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Série de documents de travail de la recherché sur la santé

La comorbidité mentale et la mesure dans laquelle elle entraîne une augmentation du recours aux services dispensés dans les hôpitaux de soins de courte durée

Introduction, résultats, et conclusions

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Introduction

Environ un Canadien sur cinq a éprouvé un problème de santé mentale à un moment donné de sa vie1,2,3. Approximativement 14 % du fardeau global de la maladie a été attribué à des troubles neuropsychiatriques, surtout en raison de la nature chroniquement invalidante de la dépression et des autres troubles mentaux courants, des problèmes liés à la consommation d'alcool et des troubles d'utilisation de substances ainsi que de la psychose4. Selon des études de la Banque mondiale et de l'Organisation mondiale de la Santé, la dépression se classerait au troisième rang parmi les maladies non transmissibles diminuant le nombre d'années de vie en santé dans le cas des femmes, et au cinquième rang dans le cas des hommes5. Des organismes des quatre coins du globe ont identifié la santé mentale comme un enjeu prioritaire6,7.

Les problèmes de santé mentale, tout comme d'autres problèmes de santé, imposent un fardeau économique à la société, engendrant dans bien des cas des coûts comparables à ceux de problèmes de santé physique, tels que les maladies cardiaques8,9. Les dépenses reliées aux troubles mentaux et à la dépendance dans les provinces canadiennes en 2003-2004 se sont élevées à 6,6 milliards de dollars, dont 5,5 milliards provenant de sources publiques10. À l'échelle nationale, les hôpitaux représentaient la plus grande partie des dépenses; venaient ensuite les services communautaires de santé mentale et les produits pharmaceutiques. Même une fois que l'on prend en compte ces montants, les dépenses publiques en santé mentale ont été moins élevées au Canada que dans la plupart des autres pays développés10.

Il semble aussi que l'on ne mesure pas adéquatement l'incidence des troubles mentaux sur le bien-être physique et que l'on ne saisisse pas toujours parfaitement le bien-fondé du principe selon lequel la santé mentale fait partie intégrante de la santé4. De là l'importance de comprendre le fardeau associé aux problèmes de santé mentale donnant lieu à une comorbidité chez les personnes atteintes de maladies physiques. On constate l'existence de nombreux troubles psychiatriques importants de pair avec des problèmes de santé physique11. La prévalence de plusieurs problèmes de santé physique chroniques, plus précisément la douleur chronique, le diabète, les maladies cardiovasculaires, l'hypertension et les troubles respiratoires, est plus forte chez les gens atteints de troubles mentaux12,13,14. Les raisons expliquant la plus grande fréquence de problèmes de santé mentale parmi les personnes chez qui l'on observe une morbidité physique sont multiples et ne sont pas parfaitement comprises. De nombreux problèmes de santé physique font augmenter le risque de problème de santé mentale, et la comorbidité mentale a souvent pour effet de rendre plus difficiles la demande d'aide, le diagnostic et le traitement, ce qui peut influer sur le pronostic4.

Peu importe l'enchaînement causal, la combinaison de troubles physiques et de troubles mentaux entraîne souvent un taux plus élevé d'utilisation des soins de santé. À titre d'exemple, on constate un taux plus élevé d'utilisation des soins en salle d'urgence et en soins aux malades externe ainsi que des dépenses plus importantes au chapitre des produits pharmaceutiques dans le cas des personnes souffrant de problèmes chroniques et présentant des troubles mentaux comparativement à celles qui ont uniquement des problèmes de santé physique15. Plus précisément, dans le cas des personnes atteintes de diabète, les dépenses au titre des soins de santé étaient plus élevées lorsque des troubles mentaux étaient présents, par exemple des troubles d'utilisation de substances16. Les personnes ayant des problèmes de santé mentale peuvent aussi être exposées à un risque du fait des interactions entre les médicaments généraux et les psychotropes17.

Le Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie a mené récemment une étude sur les services de santé mentale au Canada, et il en est arrivé à la conclusion que l'on ne savait pas quelle était la situation en matière de santé mentale à l'échelle nationale. Le Comité jugeait qu'il fallait disposer de plus d'information afin de mesurer l'ampleur du problème et de mettre de l'avant les services et programmes requis18,19. L'Agence de la santé publique du Canada a exprimé des préoccupations similaires, indiquant que le profil des troubles mentaux est très limité au Canada et qu'il faut disposer de renseignements en complément des données disponibles sur les hospitalisations afin d'avoir de meilleurs connaissances au sujet des patients qui font actuellement appel au système de soins de santé afin d'obtenir des services de santé mentale ainsi que de la comorbidité des problèmes de santé mentale avec les autres types de maladie20,21.

Il y a eu une augmentation du nombre d'études de la santé mentale fondées sur la population à l'échelon national22,23,24,25,26 et provincial27,28,29. Toutefois, notre compréhension de l'ampleur du fardeau et du profil des patients hospitalisés dans des hôpitaux de soins de courte durée avec un diagnostic de problème mental présente encore d'importantes lacunes. À titre d'exemple, la plupart des rapports sur les hospitalisations portent sur les problèmes de santé mentale qui constituent le diagnostic principal, mais fournissent peu de renseignements sur le fardeau que représentent ces problèmes à titre d'états comorbides. De plus, pour une bonne part, les données administratives sur la santé fournissent peu de renseignements sur les caractéristiques des personnes hospitalisées avec un diagnostic de trouble mental. Or, il est essentiel de disposer de ces renseignements pour comprendre le fardeau associé au recours aux services de santé qui est imputable à ces personnes.

Le présent rapport prend comme point de départ la nouvelle conception que l'on se fait du fardeau associé aux problèmes de santé mentale à partir de différentes sources de données disponibles à Statistique Canada. La partie 1 du rapport porte essentiellement sur le fardeau des problèmes de santé mentale dans les hôpitaux de soins de courte durée, à partir des données administratives des hôpitaux. Nous envisageons un élargissement du rôle relié à la santé mentale en tenant compte à la fois des hospitalisations pour lesquelles un problème de santé mentale constitue le diagnostic principal ainsi que de celles où le problème de santé mentale constitue un état comorbide. Il devient ainsi possible d'évaluer de façon plus approfondie l'incidence des troubles mentaux sur l'utilisation des ressources hospitalières. Pour se pencher sur les questions liées à l'utilisation des services, on tient compte du nombre de jours d'hospitalisation et de la durée moyenne d'hospitalisation plutôt que du nombre d'hospitalisations.

La partie 2 du rapport porte essentiellement sur la compréhension des caractéristiques que présentent les patients hospitalisés avec un problème de santé mentale, que celui-ci constitue le diagnostic principal ou soit un état comorbide. Nous utilisons des données couplées afin de définir les caractéristiques associées à l'hospitalisation des patients et à un diagnostic de trouble mental. Ces renseignements permettent de mieux comprendre certains autres facteurs propres au patient qui peuvent être rattachés à une utilisation accrue des ressources.

Résultats

Partie 1 – Le fardeau associé à l'utilisation des services hospitaliers par les personnes ayant reçu un diagnostic de trouble mental

Services hospitaliers dispensés aux personnes ayant reçu un diagnostic de trouble mental

Taux d'hospitalisation en hôpital de soins de courte durée avec un diagnostic de trouble mental

Au cours de 2003-2004, le nombre total d'hospitalisations pour lequel un trouble mental constituait le diagnostic principal s'est chiffré à 155 000, soit 5,7 % de l'ensemble des hospitalisations au cours de l'exercice en question, tandis qu'il y a eu 228 000 hospitalisations pour lesquelles un trouble mental avait été diagnostiqué à titre d'état comorbide, soit 8,4 % des hospitalisations. Au chapitre des jours d'hospitalisation, 12,4 % de ceux-ci (2 471 000 jours) ont été associés à un diagnostic principal de trouble mental et 16,6 % (3 306 000 jours), à un diagnostic de trouble mental comorbide.

