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Accent sur l’innovation : exploration des tendances relatives au développement de technologies de pointe au moyen des demandes de brevet
par Dominique Gagnon et Sicong Ma
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Résumé
Le présent article explore les tendances relatives aux demandes de brevet déposées par des entreprises résidentes du Canada pour des technologies de pointe entre 2001 et 2019, en s’appuyant sur l’agrégation des brevets de haute technologie d’Eurostat. Environ le tiers des demandes relèvent de catégories de haute technologie, dont la plupart sont associées aux technologies des communications ainsi que de l’équipement informatique et de l’équipement de bureau automatisé. Si ces domaines ont affiché une croissance jusqu’en 2012, un déclin a ensuite été observé, notamment dans le sous-secteur de la fabrication de produits informatiques et électroniques. Les domaines de la biotechnologie, des semi-conducteurs et des lasers ont montré un dynamisme limité, tandis que les demandes dans le domaine de la technologie de l’aviation ont été multipliées par près de 20 au cours de la période examinée. En nous penchant sur les extrants de l’innovation selon le statut d’entreprise multinationale des demandeurs, nous constatons que les entreprises multinationales canadiennes (EMN) ont généré davantage d’actifs de propriété intellectuelle, 4 demandes de brevet de haute technologie sur 5 émanant d’entités sous contrôle canadien.
Contexte
Les technologies de pointe jouent un rôle essentiel dans le développement économique d’un pays fortement industrialisé comme le Canada. L’évolution constante de la technologie a une incidence sur les entreprises de haute technologie qui s’efforcent de maintenir leur position à la pointe de l’innovation, jouant ainsi un rôle crucial dans le façonnement de l’avenir des industries et des sociétés. Non seulement l’adoption et l’exploitation des technologies de pointe alimentent la croissance économique, mais en plus, elles augmentent la productivité et la compétitivité mondiale d’un pays.
Le système des brevets peut être un moteur essentiel du progrès technologique. En octroyant des droits exclusifs sur l’exploitation de technologies nouvellement développées pendant une période déterminée, ce système incite les entreprises à prendre part aux efforts d’innovation. À l’appui de cette notion, les recherches menées par Abbes, Baldwin et Leung (2022b) révèlent que les entreprises résidentes du Canada qui ont déposé une demande de brevet étaient 7,5 % plus susceptibles de connaître une forte croissance de l’emploi et 12,9 % plus susceptibles de connaître une forte croissance des revenus que leurs homologues qui n’avaient pas déposé de demande de brevet.
Au-delà de sa fonction première de protection des investissements créatifs d’une organisation, le système des brevets facilite également la collecte de données relatives aux technologies. L’analyse des statistiques sur les brevets permet de comprendre les niveaux de maturité des différentes technologies et de dégager les tendances émergentes dans le paysage technologique national. En examinant méticuleusement les demandes de brevet liées à la technologie ainsi que le nombre de demandeurs, il est possible de déterminer si les initiatives de recherche présentent une concentration ou une dispersion. En outre, l’analyse des statistiques sur les brevets permet de déterminer les compétences régionales dans des secteurs technologiques précis dans un contexte national.
Les données utilisées pour cette analyse proviennent de la base de données de recherche sur les brevets canadiens (BDRBC), qui est construite en couplant la base de données mondiale sur les statistiques en matière de brevets (PATSTAT) de l’Office européen des brevets (OEB) à d’autres fonds de données administratives de Statistique Canada. Abbes, Baldwin, Gibson et Leung (2022a) ont décrit la méthodologie employée pour l’élaboration de la BDRBC. En outre, leurs travaux mettent en lumière l’évolution des tendances relatives aux demandes de brevet déposées par des entreprises résidentes du Canada de 2001 à 2015. Ils observent notamment une augmentation des demandes émanant de petites entreprises dans les services, ce qui contraste avec la baisse des demandes émanant de grandes entreprises manufacturières au cours de la même période. Gibson et Leung (2023) donnent un éclairage supplémentaire sur les améliorations méthodologiques apportées à la base de données. Parmi ces améliorations, notons les suivantes : la BDRBC inclut désormais toutes les entreprises qui déposent des demandes de brevet et non plus seulement la première entreprise sur chaque demande, le taux de couplage amélioré garantit davantage l’exhaustivité des renseignements, et les séries ont été actualisées pour inclure l’activité jusqu’en 2019.
