Quelle est l'incidence de la faillite personnelle sur la planification de la retraite?

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par Susan Crompton

Introduction

Entre 2008 et 2009, le taux de faillite des consommateurs au Canada s'est accru de 30 %, passant de 3,4 à 4,5 faillites pour 1 000 adultes1. Il est évident que ces deux années ont été marquées par la crise économique et que les tendances des déclarations de faillite sont surtout liées aux cycles économiques : elles croissent rapidement pendant les récessions et diminuent lors de chaque croissance économique2. Il n'en reste pas moins qu'à long terme la tendance est à la hausse, quelles que soient les conditions économiques. Au cours des 20 années précédentes (de 1987 à 2007), le taux de faillite a crû de plus de 150 % (graphique 1).

Graphique 1 Les taux de faillites augmentent et diminuent en fonction des cycles économiques, mais la tendance générale est à la hausseGraphique 1 Les taux de faillites augmentent et diminuent en fonction des cycles économiques, mais la tendance générale est à la hausse

Le fait de déclarer faillite soulage immédiatement une personne d'un niveau d'endettement qu'elle trouve insupportable, mais les effets peuvent durer des années. Près d'une personne sur dix qui déclare faillite le fait plus d'une fois, ce qui laisse fortement entendre que ces personnes ont généralement de la difficulté à gérer leurs finances3,4. Le nombre total de personnes touchées n'est pas insignifiant : selon les données de l'Enquête sociale générale de 2007, plus de 6 % des Canadiens âgés de 45 ans et plus (plus de 825 000 personnes) ont connu au moins une faillite dans leur vie. L'endettement des Canadiens et leur niveau de préparation à la retraite préoccupent de nombreux observateurs, et les personnes ayant connu des difficultés financières peuvent courir un risque encore plus grand pour ce qui est de leur transition vers la retraite.

Dans le présent article, on utilise les données de l'Enquête sociale générale de 2007 pour étudier les personnes non retraitées âgées de 45 à 64 ans ayant vécu une faillite à l'âge adulte (c'est-à-dire à 25 ans ou plus)5. On tentera d'établir la mesure dans laquelle ces personnes sont différentes des autres préretraités, puis la façon dont elles se sont préparées à la retraite (voir « Ce qu'il faut savoir au sujet de la présente étude » pour connaître les concepts, définitions et détails).

Début de l'encadré

Ce qu'il faut savoir au sujet de la présente étude

Les données de l'Enquête sociale générale (ESG) de 2007 sur la famille, le soutien social et la retraite sont utilisées dans le présent article. L'ESG a recueilli des renseignements sur des sujets comme la composition des familles, les réseaux sociaux, les soins reçus et l'aide fournie, ainsi que l'expérience et la planification de la retraite. Parmi les différentes questions supplémentaires concernant les expériences de vie inhabituelles, on a demandé aux répondants s'ils avaient connu la faillite. Vu la formulation de la question de l'ESG, les répondants peuvent avoir déclaré faillite eux-mêmes, mais ils peuvent également avoir été touchés de près par la faillite, par exemple, en tant que conjoint d'une personne déclarant faillite.

La population cible de cette étude est constituée de personnes âgées de 45 à 64 ans qui se sont décrites comme non retraitées et qui ont indiqué quel était le revenu de leur ménage. Cela comprend plus de 10 500 répondants de l'ESG, représentant plus de 6,2 millions de Canadiens, parmi lesquels presque 8 % (875 répondants représentant plus de 480 000 Canadiens) ont vécu une faillite telle qu'elle a été définie dans la présente étude.

Veuillez noter que ces données ont été recueillies en 2007 et ne reflètent pas les répercussions de la dernière récession.

