Rapports économiques et sociaux
Expériences professionnelles des femmes ayant une incapacité

Date de diffusion : le 27 octobre 2021

DOI: https://doi.org/10.25318/36280001202101000004-fra

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Résumé

La présente étude utilise les données de l’Enquête canadienne sur l’incapacité de 2017 pour comparer les expériences professionnelles des femmes et des hommes de 20 à 54 ans ayant une incapacité. Ces expériences permettent de rendre compte des difficultés auxquelles les personnes ayant une incapacité ont déclaré être confrontées dans le cadre de leur emploi, dans leur milieu de travail et sur le marché du travail. Parmi les personnes ayant une incapacité, les femmes étaient plus susceptibles que les hommes de changer la quantité de travail qu’elles font, de commencer à travailler à la maison et de prendre un congé en raison de leur état. Une proportion plus élevée de femmes que d’hommes ayant une incapacité avaient besoin de mesures d’adaptation en milieu de travail, mais aucune différence significative entre les sexes n’a été relevée quant à l’accès à ces mesures d’adaptation. Les perceptions de la discrimination sur le marché du travail étaient généralement similaires entre les femmes et les hommes ayant une incapacité, mais avec une différence notable : moins de femmes que d’hommes ayant une incapacité (en particulier celles ayant une incapacité plus sévère) ont déclaré s’être vu refuser une entrevue en raison de leur état.

Mots clés : discrimination fondée sur l’incapacité; femmes ayant une incapacité; mesures d’adaptation en milieu de travail; obstacles à l’emploi; travailleurs ayant une incapacité.

Auteurs

Christoph Schimmele, Sung-Hee Jeon et Rubab Arim travaillent à la Division de l’analyse sociale et de la modélisation, au sein de la Direction des études analytiques et de la modélisation de Statistique Canada.

Remerciement

La présente étude est financée par le ministère des Femmes et de l’Égalité des genres.

Introduction

Les personnes ayant une incapacité et les femmes sont deux des groupes désignés en vertu de la Loi sur l’équité en matière d’emploi, laquelle a pour objet de réaliser l’égalité en milieu de travail. Par suite de l’entrée en vigueur de Loi canadienne sur l’accessibilité, le 11 juillet 2019, l’emploi des personnes ayant une incapacité a été cimenté comme domaine prioritaire, et l’accent est particulièrement mis sur la reconnaissance et l’élimination des obstacles à l’accessibilité dans le domaine de l’emploi, et sur prévention de nouveaux obstacles. À la lumière de ces lois, la présente étude vise à élargir la recherche sur les expériences professionnelles des femmes ayant une incapacité en ce qui a trait aux obstacles à l’emploi et aux obstacles en milieu de travail. Des études antérieures ont montré que les femmes ayant une incapacité peuvent être confrontées à un double désavantage sur le marché du travail, notamment sur le plan de leur taux d’emploi, de leur sous-emploi et de leurs revenus (Burlock, 2017; Kavanagh et coll., 2015; Morris et coll., 2018; Pettinicchio et Maroto, 2017). En revanche, on en sait relativement moins sur les similitudes ou les différences entre les expériences professionnelles des femmes et des hommes ayant une incapacité.

En 2016, chez les Canadiens âgés de 25 à 64 ans, 3 personnes ayant incapacité sur 5 occupaient un emploi, comparativement à 4 sur 5 chez les personnes sans incapacité (Morris et coll., 2018). Parmi les personnes ayant une incapacité moins sévère, le taux d’emploi était plus élevé chez les femmes que chez les hommes de 25 à 34 ans, mais comparativement plus faible chez les femmes des groupes d’âge plus avancéNote . Parmi les personnes ayant une incapacité plus sévère, les femmes âgées de 25 à 34 ans avaient également un taux d’emploi plus élevé que les hommes, tandis que les hommes âgés de 55 à 64 ans avaient un taux d’emploi plus élevé que les femmes de ce groupe d’âge. Lorsque l’on tient compte du niveau de scolarité, une tendance mitigée se dessine. Chez les personnes de 25 à 64 ans ayant une incapacité moins sévère et un grade universitaire, les hommes affichaient un taux d’emploi plus élevé que les femmes, mais on observait le contraire chez les personnes ayant une incapacité plus sévère, les femmes de ce groupe ayant un taux d’emploi comparativement plus élevé que les hommes (Morris et coll., 2018). Parmi les personnes ayant un diplôme d’études secondaires ou moins, les femmes affichaient un taux d’emploi plus faible que les hommes, peu importe la sévérité de l’incapacité.

Des recherches antérieures ont également montré que les femmes ayant une incapacité qui occupent un emploi sont plus susceptibles de travailler à temps partiel et de gagner moins que les autres (Brown et Moloney, 2018; Pettinicchio et Maroto, 2017). En 2016, parmi les personnes employées ayant une incapacité moins sévère, la proportion de femmes travaillant à temps partiel était plus de deux fois plus élevée que la proportion d’hommes (Morris et coll., 2018). Chez les personnes ayant une incapacité plus sévère, la différence entre les sexes sur le plan de l’emploi à temps partiel était légère. De même, il y avait un grand écart de revenu médian entre les femmes et les hommes ayant une incapacité moins sévère (30 080 $ par rapport à 39 710 $ en 2015), tandis que l’écart de revenu était plus petit entre les femmes et les hommes ayant une incapacité plus sévère (17 520 $ par rapport à 20 230 $).

La disponibilité des emplois et les conditions d’emploi peuvent expliquer certaines de ces différences. Bien que certaines personnes ayant une incapacité soient des étudiants, des retraités ou des personnes incapables de travailler en raison de leur état, d’autres personnes ayant une incapacité peuvent travaillerNote , mais ne font actuellement pas partie de la population active (Morris et coll., 2018; Till et coll., 2015). Parmi les non-travailleurs âgés de 25 à 64 ans, une proportion un peu plus élevée d’hommes (42 %) que de femmes (37 %) ayant une incapacité avaient la capacité de travailler, mais étaient sans emploi (Morris et coll., 2018). Cette capacité de travailler non réalisée pourrait découler en partie d’obstacles rencontrés sur le marché du travail, y compris l’insuffisance d’emplois offrant les mesures d’adaptation nécessaires, les problèmes d’accessibilité et la discrimination (Till et coll., 2015).