Le présent article, qui repose sur les statistiques sur les demandes de brevet déposées par des entreprises résidentes du Canada et qui couvre les années 2001 à 2019, vise à mettre en évidence les tendances relatives au développement de technologies clés au Canada, en se concentrant sur un panier de demandes de brevet de haute technologie obtenu par l’agrégation des brevets de haute technologie d’Eurostat. Cette agrégation utilise la sous-classe de la Classification internationale des brevets (CIB) pour classer les demandes en six groupes de technologies de pointe : équipement informatique et équipement de bureau automatisé , aviation , lasers , semi-conducteurs , technologie des communications et biotechnologie . Pour les besoins de cette analyse, la BDRBC est également couplée aux données des Activités des entreprises multinationales (AEMN) afin de déterminer les entreprises multinationales (EMN).
Les demandes de brevet de haute technologie représentent le tiers des demandes de brevet déposées par des entreprises résidentes du Canada de 2001 à 2019
Dans l’ensemble, les demandes de brevet déposées par des entreprises résidentes du Canada ont affiché une forte hausse de 2001 à 2007 (+42,1 %), suivie d’une diminution (-10,7 %) pendant la crise financière de 2008-2009. Le nombre de demandes est remonté de 2009 à 2011 (+18,0 %), mais a de nouveau baissé dans les années qui ont suivi pour s’établir à son niveau le plus bas en 2016 (-17,7 %).
Les demandes de brevet de haute technologie ont représenté une part importante (33,1 % en moyenne) de l’ensemble des demandes de brevet de 2001 à 2019. Cette proportion a atteint un pic de 38,6 % en 2012, avant de redescendre en 2019 pour s’établir à 26,6 %. Les demandes de brevet de haute technologie ont affiché une forte hausse de 2001 à 2006 (+46,0 %), suivie d’une réduction modérée de 2006 à 2009 (-6,7 %), puis d’une nouvelle période de croissance jusqu’au pic de 2012 (+19,2 %). Toutefois, après ce pic, on a observé un écart important par rapport à la trajectoire de croissance antérieure, les demandes ayant chuté de 41,9 % de 2012 à 2019.
Tableau de données du graphique 1
Brevets | Brevets de haute technologie | |
---|---|---|
nombre d'application | ||
2001 | 9 343 | 3 271 |
2002 | 10 170 | 3 471 |
2003 | 10 706 | 3 513 |
2004 | 10 891 | 4 041 |
2005 | 11 591 | 4 293 |
2006 | 12 696 | 4 777 |
2007 | 13 277 | 4 755 |
2008 | 12 543 | 4 620 |
2009 | 11 852 | 4 456 |
2010 | 13 560 | 4 986 |
2011 | 13 983 | 5 224 |
2012 | 13 775 | 5 311 |
2013 | 13 690 | 4 396 |
2014 | 13 242 | 3 555 |
2015 | 12 382 | 3 212 |
2016 | 11 511 | 3 232 |
2017 | 11 713 | 3 040 |
2018 | 11 661 | 3 087 |
2019 | 11 613 | 3 087 |
Source : Base de données de recherche sur les brevets canadiens (BDRBC). |
La majeure partie de la croissance et du déclin subséquent des demandes de brevet de haute technologie de 2001 à 2019 est attribuable aux technologies des communications ainsi que de l’équipement informatique et de l’équipement de bureau automatisé
Les demandes de brevet concernant l’équipement informatique et l’équipement de bureau automatisé, ainsi que la technologie des communications, ont représenté la plus grande part des demandes de brevet de haute technologie de 2001 à 2019. Elles étaient également à l’origine de la majeure partie de la croissance des demandes de brevet de haute technologie de 2001 à 2012 et du déclin qui s’en est suivi. La variation du nombre de demandes pour ces deux groupes de technologies était principalement attribuable au sous-secteur de la fabrication de produits informatiques et électroniques, et correspondait à la hausse et au déclin de la position dominante du Canada dans la fabrication d’appareils mobiles.