Au Canada, les personnes ayant été hospitalisées avec un diagnostic de trouble mental représentent une proportion relativement faible de l'ensemble de la population, mais ils accaparent une fraction disproportionnée des services hospitaliers. Ainsi, en 2003-2004, à peu près 291 000 personnes, ce qui représente 0,9 % de la population canadienne, ont obtenu leur congé d'un hôpital de soins de courte durée au moins une fois avec un diagnostic de trouble mental (diagnostic principal ou état comorbide); cela constitue toutefois 14,7 % de toutes les personnes ayant reçu leur congé de l'hôpital durant cet exercice.

Les personnes ayant un trouble mental ont utilisé une part disproportionnée des ressources hospitalières : on peut leur attribuer 14,1 % des hospitalisations et 29,0 % des jours d'hospitalisation (5,8 millions de jours) (figure 1).

Figure 1 Caractéristiques des hospitalisations en hôpital de soins de courte durée, associées aux diagnostics de trouble mental, Canada, 2003-2004Figure 1 Caractéristiques des hospitalisations en hôpital de soins de courte durée, associées aux diagnostics de trouble mental, Canada, 2003-2004

De manière à évaluer de façon complète le fardeau engendré par les troubles mentaux sur le plan des hospitalisations dans les hôpitaux de soins de courte durée, nous devons de toute évidence tenir compte du rôle de ces troubles mentaux à la fois lorsqu'ils sont le diagnostic principal et lorsqu'ils sont diagnostiqués à titre d'état comorbide.

Résultats selon l'âge et le sexe

Les distributions selon l'âge et le sexe nous permettent d'en savoir plus sur les personnes qui correspondent aux jours d'hospitalisation avec un diagnostic de trouble mental (figures 2a et 2b). Même si une plus grande partie des jours d'hospitalisation est attribuable aux femmes (55,1 %), les pourcentages entre les hommes et les femmes étaient comparables en ce qui touche les diagnostics de trouble mental (diagnostic principal : 12,1 % pour les hommes et 12,7 % pour les femmes; état comorbide : 17,1 % pour les hommes et 16,2 % pour les femmes). La tendance générale est semblable au niveau des différents groupes d'âge chez les hommes et chez les femmes (figure 2a).

Figure 2a Nombre total de jours d'hospitalisation, selon la présence de trouble mental, selon le sexe et le groupe d'âge, Canada, 2003-2004Figure 2a Nombre total de jours d'hospitalisation, selon la présence de trouble mental, selon le sexe et le groupe d'âge, Canada, 2003-2004

Figure 2b Pourcentage de jours d'hospitalisation associés à un diagnostic de trouble mental, selon le sexe et le groupe d'âge, Canada, 2003-2004Figure 2b Pourcentage de jours d'hospitalisation associés à un diagnostic de trouble mental, selon le sexe et le groupe d'âge, Canada, 2003-2004

Ainsi que cela était prévu, le nombre de jours d'hospitalisation associés à un diagnostic de trouble mental comorbide augmente avec l'âge. Pour sa part, le nombre de jours d'hospitalisation avec diagnostic principal de trouble mental était réparti entre les différents groupes d'âge, mais était légèrement plus élevé chez les personnes dans la trentaine et dans la quarantaine. Le pourcentage de jours d'hospitalisation avec diagnostic principal de trouble mental diminue avec l'âge (dans le cas des femmes, la baisse est attribuable aux accouchements). Pour ce qui est des jeunes hommes, plus de 30 % des jours d'hospitalisation étaient associés à un diagnostic principal de trouble mental. Tant pour les hommes que pour les femmes, le pourcentage de jours d'hospitalisation associé à un diagnostic de trouble mental comorbide augmente avec l'âge (figure 2b).

La durée moyenne du séjour dans le cas des hospitalisations avec diagnostic de trouble mental et sans diagnostic de trouble mental donne une indication de l'intensité de l'utilisation des services hospitaliers. Comme  il était prévu, la durée moyenne du séjour dans le cas des hospitalisations avec diagnostic de trouble mental (diagnostic principal ou trouble comorbide) est plus élevée que pour les autres hospitalisations  (figure 3). Ainsi, la durée du séjour est en moyenne de 15,9 jours avec diagnostic principal de trouble mental, de 14,5 jours avec diagnostic de trouble mental comorbide et de 6,1 jours en l'absence de diagnostic de trouble mental (figure 3).

Figure 3 Durée moyenne du séjour, selon la présence d'un diagnostic de trouble mental et le groupe d'âge, Canada, 2003-2004Figure 3 Durée moyenne du séjour, selon la présence d'un diagnostic de trouble mental et le groupe d'âge, Canada, 2003-2004

À l'intérieur de chaque groupe d'âge, la durée moyenne du séjour était souvent trois fois plus longue dans le cas des hospitalisations avec diagnostic principal de trouble mental que pour celles où aucun trouble mental n'avait été déclaré. La durée moyenne des hospitalisations avec diagnostic de trouble mental comorbide se situait entre ces deux extrêmes, mais elle était souvent plus de deux fois plus longue que celle sans diagnostic de trouble mental (ratio de 2,3), et ce, pour tous les groupes d'âge. Par exemple, parmi les personnes âgées de 60 à 69 ans, la durée moyenne du séjour était de 20,6 jours pour les hospitalisations avec diagnostic principal de trouble mental, de 14,2 jours pour celles avec diagnostic de trouble mental comorbide et de 7,1 jours seulement pour les autres.

Résultats selon le type de diagnostic

Il est également intéressant de se pencher sur le fardeau lié aux hospitalisations par rapport à chaque type de trouble mental pour différents groupes d'âge (figure 4). Les résultats obtenus montrent que les types de troubles comorbides les plus courants étaient les troubles organiques (démence, délire), les troubles d'utilisation de substances et les troubles de l'humeur. Tel qu'il était prévu, les cas de troubles mentaux organiques comorbides (démence, délire) étaient plus fréquents chez les personnes de plus de 70 ans.

Figure 4 Distribution des jours d'hospitalisation selon l'âge, patients âgés de dix ans et plus ayant reçu un diagnostic de trouble mental, par type de trouble mental, Canada, 2003-2004Figure 4 Distribution des jours d'hospitalisation selon l'âge, patients âgés de dix ans et plus ayant reçu un diagnostic de trouble mental, par type de trouble mental, Canada, 2003-2004

Les troubles d'utilisation de substances étaient fréquents pour un grand intervalle d'âge, principalement à titre de troubles comorbides. Les troubles de l'humeur constituent d'abord le diagnostic principal chez les personnes jeunes et en viennent à être des troubles comorbides à mesure que l'âge augmente. Les cas de schizophrénie et de psychose constituent plus fréquemment le diagnostic principal chez les personnes âgées de 20 à 60 ans. Les troubles d'anxiété et les troubles de la personnalité constituaient le plus souvent des états comorbides, et ce, pour la plupart des groupes d'âge.

Résultats par province et par région sociosanitaire

Hospitalisations avec diagnostic de trouble mental, par province et par région sociosanitaire

Le fardeau que représentent les troubles mentaux au regard des hospitalisations en hôpital de soins de courte durée variait selon la province (figure 5). La proportion d'hospitalisations pour lesquelles un trouble mental constituait le diagnostic principal allait de 3,7 % à Terre-Neuve-et-Labrador (52 580 hospitalisations) à 8,8 % à l'Île-du-Prince-Édouard (15 912 hospitalisations). Lorsque le trouble mental était comorbide, la proportion allait de moins de 3,1 % à Terre-Neuve-et-Labrador à 15,1 % au Québec.

