Rapports sur la santé
Prévalence et corrélats de la consommation de cannabis à des fins non médicales seulement comparativement à la consommation de cannabis à des fins médicales autodéfinies et non médicales, Canada, 2015

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par Michelle Rotermann et Marie-Michèle Pagé

Date de diffusion : le 18 juillet 2018

Le gouvernement du Canada s’est engagé à légaliser, à réglementer et à restreindre la consommation de cannabis à des fins non médicales par les adultes en 2018. En vue de ce changement, Statistique Canada adapte le système statistique national afin de mesurer les répercussions sociales et économiques de la légalisation du cannabis. L’organisme a en outre entrepris un certain nombre de projets d’analyse connexesNote 1. Depuis 2001, l’accès au cannabis à des fins médicales est autorisé au CanadaNote 2Note 3Note 4Note 5. Les observations scientifiques de grande qualité sur la consommation de cannabis se multiplient. Alors que certaines d’entre elles démontrent les bienfaits du cannabis pour différents usages médicaux, notamment pour le traitement de la douleur chronique chez les adultesNote 6Note 7Note 8, d’autres font état des effets néfastes sur la santé physique et mentale, comme le risque de dépendance et le déclenchement ou l’aggravation de maladies psychiatriques graves (schizophrénie), surtout chez les consommateurs fréquents, les consommateurs de longue date et les jeunesNote 6Note 9Note 10Note 11Note 12Note 13Note 14.

On en sait beaucoup moins au sujet de la prévalence de la consommation de cannabis chez les personnes déclarant une consommation à des fins médicales (exclusive ou jumelée à une consommation à des fins non médicales) et des caractéristiques de ces personnes. Il en va de même pour les rapports entre les caractéristiques et les tendances en matière de consommation des personnes qui consomment du cannabis à des fins médicales et celles qui en consomment à des fins non médicales. De plus, on en sait peu sur l’incidence qu’aura la légalisation de la consommation à des fins non médicales sur la consommation à des fins médicales ou thérapeutiques. La plupart des études réalisées auprès des consommateurs de cannabis à des fins médicales sont américainesNote 15Note 16Note 17Note 18Note 19Note 20Note 21Note 22Note 23Note 24Note 25 ou britanniquesNote 26 ou elles sont fondées sur les données d’une seule province canadienne, l’OntarioNote 27Note 28Note 29Note 30. Les données recueillies proviennent souvent d’enquêtes sur la populationNote 15Note 17Note 20Note 22Note 27Note 28Note 29, d’essais cliniquesNote 18, de tables rondes de consommateursNote 25, ainsi que d’échantillons de commodité (autosélectionnés) de patients de cliniques et de dispensairesNote 16Note 19Note 21Note 23Note 24Note 26Note 27Note 30.Par conséquent, les résultats peuvent ne pas rendre entièrement compte de l’expérience actuelle des consommateurs de cannabis au Canada.

La présente analyse porte sur la prévalence de la consommation de cannabis à des fins exclusivement non médicales, ainsi que sur les facteurs associés aux personnes qui déclarent une telle consommation. Les résultats à cet égard sont comparés avec ceux des personnes qui déclarent consommer du cannabis à des fins médicales et non médicales. L’analyse traite également de la consommation d’autres drogues illicites et de l’usage non thérapeutique d’un médicament d’au moins l’une des trois catégories de médicaments psychotropes, de la consommation de cannabis (quelles qu’en soient les fins) au cours des trois mois précédents, et des perturbations et des effets néfastes associés à la consommation de cannabis au sein de la population à domicile âgée de 15 ans ou plus en 2015.

Méthodes

Données

Les données utilisées sont tirées d’une enquête transversale, soit l’Enquête canadienne sur le tabac, l’alcool et les drogues (ECTAD) de 2015, qui présente des estimations sur l’usage du tabac et la consommation d’alcool et de drogues, ainsi que sur les enjeux connexesNote 31. L’enquête, réalisée par Statistique Canada, a été parrainée par Santé Canada.

