDR (Statistique Canada, 2002a). Les SDR peuvent varier beaucoup pour ce qui est de la taille de la population — de quelques habitants jusqu'à plus de deux millions à Toronto. En outre, l'étendue géographique d'une SDR peut varier beaucoup — de moins d'un kilomètre carré pour une petite ville rurale jusqu'aux vastes étendues géographiques des territoires dits « non organisés » dans la partie nord de nombreuses provinces. Les données au niveau des SDR sont regroupées selon le type de secteur d'après la classification des secteurs statistiques de Statistique Canada.

Les grands centres urbains (GCU) sont composés de SDR classées en tant que parties des régions métropolitaines de recensement (RMR) et des agglomérations de recensement (AR). En 2001, on considérait qu'une RMR avait un noyau urbain de 100 000 habitants ou plus et comprenait toutes les SDR voisines dont 50 % ou plus de la main-d'œuvre résidente se déplaçait vers le noyau urbain. Une AR avait un noyau urbain de 10 000 à 99 999 habitants et comprenait aussi les SDR voisines dont 50 % ou plus de la main-d'œuvre résidente se déplaçait vers le noyau urbain.

  • Les grandes RMR ont une population totale de 500 000 habitants ou plus. En 2001, il s'agissait de Québec, Montréal, Ottawa-Gatineau, Toronto, Hamilton, Winnipeg, Calgary, Edmonton et Vancouver.
  • Les petites RMR ont une population de 100 000 à 499 999 habitants.
  • Les AR ont une population de 10 000 à 99 999 habitants.

Les régions rurales et petites villes (RRPV) sont des SDR qui ne font pas partie d'une RMR ou d'une AR. Les RRPV sont classées selon une zone d'influence métropolitaine (ZIM) :

  • ZIM forte : 30 % ou plus de la main-d'œuvre résidente fait la navette vers une RMR ou une AR;
  • ZIM modérée : de 5 % à 29 % de la main-d'œuvre résidente fait la navette vers une RMR ou une AR;
  • ZIM faible : moins de 5 % de la main-d'œuvre résidente fait la navette vers une RMR ou une AR;
  • ZIM nulle : la main-d'œuvre ne se déplace pas vers une RMR ou une AR (ou elle comprend moins de 40 travailleurs).

Les définitions de GCU et de RRPV sont fondées sur l'activité de navettage vers une RMR ou une AR. C'est donc que le volume de l'activité de navettage vers une RMR ou une AR et la ZIM à laquelle une SDR est attribuée sont directement en corrélation. Pour la même raison, une partie des résultats confirment tout simplement les déplacements qui servent à produire cette classification. Par ailleurs, la classification des ZIM ne permet pas d'évaluer les déplacements qui se produisent entre diverses catégories de ZIM ou dans la même catégorie de ZIM. C'est là où les résultats de l'analyse sont les plus révélateurs. Dans cette étude, la classification des RMR et des AR est fondée sur la population totale de l'agglomération plutôt que sur la population dans le noyau urbain. Toute agglomération ayant une population totale supérieure à 100 000 est classée en tant que RMR; par conséquent, les petites RMR comprennent sept AR ayant un noyau urbain de moins de 100 000 habitants, mais une population totale supérieure à 100 000 habitants. En outre, pour des raisons pratiques, 16 SDR qui ne sont pas des AR dans les territoires, et où il y a de petits déplacements vers une AR dans les territoires, ont été assignées à la catégorie des ZIM forte. Toutefois, beaucoup ont été exclues parce que moins de 20 personnes faisaient la navette ou que la distance parcourue était de 250 kilomètres ou plus.

Le découpage géographique utilisé a certaines incidences sur les résultats. D'autres définitions de rural pourraient engendrer des perspectives différentes. Par exemple, il y a une autre définition qui est celle de la région rurale de recensement et qui tient compte de la population à l'extérieur des centres de 1 000 habitants ou plus et à l'extérieur des régions ayant une densité de population de 400 habitants ou plus au kilomètre carré (du Plessis et coll., 2001). Chaque SDR peut comporter des régions rurales de recensement et des régions urbaines de recensement. Essentiellement, il s'agit de l'espace rural à l'intérieur de chaque SDR. Dans la période de 1991 à 2006, plus du tiers des habitants des régions rurales de recensement vivaient dans une SDR qui faisait partie d'une RMR ou d'une AR (Bollman et Clemenson, 2008). Par conséquent, l'utilisation des régions rurales de recensement et des régions urbaines de recensement permettrait de saisir les déplacements multidirectionnels dans une SDR (rural-urbain, rural-rural, etc.). Plus expressément, étant donné la définition de rural qui est utilisée, le navettage rural-rural présenté dans cette analyse comprend les déplacements entre les très petites municipalités et les villes comptant jusqu'à 10 000 habitants.