Figure 5 Pourcentage d'hospitalisations en hôpital de soins de courte durée avec diagnostic de trouble mental (diagnostic principal ou trouble comorbide), par province, tous âges confondus, Canada, 2003-2004Figure 5 Pourcentage d'hospitalisations en hôpital de soins de courte durée avec diagnostic de trouble mental (diagnostic principal ou trouble comorbide), par province, tous âges confondus, Canada, 2003-2004

Les variations d'une province à l'autre peuvent tenir à des différences éventuelles au niveau soit de la prévalence des troubles mentaux dans la population, soit des pratiques de traitement dans les hôpitaux de soins de courte durée. Les variations pourraient toutefois s'expliquer aussi par des différences dans les pratiques de codage rattachées spécifiquement à la comorbidité. De façon générale, le nombre moyen de diagnostics par patient et par hospitalisation qui sont documentés dans les données hospitalières varie de façon très marquée entre les provinces. C'est au Québec que l'on déclare le nombre moyen le plus élevé de diagnostics de troubles comorbides par hospitalisation, tandis que Terre-Neuve-et-Labrador et l'Île-du-Prince-Édouard sont les provinces où ce nombre est le plus bas39.

Il serait utile pour les planificateurs de soins de santé de prendre en compte le fardeau associé aux troubles mentaux au niveau de régions de plus petite taille. À la figure 6, chaque carré représente une région sociosanitaire. Les résultats mettent en lumière des variations considérables entre régions sociosanitaires en ce qui touche les hospitalisations reliées à des troubles mentaux. Par exemple, dans les régions sociosanitaires de l'Alberta, le pourcentage d'hospitalisations associées à un trouble mental comorbide se situe entre 5,0 % et 12,9 %. De même que ceux existant entre provinces, les écarts entre régions sociosanitaires peuvent être le fait de différences dans les états de santé sous-jacents, les traitements ou même les pratiques de codage, quoique, à l'intérieur d'une même province, on puisse s'attendre à ce que les différences de codage ne soient pas un facteur aussi important. On trouvera au tableau B de l'annexe des données complètes sur les régions sociosanitaires.

Figure 6 Pourcentage d'hospitalisations en hôpital de soins de courte durée avec diagnostic de trouble mental comorbide, par région sociosanitaire et par province, tous âges confondus, Canada, 2003-2004Figure 6 Pourcentage d'hospitalisations en hôpital de soins de courte durée avec diagnostic de trouble mental comorbide, par région sociosanitaire et par province, tous âges confondus, Canada, 2003-2004

Jours d'hospitalisation associés à un diagnostic de trouble mental, par province et par région sociosanitaire

Les jours d'hospitalisation constituent une mesure indirecte de l'utilisation des ressources. Ainsi qu'on pouvait s'y attendre, il existe aussi des variations entre provinces à cet égard (figure 7). Le pourcentage de jours d'hospitalisation avec diagnostic principal de trouble mental variait 7,3 % en Saskatchewan à 12,9 % au Québec, tandis que le pourcentage de jours d'hospitalisation avec diagnostic de trouble mental comorbide allait de 7,1 % à Terre-Neuve-et-Labrador à 25,9 % au Québec.

Figure 7 Pourcentage de jours d'hospitalisation en hôpital de soins de courte durée avec diagnostic de trouble mental (diagnostic principal ou trouble comorbide), par province, tous âges confondus, Canada, 2003-2004Figure 7 Pourcentage de jours d'hospitalisation en hôpital de soins de courte durée avec diagnostic de trouble mental (diagnostic principal ou trouble comorbide), par province, tous âges confondus, Canada, 2003-2004

Les résultats montrent des écarts substantiels en ce qui touche les jours d'hospitalisation entre régions sociosanitaires, et même entre les provinces (figure 8). À titre d'exemple, en Alberta, le pourcentage de jours d'hospitalisation avec diagnostic de trouble mental comorbide va de 8,9 % à 24,9 %. Les données relatives aux régions sociosanitaires au tableau B de l'annexe peuvent servir à déterminer les régions sociosanitaires.

Figure 8 Pourcentage de jours d'hospitalisation en hôpital de soins de courte durée avec diagnostic de trouble mental comorbide, par région sociosanitaire et par province, tous âges confondus, Canada, 2003-2004Figure 8 Pourcentage de jours d'hospitalisation en hôpital de soins de courte durée avec diagnostic de trouble mental comorbide, par région sociosanitaire et par province, tous âges confondus, Canada, 2003-2004

Nous avons étudié le pourcentage de jours d'hospitalisation selon le type de diagnostic de trouble mental afin de voir quelle était l'incidence particulière de chaque type sur l'utilisation des services hospitaliers dans les provinces. Le tableau 2 nous apprend que le nombre de jours d'hospitalisation était plus élevé lorsqu'il y avait diagnostic principal de trouble de l'humeur, de psychose et de trouble organique (démence, délire). Dans le cas des troubles mentaux comorbides, les troubles organiques, les troubles d'utilisation de substances et les troubles de l'humeur (démence, délire) étaient ceux qui étaient associés au nombre de jours d'hospitalisation le plus élevé. Dans le cas de certaines hospitalisations, on avait diagnostiqué plus d'un trouble mental, de sorte que le nombre total de jours est inférieur à la somme des chiffres indiqués. Dans toutes les provinces, les pourcentages de jours d'hospitalisation associés aux diagnostics de troubles d'anxiété et de troubles de la personnalité sont peu élevés. Le pourcentage de jours d'hospitalisation associé à un diagnostic de trouble organique comorbide va de 2,4 % dans les Territoires du Nord-Ouest à 9,6 % en Alberta. Dans le cas des troubles de l'humeur et des psychoses, le pourcentage varie d'une province à l'autre, tandis qu'il est plus élevé dans les territoires pour ce qui est des problèmes d'abus de substances.

Tableau 2 Pourcentage de jours d'hospitalisation avec diagnostic de trouble mental (diagnostic principal ou trouble comorbide), par province et par type de trouble mental, tous âges confondus, Canada, 2003-2004Tableau 2 Pourcentage de jours d'hospitalisation avec diagnostic de trouble mental (diagnostic principal ou trouble comorbide), par province et par type de trouble mental, tous âges confondus, Canada, 2003-2004

Durée du séjour dans le cas des hospitalisations avec diagnostic de trouble mental, par province et par région sociosanitaire

Tandis que le nombre de jours d'hospitalisation permet de mesurer indirectement le fardeau associé aux diagnostics de trouble mental pour le réseau des hôpitaux de soins de courte durée, le nombre moyen de jours par hospitalisation fournit une indication de l'intensité d'utilisation des services hospitaliers par patient. Les diagnostics de trouble mental comorbide semblent avoir une incidence importante sur l'utilisation des services hospitaliers durant l'hospitalisation. La durée moyenne du séjour lorsqu'il y a un diagnostic de trouble mental comorbide est deux fois plus longue qu'en l'absence de diagnostic de trouble mental. On observe à peu près la même chose dans toutes les provinces. Le ratio du nombre moyen de jours d'hospitalisation par congé lorsqu'il existe un trouble mental comorbide au nombre moyen de jours d'hospitalisation en l'absence d'un tel trouble va de 1,9 en Saskatchewan à 3,0 à Terre-Neuve-et-Labrador (figure 9, ligne horizontale).

Figure 9 Durée moyenne du séjour, selon la présence de diagnostic de trouble mental et la province, tous âges confondus, Canada, territoires non compris, 2003-2004Figure 9 Durée moyenne du séjour, selon la présence de diagnostic de trouble mental et la province, tous âges confondus, Canada, territoires non compris, 2003-2004

Également, le ratio du nombre de jours d'hospitalisation par congé lorsqu'il existe un trouble mental comorbide au nombre moyen de jours d'hospitalisation en l'absence d'un tel trouble varie entre régions sociosanitaires à l'intérieur d'une même province (figure 10). Ainsi, en Colombie-Britannique, il va de 1,6 à plus de 3,2. Les données relatives aux régions sociosanitaires au tableau B de l'annexe peuvent servir à déterminer les régions sociosanitaires.