En résumé, ces constatations font ressortir une intersection importante entre la situation vis-à-vis de l’incapacité et le sexe (Gerschick, 2000) et la nécessité de mieux comprendre les expériences professionnelles des femmes ayant une incapacité par rapport à leurs homologues masculins, tout en tenant compte de la sévérité de l’incapacité. La présente étude contribue à ce domaine de recherche en examinant les expériences professionnelles des personnes ayant une incapacité selon le sexe, à partir des données de l’Enquête canadienne sur l’incapacité (ECI) de 2017. Les expériences professionnelles désignent les changements dans le travail et les conditions de travail attribuables à l’état de santé, les raisons de travailler à temps partiel, les mesures d’adaptation nécessaires pour travailler, la disponibilité de ces mesures d’adaptation et la discrimination perçue sur le marché du travail. Ces expériences permettent de rendre compte des difficultés auxquelles les personnes ayant une incapacité sont confrontées dans le cadre de leur emploi, dans leur milieu de travail et sur le marché du travail.

Source des données et mesures

Cette étude se fonde sur les données de l’Enquête canadienne sur l’incapacité (ECI) de 2017, une enquête postcensitaire qui a servi à recueillir des données sur les Canadiens âgés de 15 ans et plus ayant une difficulté fonctionnelle (p. ex. difficulté à voir) ou un problème de santé ayant duré ou qui aurait pu durer six mois ou plus (Cloutier, Grondin et Lévesque, 2018). Pour économiser du temps d’interview, l’ECI comportait des renseignements sociodémographiques sur les répondants tirés du Recensement de 2016. La population cible a englobé les Canadiens des dix provinces et trois territoires qui vivaient au sein d’un ménage. Étaient exclues les personnes qui vivaient dans un établissement institutionnel (p. ex. établissement de soins de longue durée) et dans une réserve des Premières Nations. Plus de 23 000 personnes (une population pondérée estimée à 6,2 millions) ont participé à l’enquête, et le taux de réponse global a été de 69,5 %. Plus de la moitié des répondants (55,8 %) étaient des femmes.

La présence d’une incapacité a été déterminée au moyen des questions d’identification des incapacités (QII). Celles-ci sont fondées sur le modèle social de l’incapacité, qui définit l’incapacité selon la fréquence ou l’intensité à laquelle une difficulté fonctionnelle ou un état de santé limite les activités courantes d’une personne (Grondin, 2016). Dans l’ECI, les répondants qui ont déclaré qu’une difficulté fonctionnelle ou un état de santé limitait leurs activités courantes « parfois », « souvent » ou « toujours » ont été désignés comme des personnes ayant une incapacité. Les personnes qui ont déclaré qu’une difficulté fonctionnelle ou un état de santé limitait « rarement » leurs activités courantes ou ne les limitaient « jamais » n’ont pas été désignées comme des personnes ayant une incapacité, à une exception près. Les personnes qui ont rarement connu des limitations d’activités, mais qui ont déclaré une forte intensité de difficulté (c.-à-d. « beaucoup de difficulté » ou « ne peut pas faire la plupart des activités ») ont également été désignées comme des personnes ayant une incapacité. Les personnes qui ont déclaré avoir un trouble du développement ont été désignées comme des personnes ayant une incapacité, peu importe la fréquence ou l’intensité de leur état de santé limitant leurs activités courantes.

Dans le cadre de l’ECI, un score de sévérité a été calculé pour chaque type d’incapacitéNote , en fonction du niveau de difficulté à réaliser certaines tâches et de la fréquence de la limitation des activités (Cloutier et coll., 2018). Un score global de sévérité a été calculé à partir des scores combinés pour les différents types d’incapacité qu’une personne avait. Afin de faciliter l’interprétation des scores globaux de sévérité, le fichier analytique de l’ECI comprend une variable dérivée qui établit quatre catégories de sévérité de l’incapacité : catégorie 1 (légère), catégorie 2 (modérée), catégorie 3 (sévère) et catégorie 4 (très sévère)Note . Aux fins de la présente étude, à l’instar d’études antérieures, les répondants des catégories d’incapacité légère et modérée ont été regroupés pour former un seul groupe témoin, et ceux des catégories d’incapacité sévère et très sévère ont été regroupés dans un autre groupe (Morris et coll., 2018; Turcotte, 2014). Ces groupes sont respectivement désignés comme ayant une « incapacité moins sévère » et une « incapacité plus sévère ».

Dans le cadre de l’ECI, un large éventail de questions ont été posées aux répondants à propos de leur situation de travail, des raisons pour lesquelles ils travaillaient à temps partiel, des besoins autodéclarés en matière de mesures d’adaptation en milieu de travail, de l’accès à ces mesures d’adaptation, de la formation en milieu de travail et des perceptions de la discrimination sur le marché du travail. Des statistiques descriptives ont été utilisées pour comparer les expériences professionnelles des femmes et des hommes ayant une incapacité, et la signification statistique de ces différences a été vérifiée. Dans l’ECI, la variable du sexe indique si le répondant a déclaré être de sexe féminin ou masculin au cours de l’interview ou lors du recensement. L’analyse a comparé les différences entre les sexes quant aux expériences professionnelles des personnes ayant : 1) une incapacité quelconque; 2) une incapacité moins sévère; et 3) une incapacité plus sévère. Bien que les différences entre les types d’incapacité puissent avoir une incidence sur les différences selon le sexe en ce qui a trait aux expériences professionnelles, les données et les limites méthodologiques n’ont pas permis d’effectuer une comparaison selon les types d’incapacité.