Pour en savoir davantage sur les définitions décrites ci-dessus, voir McNiven et coll. (2000) et Statistique Canada (2002a).


Documents consultés

  • BOLLMAN, Ray D., et Heather A. CLEMENSON. 2008. « Structure et évolution de la démographie rurale du Canada : mise à jour jusqu'en 2006 », Bulletin d'analyse : régions rurales et petites villes du Canada, vol. 7, no 7, novembre, no 21-006-XIF au catalogue de Statistique Canada, Ottawa, p. 1 à 27, (consulté le 12 novembre 2008).
  • DU PLESSIS, Valérie, Roland BESHIRI, Ray D. BOLLMAN et Heather CLEMENSON. 2001. « Définitions de "rural" », Bulletin d'analyse : régions rurales et petites villes du Canada, vol. 3, no 3, novembre, no 21-006-XIF au catalogue de Statistique Canada, Ottawa, p. 1 à 17, (consulté le 12 novembre 2008).
  • GREEN, Milford B., et Stephen P. MEYER. 1997. « Occupational stratification of rural commuting », Rural Employment: An International Perspective, publié sous la direction de Ray D. Bollman et John M. Bryden, Wallingford, Royaume-Uni, CAB International, chapitre 15.
  • HEISZ, Andrew, et Sébastien LAROCHELLE-CÔTÉ. 2005. « Se rendre au travail », Tendances sociales canadiennes, hiver, no 11-008 au catalogue de Statistique Canada, p. 13 à 17, (consulté le 13 novembre 2008).
  • MCNIVEN, Chuck, Henry PUDERER et Darryl JANES. 2000. Zones d'influence des régions métropolitaines de recensement et des agglomérations de recensement (ZIM) : une description de la méthodologie, no 92F0138MPF au catalogue de Statistique Canada, Ottawa, « Série de documents de travail de la géographie », no 2000-2.
  • MITCHELL, Clare J.A. 2005. « Population change and external commuting in Canada's rural small town municipalities: 1996-2001 », Revue canadienne des sciences régionales, septembre.
  • PERSSON, Lars Olaf, Erik WESTHOLM et Tony FULLER. 1997. « Two contexts, one outcome: The importance of lifestyle choice in creating rural jobs in Canada and Sweden », Rural Employment: An International Perspective, publié sous la direction de Ray D. Bollman et John M. Bryden, Wallingford, Royaume-Uni, CAB International, chapitre 10.
  • SCHINDEGGER, Friedrich, et Cornelia KRAJASITS. 1997. « Commuting: Its importance for rural employment analysis », Rural Employment: An International Perspective, publié sous la direction de Ray D. Bollman et John M. Bryden, Wallingford, Royaume-Uni, CAB International, chapitre 11.
  • STATISTIQUE CANADA. 2003. Où travaillent les Canadiens et comment s'y rendent-ils?, no 96F0030XIF2001010 au catalogue de Statistique Canada, Ottawa, « Série "Analyses" : Recensement de 2001 », 40 p., (consulté le 13 novembre 2008).
  • STATISTIQUE CANADA. 2002a. Dictionnaire du Recensement de 2001, no 92-378-XPF au catalogue de Statistique Canada, Ottawa.
  • STATISTIQUE CANADA. 2002b. GéoSuite : Recensement de 2001, no 92F0150XBB au catalogue de Statistique Canada, Ottawa.

Auteurs

Spencer Harris est étudiant à l'Université de Waterloo. Alessandro Alasia et Ray D. Bollman sont au service de la Division de l'agriculture. On peut joindre Alessandro Alasia au 613-951-1204 ou à perspective@statcan.gc.ca, et Ray D. Bollman au 613-951-3747 ou à perspective@statcan.gc.ca.