Définitions
Préretraité : Personne âgée de 45 à 64 ans ayant déclaré qu'elle n'était pas à la retraite. La plupart des préretraités sont employés, mais d'autres sont au chômage, travaillent au foyer, sont inactifs en raison d'une maladie de longue durée, etc.
Expérience de la faillite : Préretraité ayant fait l'expérience d'au moins une faillite depuis l'âge de 25 ans. Le répondant peut avoir déclaré lui-même faillite ou peut avoir été directement touché par la faillite d'une autre personne (par exemple, en tant que conjoint).
Faillite principale : Si les répondants ont indiqué plusieurs faillites, seule l'année de la faillite ayant eu les plus grandes répercussions pour eux a été enregistrée. Dans la présente étude, la faillite ayant eu les plus grandes répercussions est définie comme la « faillite principale ». Étant donné que 88 % de la population cible a fait part d'une seule faillite, la faillite principale est en fait leur seule faillite.
Revenu médian du ménage : Le revenu du ménage a été recueilli par tranche, rendant impossible le calcul d'une véritable médiane. Le revenu inférieur à 80 000 $ est une estimation arrondie puisque 54 % de la population non retraitée de 45 à 64 ans se trouve sous ce seuil (y compris les personnes n'ayant pas de revenu). Le calcul est fondé sur 83 % des répondants ayant déclaré le revenu de leur ménage.
Revenu sous forme de transferts gouvernementaux : Revenu provenant de l'assurance-emploi, de l'indemnisation des accidentés du travail, de la Sécurité de la vieillesse, du Supplément de revenu garanti, et des allocations municipales ou provinciales d'aide sociale ou de bien-être.
Autre revenu : Revenu provenant du crédit d'impôt pour enfants, d'une pension alimentaire et d'autres sources (p. ex. bourses, autres revenus gouvernementaux, dépôts, épargne).

Limites des données
L'ESG ne fournit aucune donnée sur l'emploi ou l'historique des revenus. Par conséquent, même si des facteurs comme un emploi instable ou mal rémunéré ont contribué à la faillite, ils peuvent également refléter les conséquences de cette dernière. Par exemple, un niveau inférieur de formation peut empêcher quelqu'un d'obtenir un travail de col blanc, mais il se peut également que le fait d'être en faillite bloque certaines possibilités d'emploi. De même, s'il est reconnu que le divorce précipite les faillites, il peut également y faire suite.

Note : Les expériences de faillites étudiées dans le présent article s'échelonnent sur une période pouvant atteindre 40 ans. Les lois et règlements concernant les faillites sont souvent modifiés, la dernière modification ayant eu lieu en septembre 2009. En outre, les provinces et territoires peuvent avoir des exigences différentes, par exemple, concernant le type ou la valeur des actifs protégés de la saisie. (Pour plus de renseignements, consultez le site du Bureau du surintendant des faillites Canada à l'adresse http://www.ic.gc.ca/eic/site/bsf-osb.nsf/Intro.) Étant donné ces variations dans le temps et dans l'espace, le présent article ne traite pas de questions en lien avec les dispositions de la législation elle-même (p. ex. comparaison de répondants déclarant faillite dans des régimes plus stricts ou plus généreux).

Début de l'encadré

Qui déclare faillite et pourquoi?

Le fait d'être largement endetté est sans aucun doute une condition indispensable pour déclarer faillite, mais ce n'est généralement pas suffisant6,7,8. Le prédicteur le plus important de la faillite est le fait de dépasser ses possibilités financières, puis d'être touché par un événement qui perturbe le revenu. Ainsi, une perte d'emploi, une dépense intem­pestive et un divorce précipitent souvent la faillite9,10,11,12,13.

Les études sur les personnes déclarant faillite au Canada présentent toutes le même portrait de base. Par rapport à la population générale, ces personnes ont plus de risques de travailler dans des emplois moins spécialisés et moins rémunérés, de présenter un historique d'emploi moins stable, d'être divorcées et de ne posséder virtuellement aucun actif. En bref, ces personnes vivent d'une paie à l'autre14,15. Mais le nombre de Canadiens déclarant faillite a presque quadruplé depuis le milieu des années 1980. Si ce sont toujours les mêmes types de personnes qui font l'expérience de la faillite, pourquoi les chiffres ont-ils augmenté aussi rapidement?