Figure 10 Ratio de la durée moyenne des hospitalisations avec diagnostic de trouble mental comorbide à celle des hospitalisations sans trouble mental comorbide, par région sociosanitaire, tous âges confondus, Canada, 2003-2004Figure 10 Ratio de la durée moyenne des hospitalisations avec diagnostic de trouble mental comorbide à celle des hospitalisations sans trouble mental comorbide, par région sociosanitaire, tous âges confondus, Canada, 2003-2004

Tableau B Certaines données hospitalières, diagnostic principal de trouble mental et diagnostic de trouble mental comorbide, par région sociosanitaire, tous âges confondus, Canada, 2003-2004Tableau B Certaines données hospitalières, diagnostic principal de trouble mental et diagnostic de trouble mental comorbide, par région sociosanitaire, tous âges confondus, Canada, 2003-2004

Fardeau global des troubles mentaux à titre d'états comorbides, selon les principaux types de maladie

Pour mieux comprendre le fardeau associé aux troubles mentaux comorbides, nous avons examiné les écarts de durée de l'hospitalisation selon qu'un trouble mental comorbide avait été diagnostiqué ou non, en fonction des principaux types de maladie. Ces derniers ont été établis en fonction du diagnostic principal pour chaque hospitalisation, selon les définitions énoncées dans les chapitres de la CIM-10-CA (tableau 3). Étant donné qu'on ne peut faire un bon recoupement entre les chapitres de la CIM-9 et ceux de la CIM-10-CA, cette analyse n'inclut pas le Manitoba et le Québec, car les hospitalisations dans ces provinces ont été codées d'après la CIM-9 et la CIM-9-MC en 2003-2004.

Tableau 3 Caractéristiques reliées aux jours d'hospitalisation avec et sans diagnostic de trouble mental comorbide, selon les principaux types de maladie (chapitres du CIM-10-CA) et le groupe d'âge, Canada, en excluant le Manitoba et le Québec, 2003-2004Tableau 3 Caractéristiques reliées aux jours d'hospitalisation avec et sans diagnostic de trouble mental comorbide, selon les principaux types de maladie (chapitres du CIM-10-CA) et le groupe d'âge, Canada, en excluant le Manitoba et le Québec, 2003-2004

Nous présentons le pourcentage de jours d'hospitalisation avec un diagnostic de trouble mental comorbide, le nombre moyen de jours d'hospitalisation avec et sans diagnostic de trouble mental comorbide ainsi que le ratio de la durée du séjour pour les hospitalisations avec et sans diagnostic de trouble mental comorbide (tableau 3). Ces résultats sont exposés par groupe d'âge, car la durée du séjour dépend en grande partie de l'âge en raison de différences observées précédemment dans le présent rapport. (On trouvera au tableau C de l'annexe une analyse similaire reposant sur les hospitalisations plutôt que sur les jours d'hospitalisation.)

Tableau C Caractéristiques des hospitalisations avec diagnostic de trouble mental comorbide pour les principaux types de maladie (chapitres de la CIM-10-CA), par groupe d'âge, Canada, en excluant le Manitoba et le Québec, 2003-2004Tableau C Caractéristiques des hospitalisations avec diagnostic de trouble mental comorbide pour les principaux types de maladie (chapitres de la CIM-10-CA), par groupe d'âge, Canada, en excluant le Manitoba et le Québec, 2003-2004

La proportion de jours d'hospitalisation associés à un diagnostic de trouble mental comorbide a été en moyenne de 15,1 % dans les provinces comprises dans notre analyse. La proportion de ces jours allait de 2,0 % pour les hospitalisations liées à la grossesse à 29,2 % pour les hospitalisations en raison de maladies nerveuses. Parmi les autres principaux types de maladie avec diagnostic de trouble mental comorbide, il convient de mentionner les maladies infectieuses et parasitaires  (20,7 %), les maladies métaboliques (22,4 %), les maladies respiratoires (18,7 %), les maladies de la peau (18,1 %) ainsi que les blessures et les empoisonnements (21,7 %).

La proportion de jours d'hospitalisation par chapitre donné de la CIM-10-CA qui sont associés à un diagnostic de trouble mental comorbide allait de 4,4 % pour les personnes de 19 ans et moins à 18,5 % pour celles de 65 ans et plus. Pour certains chapitres d'hospitalisations, on risquait davantage d'observer un trouble mental comorbide dans certains groupes d'âge. Par exemple, en ce qui touche les maladies respiratoires, la proportion de jours d'hospitalisation que l'on peut associer à un diagnostic de trouble mental augmentait avec l'âge, passant de 3,0 % à 20,8 %. Par contre, dans le cas des maladies de peau, le pourcentage de jours d'hospitalisation en cas de trouble mental comorbide était comparable chez les personnes âgées de 20 à 65 ans. Les pourcentages de jours par chapitre observés étaient généralement peu élevés dans le cas du groupe des personnes âgées de 19 ans et moins.

Afin de résumer les différences touchant la durée du séjour, nous présentons un ratio des hospitalisations avec diagnostic de trouble mental aux hospitalisations sans diagnostic de trouble mental (tableau 3). Les ratios les plus élevés sont ceux des hospitalisations où le diagnostic principal a trait aux maladies de l'œil (3,5) et aux maladies congénitales (3,5). Les hospitalisations étaient généralement plus longues lorsqu'il existait un trouble mental comorbide, et ce, pour tous les groupes d'âge. Font toutefois exception à cet égard les maladies de l'œil et de l'oreille pour les personnes les plus jeunes. Au total, la durée moyenne du séjour était 2,5 fois plus longue lorsqu'il y avait un trouble mental comorbide qu'en l'absence de celui-ci. L'incidence de la comorbidité était relativement uniforme d'un groupe d'âge à l'autre, le ratio allant de 1,8 à 2,1.

On trouvera aux tableaux de l'annexe D, E et F une répartition au niveau des provinces d'après la CIM-10-CA.

Tableau D Pourcentage d'hospitalisations avec diagnostic de trouble mental comorbide, par province et territoire ainsi que par chapitre de la CIM-10-CA, Canada, en excluant le Manitoba et le Québec, 2003-2004Tableau D Pourcentage d'hospitalisations avec diagnostic de trouble mental comorbide, par province et territoire ainsi que par chapitre de la CIM-10-CA, Canada, en excluant le Manitoba et le Québec, 2003-2004

Tableau E Pourcentage de jours d'hospitalisation avec diagnostic de trouble mental comorbide, par province et territoire et par chapitre de la CIM-10-CA, Canada, en excluant le Manitoba et le Québec, 2003-2004Tableau E Pourcentage de jours d'hospitalisation avec diagnostic de trouble mental comorbide, par province et territoire et par chapitre de la CIM-10-CA, Canada, en excluant le Manitoba et le Québec, 2003-2004

Tableau F Ratio de la durée moyenne du séjour en hôpital de soins de courte durée avec diagnostic de trouble mental comorbide à la durée moyenne du séjour en l'absence de diagnostic de trouble mental comorbide, par province et territoire et par chapitre de la CIM-10-CA, Canada, en excluant le Manitoba et le Québec, 2003-2004Tableau F Ratio de la durée moyenne du séjour en hôpital de soins de courte durée avec diagnostic de trouble mental comorbide à la durée moyenne du séjour en l'absence de diagnostic de trouble mental comorbide, par province et territoire et par chapitre de la CIM-10-CA, Canada, en excluant le Manitoba et le Québec, 2003-2004

Pour mieux comprendre le fardeau des troubles mentaux comorbides, nous nous sommes penchés sur les différents chapitres relatifs aux maladies d'après les principaux diagnostics de trouble mental (tableau 4). Le pourcentage de jours d'hospitalisation associés aux divers troubles mentaux varie selon le chapitre. Par exemple, 4,9 % des jours d'hospitalisation en raison de maladies de la peau présentent des problèmes d'abus de substances comme trouble comorbide, comparativement à 1,9 seulement pour les maladies de l'appareil circulatoire. Les chapitres sur les maladies pour lesquels plus de 18 % des jours d'hospitalisation étaient associés à des troubles mentaux comorbides étaient les suivants : maladies infectieuses; maladies métaboliques; troubles mentaux; maladies du système nerveux; maladies de l'appareil respiratoire; maladies de la peau; lésions traumatiques et empoisonnements; et états morbides mal définis. Précisons que le total obtenu est inférieur à la somme de ces sept catégories, car, dans le cas de certaines hospitalisations, on a diagnostiqué plus d'un trouble mental comorbide. Le tableau G de l'annexe présente des données semblables portant sur les hospitalisations plutôt que sur les jours d'hospitalisation.