De 2002 à 2006, les demandes de brevet concernant la technologie des communications ont affiché un solide taux de croissance annualisé de 9,2 %. Le développement dans ce domaine a ralenti de 2006 à 2009, les demandes ayant diminué à un taux annualisé de -6,0 %. Toutefois, ce taux annualisé s’est redressé à la suite de la crise financière pour se situer à 5,0 % de 2009 à 2012. Parallèlement, les demandes de brevet concernant la technologie de l’équipement informatique et de l’équipement de bureau automatisé ont affiché un taux de croissance annualisé de 23,6 % de 2002 à 2006, rattrapant rapidement le niveau des demandes de brevet concernant la technologie des communications. Malgré une légère baisse de 5,2 % de 2006 à 2008, les demandes pour la technologie de l’équipement informatique et de l’équipement de bureau automatisé ont de nouveau dépassé la croissance des demandes observée dans le domaine de la technologie des communications pendant la reprise, affichant un taux de croissance annualisé de 8,9 % de 2009 à 2012. Toutefois, les années qui ont suivi 2012 ont présenté des défis, les technologies des communications ainsi que de l’équipement informatique et de l’équipement de bureau automatisé ayant connu une diminution rapide des demandes de brevet, en particulier dans le sous-secteur de la fabrication de produits informatiques et électroniques.
Tableau de données du graphique 2
Brevets de haute technologie | Communication | Équipement informatique et équipement de bureau automatisé | Autres brevets de haute technologie | |
---|---|---|---|---|
nombre d'application | ||||
2001 | 3 271 | 2 015 | 777 | 869 |
2002 | 3 471 | 1 925 | 809 | 1 120 |
2003 | 3 513 | 2 056 | 1 056 | 851 |
2004 | 4 041 | 2 429 | 1 444 | 860 |
2005 | 4 293 | 2 608 | 1 616 | 717 |
2006 | 4 777 | 2 739 | 1 887 | 713 |
2007 | 4 755 | 2 555 | 1 884 | 851 |
2008 | 4 620 | 2 448 | 1 789 | 961 |
2009 | 4 456 | 2 277 | 1 844 | 842 |
2010 | 4 986 | 2 584 | 2 040 | 907 |
2011 | 5 224 | 2 615 | 2 414 | 805 |
2012 | 5 311 | 2 637 | 2 381 | 888 |
2013 | 4 396 | 2 210 | 1 865 | 893 |
2014 | 3 555 | 1 618 | 1 526 | 948 |
2015 | 3 212 | 1 498 | 1 281 | 907 |
2016 | 3 232 | 1 424 | 1 240 | 1 034 |
2017 | 3 040 | 1 238 | 1 106 | 1 067 |
2018 | 3 087 | 1 239 | 1 139 | 1 109 |
2019 | 3 087 | 1 253 | 1 238 | 1 017 |
Source : Base de données de recherche sur les brevets canadiens (BDRBC). |
Le nombre de demandes concernant la technologie de l’aviation se rapproche de celui des demandes pour la biotechnologie après avoir dépassé celui des demandes pour les technologies des semi-conducteurs et laser
Sur l’ensemble de la période examinée, le paysage des demandes de brevet de haute technologie au Canada révèle des trajectoires distinctes pour divers secteurs technologiques. Les demandes de brevet concernant la biotechnologie se sont classées au troisième rang des demandes de brevet de haute technologie les plus courantes, leur nombre demeurant relativement stable (environ 600 demandes) après avoir diminué par rapport au pic de 2002 (850 demandes). En revanche, les demandes concernant la technologie de l’aviation ont affiché une croissance annualisée de 18,2 % par année. Cette tendance à la hausse a fait en sorte que leur nombre a dépassé celui des demandes concernant la technologie laser en 2003 et la technologie des semi-conducteurs en 2013. Notamment, en 2019, il ne manquait plus que 103 demandes de brevet pour que la technologie de l’aviation dépasse la biotechnologie en ce qui concerne la fréquence. Dans le même temps, le nombre de demandes concernant la technologie des semi-conducteurs s’est maintenu à une moyenne de 151 demandes par année, atteignant un pic de 200 en 2008 et affichant un recul en 2019 pour s’établir à 133. À l’instar du nombre de demandes concernant la biotechnologie, celui des demandes pour la technologie laser a atteint un pic de 70 demandes en 2001 et 2002, mais est resté relativement faible depuis.