La population cible de l’ECTAD était composée de la population à domicile âgée de 15 ans ou plus dans toutes les provinces canadiennes. La période de collecte s’est étendue de février à décembre 2015. Les résidents des territoires et les résidents à temps plein d’établissements institutionnels étaient exclus. Le taux de réponse de 48,3 % a donné lieu à un échantillon de 15 154 personnes, qui représentent près de 30 millions de CanadiensNote 32. L’enquête de 2015 a été menée au moyen de numéros de téléphone cellulaire. Elle était donc plus complète, car les ménages n’utilisant que le téléphone cellulaire pouvaient y participer. Il s’agit d’un changement important, car plus de 1 ménage sur 5 a recours exclusivement à un service mobile sans fil. Cette proportion s’établit à plus de 60 % lorsque tous les membres du ménage sont âgés de moins de 35 ansNote 33.

Échantillon de l’étude

Le principal échantillon de l’étude était composé de 14 978 répondants qui étaient âgés d’au moins 15 ans au moment de l’ECTAD de 2015, qui résidaient dans les provinces canadiennes et qui ont fourni des réponses valides. Parmi ces répondants, 1 622 ont déclaré avoir consommé du cannabis à des fins non médicales seulement au cours de l’année précédente, 454 ont déclaré en avoir consommé à des fins médicales autodéfinies et non médicales, et les 12 902 autres ont déclaré n’en avoir pas consommé du tout (graphique de l’annexe A). Un deuxième échantillon a aussi été créé; il comprend uniquement les personnes qui consomment fréquemment du cannabis à des fins non médicales seulement (les 99 personnes ayant déclaré avoir consommé du cannabis une seule fois ont été exclues).

Définitions

La consommation de cannabis à des fins non médicales seulement (NMS) au cours de l’année précédente a été déterminée en fonction des réponses données aux deux questions suivantes : « Au cours des 12 derniers mois, avez-vous consommé de la marijuana? » et « Au cours des 12 derniers mois, avez-vous consommé ou essayé de la marijuana (haschish, huile de haschish ou tout autre produit dérivé du cannabis) à des fins médicales? » De plus, les résultats ont été triés selon la fréquence de consommation pour n’inclure que les consommateurs fréquents et exclure les personnes ayant déclaré avoir consommé du cannabis une seule fois. Cette mesure visait à faciliter la comparaison avec les consommateurs de cannabis à des fins médicales autodéfinies et non médicales, qui devaient aussi avoir déclaré en avoir consommé plus d’une fois.

La consommation de cannabis à des fins médicales autodéfinies et non médicales (MANM) au cours de l’année précédente a été déterminée en fonction des réponses données aux trois questions suivantes : « Au cours des 12 derniers mois, avez-vous consommé de la marijuana? », « Avez-vous essayé de la marijuana une fois ou plus d’une fois? » et « Au cours des 12 derniers mois, avez-vous consommé ou essayé de la marijuana (haschish, huile de haschish ou tout autre produit dérivé du cannabis) à des fins médicales? » Les consommateurs de cannabis à des fins MANM devaient indiquer avoir consommé du cannabis au cours des 12 mois précédents et en avoir consommé à des fins médicales au moins une fois au cours de cette période. Les questions sur la consommation à des fins médicales ont été posées uniquement aux personnes qui ont déclaré avoir consommé du cannabis à plus d’une reprise. En raison d’un problème d’enchaînement et de contrôle du questionnaire, 10 répondants ont indiqué n’avoir pas consommé de cannabis au cours des 12 mois précédents, mais en avoir consommé à des fins médicales. Ces répondants ont été exclus de l’échantillon de l’étude, parce que, en raison du schéma de réponse, les autres questions sur le cannabis, par exemple celles sur la fréquence de consommation et sur les effets néfastes, ne leur ont pas été posées.

Un centre de population est une zone bâtie en continu d’au moins 1 000 habitants dont la densité de population est de 400 personnes ou plus au kilomètre carré, selon les chiffres de population du recensement le plus récent. Les régions rurales comptent moins d’habitants et ont une densité de population inférieure.