Il est courant de définir la population du principal groupe d’âge actif comme étant composée des personnes âgées de 25 à 54 ans, ce qui permet de tenir compte de l’achèvement des études. Toutefois, parmi les répondants de l’ECI âgés de 20 à 24 ans, 30 % étaient aux études et 58 % occupaient un emploi au moment de l’enquête. Par conséquent, pour être plus inclusive, l’analyse a porté sur les répondants âgés de 20 à 54 ansNote  qui ont déclaré occuper un emploi pendant la semaine de référence de l’enquête. En ce qui concerne les points sur les mesures d’adaptation en milieu de travail et la discrimination perçue en milieu de travail, l’analyse a également porté sur des personnes qui occupaient un emploi au cours des cinq années précédentes.

Résultats

Caractéristiques descriptives

Le tableau 1 présente les caractéristiques démographiques et d’incapacité des personnes de 20 à 54 ans occupant un emploi et ayant une incapacité. Bien que les données de ce tableau présentent des différences entre les sexes en matière d’éducation, d’emploi, de profession et de salaires chez les personnes ayant une incapacité, elles ne doivent pas être interprétées comme des estimations de la façon dont l’incapacité contribue à ces caractéristiques.

Des différences significatives ont été observées entre les sexes dans la composition selon l’âge de l’échantillon. Une proportion plus élevée de femmes ayant une incapacité se situaient dans les deux groupes d’âge les plus jeunes et une plus petite part se situait dans le groupe d’âge le plus avancé.

Environ 11 % des femmes ayant une incapacité étaient âgées de 20 à 24 ans et 28 % étaient âgées de 25 à 34 ans, comparativement à 8 % et à 22 % des hommes ayant une incapacité. Une proportion similaire de femmes et d’hommes (environ 29 % chacun) ayant une incapacité étaient âgés de 35 à 44 ans. Une proportion significativement plus élevée d’hommes (41 %) que de femmes (33 %) ayant une incapacité étaient âgés de 45 à 54 ans.

Il y avait également des différences significatives entre les sexes en ce qui a trait au niveau de scolarité. Dans l’ensemble, les femmes ayant une incapacité avaient un niveau de scolarité plus élevé que les hommes ayant une incapacité. Parmi les personnes occupant un emploi, 31 % des femmes et 23 % des hommes ayant une incapacité étaient titulaires d’un baccalauréat ou d’un grade de niveau supérieur, et une proportion plus élevée de femmes (35 %) que d’hommes (23 %) étaient titulaires d’un certificat ou d’un diplôme collégial ou de cégep inférieur au baccalauréat. À l’inverse, une proportion plus élevée d’hommes (14 %) que de femmes (8 %) ayant une incapacité détenaient un certificat ou un diplôme d’une école de métiers. Pour environ 27 % des hommes et 21 % des femmes ayant une incapacité, l’école secondaire était leur plus haut niveau de scolarité. Environ trois fois plus d’hommes (13 %) que de femmes (5 %) ayant une incapacité avaient un niveau de scolarité inférieur au diplôme d’études secondaires.

En ce qui concerne le niveau de scolarité, la différence entre les sexes chez les personnes ayant une incapacité suivait généralement une tendance similaire à celle observée chez les personnes sans incapacité. Toutefois, chez les femmes, l’avantage sur le plan de l’éducation semble avoir été plus grand pour les personnes ayant une incapacité que pour celles n’en ayant pas (données non présentées). L’écart entre les sexes dans la part de personnes n’ayant pas terminé leurs études secondaires était comparativement plus faible chez les personnes sans incapacité. Parmi les personnes de 20 à 54 ans qui occupent un emploi, 5 % des femmes et 8 % des hommes sans incapacité avaient moins qu’un diplôme d’études secondaires, ce qui représente un écart d’environ 3 points de pourcentage, comparativement à un écart de 9 points de pourcentage chez les personnes ayant une incapacité. Environ 29 % des femmes et 23 % des hommes sans incapacité avaient fait des études postsecondaires, un écart de 4 points de pourcentage, comparativement à un écart de 13 points entre les personnes ayant une incapacité. Aucune autre différence relativement au niveau de scolarité n’a été observée entre les femmes et les hommes ayant une incapacité.


Tableau 1
Certaines caractéristiques des Canadiens de 20 à 54 ans ayant une incapacité et qui occupent actuellement un emploi, 2017
Sommaire du tableau
Le tableau montre les résultats de Certaines caractéristiques des Canadiens de 20 à 54 ans ayant une incapacité et qui occupent actuellement un emploi Femmes et Hommes, calculées selon Pourcentage unités de mesure (figurant comme en-tête de colonne).
Femmes Hommes
Pourcentage
Groupe d’âge
20 à 24 ans 10,7Note * 8,1
25 à 34 ans 27,8Note * 21,5
35 à 44 ans 28,8 29,2
45 à 54 ans 32,6Note * 41,2
Plus haut niveau de scolarité atteint
Sans diplôme d’études secondaires 4,5Note * 13,4
Diplôme d’études secondaires ou l’équivalent 21,3Note * 26,5
Certificat ou diplôme d’une école de métiers 8,0Note * 14,3
Certificat ou diplôme d’un collège ou d’un cégepNote 1 35,4Note * 22,5
Baccalauréat ou grade de niveau supérieur 30,8Note * 23,2
Sévérité de l’incapacité
Légère 55,6 58,7
Modérée 20,8 21,0
Sévère 15,5 12,8
Très sévère 8,1 7,5
Nombre de différents types d’incapacité
Un 43,8 47,0
Deux ou trois 39,9 37,0
Plus de trois 16,3 16,0
Caractéristiques d’emploi
Temps plein 76,4Note * 88,4
Temps partiel 23,6Note * 11,6
Employé 88,2 86,8
Travailleur autonome 11,8 12,7
Emploi non permanent chez les employés 13,7 11,3
Emploi permanent chez les employés 86,3 88,7
Groupe professionnel
Gestion 5,1Note * 7,8
Affaires, finances et administration 24,6Note * 11,0
Sciences naturelles et appliquées 3,8Note * 10,3
Santé 12,0Note * 2,9Note E: à utiliser avec prudence
Enseignement, droit et services sociaux, communautaires et gouvernementaux 17,8Note * 8,1
Arts, culture, loisirs et sports 3,6 3,3Note E: à utiliser avec prudence
Ventes et services 27,9Note * 21,6
Métiers, transport et machinerie 2,7Note * Note E: à utiliser avec prudence 26,4
Ressources naturelles et agriculture 0,5Note * Note E: à utiliser avec prudence 2,5
Fabrication et services publics 1,8Note * Note E: à utiliser avec prudence 6,1
Salaire (du Recensement de 2016, année de référence : 2015)
Médian ($) 31 100Note * 43 300