Tableau de données du graphique 3
Biotechnologie | Aviation | Semiconducteurs | Lasers | |
---|---|---|---|---|
nombre d'application | ||||
2001 | 655 | 19 | 128 | 67 |
2002 | 850 | 39 | 161 | 70 |
2003 | 606 | 85 | 125 | 35 |
2004 | 650 | 36 | 153 | 21 |
2005 | 513 | 43 | 144 | 17 |
2006 | 494 | 56 | 153 | 10 |
2007 | 585 | 72 | 164 | 30 |
2008 | 645 | 92 | 200 | 24 |
2009 | 620 | 53 | 145 | 24 |
2010 | 626 | 65 | 186 | 30 |
2011 | 561 | 58 | 178 | 8 |
2012 | 613 | 82 | 179 | 14 |
2013 | 640 | 94 | 143 | 16 |
2014 | 577 | 184 | 171 | 16 |
2015 | 584 | 207 | 102 | 14 |
2016 | 592 | 291 | 141 | 10 |
2017 | 585 | 321 | 150 | 11 |
2018 | 613 | 338 | 115 | 43 |
2019 | 487 | 384 | 133 | 13 |
Source : Base de données de recherche sur les brevets canadiens (BDRBC). |
Le nombre de demandes de brevet de haute technologie déposées par des EMN sous contrôle canadien dépasse celui des demandes de leurs homologues sous contrôle étranger
En s’appuyant sur les données du programme des Activités des entreprises multinationales (AEMN)Note , il est possible d’examiner la contribution des EMN à l’innovation dans le secteur de la haute technologie au Canada. En prenant 2019 comme année de référence, le programme des AEMN fait état de la présence au Canada de 13 528 EMN sous contrôle canadien, de 17 794 EMN sous contrôle étranger et de 2 789 565 entreprises non multinationales.
Si l’on compare les EMN sous contrôle canadien à leurs homologues sous contrôle étranger, on observe des intensités semblables sur le plan des dépenses intra-muros en R-D, les deux groupes ayant dépensé environ 520 milliers de dollars par entreprise. En outre, l’intensité au chapitre du personnel affecté à la R-D est légèrement plus élevée pour les EMN sous contrôle canadien (3,54 personnes par entreprise) que pour les EMN sous contrôle étranger (3,38 personnes par entreprise). Toutefois, ces chiffres comparables se traduisent par une formation brute de capital fixe (FBCF) en propriété intellectuelle (PI) nettement plus importante pour les EMN sous contrôle canadien (1,37 million de dollars par entreprise) que pour leurs homologues sous contrôle étranger (0,77 million de dollars par entreprise). En d’autres termes, les EMN canadiennes semblent générer davantage d’actifs de propriété intellectuelle pour un niveau d’investissement en R-D semblable.