Tableau 4 Pourcentage de jours d'hospitalisation avec diagnostic de trouble mental comorbide, par chapitre de la CIM-10-CA et par type de trouble mental comorbide, Canada, en excluant le Manitoba et le Québec, 2003-2004Tableau 4 Pourcentage de jours d'hospitalisation avec diagnostic de trouble mental comorbide, par chapitre de la CIM-10-CA et par type de trouble mental comorbide, Canada, en excluant le Manitoba et le Québec, 2003-2004

Tableau G Pourcentage d'hospitalisations en hôpital de soins de courte durée avec diagnostic de trouble mental comorbide, par chapitre de la CIM-10-CA et par type de comorbidité mentale, Canada, en excluant le Manitoba et le Québec, 2003-2004Tableau G Pourcentage d'hospitalisations en hôpital de soins de courte durée avec diagnostic de trouble mental comorbide, par chapitre de la CIM-10-CA et par type de comorbidité mentale, Canada, en excluant le Manitoba et le Québec, 2003-2004

Résumé

Pour résumer brèvement les personnes ayant reçu au moins une fois leur congé d'un hôpital de soins de courte durée avec un trouble mental représentent un peu moins de 1 % des Canadiens; par contre, ils représentent une fraction disproportionnée du nombre de personnes hospitalisées (12,8 %). Au total, 29 % des jours d'hospitalisation (3,3 millions de jours) étaient associés à un diagnostic de trouble mental et plus de la moitié de ces jours d'hospitalisation, à un diagnostic de trouble mental comorbide. La durée moyenne du séjour dans le cas des hospitalisations avec diagnostic de trouble mental comorbide était deux fois plus longue qu'en l'absence d'un tel diagnostic.Ce résultat vaut à peu de choses près pour tous les groupes d'âge, pour la plupart des chapitres et pour la plupart des provinces. Il en ressort que les personnes ayant des troubles mentaux engendrent un lourd fardeau pour le système de soins de santé.

Partie 2 – Caractéristiques des personnes hospitalisées avec un diagnostic de trouble mental

Les résultats présentés jusqu'ici font clairement ressortir l'importance du fardeau engendré par les troubles mentaux sur le plan des hospitalisations en hôpital de soins de courte durée, que ces troubles constituent le diagnostic principal ou des états comorbides. Il importe donc de connaître cette population de patients et les facteurs pouvant concourir à ce fardeau plus lourd au chapitre des services hospitaliers. Les données probantes recueillies jusqu'ici laissent penser que différents facteurs de risque sont souvent plus présents chez les personnes atteintes de troubles mentaux. En comparaison avec les personnes sans troubles mentaux, les personnes présentant un trouble mental sont généralement moins susceptibles d'être mariées26,40,41, plus susceptibles d'avoir un faible revenu ou d'être sans emploi 28,29,40,41, plus susceptibles d'être fumeurs12,29,42,43,44,45,46, et, parfois, plus susceptibles de faire de l'embonpoint ou d'être obèses43,44,47,48,49,50. De plus, on observe chez ces personnes une plus grande prévalence de plusieurs  problèmes de santé chroniques, en particulier la douleur chronique, le diabète, les maladies cardiovasculaires, l'hypertension et les troubles respiratoires12,13,14. Ces facteurs sont souvent associés à un recours accru aux services hospitaliers, et cela peut donc être le cas pour cette population particulière de patients.

Dans la seconde partie de notre étude, nous avons utilisé des données d'enquête couplées avec des données hospitalières afin de mettre en lumière les facteurs associés aux hospitalisations futures avec diagnostic de trouble mental. Plus précisément, nous avons procédé au couplage de l'Enquête sur la santé dans les collectivités canadiennes (ESCC) et de données administratives des hôpitaux. (L'encadré « Sources de données » fournit de plus amples renseignements à ce sujet.) Ce couplage de données d'enquête et de données sur les admissions à l'hôpital nous donne la possibilité unique d'examiner un ensemble détaillé de caractéristiques pouvant être associées aux hospitalisations avec diagnostic de trouble mental. Certaines caractéristiques — démographiques, socioéconomiques et liées à l'état de santé, aux comportements influant sur la santé et à l'expérience des soins de santé — ont été définies à l'égard des répondants à l'enquête selon qu'ils ont ou non été hospitalisés pour des raisons liées à un problème de santé mentale dans les quatre années suivant leur participation. Toutes les variables examinées sont récapitulées aux tableaux 5 à 8.

Résultats

Les personnes hospitalisées à au moins une reprise avec un diagnostic de trouble mental tendaient à faire partie de groupes socio-économiques moins favorisés que celles hospitalisées pour d'autres causes

Il était plus courant que les personnes hospitalisées avec un diagnostic de trouble mental aient un niveau de scolarité peu élevé. Ainsi, dans le cas des hospitalisations survenues au cours des quatre années ayant suivi l'ESCC, le niveau de scolarité le plus élevé atteint n'excédait pas les études secondaires chez 42,8 % des personnes admises avec un diagnostic de trouble mental comorbide (tableau 5); dans le cas des autres personnes admises à l'hôpital, cette proportion était de 29,2 %.

Tableau 5 Certaines caractéristiques socioéconomiques et démographiques, 2000-2001, d'après les admissions à l'hôpital à l'intérieur de la période de suivi de quatre ans, population à domicile âgée de 12 ans et plus, Canada, en excluant les territoires et le QuébecTableau 5 Certaines caractéristiques socioéconomiques et démographiques, 2000-2001, d'après les admissions à l'hôpital à l'intérieur de la période de suivi de quatre ans, population à domicile âgée de 12 ans et plus, Canada, en excluant les territoires et le Québec

On observait une situation semblable au chapitre du revenu. Par rapport aux autres personnes hospitalisées, celles ayant reçu un diagnostic de trouble mental étaient plus souvent des personnes à faible revenu. Environ 8,7 % des personnes hospitalisées avec un diagnostic principal de trouble mental et 7,0 % de celles avec un diagnostic de trouble mental comorbide faisaient partie du quintile de revenu inférieur, contre 3,7 % pour le groupe témoin (tableau 5).

Les personnes hospitalisées avec un diagnostic de trouble mental étaient moins susceptibles d'être mariées ou conjoints de fait (diagnostic principal : 43,2 %; trouble comorbide : 47,3 %) que celles faisant partie du groupe témoin (61,8 %).

En outre, la proportion d'Autochtones parmi les personnes hospitalisées avec un diagnostic principal de trouble mental ou un diagnostic de trouble mental comorbide était plus élevée (3,6 % et 4,4 %, respectivement) que parmi celles hospitalisées sans diagnostic de trouble mental (1,5 %) (tableau 5). Par ailleurs, les personnes vivant en milieu rural étaient moins susceptibles d'être hospitalisées avec un diagnostic de trouble mental que celles vivant en milieu urbain. On n'a observé aucun effet rattaché au statut d'immigrant.