L’ECTAD ne recueillait pas de données sur le revenu du ménage. Des quintiles de revenu ont plutôt été attribués aux répondants en fonction de leur code postal et des données sur le revenu dans leur quartier tirées du Recensement de 2006 (c.-à-d. les données les plus récentes sur le revenu par aire de diffusion du recensementNote 34. L’utilisation de mesures du revenu en fonction de l’aire est une mesure de substitution valide dans le cadre de la recherche sur la santé, surtout lorsque des données ne sont pas recueillies par l’intermédiaire de mesures directesNote 35Note 36. Les quintiles de revenu du ménage ont été regroupés dans deux catégories : la catégorie des ménages dont le revenu est dans le quintile le plus bas et celle des ménages dont le revenu n’est pas dans le quintile le plus bas (les 80 % restants).

L’autoévaluation de la santé des répondants a été classée dans deux catégories : « bonne, très bonne ou excellente » et « passable ou mauvaise ». L’autoévaluation de la santé a été choisie comme covariable en raison, d’une part, de sa fiabilité et de sa validité et, d’autre part, de sa forte corrélation avec les divers aspects de l’état de santé, notamment la capacité fonctionnelle, les maladies chroniques et le bien-être psychologiqueNote 37. L’autoévaluation de la santé mentale a aussi été comprise, et la même approche a été adoptée.

Les résultats des fumeurs quotidiens ont été comparés avec ceux de tous les autres répondants (les fumeurs occasionnels, les anciens fumeurs et les personnes n’ayant jamais fumé). Par grand buveur, on entend le fait d’avoir bu quatre verres d’alcool ou plus (chez les femmes) ou cinq verres d’alcool ou plus (chez les hommes) lors d’une même occasion, au moins une fois par mois au cours de l’année précédente.

Les raisons motivant la consommation de cannabis à des fins médicales ont été déterminées en fonction des réponses à la question suivante : « Quel est le problème médical principal qui vous a poussé à utiliser la marijuana? » Cette question comportait neuf catégories de réponse, dont « Autre – Précisez ». Pour réaliser une analyse selon le groupe d’âge et le sexe, les réponses ont été regroupées en quatre catégories (soit trois catégories principales et une catégorie « Autre ») : 1) Douleur : aiguë et chronique; 2) Anxiété, nervosité ou dépression, dont le stress; 3) Insomnie; 4) « Autre », dont les nausées et les vomissements, le manque d’appétit ou la perte de poids, la sclérose en plaques ou le traumatisme médullaire, et l’épilepsie. Les 77 réponses « Autre » ont été passées en revue manuellement avant d’être recodées (dans la mesure du possible). Si les répondants qui avaient sélectionné la réponse « Autre » avaient donné plus d’une raison, la réponse était recodée en fonction de la première raison.

Lors de son évaluation des problèmes associés au cannabis, l’ECTAD a inclus plusieurs éléments tirés de l’outil de dépistage ASSIST de l’Organisation mondiale de la SantéNote 38. Dix questions additionnelles ont été posées aux répondants qui avaient déclaré avoir consommé du cannabis avant l’enquête (quelles que soient les fins de la consommation) et en avoir consommé à plus d’une reprise au cours de leur vie : cinq questions visaient la consommation au cours de leur vie, et les cinq autres portaient sur la période de trois mois ayant précédé l’interview. Chaque ensemble de cinq questions portait sur ce qui suit : 1) La fréquence à laquelle la personne a ressenti un grand désir ou une forte envie de consommer du cannabis; 2) La fréquence à laquelle la consommation de cannabis de la personne a causé des problèmes de santé ou des problèmes sociaux, juridiques ou financiers; 3) La question de savoir si la consommation de cannabis de la personne a déjà fait en sorte qu’elle était incapable de faire ce qui était normalement attendu d’elle; 4) La question de savoir si un ami, un parent ou une autre personne a déjà exprimé une inquiétude au sujet de la consommation de cannabis de la personne; 5) La question de savoir si la personne a déjà fait une tentative infructueuse de maîtriser, de réduire ou de cesser sa consommation de cannabis. Dans le cadre de cette analyse, les questions sur la période de trois mois ayant précédé l’interview ont été choisies de manière à assurer l’uniformité avec les questions sur la fréquence de la consommation de cannabis.