Le chercheur Saul Schwartz fait remarquer qu'entre 1977 et 1997, le Canada a connu une augmentation substantielle de la proportion de personnes déclarant faillite dans les catégories suivantes : femmes célibataires, gens ayant des personnes à charge, adultes âgés de moins de 30 ans et chômeurs. Il suggère que ces groupes, qui ne contractaient pas traditionnellement d'emprunts, ont commencé à accumuler des niveaux supérieurs d'endettement pendant les années 1980 et 1990, les rendant ainsi pour la première fois plus vulnérables aux déclencheurs de faillite comme le divorce et la perte d'emploi16.

D'après un certain nombre études, il n'y a que peu de preuves indiquant que les gens déclarent faillite pour se dérober à leurs obligations. La plupart des gens se battent pendant un certain temps pour payer leurs dettes et déclarent faillite seulement en dernier recours17,18,19. Il ne semble pas non plus que la stigmatisation moins importante associée à la faillite joue un rôle. La majorité doit simplement plus d'argent qu'elle ne peut espérer en rembourser20. Des données du Bureau du surintendant des faillites Canada indiquent que le rapport entre les dettes et les actifs des consommateurs insolvables21 est resté relativement stable à environ 2 pour 1 depuis 1987, ce qui signifie que les personnes doivent deux fois plus qu'elles ne possèdent. Par exemple, en 2006, les personnes déclarant faillite avaient, en moyenne, des dettes d'environ 67 000 $, des actifs d'un peu moins de 30 000 $ et un revenu personnel d'un peu plus de 19 000 $. Leurs sources principales d'endettement étaient les cartes de crédit, les prêts auprès de banques et de sociétés financières, les impôts impayés et les hypothèques22.

Les caractéristiques socioéconomiques des préretraités ayant vécu une faillite sont différentes des autres

Selon les données de l'ESG de 2007, près de 8 % de la population cible, soit plus de 480 000 Canadiens non retraités âgés de 45 à 64 ans, a connu au moins une faillite depuis l'âge de 25 ans. Ces personnes étaient âgées de 40 ans en moyenne à ce moment-là. La majorité a indiqué que l'événement avait eu lieu plus de dix ans avant l'enquête, mais 1 personne sur 5 avait expérimenté la faillite dans les cinq années précédentes (graphique 2)23.

Graphique 2 Plus de la moitié des préretraités ayant vécu une faillite l'ont fait plus de dix ans avant l'enquêteGraphique 2 Plus de la moitié des préretraités ayant vécu une faillite l'ont fait plus de dix ans avant l'enquête

Les préretraités ayant fait l'expé­rience de la faillite partageaient certaines caractéristiques de base fortement associées aux déclencheurs indiqués plus haut. Ils étaient beaucoup moins susceptibles d'avoir suivi des études postsecondaires, le quart n'ayant pas terminé les études secondaires. À l'inverse, plus d'un quart des autres préretraités avaient un diplôme universitaire (tableau A.1).

Tableau A.1 Caractéristiques choisies des adultes non retraités âgés de 45 à 64 ans, selon leur expérience de la faillite, 2007Tableau A.1 Caractéristiques choisies des adultes non retraités âgés de 45 à 64 ans, selon leur expérience de la faillite, 2007

Les préretraités ayant connu la faillite avaient également tendance à avoir occupé de nombreux emplois, ce qui est souvent associé à du travail moins spécialisé : un tiers avait occupé plus de cinq emplois pendant leur vie active, contre environ un cinquième des autres préretraités. Ils étaient également deux fois plus susceptibles d'avoir connu une rupture et d'être divorcés ou séparés au moment de l'enquête.