Nombre d'entreprises | Dépenses de R-D intramural | Personnel de R-D | FBCF de PI | |
---|---|---|---|---|
Nombre | Millions de dollar | Nombre | Millions de dollars | |
EMN sous contrôle canadien | 13 528 | 7 003 | 47 938 | 18 543 |
EMN sous contrôle étranger | 17 794 | 9 287 | 60 184 | 13 632 |
Non-EMN | 2 789 565 | 5 630 | 60 266 | 14 596 |
Source: Tableau 36-10-0356-01 Activités des entreprises multinationales au Canada, multinationales canadiennes et étrangères, en proportion de l’économie canadienne |
En ce qui concerne les demandes de brevet, alors qu’environ 1 demande sur 4 émanant d’EMN sous contrôle étranger était liée à une technologie de pointe, le chiffre était plus proche de 1 sur 3 pour les EMN sous contrôle canadien. En outre, la majorité des demandes de brevet de haute technologie déposées par des entreprises résidentes du Canada provenaient d’entités sous contrôle canadien. En moyenne, dans les domaines de la haute technologie, si l’on exclut les demandes liées à l’aviation, pas moins de 85 % des demandes de brevet émanaient d’entreprises sous contrôle canadien. Cela peut paraître surprenant à première vue, étant donné qu’à l’échelle mondiale, la plupart des entreprises de haute technologie sont des EMN sous contrôle étranger et que nombre d’entre elles ont des filiales au Canada. Cela peut laisser entendre que, dans une certaine mesure, ces EMN sous contrôle étranger n’effectuent peut-être pas une grande partie de leur R-D de haute technologie au Canada, mais se concentrent plutôt sur des activités opérationnelles telles que le commerce de gros et la distribution, la production et l’assemblage, les ventes et le marketing, le lobbying et le soutien à la clientèle. Même si le Canada dispose de restrictions limitant le contrôle étranger des opérateurs de télécommunications et des transporteurs aériens au Canada à un maximum de 20 % et de 49 % respectivement, cela n’a pas une grande incidence dans les domaines technologiques concernés, puisqu’aucun de ces groupes d’industries ne représente une part importante des demandes dans l’un ou l’autre des domaines.
À l’inverse, dans le domaine de l’aviation, les EMN sous contrôle étranger sont à l’origine de la majorité (52,6 %) des demandes. Cela correspond à l’idée plus générale que le domaine aérospatial est largement dominé par quelques grandes EMN américaines et européennes qui remplissent des fonctions à la fois commerciales et militaires, et que la R-D la plus risquée est très souvent directement financée par la part du budget consacrée à la défense nationale. Les intérêts stratégiques cruciaux des grandes puissances contribuent à façonner un domaine tributaire des politiques et des mesures de protection qui limitent la capacité des entreprises sous contrôle canadien à être compétitives dans le domaine, comme l’illustre le cas récent des appareils C Series de BombardierNote .
Sous contrôle canadien | Sous contrôle étranger | |||
---|---|---|---|---|
EMN | Non-EMN | EMN et Non-EMN | EMN | |
pourcentage | ||||
Demandes qui sont de H-T selon le statut d’EMN | ||||
Tout H-T | 0,32 | 0,22 | 0,27 | 0,26 |
Répartition des demandes de H-T selon le statut d’EMN | ||||
Tout H-T | 0,48 | 0,32 | 0,80 | 0,20 |
Lasers | 0,46 | 0,31 | 0,77 | 0,23 |
Aviation | 0,35 | 0,12 | 0,47 | 0,53 |
Communication | 0,55 | 0,27 | 0,82 | 0,18 |
Biotechnologie | 0,29 | 0,59 | 0,88 | 0,12 |
Semiconducteurs | 0,49 | 0,44 | 0,93 | 0,07 |
Équipements informatiques et automatisés pour les entreprises | 0,55 | 0,31 | 0,86 | 0,14 |
Source: Base de données de recherche sur les brevets canadiens (BDRBC), Tableau 36-10-0356-01 Activités des entreprises multinationales au Canada, multinationales canadiennes et étrangères, en proportion de l’économie canadienne |
Si l’on élargit l’analyse au nombre d’entreprises, aux dépenses intra-muros en R-D et au personnel affecté à la R-D, on constate que les EMN sous contrôle canadien dépassent leurs homologues sous contrôle étranger au chapitre des demandes de brevet de haute technologie par entreprise (0,109 par rapport à 0,034), par employé affecté à la R-D (0,031 par rapport à 0,010) et pour ce qui est des demandes de brevet de haute technologie par million de dollars de dépenses en R-D (0,210 par rapport à 0,066). Inversement, malgré le grand nombre d’entreprises non multinationales au pays (comprenant la plupart des petites et moyennes entreprises [PME]) qui se traduit par un faible taux de demandes de brevet de haute technologie par entreprise, les entreprises non multinationales au Canada ont dépassé les EMN sous contrôle étranger au chapitre du taux de demandes de brevet de haute technologie par employé affecté à la R-D (0,017 par rapport à 0,010) et par million de dollars de dépenses intra-muros en R-D (0,178 par rapport à 0,066).