Certaines différences non significatives ont été observées entre les femmes et les hommes pour ce qui est de la sévérité de l’incapacité et du nombre de différents types d’incapacité. La majorité des femmes avaient une incapacité légère (56 %) ou modérée (21 %), tandis que les autres avaient une incapacité sévère (16 %) ou très sévère (8 %). Les proportions d’hommes dans chaque catégorie de sévérité étaient assez similaires à celles des femmes. Environ 44 % des femmes et 47 % des hommes avaient un type d’incapacité, 40 % des femmes et 37 % des hommes avaient deux ou trois types d’incapacité, et 16 % des femmes et des hommes avaient quatre types d’incapacité ou plus.

Parmi les personnes ayant une incapacité qui travaillaient à un emploiNote , une proportion significativement plus faible de femmes (76 %) que d’hommes (88 %) travaillaient à temps plein et deux fois plus de femmes (24 %) que d’hommes (12 %) travaillaient à temps partielNote . Une proportion similaire de femmes (88 %) et d’hommes (87 %) étaient employés et 12 % des femmes et 13 % des hommes étaient des travailleurs autonomesNote . Parmi les employés, une proportion similaire de femmes (86 %) que d’hommes (89 %) ayant une incapacité occupaient un emploi permanent.

Il y avait également des différences significatives entre les femmes et les hommes sur le plan du groupe professionnel. Par exemple, environ deux fois plus de femmes (25 %) que d’hommes (11 %) ayant une incapacité travaillaient dans le domaine des affaires, des finances et de l’administration. Environ quatre fois plus de femmes (12 %) que d’hommes (3 %) travaillaient dans le secteur de la santé et environ deux fois plus de femmes (18 %) que d’hommes (8 %) travaillaient dans le secteur de l’éducation, du droit et des services sociaux, communautaires et gouvernementaux. Une plus grande proportion de femmes (28 %) que d’hommes (22 %) travaillaient dans les professions de vente et de services. Une part beaucoup plus élevée d’hommes (26 %) que de femmes (3 %) travaillaient dans les métiers, le transport et la machinerie. Une proportion plus élevée d’hommes (10 %) que de femmes (4 %) travaillaient dans le domaine des sciences naturelles et appliquéesNote .

En 2015, chez les personnes de 20 à 54 ans, le revenu médian avant impôt des femmes ayant une incapacité était de 31 100 $, un moment significativement inférieur à celui des hommes ayant une incapacité (43 300 $)Note .

En somme, les femmes ayant une incapacité étaient en moyenne plus jeunes que les hommes, mais avaient un niveau de scolarité plus élevé. Les femmes étaient plus susceptibles de travailler à temps partiel que les hommes et de toucher des salaires inférieurs aux leurs. Les femmes ayant une incapacité étaient plus susceptibles de travailler dans le domaine des ventes et des services, suivis des affaires, des finances et de l’administration, tandis que les hommes ayant une incapacité étaient plus susceptibles de travailler dans les métiers, le transport et la machinerie. Il n’y avait pas de différences entre les sexes quant à la sévérité ou au nombre des différents types d’incapacité.

Expériences professionnelles

Parmi les personnes ayant une incapacité quelconque qui occupaient un emploi, des proportions similaires de femmes (36 %) et d’hommes (35 %) ont déclaré que leur état de santé limitait le genre ou la quantité de travail qu’elles pouvaient faire dans le cadre de leur emploi ou entreprise (tableau 2, colonne 1). Cette expérience variait selon la sévérité de l’incapacité, mais aucune différence selon le sexe n’a été relevée. Parmi les personnes ayant une incapacité moins sévère, environ le quart des femmes (27 %) et des hommes (25 %) ont déclaré que leur état limitait leur capacité à travailler (tableau 2, colonne 2). C’était le cas pour 67 % des femmes et 72 % des hommes ayant une incapacité plus sévère (tableau 2, colonne 3).