En 2007, les préretraités ayant fait l'expérience de la faillite étaient moins susceptibles d'être employés (78 %), que les autres préretraités (84 %). Ceux qui avaient un emploi étaient moins susceptibles de travailler dans un poste à col blanc avec un plus haut revenu, par exemple un poste de gestion, professionnel ou technique (27 % contre 42 %). Plus du tiers (37 %) disposaient d'un régime de pension privé en lien avec l'emploi actuel ou un emploi précédent, alors que c'était le cas de 47 % des autres préretraités.

La situation financière d'un grand nombre de préretraités ayant vécu une faillite est relativement précaire. Les deux tiers ont indiqué que leur revenu personnel était inférieur à la valeur médiane de 43 000 $ pour les personnes non retraitées âgées de 45 à 64 ans. En outre, même s'ils n'étaient pas à la retraite, ils étaient deux fois plus susceptibles de dépendre des paiements de transfert gouvernementaux comme source principale de revenus. Ils étaient en outre plus susceptibles d'être la seule personne du ménage à avoir un revenu, ce qui expliquerait en partie le revenu total inférieur du ménage : 61 % vivaient dans un ménage avec un revenu annuel inférieur à 50 000 $, contre 37 % des autres Canadiens préretraités (tableau A.1).

Un grand nombre de préretraités ayant connu la faillite indiquaient également qu'ils n'étaient pas en bonne santé. Il est impossible de savoir si leurs problèmes de santé peuvent avoir joué un rôle dans la faillite, mais à l'époque de l'enquête, environ un quart de ces personnes étaient limitées dans leurs activités. Et elles étaient plus de deux fois plus susceptibles de ne pas travailler en raison d'une maladie de longue durée (13 % contre 5 %).

Plus de la moitié des préretraités ayant fait l'expérience de la faillite espèrent prendre leur retraite d'ici l'âge de 65 ans

La plupart des adultes âgés de 45 à 64 ans sont dans la dernière moitié de leur vie active et nombre d'entre eux commencent à penser à la retraite. Lorsqu'on leur a demandé à quel âge ils avaient l'intention de prendre leur retraite, plus des deux tiers (70 %) des personnes interrogées n'ayant pas fait faillite ont indiqué qu'elles souhaitaient quitter la vie active d'ici l'âge de 65 ans (graphique 3).

Graphique 3 La majorité des préretraités avaient l'intention de prendre leur retraite d'ici l'âge de 65 ans, mais ceux ayant vécu une faillite étaient moins susceptibles d'avoir planifié leur retraiteGraphique 3 La majorité des préretraités avaient l'intention de prendre leur retraite d'ici l'âge de 65 ans, mais ceux ayant vécu une faillite étaient moins susceptibles d'avoir planifié leur retraite

Parmi les préretraités ayant fait l'expérience de la faillite, 57 % prévoyaient prendre leur retraite d'ici l'âge de 65 ans. Vingt pour cent ne savaient pas à quel moment ils prendraient leur retraite et un autre 16 % disaient qu'ils ne s'arrêteraient jamais de travailler, surtout parce qu'ils ne pouvaient pas se permettre de prendre leur retraite ou parce qu'ils souhaitaient travailler aussi longtemps que possible. Reporter leur retraite pourrait au moins partiellement s'expliquer par le désir de disposer de plus de temps pour se préparer à la retraite. Savoir si ce temps est suffisant dépendra des caractéristiques de chacun, par exemple de son revenu, de son admissibilité à un régime de pension privé ou public, et ainsi de suite (graphique 3).

Le reste de cet article explore les projets de retraite entrepris par les préretraités dans les cinq années précédant l'enquête. Comme nous l'avons vu, les personnes ayant fait l'expérience de la faillite ont un profil différent des autres préretraités. Il est donc plus approprié de comparer leurs préparatifs avec ceux des préretraités n'ayant pas connu la faillite et présentant des caractéristiques démographiques et économiques similaires. Dans ce cas, le rapprochement le plus adéquat est avec les 54 % de préretraités n'ayant jamais connu la faillite et dont le revenu du ménage médian est de moins de 80 000 $24.