Certains aspects du mode de vie, comme l'usage du tabac, étaient associés aux hospitalisations avec diagnostic de trouble mental

Un plus fort pourcentage de personnes hospitalisées avec un diagnostic de trouble mental a déclaré fumer que celui des autres personnes hospitalisées sans trouble mental.  Environ la moitié des personnes hospitalisées avec un trouble mental (diagnostic principal ou trouble comorbide) ont déclaré être des fumeurs, alors que cette proportion n'est que de 28,4 % chez les autres personnes hospitalisées (tableau 6).

Tableau 6 Certains comportements influant sur la santé et facteurs de risque en 2000-2001, d'après les admissions à l'hôpital à l'intérieur de la période de suivi de quatre ans, population à domicile âgée de 12 ans et plus, Canada, en excluant les territoires et le QuébecTableau 6 Certains comportements influant sur la santé et facteurs de risque en 2000-2001, d'après les admissions à l'hôpital à l'intérieur de la période de suivi de quatre ans, population à domicile âgée de 12 ans et plus, Canada, en excluant les territoires et le Québec

Les non-buveurs représentaient un pourcentage plus élevé des personnes hospitalisées avec diagnostic principal de trouble mental que de celles admises à l'hôpital pour d'autres causes (31,2 % contre 23,2 %) (tableau 6).

Par ailleurs, 48,5 % des personnes hospitalisées avec diagnostic principal de trouble mental avaient un faible sentiment d'appartenance à la communauté, comparativement à 37,2 % de celles hospitalisées pour d'autres causes (tableau 6).

En ce qui touche l'indice de masse corporelle, la distribution semble la même entre les différents groupes de personnes hospitalisées (tableau 6).

Les personnes ayant été hospitalisées au moins une fois avec un diagnostic de trouble mental tendent à déclarer un état de santé moins bon que les autres personnes hospitalisées

Les personnes hospitalisées avec un trouble mental (diagnostic principal ou trouble comorbide) déclaraient un état de santé moins bon que les autres personnes hospitalisées, et ce, selon plusieurs mesures, notamment l'autoévaluation d'un état de santé passable ou mauvais ou d'une incapacité (d'après l'Indice de l'état de santé) (tableau 7).

Tableau 7 Certaines caractéristiques de l'état de santé, 2000-2001, d'après les admissions à l'hôpital à l'intérieur de la période de suivi de quatre ans, population à domicile âgée de 12 ans et plus, Canada, en excluant les territoires et le QuébecTableau 7 Certaines caractéristiques de l'état de santé, 2000-2001, d'après les admissions à l'hôpital à l'intérieur de la période de suivi de quatre ans, population à domicile âgée de 12 ans et plus, Canada, en excluant les territoires et le Québec

Les personnes hospitalisées avec un diagnostic de trouble mental comorbide étaient plus susceptibles d'être atteintes de trois problèmes de santé chroniques ou plus que celles hospitalisées sans diagnostic de trouble mental (21,3 % contre 11,8 %) (tableau 7). Le pourcentage de personnes atteintes de certaines maladies — diabète, arthrite, maladie pulmonaire obstructive chronique (MPOC), asthme, maladie cardiaque, ACV — était également plus élevé chez les personnes hospitalisées avec un diagnostic de trouble mental comorbide (tableau 7). En outre, les personnes hospitalisées avec un trouble mental étaient plus susceptibles de déclarer de la douleur (diagnostic principal : 36,5 %; trouble comorbide : 35,6 %) que les autres personnes hospitalisées (25,6 %) (tableau 7).

Ainsi que l'on pouvait s'y attendre, les personnes hospitalisées en raison d'un trouble mental étaient plus susceptibles d'être déprimées, de prendre des antidépresseurs ou de subir un fort stress au moment de l'enquête comparativement à celles hospitalisées sans avoir de trouble mental diagnostiqué.

Les personnes hospitalisées avec un diagnostic de trouble mental étaient plus susceptibles de faire état de besoins de soins de santé non comblés

Les personnes hospitalisées avec un diagnostic de trouble mental étaient plus susceptibles d'avoir consulté un professionnel de la santé mentale (diagnostic principal : 44,7 %; trouble comorbide : 21,9 %) que les autres personnes hospitalisées (10,1 %) (tableau 8), ce qui n'a pas lieu de surprendre. Toutefois, le pourcentage de personnes hospitalisées avec un diagnostic de trouble mental ayant un médecin régulier était le même que chez les autres personnes hospitalisées (diagnostic principal : 90,5 %; trouble comorbide : 87,4 %; personnes hospitalisées sans diagnostic de trouble mental : 91,7 %) (tableau 8).

Tableau 8 Certaines caractéristiques rattachées à l'utilisation des soins de santé, 2000-2001, d'après les admissions à l'hôpital à l'intérieur de la période de suivi de quatre ans, population à domicile âgée de 12 ans et plus, Canada, en excluant les territoires et le QuébecTableau 8 Certaines caractéristiques rattachées à l'utilisation des soins de santé, 2000-2001, d'après les admissions à l'hôpital à l'intérieur de la période de suivi de quatre ans, population à domicile âgée de 12 ans et plus, Canada, en excluant les territoires et le Québec

Les personnes hospitalisées avec un diagnostic de trouble mental étaient plus susceptibles de faire état de besoins de soins de santé non comblés. C'était le cas de 25,9 % de celles avec un diagnostic principal de trouble mental et 23,1 % de celles avec un diagnostic de trouble mental comorbide, comparativement à 16,5 % des personnes hospitalisées sans diagnostic de trouble mental (tableau 8). De même, le pourcentage de personnes hospitalisées avec un diagnostic principal de trouble mental ayant fait état de besoins de soins de santé mentale non comblés était supérieur à celui des personnes sans diagnostic de trouble mental (10,7 % contre 1,3 %). Ces écarts au chapitre des besoins de soin de santé non comblés se traduisent par une probabilité nettement plus élevée d'hospitalisation avec diagnostic de trouble mental.

Résumé

Nos résultats rendent compte de la prévalence, chez les personnes ayant des troubles mentaux chroniques, de facteurs de risque signalés dans la littérature spécialisée, par exemple une situation socioéconomique moins favorable, le célibat, l'usage du tabac et la plus forte prévalence de problèmes de santé physique chroniques. Cela dit, l'objet de la présente étude est de déterminer quels sont les facteurs associés à une hospitalisation future avec diagnostic de trouble mental. En un mot, d'après nos résultats corrigés selon l'âge et le sexe, (tableaux 5 à 8), les personnes admises à l'hôpital au cours des quatre années suivantes avec un problème de santé mentale étaient, comparativement à celles admises à l'hôpital au cours de la même période sans avoir de trouble mental, plus susceptibles d'être des personnes dont le niveau de scolarité ne dépasse pas les études secondaires, des personnes faisant partie des quintiles de revenu du ménage inférieurs, des personnes non mariées, des Autochtones, des fumeurs, des personnes ayant déclaré être déprimées ou prendre des antidépresseurs, des personnes ayant déclaré un état de santé passable ou mauvais, des personnes qui avaient des problèmes de santé physique comme le diabète, l'arthrite, une MPOC, une maladie cardiaque, de l'asthme ou de la douleur ou qui avaient fait un ACV, et des personnes qui avaient fait état de besoins de soins de santé non comblés.

Étant donné que ces facteurs pourraient également donner lieu à un recours accru aux ressources hospitalières, d'autres travaux sont requis afin de mieux connaître l'association entre ces facteurs et une durée moyenne de séjour à l'hôpital plus longue chez les personnes à qui l'on a diagnostiqué un trouble mental.