Tableau de données du graphique 4
Demandes de HT par entreprise | Demandes de HT par personnel de R-D | Demandes de HT par million de dépenses en R-D | |
---|---|---|---|
ratio | |||
EMN sous contrôle canadien | 0,11 | 0,03 | 0,21 |
Non-EMN | 0,00 | 0,02 | 0,18 |
EMN sous contrôle étranger | 0,03 | 0,01 | 0,07 |
Source: Canadian Patent Research Database (CPRD), Table 36-10-0356-01 Activities of multinational enterprises in Canada, Canadian and foreign multinationals, as a share of the Canadian economy. |
Conclusion
En s’appuyant sur l’agrégation des brevets de haute technologie d’Eurostat pour dégager les tendances relatives aux demandes de brevet déposées par des entreprises résidentes du Canada pour diverses technologies de pointe, nos résultats révèlent que jusqu’à un tiers des demandes déposées de 2001 à 2019 relèvent d’une catégorie de haute technologie. Ces demandes sont principalement associées aux technologies des communications ainsi que de l’équipement informatique et de l’équipement de bureau automatisé. Bien que ces technologies aient affiché une croissance marquée au chapitre des demandes de 2002 à 2012, une diminution rapide s’en est suivie, notamment en raison d’une réduction des demandes dans le sous-secteur de la fabrication de produits informatiques et électroniques. La biotechnologie, troisième domaine technologique en importance parmi ceux étudiés, a montré un dynamisme limité au cours de la période examinée. Il en va de même pour les semi-conducteurs et les lasers, qui se classent respectivement à la 4e et à la 5e place parmi les six catégories, au chapitre des demandes. En revanche, les demandes concernant la technologie de l’aviation ont affiché une croissance remarquable de 2001 à 2019, ayant été multipliées par près de 20.
Un examen plus approfondi des différences relatives aux extrants de l’innovation selon le statut d’EMN des demandeurs montre que, malgré des dépenses intra-muros en R-D comparables et une intensité au chapitre du personnel affecté à la R-D à peine supérieure à celle de leurs homologues sous contrôle étranger, les EMN canadiennes semblent générer davantage d’actifs de propriété intellectuelle et ont été à l’origine de beaucoup plus de demandes de brevet de haute technologie en 2019, sauf dans le domaine de l’aviation, où les EMN sous contrôle étranger sont légèrement en tête. Néanmoins, étant donné que jusqu’à 80 % de toutes les demandes de brevet de haute technologie émanent de demandeurs sous contrôle canadien, une enquête plus approfondie pourrait être nécessaire afin de mieux comprendre dans quelle mesure les différences en matière d’innovation sont attribuables à des variations en ce qui concerne la nature et l’intensité technologique des activités menées par les filiales sous contrôle étranger au Canada par rapport à leurs homologues sous contrôle canadien.
Si la capacité d’innovation des entreprises sous contrôle canadien dans les segments des technologies de pointe est positive, les résultats de l’innovation relativement plus faibles des entreprises sous contrôle étranger au Canada dans les technologies de pointe soulèvent des questions quant aux préoccupations existantes sur les conséquences possibles de l’acquisition d’entreprises canadiennes de haute technologie par des sociétés étrangères. La crainte prépondérante est que ce genre d’acquisition conduise à terme au déplacement de leurs activités de recherche et développement (R-D) les plus avancées en dehors du pays. Pour approfondir cette question, une analyse plus complète des demandes de brevet, comparable à celle présentée ici, pourrait fournir des renseignements précieux sur les tendances relatives aux activités de brevetage dans les technologies de pointe avant et après les acquisitions étrangères, ce qui constituerait une étape cruciale pour faire la lumière sur l’incidence de ces transactions.