Les préretraités ayant fait l'expérience de la faillite sont inquiets pour l'avenir

Moins de la moitié (48 %) des préretraités ayant fait l'expérience de la faillite pensaient que le revenu de leur ménage serait suffisant pour maintenir leur niveau de vie au moment de la retraite. Les préretraités n'ayant jamais connu la faillite et ayant un revenu médian ou inférieur étaient plus susceptibles de déclarer qu'ils disposeraient d'un revenu adéquat à leur retraite (graphique 4)25.

Graphique 4 Moins de la moitié des préretraités ayant vécu une faillite pensaient que leur revenu de retraite serait suffisant pour maintenir leur niveau de vieGraphique 4 Moins de la moitié des préretraités ayant vécu une faillite pensaient que leur revenu de retraite serait suffisant pour maintenir leur niveau de vie

Comme on l'a mentionné, le divorce contribue de façon impor­tante à la faillite. Une étude récente a prouvé que les personnes divorcées avaient plus de difficultés à se remettre économiquement que les personnes mariées après une faillite, même si elles avaient un profil économique très proche avant celle-ci26. Il n'est donc pas étonnant que, d'après l'EGS, parmi les personnes ayant vécu une faillite, seulement le tiers (32 %) des préretraités divorcés pensaient pouvoir maintenir leur niveau de vie à leur retraite, tandis qu'un peu plus de la moitié (53 %) des préretraités mariés étaient optimistes quant au caractère suffisant de leur revenu à la retraite.

Concernant l'acquisition d'actifs de base en vue de la retraite, les personnes ayant vécu une faillite avaient du retard par rapport aux autres

Pour la plupart des gens, la majeure partie de leurs économies consiste en ce qu'ils ont investi dans leur maison27. Être propriétaires rassure les préretraités quant à leur avenir financier. D'ailleurs, près des trois quart de ces préretraités propriétaires disaient ne pas avoir d'appréhensions quant au caractère suffisant de leur revenu à la retraite et la proportion était encore plus grande chez ceux n'ayant pas d'hypothèque. Chez les préretraités locataires, une proportion beaucoup moindre (50 %) pensaient que le revenu de leur ménage serait suffisant pour vivre au moment de la retraite28.

Néanmoins, environ la moitié des préretraités ayant fait l'expérience de la faillite étaient propriétaires de leur maison. Parmi eux, plus des trois quarts remboursaient encore leur hypothèque. À titre de comparaison, 77 % des préretraités n'ayant jamais connu la faillite et ayant un revenu du ménage médian ou inférieur étaient propriétaires de leur maison, et presque la moitié d'entre eux n'avaient plus d'hypothèque (tableau 1).

Tableau 1 Caractéristiques financières choisies des adultes non retraités âgés de 45 à 64 ans, selon leur expérience de la faillite, 2007Tableau 1 Caractéristiques financières choisies des adultes non retraités âgés de 45 à 64 ans, selon leur expérience de la faillite, 2007

Avancer vers la retraite avec un régime de pension privé peut également soulager une partie des inquiétudes financières des gens. Près des trois quarts des préretraités ayant un régime de pension privé pensaient que leur revenu serait suffisant après avoir quitté la vie active, contre moins de deux tiers des préretraités sans régime de pension privé. Néanmoins, 63 % des préretraités ayant fait l'expérience de la faillite et 64 % de ceux qui ne l'avaient pas connue et qui avaient un revenu inférieur ou égal à la valeur médiane ne disposaient pas de régime de pension privé associé à leur emploi actuel ou à un emploi précédent.

Les REER sont un autre instrument largement utilisé dans le cadre de la préparation à la retraite. Au cours des cinq années précédant l'enquête, 38 % des préretraités ayant fait l'expérience de la faillite avaient contribué à un REER, de même que 52 % des préretraités n'ayant pas connu la faillite et ayant un revenu inférieur ou égal à la valeur médiane. La plupart des contributeurs des deux groupes estimaient que leurs REER avaient une valeur inférieure à 50 000 $.