Discussion et conclusions

Les personnes atteintes de troubles mentaux imposent un lourd fardeau au système de soins de santé. Bien que représentant une faible proportion de la population (1 %), les personnes hospitalisées en raison de problèmes de santé mentale, qu'il s'agisse du diagnostic principal ou d'un trouble comorbide, utilisent une fraction disproportionnée des services hospitaliers. Ainsi, 29 % des jours d'hospitalisation, soit 5,8 millions de jours d'hospitalisation, sont rattachés à des patients présentant un trouble mental. De ce nombre, plus de la moitié était associée à un diagnostic de trouble mental comorbide. La plupart des rapports précédents sur les hospitalisations mettent l'accent sur les troubles mentaux qui constituent le diagnostic principal mais fournissent peu de données sur le fardeau attribuable aux troubles mentaux comorbides21,22,23. Cela explique pourquoi il y a très peu d'information sur les troubles mentaux comorbides au Canada, d'où l'importance particulière qui leur est accordée dans notre rapport.

La durée moyenne du séjour dans le cas des hospitalisations avec trouble mental comorbide est deux fois plus longue que pour les hospitalisations sans trouble mental comorbide. Cette proportion demeurait à peu près la même, peu importe le groupe d'âge, le diagnostic principal selon le chapitre, et la province. Certaines études américaines antérieures se fondaient sur un examen rétrospectif des dossiers et sur les diagnostics prospectifs, de manière à comparer la durée moyenne du séjour des patients chez qui un trouble mental comorbide avait été diagnostiqué ou était présumé et les patients faisant partie de groupes témoins. Ces études ont elles aussi fait état d'hospitalisations plus longues dans le cas des personnes ayant un trouble mental53,54,55,56. Les résultats de ces analyses rétrospectives ont conduit à des études prospectives établissant quels étaient les patients ayant eu des troubles psychiatriques durant leur hospitalisation; les études en question ont également indiqué que la durée du séjour était plus longue lorsqu'il y avait un trouble mental comorbide57,58,59,60. Il faut préciser que, pour la majorité, ces études n'ont pas pris en compte comme il se doit d'autres variables ayant une incidence sur la durée du séjour et que, de plus, elles étaient souvent circonscrites à un ou deux sites seulement. Afin de donner suite à ces préoccupations, Bressi (2006)61 utilise dans son analyse un échantillon d'hospitalisations qui est représentatif à l'échelle nationale (États-Unis), en tenant compte des caractéristiques propres aux patients et aux hôpitaux. Il ressort de son analyse que la présence d'un trouble psychiatrique comorbide laissait prévoir une hospitalisation plus longue des patients.

Les résultats de cette étude nous apprennent que, pour de nombreux problèmes de santé physique, on aura diagnostiqué un trouble mental comorbide. Cette observation concorde avec les données actuelles laissant penser qu'il existe une comorbidité significative entre problèmes de santé physique et mentale11. Plusieurs études ont mis en lumière l'existence d'un mauvais état de santé physique et une plus forte prévalence de problèmes de santé physique chroniques, de maladies et de facteurs de risque de maladie chronique chez les personnes atteintes de troubles mentaux12,13,14,48,49,50,62. De plus, les recherches ont souvent montré que la prévalence de troubles mentaux était plus forte chez les gens souffrant de troubles physiques chroniques que chez ceux n'ayant pas de troubles physiques63,64,65,66. Ainsi, selon les données épidémiologiques contemporaines, il existe une cooccurrence fréquente entre certaines maladies physiques et certains troubles mentaux; c'est notamment le cas des maladies cardiovasculaires, de l'hypertension, des maladies respiratoires, du diabète sucré et d'autres maladies métaboliques67.

Cette combinaison de troubles mentaux et physiques est à l'origine de deux courants de la littérature spécialisée. D'abord, dans l'optique des patients, il semble que ceux ayant un trouble mental grave soient moins au fait des troubles médicaux concomitants. Par exemple, les patients faisant partie du registre des psychoses du ministère des Anciens combattants et présentant un trouble mental grave étaient moins susceptibles que ceux n'ayant pas de trouble mental grave d'autodéclarer un état pathologique (p. ex. , maladie cardiovasculaire, arthrite, cancer, diabète, mal de dos, insuffisance cardiaque congestive, hypertension) figurant dans leur dossier médical68. Les patients atteints d'un trouble mental comorbide ajoutaient en outre à la complexité de l'offre de soins en ce sens que la comorbidité mentale rend plus difficiles la demande d'aide, le diagnostic et le traitement, sans compter qu'elle influera aussi sur le pronostic4.

Ensuite, sur le plan des soins de santé, on a indiqué que les services de santé ne sont pas dispensés de façon équitable aux personnes ayant des troubles mentaux, et que la qualité des soins offerts à ces personnes pour leurs problèmes de santé tant mentale que physique pouvait être améliorée4,69,70,71. Les services de consultation traditionnels, qui sont réactifs par nature, seront probablement dispensés uniquement à un faible pourcentage des patients des hôpitaux nécessitant des soins généraux, patients qui pourraient tirer parti des services en question72. Ces patients peuvent facilement passer entre les mailles du filet, étant donné que les services de santé se composent de différents niveaux disjoints18. Dans le présent rapport, nous constatons que les personnes ayant un trouble mental sont plus susceptibles de déclarer que leurs besoins de soins de santé n'ont pas été comblés que les personnes hospitalisées avec un diagnostic autre que de trouble mental. Pour citer un exemple tiré de la littérature sur le sujet, S. M. Frayne et ses collaborateurs (2005) ont constaté qu'il était plus fréquent que les patients atteints de troubles mentaux ne se conforment pas aux mesures de contrôle du diabète, et que le pourcentage de personnes n'observant pas les normes de soins du diabète augmentaient de pair avec le nombre de troubles mentaux73.

Sur une note plus optimiste, S. L. Krein et ses collaborateurs (2006)74 ont constaté, à partir des données du système de soins de santé du ministère des Anciens combattants, que les mesures de la qualité des soins et les résultats intermédiaires étaient comparables entre les patients atteints du diabète ayant un trouble mental grave et les autres patients atteints du diabète. Cette étude donne à penser que, si les soins sont similaires, c'est peut-être en raison de meilleurs contacts avec le système de soins de santé ainsi que de l'intégration des services médicaux et des services de santé mentale dans ce ministère.

Plusieurs autres auteurs avançaient qu'il serait avantageux d'intégrer les soins de santé physique et mentale. Kathol et ses collaborateurs (2008)75 décrivent les avantages qui pourraient être obtenus si l'évaluation et le traitement des problèmes de santé mentale et des troubles d'utilisation de substances en venaient à constituer un élément — clinique, administratif et financier — des soins de santé physique, tous ces services étant fournis par des réseaux communs, sans oublier la possibilité d'établir des lieux de services combinés (cliniques et unités des malades hospitalisés intégrées), l'utilisation de procédures de codage et de facturation similaires ainsi qu'une source de financement unique. D'autres chercheurs sont d'avis que les enjeux liés à la santé mentale doivent faire partie intégrante de tous les aspects de la politique sanitaire et sociale, de la planification du système de santé et de la prestation des soins de santé généraux (soins primaires et secondaires)4,76,77. Le défi consiste à mettre en place un système où les gens ayant à la fois des problèmes de santé mentale ou d'abus de substances et des troubles physiques obtiennent les services requis, peu importe où ils se rendent pour obtenir de l'aide78. Il est indiqué dans le rapport d'un comité sénatorial permanent18 que les patients atteints de troubles mentaux doivent composer avec un système fragmenté, déroutant et manquant de ressources, et qu'il serait également fort utile de disposer d'un système mieux coordonné.