Tableau 2
Expériences professionnelles des Canadiens de 20 à 54 ans ayant une incapacité, selon le sexe et la sévérité de l’incapacité, 2017
Sommaire du tableau
Le tableau montre les résultats de Expériences professionnelles des Canadiens de 20 à 54 ans ayant une incapacité Incapacité quelconque, Incapacité moins sévère , Incapacité lus sévère, Femmes et Hommes, calculées selon Pourcentage unités de mesure (figurant comme en-tête de colonne).
Incapacité quelconque Incapacité moins sévère Incapacité lus sévère
Femmes Hommes Femmes Hommes Femmes Hommes
Pourcentage
Situation de travail
Travail actuel limité par l’état 36,4 34,7 26,8 25,2 67,3 71,7
Changé le genre de travail fait 23,5 24,3 19,0 19,1 38,0 44,7
Changé la quantité de travail fait 30,5Note * 23,6 23,8Note * 18,7 51,8 42,7
Changé d’emploi 21,5 20,3 17,6 16,2 33,8 36,3
Commencé à travailler à la maison 10,1Note * 6,9 7,0 6,0 20,1Note * 10,5
Pris un congé de plus d’un mois 30,3Note * 24,2 25,0Note * 18,7 47,5 46,0
Aucune de ces réponses 44,5Note * 50,4 51,5Note * 57,6 21,9 22,0
Raisons de travailler à travailler à temps partiel
État de santé 27,2 30,1 16,2 14,0Note E: à utiliser avec prudence 51,7 51,6
Soins des enfants 13,0 Note F: trop peu fiable pour être publié 16,2Note E: à utiliser avec prudence Note F: trop peu fiable pour être publié Note F: trop peu fiable pour être publié Note F: trop peu fiable pour être publié
Obligations personnelles ou familiales Note F: trop peu fiable pour être publié Note F: trop peu fiable pour être publié Note F: trop peu fiable pour être publié Note F: trop peu fiable pour être publié Note F: trop peu fiable pour être publié Note F: trop peu fiable pour être publié
Fréquente l’école 9,0Note E: à utiliser avec prudence 11,9Note E: à utiliser avec prudence 10,8Note E: à utiliser avec prudence 13,2Note E: à utiliser avec prudence 4,8Note E: à utiliser avec prudence Note F: trop peu fiable pour être publié
Conjoncture économique 3,0Note E: à utiliser avec prudence Note F: trop peu fiable pour être publié Note F: trop peu fiable pour être publié Note F: trop peu fiable pour être publié Note F: trop peu fiable pour être publié Note F: trop peu fiable pour être publié
N’a pas trouvé de travail à temps plein 2,6Note E: à utiliser avec prudence Note F: trop peu fiable pour être publié 3,4Note E: à utiliser avec prudence Note F: trop peu fiable pour être publié Note F: trop peu fiable pour être publié Note F: trop peu fiable pour être publié
L’emploi est à temps partiel ou un contrat 32,4 28,7 37,7 36,1 20,5Note E: à utiliser avec prudence 18,8Note E: à utiliser avec prudence
Choix personnel 6,1Note E: à utiliser avec prudence 7,9Note E: à utiliser avec prudence 6,1Note E: à utiliser avec prudence Note F: trop peu fiable pour être publié Note F: trop peu fiable pour être publié Note F: trop peu fiable pour être publié
Formation professionnelle
Formation en salle de classe 45,3 41,6 47,2 43,0 39,2 36,1
Formation en milieu de travail 51,5 48,1 53,2 51,2 46,2Note * 35,9
Formation liée à l’emploi non payée par l’employeur 14,2Note * 10,3 13,6Note * 10,0 16,0 11,3Note E: à utiliser avec prudence

Environ 24 % des femmes ayant une incapacité quelconque ont déclaré avoir changé le genre de travail qu’elles font en raison de leur état. Encore une fois, la proportion de femmes dans cette situation variait selon la sévérité de l’incapacité : environ 19 % des femmes ayant une incapacité moins sévère et 38 % des femmes ayant une incapacité plus sévère ont changé le genre de travail qu’elles font en raison de leur état. Alors que 22 % des femmes ayant une incapacité quelconque ont changé d’emploi en raison de leur état, c’était le cas pour environ 18 % des femmes ayant une incapacité moins sévère et 34 % de celles ayant une incapacité plus sévère. Il n’y avait pas de différence significative entre les femmes et les hommes ayant une incapacité en ce qui concerne le changement de genre de travail ou d’emploi en raison de leur état.

Toutefois, certaines différences significatives entre les sexes indiquent que les femmes ayant une incapacité peuvent être désavantagées par rapport aux hommes pour ce qui est de leur situation de travail. Parmi les personnes ayant une incapacité quelconque, une proportion significativement plus élevée de femmes (31 %) que d’hommes (24 %) ont déclaré avoir changé la quantité de travail qu’elles font en raison de leur état (tableau 2, colonne 1). Parmi les personnes ayant une incapacité moins sévère, les pourcentages correspondants étaient de 24 % pour les femmes et de 19 % pour les hommes, ce qui représente une différence statistiquement significative (tableau 2, colonne 2). Enfin, parmi les personnes ayant une incapacité plus sévère, une proportion plus élevée de femmes (52 %) que d’hommes (43 %) ont également fait un tel changement en raison de leur état, mais la différence n’était pas statistiquement significative (tableau 2, colonne 3).

Une plus grande proportion de femmes que d’hommes ont commencé à travailler à la maison en raison de leur état, mais la différence n’était significative que pour les personnes ayant une incapacité quelconque et une incapacité plus sévère. Parmi celles ayant une incapacité plus sévère, la proportion de femmes (20 %) ayant commencé à travailler à la maison en raison de leur état était environ deux fois plus élevée que la proportion d’hommes (11 %). En comparaison, environ 10 % des femmes (par rapport à 7 % des hommes) ayant une incapacité quelconque et 7 % des femmes (par rapport à 6 % des hommes) ayant une incapacité moins sévère ont commencé à travailler à la maison.

Une proportion comparativement plus élevée de femmes que d’hommes ayant une incapacité quelconque (30 % par rapport à 24 %) ou une incapacité moins sévère (25 % par rapport à 19 %) ont pris un congé (de plus d’un mois) en raison de leur état. Toutefois, les proportions étaient similaires entre les hommes et les femmes ayant une incapacité plus sévère; près de la moitié des femmes (48 %) et des hommes (46 %) ayant pris un tel congé.

Dans l’ensemble, moins de femmes que d’hommes ayant une incapacité quelconque (45 % par rapport à 50 %) ou une incapacité moins sévère (52 % par rapport à 58 %) n’ont déclaré aucune des situations de travail ci-dessus; chez les personnes ayant une incapacité plus sévère, la proportion était beaucoup plus faible (22 %), mais elle était similaire entre les femmes et les hommes.

Aux personnes qui ont déclaré travailler à temps partiel, on a demandé la raison principale de cette situation. Mis à part les emplois à temps partiel dès le départ, la principale raison de travailler à temps partiel était l’« état de santé », mais aucune différence significative n’a été relevée entre les sexes pour cette réponse. Environ 27 % des femmes et 30 % des hommes ayant une incapacité quelconque ont indiqué qu’ils travaillaient à temps partiel en raison de leur état de santé, à l’instar d’environ 16 % des femmes et 14 % des hommes ayant une incapacité moins sévère. Quant aux personnes ayant une incapacité plus sévère 52 % des femmes ainsi que des hommes ont indiqué travailler à temps partiel en raison de leur état de santé.