Ces actifs de base (une maison, un régime de pension privé, un REER) constituent généralement la base de l'investissement autour de laquelle un grand nombre de Canadiens planifient leur retraite. Un quart des préretraités ayant fait l'expérience de la faillite n'avaient aucune de ces bases. D'un autre côté, 41 % d'entre eux disposaient de deux ou de trois de ces éléments, contre 57 % des personnes n'ayant pas connu la faillite et ayant un revenu inférieur ou égal à la valeur médiane (tableau 1).

Les autres stratégies financières des préretraités ayant fait l'expérience de la faillite comprennent le remboursement des dettes

Les gens peuvent se préparer à la retraite en utilisant d'autres stratégies d'investissement. Environ 20 % des préretraités ayant fait l'expérience de la faillite avaient fait des économies, et 19 % avaient fait d'autres investissements dans des instruments comme des actions, des obligations ou des fonds communs de placement. En ce qui concerne les préretraités n'ayant jamais connu la faillite et ayant un revenu inférieur ou égal à la valeur médiane, ils étaient plus susceptibles d'avoir mis de l'argent de côté par des économies (32 %) et des investissements (27 %) (tableau 1).

Se préparer pour la retraite n'est pas exclusivement synonyme d'économies. Nombreux sont ceux qui se concentrent sur le remboursement de leurs prêts afin de quitter la vie active en n'ayant plus de dettes. Au cours des cinq années précédant l'enquête, un quart des préretraités ayant fait l'expérience de la faillite avaient remboursé une hypothèque (ou n'en avaient pas contracté de nouvelle) et plus de la moitié avaient remboursé d'autres types de dettes comme des prêts et des lignes de crédit.

Au total, 41 % des préretraités ayant fait l'expérience de la faillite remboursaient des dettes ou faisaient des économies, et 29 % faisaient les deux. En somme, 70 % des préretraités ayant fait l'expérience de la faillite utilisaient ces stratégies pour améliorer leur situation financière. Ce pourcentage était presque aussi élevé que pour les préretraités n'ayant jamais connu la faillite et ayant un revenu du ménage médian ou inférieur (77 %).

Un modèle de régression logistique a été élaboré pour déterminer les stratégies financières qui seraient les plus susceptibles de donner aux préretraités l'assurance que leur revenu à la retraite sera suffisant pour maintenir le niveau de vie de leur ménage29. Les résultats ont montré que pour ceux ayant fait l'expérience de la faillite, disposer d'un revenu de 100 000 $ et plus pour le ménage, avoir un régime de pension privé et avoir des économies autres que les REER étaient des facteurs significatifs. À titre de comparaison, pour les préretraités n'ayant jamais connu la faillite et ayant un revenu inférieur ou égal à la valeur médiane, les facteurs significatifs étaient le fait d'avoir un revenu du ménage supérieur à 50 000 $, d'être propriétaire de sa maison, et d'avoir un régime de pension privé, des économies et des investissements.

Le temps permet en partie de se rattraper

On s'attend à ce que plus la faillite est ancienne, plus un préretraité a été en mesure de se remettre. Est-ce le cas?

Par rapport aux préretraités ayant fait l'expérience de la faillite plus récemment, ceux qui ont connu la leur plus de dix ans avant l'enquête étaient plus susceptibles de vivre dans un ménage ayant un revenu supérieur au revenu médian (27 % contre 19 %) et d'avoir deux des trois actifs de base de la retraite — maison, régime de pension privé, REER (32 % contre 22 %). En ce qui concerne les autres types de préparation à la retraite, ils n'étaient pas plus avancés. Environ la moitié d'entre eux avaient confiance quant au caractère suffisant de leur revenu de retraite par rapport à leur niveau de vie, de même qu'un peu moins de la moitié des préretraités ayant fait l'expérience de la faillite au cours des dix années précédentes.