Enfin, il convient de noter qu’il existe d’autres agrégations des brevets et d’autres méthodes de détermination qui pourraient être exploitées dans de futures analyses pour mettre en lumière d’autres domaines technologiques d’intérêt.
Références
Abbes, C., Baldwin, J.R., Gibson, R., et Leung, D. (2022a). Base de données de recherche sur les brevets canadiens (Études analytiques : méthodes et références, no 42). https://www150.statcan.gc.ca/n1/pub/11-633-x/11-633-x2022005-fra.htm
Abbes, C., Baldwin, J. R., et Leung, D. (2022b). Les activités de brevetage des entreprises résidentes du Canada. Rapports économiques et sociaux, vol. 2, no 3.https://www150.statcan.gc.ca/n1/pub/36-28-0001/2022003/article/00005-fra.htm
Gibson, R., et Leung, D. (2023). Base de données de recherche sur les brevets canadiens, 2001 à 2019 (Études analytiques : méthodes et références). https://www150.statcan.gc.ca/n1/pub/11-633-x/11-633-x2023001-fra.htm
Eurostat, High-tech industry and Knowledge-Intensive Services Indicators. Annex 6: High-tech aggregation by patents. https://ec.europa.eu/eurostat/cache/metadata/Annexes/htec_esms_an_6.pdf
Pour en savoir plus sur les demandes de brevet déposées par des entreprises résidentes du Canada
Base de données de recherche sur les brevets canadiens (statcan.gc.ca)
Cet article vise à documenter l’utilisation de la base de données mondiale sur les statistiques en matière de brevets (PATSTAT), une base de données mondiale des demandes de brevet créée par l’Office européen des brevets, afin de mettre au point la base de données de recherche sur les brevets canadiens à Statistique Canada. L’innovation est un important moteur de l’économie, et les statistiques sur les brevets sont reconnues comme étant une mesure utile de l’activité d’innovation. La version actuelle de la base de données de recherche sur les brevets canadiens est axée sur les demandes de brevet déposées à l’échelle mondiale par des entreprises ayant une adresse au Canada (entreprises résidentes du Canada). Ces données sont couplées aux fonds de données administratives de Statistique Canada pour permettre des études décrivant les tendances en ce qui concerne l’activité de brevetage des entreprises résidentes du Canada et la relation entre les entrées et les sorties du processus d’innovation et leur incidence sur le rendement des entreprises.
Cet article traite de la manière dont a été créée la base de données de recherche sur les brevets canadiens ainsi que quelques données de base tirées de cette dernière. On constate que l’activité de brevetage, mesurée en fonction du nombre de demandes de brevet, a légèrement augmenté de 0,7 % par année de 2001 à 2015. Derrière cette stabilité relative, on a observé des augmentations plus fortes de l’activité de brevetage parmi les petites entreprises de 0 à 19 employés dans un certain nombre d’industries de service, et une diminution de l’activité de brevetage parmi les grandes entreprises de 500 employés ou plus dans le secteur de la fabrication. Parmi les domaines techniques dans lesquels l’activité de brevetage connaît la plus grande croissance, notons le génie civil, la technologie médicale, les méthodes informatiques de gestion, la technologie informatique, le transport, les procédés thermiques et les appareils, ainsi que les éléments mécaniques.