Les soins à donner aux enfants ont aussi été cités comme raison de travailler à temps partiel. Environ 13 % des femmes ayant une incapacité quelconque ont indiqué qu’elles travaillaient à temps partiel en raison de leurs responsabilités en matière de soins aux enfants. En général, les soins aux enfants sont l’une des raisons pour lesquelles les femmes (ayant une incapacité ou non) ayant des enfants travaillent à temps partiel (Moyser, 2017). Environ le tiers des femmes ayant une incapacité quelconque travaillaient à temps partiel parce qu’elles occupaient un emploi à temps partiel ou faisaient un travail à contrat et n’avaient pas la possibilité de travailler un plus grand nombre d’heures. Une proportion similaire d’hommes ayant une incapacité quelconque ont déclaré travailler à temps partiel pour la même raison. En général, les raisons invoquées pour travailler à temps partiel étaient similaires entre les femmes et les hommes ayant une incapacité.

Certaines différences entre les sexes ont été enregistrées sur le plan de la formation en milieu de travail. Chez les personnes ayant une incapacité plus sévère, environ 46 % des femmes comparativement à 36 % des hommes ont suivi une formation liée à l’emploi fournie par leur employeur. Chez les personnes ayant une incapacité moins sévère, une part un peu plus élevée de femmes que d’hommes (14 % par rapport à 10 %) ont suivi une formation liée à l’emploi qui n’était pas payée par leur employeur. Quelle que soit la sévérité de l’incapacité, une proportion similaire d’hommes et de femmes ont reçu une formation en salle de classe.

En résumé, les femmes ayant une incapacité étaient plus susceptibles que leurs homologues masculins de changer la quantité de travail qu’elles font, de commencer à travailler à la maison et de prendre un congé. Les raisons pour lesquelles les femmes et les hommes travaillaient à temps partiel étaient également liées à l’incapacité, même si les données pour certaines réponses étaient trop faibles pour être diffusées. On a observé certaines différences entre les sexes pour ce qui est de la formation en milieu de travail : un plus grand nombre de femmes que d’hommes ayant une incapacité plus sévère ont suivi une formation liée à l’emploi fournie par leur employeur et un plus grand nombre de femmes que d’hommes ayant une incapacité moins sévère ont suivi une formation liée à l’emploi qui n’était pas payée par leur employeur.

Mesures d’adaptation en milieu de travail

Les obstacles environnementaux à la participation sont une importante source d’incapacité (MacKenzie, Hurst et Crompton, 2009; OMS, 2001). Par exemple, un milieu de travail n’offrant pas de mesures d’adaptation impose un désavantage social aux personnes ayant une incapacité. L’ECI comportait une série de questions sur les mesures d’adaptation en milieu de travail dont les personnes ayant une incapacité ont déclaré avoir besoin en raison de leur état, ainsi qu’un ensemble de questions de suivi pour savoir si ces mesures d’adaptation leur étaient offertesNote . Les résultats de cette section englobent les personnes qui occupaient un emploi au moment de l’enquête ainsi qu’au cours des cinq années précédentes.


Tableau 3
Mesures d’adaptation en milieu de travail pour les Canadiens de 20 à 54 ans ayant une incapacité, selon le sexe et la sévérité de l’incapacité, 2017
Sommaire du tableau
Le tableau montre les résultats de Mesures d’adaptation en milieu de travail pour les Canadiens de 20 à 54 ans ayant une incapacité. Les données sont présentées selon Mesures d’adaptation en milieu de travail (titres de rangée) et Incapacité quelconque, Incapacité moins sévère, Incapacité plus sévère, Femmes et Hommes, calculées selon Pourcentage unités de mesure (figurant comme en-tête de colonne).
Mesures d’adaptation en milieu de travail Incapacité quelconque Incapacité moins sévère Incapacité plus sévère
Femmes Hommes Femmes Hommes Femmes Hommes
pourcentage
Mesures d’adaptation nécessaires
Tâches modifiées ou différentes 16,2 14,9 9,5 8,6 36,1 35,8
Travail à la maison (télétravail) 12,8Note * 5,9 8,6Note * 4,0Note E: à utiliser avec prudence 25,3Note * 12,5
Horaire flexible ou réduction du temps de travail 25,4Note * 15,8 18,0Note * 10,0 47,3Note * 35,1
Poste de travail modifié 14,3Note * 6,7 10,8Note * 4,4Note E: à utiliser avec prudence 24,6Note * 14,3
Chaise spéciale ou soutien dorsal 14,7Note * 8,6 10,3Note * 5,4Note E: à utiliser avec prudence 27,7Note * 18,9
Mesures d’adaptation disponibles
Tâches modifiées ou différentes 49,9 54,8 53,8 54,9 46,9 54,7
Travail à la maison (télétravail) 49,2 52,9 55,5 73,2 42,8 32,2Note E: à utiliser avec prudence
Horaire flexible ou réduction du temps de travail 64,4 63,3 66,9 69,4 61,6 57,6
Poste de travail modifié 57,2 53,1 62,4 63,5 50,6 42,4
Chaise spéciale ou soutien dorsal 53,2 53,1 60,2 69,7 45,4 37,1Note E: à utiliser avec prudence

Pour la plupart des mesures d’adaptation en milieu de travail dont les répondants ont déclaré avoir besoin, il y avait des différences significatives entre les femmes et les hommes ayant une incapacité quelconque, une incapacité moins sévère et une incapacité plus sévère (tableau 3). En général, une proportion significativement plus élevée de femmes avaient besoin de mesures d’adaptation pour pouvoir travailler. Environ deux fois plus de femmes que d’hommes avaient besoin d’un régime de télétravail. C’était le cas pour 13 % des femmes ayant une incapacité quelconque, pour 9 % des femmes ayant une incapacité moins sévère et pour 25 % des femmes ayant une incapacité plus sévère. Parmi les femmes qui en avaient besoin, un régime de télétravail était offert à un peu plus de la moitié de celles ayant une incapacité moins sévère (56 %), comparativement à près des trois quarts des hommes (73 %), mais cette différence n’était pas statistiquement significative. Environ 43 % des femmes et 32 % des hommes ayant une incapacité plus sévère avaient accès à un régime de télétravail, ce qui ne représentait pas une différence significative.