L'un des avantages d'un système intégré de soins de santé physique et mentale est que l'on pourrait mieux prendre en compte le fait que nombre de médicaments prescrits en cas de trouble mental grave ont d'importants effets indésirables d'ordre métabolique et cardiovasculaire79. Par exemple, selon Kiraly et ses collaborateurs (2008)79, les patients traités à l'aide d'antipsychotiques de deuxième génération devraient recevoir à titre préventif des services de consultation et des traitements pour les maladies cardiovasculaires. Les interactions médicamenteuses peuvent en outre accentuer les effets indésirables, donner lieu à une hausse ou à une baisse des concentrations de médicaments, créer un risque de toxicité ou faire échouer le traitement. Les patients peuvent aussi utiliser des substances, licites ou non, à des fins d'automédication80. Si les soins dispensés à un patient sont coordonnés entre les médecins fournissant les soins primaires et les professionnels de la santé mentale, il y aura probablement moins de risque d'effets indésirables graves.

Outre l'intégration des soins de santé physique et de santé mentale, d'autres approches systématiques ont été proposées dans la littérature spécialisée, entre autres des stratégies de prévention en amont81,82 et des programmes de soutien afin d'aider les personnes à demeurer au sein de leur collectivité83. On voit donc que l'hospitalisation n'est qu'une des différentes approches en matière de soins de santé mentale au Canada de nos jours20. En raison de l'évolution des médicaments psychiatriques, de l'élaboration de toute une gamme de services communautaires, et également du coût élevé qui est associé à l'institutionnalisation, certains soins de santé mentale sont désormais fournis à l'extérieur des hôpitaux. D'autres rapports avertissent toutefois que les soins communautaires n'entraîneront pas forcément une diminution de la demande de soins hospitaliers82,84,85,86,87,88,89.

Nous constatons l'existence de variations entre les provinces et entre les régions sociosanitaires en ce qui touche le pourcentage d'hospitalisations et de jours d'hospitalisation ainsi que la durée moyenne du séjour avec diagnostic de trouble mental. Les variations entre les régions sociosanitaires sont associées à de nombreux facteurs qui peuvent varier d'une région à l'autre, comme le nombre et le type d'établissements. Les écarts peuvent être le fait de différences dans la prévalence des troubles mentaux au sein de la population, dans les diagnostics et les styles de pratique professionnelle des médecins, dans les pratiques de traitement des hôpitaux de soins de courte durée ou dans les pratiques de codage, plus précisément sous l'angle de la comorbidité. Concernant ce dernier point, le nombre moyen de diagnostics documentés par hospitalisation varie de façon marquée d'une province à l'autre. C'est au Québec que l'on recense le nombre moyen le plus élevé de diagnostics de troubles comorbides par hospitalisation, tandis que Terre-Neuve-et-Labrador et l'Île-du-Prince-Édouard sont les provinces où ce nombre est le plus bas39.

L'examen des données hospitalières a permis de constater que les personnes ayant un trouble mental sont plus susceptibles de présenter plusieurs des types les plus courants de troubles comorbides. Ces personnes sont également vulnérables sous d'autres aspects. À partir de la base de données couplées (données d'enquête et données hospitalières), nous pouvons voir que les personnes en question étaient plus susceptibles d'avoir un faible sentiment d'appartenance à la communauté, d'être célibataires plutôt que mariées et de n'avoir pas achevé leurs études secondaires, qu'elles étaient moins susceptibles de faire partie d'un quintile de revenu supérieur et qu'elles étaient plus susceptibles d'avoir déclaré un état de santé passable ou mauvais, une incapacité et des besoins de soins de santé non comblés comparativement aux personnes dont l'hospitalisation n'était pas liée à des problèmes de santé mentale.

Ces constatations viennent confirmer et étoffer les données présentées jusqu'ici, soit que, comparativement aux autres personnes, celles ayant un trouble mental sont généralement moins susceptibles d'être mariées26,40,41 et plus susceptibles d'avoir un faible revenu ou d'être sans emploi28,29,40,41 ainsi que d'être fumeurs12,29,42,43,44,45,46. Dans certains rapports récents, on a utilisé, en complément des données administratives, des données provenant d'autres sources afin d'avoir un aperçu plus complet sur les personnes atteintes de maladie mentale. Par exemple, un rapport récent préparé conjointement par Statistique Canada et l'Institut canadien d'information sur la santé (ICIS) fait appel à des données d'enquête couplées à des données administratives afin de déterminer les caractéristiques des patients dans le cas des hospitalisations de personnes souffrant de dépression26. Dans un rapport récent portant sur l'Ontario, l'ICIS utilise le nouveau Système d'information ontarien sur la santé mentale afin d'étudier à la fois les hospitalisations en raison d'une maladie mentale et les principales caractéristiques que présentent les patients ayant un problème de santé mentale29. On observait ainsi chez les personnes hospitalisées pour un tel problème un taux d'activité moins élevé et un niveau de scolarité plus bas que pour l'ensemble des Ontariens âgés de 15 ans et plus; en outre, ces personnes étaient moins susceptibles d'être mariées ou de vivre avec un conjoint. Un rapport du Manitoba donnait un aperçu de la prévalence des troubles mentaux. On y comparait cinq groupes de revenu du quartier (des « quintiles de revenu ») établis d'après le revenu moyen des ménages dans la région, et on indiquait que les taux de maladie mentale les plus élevés étaient observés dans les quartiers où le revenu était le plus bas28.

L'un des principaux points mis en lumière par notre étude est que les personnes ayant un trouble mental sont plus susceptibles de faire état de besoins de soins de santé non comblés que celles ayant été hospitalisées pour des raisons autres qu'un problème de santé mentale. Ce point est également soulevé dans des études mentionnées précédement où l'on indique que les services de santé ne sont pas dispensés équitablement aux personnes atteintes de troubles mentaux. Il y a d'autres caractéristiques que partagent les personnes ayant des troubles mentaux qui peuvent aussi entrer en ligne de compte pour expliquer que des besoins ne soient pas comblés. Par exemple, plus leur niveau de scolarité était élevé, plus les répondants adultes à l'Enquête sur la santé dans les collectivités canadiennes, cycle 1.2, qui avaient un trouble d'anxiété ou qui étaient dépressifs étaient susceptibles de consulter un psychiatre, un médecin de famille, un psychologue ou un travailleur social90. Cela veut donc dire que les personnes défavorisées sur le plan social risquaient davantage que leurs besoins de soins de santé mentale ne soient pas comblés. Steele (2007) a proposé que des programmes ciblés soient élaborés et évalués à l'intention des utilisateurs de soins n'ayant pas terminé leurs études secondaires91.

En résumé, les troubles mentaux peuvent toucher n'importe quel groupe d'âge et constituent des états comorbides courants chez les personnes ayant des problèmes de santé physique. Notre rapport met l'accent sur les conditions comorbides. Nous avons constaté que 29 % des jours d'hospitalisation en 2003-2004 étaient associés à des personnes hospitalisées avec un diagnostic de trouble mental, et que plus de la moitié de ces jours d'hospitalisation étaient liés à des troubles mentaux comorbides. Également, la durée moyenne du séjour en cas de diagnostic de trouble mental comorbide était deux fois plus longue que pour les autres hospitalisations. Une étude fondée sur des données couplées (données d'enquête et données hospitalières) a mis en lumière un ensemble de caractéristiques que présentent les personnes hospitalisées avec diagnostic de trouble mental comorbide. Ces caractéristiques, par exemple l'usage du tabac, un faible revenu, un niveau de scolarité peu élevé et la prévalence de problèmes de santé physique, sont en outre souvent associées à un recours accru aux services hospitaliers; elles peuvent donc être liées à une utilisation plus grande de ces services par la population de patients atteints de troubles mentaux. Des travaux sont prévus afin d'intégrer les deux parties de la présente étude en examinant dans quelle mesure les facteurs associés à un diagnostic de trouble mental peuvent concourir à une durée moyenne  d'hospitalisation plus longue.

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