Techniques d’analyse

La prévalence de la consommation de cannabis à des fins NMS (y compris et hormis les consommateurs ponctuels), de la consommation de cannabis à des fins MANM, ainsi que de l’absence de la consommation au cours de l’année précédente a été examinée en fonction de différents facteurs. Ceux-ci comprennent le sexe, l’âge, la province (taux normalisé selon l’âge en fonction de la population à domicile provinciale moyenne en 2015 au moyen de cinq groupes d’âge), la résidence (région rurale et centre de population), le revenu du ménage (dichotomisé : ménage dont le revenu est dans le quintile le plus bas (20 %) et ménage dont le revenu n’est pas dans le quintile le plus bas), l’autoévaluation de la santé générale et mentale (passable ou mauvaise et bonne, très bonne ou excellente), le statut de fumeur quotidien, le statut de grand buveur, et la consommation d’autres drogues au cours des 12 derniers mois, notamment la cocaïne ou l’héroïne, les amphétamines ou les méthamphétamines, l’ecstasy, les hallucinogènes (y compris la salvia), les inhalants ou les solvants, et trois catégories de médicaments psychotropes : 1) les sédatifs ou les tranquillisants (p. ex. Xanax ou Ativan); 2) les stimulants (p. ex. Ritalin ou Adderall); 3) les analgésiques opioïdes (p. ex. fentanyl, codéine, oxycodone ou autres produits opioïdes). Des questions additionnelles ont été posées aux personnes qui ont déclaré avoir consommé un médicament de l’une des trois catégories de médicaments psychotropes au cours des 12 mois précédents, afin d’évaluer si la consommation était à des fins non thérapeutiques. Ces questions portaient entre autres sur le respect de la dose prescrite ou de la fréquence et sur les raisons motivant la consommation du médicament à des fins autres que celles prescrites (p. ex. pour être dans un état d’euphorie, pour se sentir mieux ou pour rester éveillé afin d’étudier ou de travailler). Le questionnaire est accessible en ligneNote 31. La sélection des covariables a été effectuée en fonction de la documentation et des données disponibles.

Des comparaisons ont également été effectuées relativement à la fréquence de la consommation de cannabis (quelles qu’en soient les fins) au cours des trois mois précédents, en fonction du type de consommation, de l’âge et du sexe. Une analyse a aussi été effectuée pour déterminer si les consommateurs de cannabis à des fins NMS et à des fins MANM ont ressenti l’un des cinq effets néfastes liés à cette consommation au cours de la période de trois mois. Aucune question n’a été posée au sujet de la fréquence au cours de l’année précédente.

Les analyses ont été réalisées au moyen de la version de SUDAAN exécutable en SAS (version 11.0.1). En outre, des poids d’échantillonnage ont été appliqués afin que les analyses soient représentatives de la population canadienne. L’estimation de la variance (intervalles de confiance à 95 %) et le test de signification par test t ont été réalisés au moyen de poids de rééchantillonnage bootstrap pour tenir compte du plan d’échantillonnage complexe de l’enquête. Toutes les différences entre les catégories de covariables et les groupes de comparaison présentées sont statistiquement significatives à p < 0,05, sauf indication contraire.

Résultats

Les personnes ayant consommé du cannabis au cours de l’année précédente, quelles que soient les fins de la consommation, sont plus susceptibles d’être jeunes, d’être de sexe masculin et d’être des fumeurs quotidiens de cigarettes ou de grands buveurs

Selon les résultats de l’ECTAD de 2015, 9,5 % des Canadiens de 15 ans ou plus (2,8 millions) ont consommé du cannabis au cours de l’année précédente à des fins NMS, et 2,8 % des Canadiens (830 900) en ont consommé à des fins MANM (tableau 1). Pour clarifier les comparaisons et faciliter la lecture, l’expression « à des fins non médicales seulement (NMS) » renvoie aux personnes qui consomment du cannabis à des fins exclusivement non médicales, alors que l’expression « à des fins médicales autodéfinies et non médicales (MANM) » renvoie aux personnes qui ont déclaré consommer du cannabis à des fins non médicales, mais aussi à certaines fins médicales (autodéfinies).