Parmi les personnes ayant une incapacité quelconque, 25 % des femmes comparativement à 16 % des hommes avaient besoin d’un horaire flexible ou de la réduction de leur temps de travail (une différence significative). Parmi les personnes ayant une incapacité moins sévère, ce besoin a été manifesté par une proportion significativement plus élevée de femmes (18 %) que d’hommes (10 %). Une telle mesure d’adaptation était accessible à une part similaire de femmes (67 %) et d’hommes (69 %) ayant une incapacité moins sévère. Parmi les personnes ayant une incapacité plus sévère, environ la moitié des femmes (47 %) et le tiers des hommes (35 %) avaient besoin d’un horaire flexible ou de la réduction de leur temps de travail (une différence significative), et cette mesure était offerte à 62 % des femmes et à 58 % des hommes, mais cette différence entre les sexes n’était pas significative.

Chez les personnes ayant une incapacité moins sévère, la proportion de femmes (11 %) qui avaient besoin d’un poste de travail modifié ou ergonomique était plus de deux vois plus élevé que la proportion d’hommes (4 %). Parmi ceux qui en avaient besoin, environ les deux tiers des femmes (62 %) et des hommes (64 %) avaient accès à une telle mesure d’adaptation. Chez les personnes ayant une incapacité plus sévère, une proportion significativement plus élevée de femmes (25 %) que d’hommes (14 %) avaient aussi besoin d’un poste de travail modifié, et environ la moitié des femmes (51 %) et moins de la moitié des hommes (42 %) y avaient accès (différence non significative). Une proportion significativement plus élevée de femmes que d’hommes ayant une incapacité quelconque, une incapacité moins sévère ou une incapacité plus sévère avaient besoin d’une chaise spéciale ou d’un soutien dorsal. Environ 60 % des femmes ayant une incapacité moins sévère (par rapport à 70 % des hommes) et 45 % des femmes ayant une incapacité plus sévère (par rapport à 37 % des hommes) y avaient accès (pas de différence significative entre les sexes).

Dans l’ensemble, une proportion plus élevée de femmes que d’hommes ont déclaré des besoins en matière de mesures d’adaptation au travail, mais il y avait des différences non significatives entre les sexes quant à l’accès à ces mesures.

Discrimination perçue sur le marché du travail

Dans le cadre de l’ECI, des questions ont aussi été posées aux répondants à propos de leur perception de la discrimination sur le marché du travail au cours des cinq dernières années. Par conséquent, à l’instar de la section précédente, les résultats englobent les personnes qui occupaient un emploi au moment de l’enquête ainsi qu’au cours des cinq années précédentes. Environ 7 % des femmes et 9 % des hommes ayant une incapacité quelconque ont déclaré s’être vu refuser une entrevue au cours des cinq années précédentes en raison de leur état (une différence significative) (tableau 4). Cette différence semble être attribuable au fait que moins de femmes que d’hommes ayant une incapacité plus sévère ont fait état d’une telle expérience (13 % par rapport à 20 %). Aucune autre différence entre les sexes n’a été relevée pour les éléments liés à la discrimination perçue sur le marché du travail (tableau 4).


Tableau 4
Discrimination perçue sur le marché du travail chez les Canadiens de 20 à 54 ans ayant une incapacité, selon le sexe et la sévérité de l’incapacité, 2017
Sommaire du tableau
Le tableau montre les résultats de Discrimination perçue sur le marché du travail chez les Canadiens de 20 à 54 ans ayant une incapacité Incapacité quelconque, Incapacité moins sévère, Incapacité plus sévère, Femmes et Hommes, calculées selon Pourcentage unités de mesure (figurant comme en-tête de colonne).
Incapacité quelconque Incapacité moins sévère Incapacité plus sévère
Femmes Hommes Femmes Hommes Femmes Hommes
Pourcentage
Discrimination perçue sur le marché du travail
S’est vu refuser une entrevue 6,9Note * 9,4 4,3 5,7 13,4Note * 19,7
S’est vu refuser un emploi 11,2 13,2 7,1 8,8 21,8 25,5
S’est vu refuser une promotion 10,5 10,8 7,1 7,9 19,1 18,9
Se considère comme désavantagé 32,7 33,3 22,0 22,7 59,9 64,4
Pense être considéré comme désavantagé 32,0 32,8 21,3 22,0 59,8 65,1

Bien qu’aucune autre différence entre les sexes n’ait été observée pour les éléments sélectionnés liés à la discrimination perçue sur le marché du travail, les différences non significatives méritent d’être signalées afin de donner un aperçu de la prévalence de la discrimination perçue chez les personnes ayant une incapacité. Par exemple, 7 % des femmes et 9 % des hommes ayant une incapacité moins sévère estimaient s’être vu refuser un emploi au cours des cinq dernières années en raison de leur état, comparativement à 22 % des femmes et à 26 % des hommes ayant une incapacité plus sévère. Environ 7 % des femmes et 8 % des hommes ayant une incapacité moins sévère ont indiqué s’être vu refuser une promotion en raison de leur état de santé, comparativement à environ 19 % des femmes et des hommes ayant une incapacité plus sévère.

Environ 60 % des femmes ayant une incapacité plus sévère se considéraient désavantagées sur le plan du travail en raison de leur état. En comparaison, c’était le pas pour 64 % des hommes ayant une incapacité plus sévère et pour 22 % des femmes ayant une incapacité moins sévère. Environ 60 % des femmes ayant une incapacité plus sévère estimaient qu’un employeur actuel ou éventuel les considérerait comme étant désavantagées sur le plan du travail à cause de leur état, comparativement à 65 % des hommes ayant une incapacité plus sévère et à 21 % des femmes ayant une incapacité moins sévère.