Résumé

Étant donné le nombre croissant de faillites de consommateurs survenues ces dernières décennies, la possibilité qu'une proportion faible, mais significative, de Canadiens se dirige vers la retraite après avoir connu une période de difficulté financière assez grave augmente. Selon les données de l'Enquête sociale générale de 2007, près de 8 % des Canadiens non retraités âgés de 45 à 64 ans, soit plus de 480 000 personnes, ont fait l'expérience d'au moins une faillite à l'âge adulte.

Les préretraités ayant fait l'expérience de la faillite ont, outre leur historique financier, des caractéristiques qui suggèrent qu'ils continueront à être désavantagés par rapport aux autres préretraités. Ils ont des niveaux d'études plus faibles, un historique professionnel moins stable et une tendance à occuper des postes moins spécialisés. En outre, ils sont plus susceptibles d'avoir vécu la dissolution d'un mariage et d'avoir des problèmes de santé et des limitations d'activité.

Une légère majorité des pré­retraités ayant fait l'expérience de la faillite souhaitaient prendre leur retraite d'ici l'âge de 65 ans, mais moins de la moitié d'entre eux pensaient que leur revenu une fois à la retraite serait suffisant pour garder le même niveau de vie. Par rapport à un groupe de préretraités de référence similaire sur les plans démographique et économique, mais n'ayant jamais connu la faillite, les préretraités ayant fait l'expérience de la faillite étaient moins préparés à la retraite. Néanmoins, les trois quarts disposaient au moins de quelques-uns des actifs de base pour la retraite, c'est-à-dire une maison en propriété, un régime de pension privé ou une contribution à des REER, et presque autant utilisaient d'autres stratégies financières comme les économies, les investissements et le remboursement des dettes personnelles.

Susan Crompton est analyste principale à la revue Tendances sociales canadiennes de la Division de la statistique sociale et autochtone.