Base de données de recherche sur les brevets canadiens, 2001 à 2019 (statcan.gc.ca)
Ce document permet de faire le point sur les travaux d’Abbes et coll. (2022a) et sur la base de données de recherche sur les brevets canadiens. Cette dernière a été créée pour étudier le brevetage, soit un indicateur important des activités d’innovation, au microniveau. Elle a été créée en couplant certaines variables de la base de données mondiale sur les statistiques en matière de brevets (PATSTAT) de l’Office européen des brevets, c’est-à-dire une base de données sur les demandes de brevets, aux fonds de données administratives de Statistique Canada. À l’origine, la version de 2018 de la base de données PATSTAT a été utilisée pour créer une base de données de recherche sur les brevets canadiens couvrant la période de 2001 à 2015. La version de 2021 de la base de données PATSTAT a été utilisée pour prolonger la période de la base de données de recherche sur les brevets canadiens jusqu’en 2019 inclusivement. Ce document fait état des changements qui en résultent dans la base de données de recherche sur les brevets canadiens.
Les activités de brevetage des entreprises résidentes du Canada (statcan.gc.ca)
Cet article fait état des premiers résultats provenant d’une nouvelle base de données longitudinale créée à partir de sources de données administratives pour étudier les activités de brevetage au Canada. L’étude du brevetage est importante, puisque celui-ci est un moyen de mesurer l’activité d’innovation et a été associé à des résultats économiques positifs pour les entreprises. Au cours de la période allant de 2001 à 2015, les entreprises résidentes du Canada ont déposé de plus en plus de demandes de brevet aux États-Unis, et cette hausse était attribuable aux petites et jeunes entreprises dans les industries de service. Au cours de la même période, le nombre de demandes de brevet déposées devant d’autres bureaux des brevets par des entreprises résidentes du Canada a diminué. Parmi les domaines techniques où le nombre de demandes déposées aux États-Unis a le plus augmenté, on compte le génie civil, la technologie médicale, les méthodes informatiques de gestion, la technologie informatique, le transport et les communications numériques. Enfin, les données probantes présentées donnent à penser que, pour les entreprises résidentes du Canada, les résultats économiques découlant d’une demande de brevet sont semblables, que la demande soit déposée aux États-Unis ou au Canada. Après le contrôle des caractéristiques des entreprises et des industries, les données montrent qu’une demande de brevet est associée à une hausse de 7,5 % de la probabilité de connaître une forte croissance de l’emploi et de 12,9 % de la probabilité de connaître une forte croissance des revenus.
Activités de brevetage des entreprises appartenant à des femmes au Canada (statcan.gc.ca)
Cette étude s’intéresse aux activités de brevetage des entreprises appartenant à des femmes et les compare avec celles des entreprises appartenant à des hommes, des entreprises appartenant en parts égales à des personnes des deux sexes, et des entreprises pour lesquelles le sexe des propriétaires ne peut pas être déterminé. Elle vient contribuer à la littérature existante sur l’écart entre les sexes dans les activités de brevetage, laquelle mettait l’accent sur les femmes à titre de chercheuses ou d’inventrices, et non à titre de propriétaires d’entreprises. De 2001 à 2019, les entreprises dont les propriétaires sont des hommes étaient à l’origine d’une plus grande part des demandes de brevet que celles dont les propriétaires sont des femmes et que celles appartenant en parts égales à des personnes des deux sexes, et l’écart observé n’a pas rétréci au cours de cette période. Les différences les plus marquées entre les entreprises appartenant à des femmes et celles appartenant à des hommes concernaient la propension à mener des activités de recherche et développement (R-D) et le montant consacré à la R-D. Comparativement aux entreprises appartenant à des femmes, celles appartenant à des hommes étaient 16,5 points de pourcentage plus susceptibles d’effectuer de la R-D, et celles qui effectuaient de la R-D y ont consacré 70 % de plus. Cela pourrait contribuer à expliquer pourquoi, parmi les entreprises qui font du brevetage, celles appartenant à des hommes déposent un plus grand nombre de demandes de brevet par entreprise que celles appartenant à de femmes, et pourquoi le taux d’acceptation de leurs demandes est plus élevé.
Remerciements
L’auteur tient à remercier Amelie Lafrance-Cooke, Haig McCarrell, Howard Bilodeau et Mark Uhrbach pour leurs commentaires portant sur une version antérieure du présent article.
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