Dans l’ensemble, les perceptions de la discrimination sur le marché du travail étaient généralement similaires entre les femmes et les hommes ayant une incapacité, quelle que soit la sévérité de leur incapacité. Une différence digne de mention a cependant été relevée : moins de femmes que d’hommes ayant une incapacité (en particulier celles ayant une incapacité plus sévère) ont déclaré s’être vu refuser une entrevue au cours des cinq dernières années en raison de leur état de santé.

Conclusion

La présente étude a comparé les expériences professionnelles des femmes et des hommes ayant une incapacité, notamment en ce qui concerne les changements de situation professionnelle, les raisons de travailler à temps partiel, les mesures d’adaptation en milieu de travail et la discrimination perçue sur le marché du travail. Un accent particulier a été mis sur la sévérité de l’incapacité. Plusieurs interprétations déterminantes peuvent découler des résultats obtenus.

Premièrement, il semble que l’existence d’une incapacité ait des conséquences plus importantes sur la situation d’emploi des femmes que celle des hommes. Lorsqu’on leur a demandé si leur situation de travail avait changé en raison de leur état, une proportion significativement plus élevée de femmes ayant une incapacité ont déclaré avoir changé la quantité de travail qu’elles font, avoir commencé à travailler à la maison (télétravail) ou avoir pris un congé. Cependant, une proportion similaire de femmes et d’hommes ayant une incapacité ont déclaré que leur état de santé limitait leur travail actuel ou les avait incités à changer de genre de travail. À partir de cette analyse, il n’est pas possible de conclure si les différences entre les sexes dans l’évolution de la situation d’emploi constituent un désavantage pour les femmes ayant une incapacité. En effet, des différences observées (p. ex. sur le plan télétravail) pourraient découler de modalités de travail flexible ou de mesures d’adaptation au travail, qui peuvent être considérées comme des expériences professionnelles positives appuyant l’emploi des femmes ayant une incapacité.

Deuxièmement, comme au sein de la population générale, les soins à donner aux enfants sont l’une des principales raisons de travailler à temps partiel invoquées par les femmes ayant une incapacité. Dans la plupart des cas, l’état de santé de la personne faisait en sorte qu’il lui était nécessaire de travailler à temps partiel. En effet, environ la moitié des femmes ayant une incapacité plus sévère ont déclaré travailler à temps partiel en raison de leur état de santé. C’était aussi le cas pour une proportion similaire d’hommes ayant une incapacité plus sévère.

Troisièmement, une proportion plus élevée de femmes que d’hommes ayant une incapacité plus sévère ont suivi une formation en milieu de travail fournie par leur employeur et une proportion plus élevée de femmes que d’hommes ayant une incapacité moins sévère ont suivi une formation liée à l’emploi qui n’était pas payée par leur employeur.

Quatrièmement, une proportion plus grande de femmes que d’hommes ayant une incapacité ont déclaré avoir besoin de mesures d’adaptation en milieu de travail. Les femmes avaient notamment besoin d’un régime de télétravail, d’un horaires flexibles ou de la réduction de leur temps de travail, et de mobilier de bureau spécialisé dans une plus grande mesure que les hommes. Faire la lumière sur les raisons potentielles de ces différences dépassait la portée de la présente étude. Il convient de noter que les résultats n’ont pas fait ressortir de différences entre les sexes en ce qui concerne les mesures d’adaptation offertes.

Néanmoins, une proportion marquée de femmes et d’hommes ayant une incapacité ont déclaré ne pas avoir accès aux mesures d’adaptation dont elles avaient besoin pour pouvoir travailler. La combinaison du besoin accru de mesures d’adaptation en milieu de travail et de l’absence générale de telles mesures pourrait contribuer en partie à des taux d’emploi plus faibles et à des taux plus élevés de travail à temps partiel, en particulier chez les femmes ayant une incapacité. Par exemple, environ la moitié des femmes ayant une incapacité qui ont déclaré avoir besoin de tâches modifiées ou de télétravail n’avaient pas accès à ces mesures d’adaptation. Plus de la moitié d’entre elles n’avaient pas accès à du mobilier de bureau spécialisé. Un peu moins des deux tiers des employés n’avaient pas accès à un emploi offrant un horaire de travail flexible. Ces besoins non comblés en matière de mesures d’adaptation peuvent fournir des pistes pour reconnaître les obstacles potentiels liés aux expériences professionnelles des femmes et des hommes ayant une incapacité. Des recherches plus approfondies sont nécessaires pour mieux comprendre les facteurs à l’origine de l’absence de certaines mesures d’adaptation afin de prévenir les obstacles à l’accessibilité dans le domaine de l’emploi.

Enfin, les perceptions de la discrimination sur le marché du travail étaient généralement similaires entre les hommes et les femmes ayant une incapacité, à une exception près. Moins de femmes que d’hommes ayant une incapacité, en particulier celles ayant une incapacité plus sévère, ont déclaré s’être vu refuser une entrevue au cours des cinq dernières années en raison de leur état de santé. Pourtant, environ le tiers des femmes et des hommes ayant une incapacité se considéraient désavantagés sur le plan du travail en raison de leur état.

En conclusion, les résultats de cette étude pourraient être utiles pour reconnaître les obstacles que doivent potentiellement surmonter les femmes et les hommes dans le domaine de l’emploi. D’autres recherches sont également nécessaires pour déterminer la mesure dans laquelle les différences sur le plan des expériences professionnelles varient selon le type d’incapacité et les caractéristiques démographiques. En raison des limites des données, il n’a pas été possible de réaliser une analyse plus approfondie tenant compte de la désagrégation multiple, et les résultats n’excluent pas la possibilité que des facteurs de confusion comme l’âge ou le type d’incapacité aient contribué à des similarités ou à des différences entre les femmes et les hommes ayant une incapacité relativement à leurs expériences professionnelles.

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