Notes

  1. BUREAU DU SURINTENDANT DES FAILLITES DU CANADA. Taux annuels d'insolvabilité de consommateurs, http://www.ic.gc.ca/eic/site/bsf-osb.nsf/fra/br01819.html, (site consulté le 9 décembre 2010).
  2. BUREAU DU SURINTENDANT DES FAILLITES CANADA. 2007. Un survol des statistiques sur l'insolvabilité au Canada jusqu'à 2006, noIu73-1/2006F au catalogue, Ottawa, Industrie Canada.
  3. GOLMANT, J., et T. ULRICH. 2006. « Bankruptcy repeat filings », American Bankruptcy Institute Law Review, vol. 14, no 169, (printemps).
  4. ENQUÊTE SOCIALE GÉNÉRALE. 2007. Données non publiées.
  5. Parmi les personnes âgées de 45 à 64 ans ayant fait l'expérience de la faillite après l'âge de 25 ans, 9 % se décrivaient comme étant à la retraite en 2007, contre 13 % des autres préretraités.
  6. BUREAU DU SURINTENDANT DES FAILLITES CANADA. Un modèle macroéconomique d'analyse et de prévision de l'insolvabilité commerciale et des consommateurs au Canada, http://www.ic.gc.ca/eic/site/bsf-osb.nsf/fra/h_br01548.html, (site consulté le 9 décembre 2010).
  7. LAWLESS, Robert M. 2001. The relationship between nonbusiness bankruptcy filings and various measure of consumer debt, University of Illinois Law and Economics Research Paper Series, http://ssrn.com/abstract=934798, (site consulté le 10 mars 2011).
  8. ZHU, Ning. 2007. Household consumption and personal bankruptcy, Working Paper Series, University of California, Graduate School of Management.
  9. HARRIS, Ron, et Einat ALBIN. 2006. « Bankruptcy policy in light of manipulation in credit advertising », Theoretical Inquiries in Law, vol. 7, no 2, http://www.bepress.com/til/defaults/vol7/iss2/art6, (site consulté le 10 mars 2011).
  10. CAPUTO, Richard. 2008. « Marital status and other correlates of personal bankruptcy, 1986-2004 », communication présentée à la réunion annuelle de l'American Sociological Association à Boston, http://www.allacademic.com/meta/p235517_index.html, (site consulté le 10 mars 2011).
  11. ZHU, 2007.
  12. LAWLESS, 2001.
  13. SCHWARTZ, Saul. 1999. « The empirical dimensions of consumer bankruptcy: Results from a survey of Canadian bankrupts », Osgoode Hall Law Journal, vol. 37, no1 et 2, p. 83 à 125.
  14. SCHWARTZ, 1999.
  15. BUREAU DU SURINTENDANT DES FAILLITES CANADA. 2007.
  16. SCHWARTZ, 1999.
  17. MOORMAN, Diann Carol Vennink. 2006. Consumer bankruptcy: Are allegations of abuse well founded? Iowa State University, http://proquest.umi.com/pqdlink?did=1216739851&Fmt=7&clientId=79356&RQT=309&VName=PQD, (site consulté le 10 mars 2011).
  18. NGUYEN, Eric S. 2008. « Parents in financial crisis: Fighting to keep the family home », American Bankruptcy Law Journal, vol. 82, no2, http://ssrn.com/abstract=1151552, (site consulté le 10 mars 2011).
  19. SCHWARTZ, 1999.
  20. EFRAT, Rafael. 2006. « The evolution of bankruptcy stigma », Theoretical Inquiries in Law, vol. 7, no2, http://www.bepress.com/til/default/vol7/iss2/art4, (site consulté le 10 mars 2011).
  21. Comprend les consommateurs ayant déclaré faillite et ceux ayant demandé un formulaire Proposition de consommateur.
  22. BUREAU DU SURINTENDANT DES FAILLITES CANADA, 2007.
  23. L'âge des personnes déclarant faillite est en augmentation générale avec le temps. Par exemple, une personne déclarant faillite était âgée de 43 ans en moyenne en 2006, contre environ 38 en 1995. BUREAU DU SURINTENDANT DES FAILLITES CANADA, 2007.
  24. Les préretraités n'ayant pas connu la faillite dont le revenu du ménage est inférieur ou égal à la valeur médiane ressemblaient plus aux préretraités ayant fait l'expérience de la faillite qu'aux préretraités ayant un revenu supérieur au revenu médian. En particulier, leur niveau de formation, leur état civil, leur emploi actuel, leur revenu personnel et le nombre de personnes ayant un revenu dans le ménage étaient très similaires. (Les données de l'ESG ne sont pas affichées.) Cela en fait un groupe de comparaison plus homogène que la population générale des préretraités n'ayant jamais connu la faillite.
  25. On a seulement demandé si leur revenu après la retraite serait suffisant pour maintenir leur niveau de vie aux répondants ayant indiqué l'âge auquel ils ont l'intention de prendre leur retraite, ou à ceux n'ayant pas encore pensé à la retraite ou fait de projets. Parmi la population cible, les taux de réponse à cette question étaient de 61 % pour les personnes ayant fait l'expérience de la faillite et de 68 % pour celles n'ayant jamais vécu de faillite.
  26. CAPUTO. 2008.
  27. Il convient de souligner que, dans certaines circonstances précises, une hypothèque peut avoir l'effet inverse en augmentant le risque de faillite.
  28. D'après l'ESG, 91 % des préretraités mariés étaient propriétaires, alors que 40 % des préretraités non mariés ne l'étaient pas. Étant donné l'importance d'être propriétaire pour la planification financière de la plupart des gens, cela peut expliquer le niveau d'inquiétude beaucoup plus élevé concernant le caractère suffisant du revenu parmi les célibataires.
  29. Les variables indépendantes du modèle étaient les années écoulées depuis la faillite principale, le revenu du ménage, les actifs de base pour la retraite (c.-à-d. maison en propriété, contribution à un REER, régime de pension privé) et les autres stratégies financières (c.-à-d. économies autres que le REER, investissements, immobilier, remboursement de l'hypothèque et d'autres dettes).