Selon les données, plus de 1 Canadien de 15 à 24 ans sur 5 (22,1 %) a consommé du cannabis à des fins NMS au cours de l’année précédente. En outre, 3,4 % d’entre eux ont consommé du cannabis à des fins MANM au cours de l’année précédente (tableau 1). Dans l’ensemble, cette proportion dépasse la prévalence de consommation déclarée par les personnes des groupes plus âgés : 13,7 % des personnes ayant consommé du cannabis à des fins NMS au cours de l’année précédente sont âgées de 25 à 44 ans et 3,1 % sont âgées de 45 ans ou plus; 1,9 % des personnes ayant consommé du cannabis à des fins MANM au cours de l’année précédente sont âgées de 45 ans ou plus. Au sein des deux groupes de consommateurs, les hommes étaient plus susceptibles que les femmes de déclarer avoir consommé du cannabis au cours de l’année précédente.

En 2015, 11,8 % des résidents de la Colombie-Britannique ont déclaré avoir consommé du cannabis à des fins NMS au cours de l’année précédente, alors que 5,4 % ont déclaré en avoir consommé à des fins MANM. Sur le plan statistique, les pourcentages pour les deux catégories sont significativement plus élevés que la prévalence enregistrée pour le reste du Canada (autres provinces regroupées). Les résidents de l’Île-du-Prince-Édouard et des trois provinces des Prairies affichaient des taux de consommation de cannabis à des fins NMS inférieurs à la moyenne, ceux-ci se situant entre 5,5 % et 7,0 %. Seul le Québec affichait un taux de consommation à des fins MANM significativement inférieur au taux observé dans le reste du Canada. Les résidents des régions rurales étaient moins susceptibles que les résidents des centres de population de déclarer avoir consommé du cannabis à des fins NMS au cours de l’année précédente. Cependant, le taux de consommation à des fins MANM ne variait pas selon la ruralité du lieu de résidence. Quant au niveau de revenu, la prévalence de la consommation au cours de l’année précédente chez les consommateurs de cannabis à des fins NMS était comparable d’un niveau à l’autre. Toutefois, chez les consommateurs de cannabis à des fins MANM, les membres d’un ménage dont le revenu est dans le quintile le plus bas étaient plus susceptibles de déclarer avoir consommé du cannabis au cours de l’année précédente que les personnes ayant un revenu plus élevé.

La prévalence de la consommation de cannabis différait aussi suivant l’autoévaluation de l’état de santé et des comportements chez les types de consommateurs de cannabis. Par exemple, L’utilisation du cannabis à des fins MANM était plus élevé parmi les personnes ayant une santé physique ou mentale passable ou mauvaise, les fumeurs quotidiens de cigarettes et les grands buveurs comparé à les personnes qui ont déclaré une meilleure santé (physique ou mentale), qui ne fument pas la cigarette quotidiennement ou qui consomment de l’alcool moins fréquemment. Plus de 20 % des fumeurs quotidiens de cigarettes et des grands buveurs ont aussi déclaré avoir consommé du cannabis à des fins NMS au cours de l’année précédente. Ce taux est de 2,5 fois supérieur à celui observé chez les fumeurs occasionnels et de plus de 4 fois supérieur à celui observé chez les consommateurs de cannabis à des fins NMS qui ont déclaré consommer de l’alcool de manière moins fréquente. Chez les consommateurs de cannabis à des fins NMS, aucune différence statistiquement significative n’a été relevée en ce qui concerne la prévalence de la consommation de cannabis en fonction de l’état de santé mentale. Inversement, les consommateurs de cannabis à des fins NMS ayant indiqué que leur santé générale était bonne, très bonne ou excellente étaient plus susceptibles (10 %) de déclarer avoir consommé du cannabis au cours de l’année précédente que ceux ayant indiqué que leur santé était moins bonne (3,6 %). L’analyse a été répétée en excluant les consommateurs ponctuels de cannabis à des fins NMS. Les résultats sont demeurés pratiquement les mêmes (données non présentées).

La consommation quotidienne ou quasi quotidienne de cannabis est fréquente chez les consommateurs de cannabis à des fins médicales autodéfinies et non médicales

Il a déjà été démontré que la fréquence de la consommation de cannabis est associée au risque de dépendanceNote 9Note 10, à une santé mentale moins bonneNote 10Note 39, à des résultats scolaires inférieurs et à des désavantages personnels à plus long termeNote 13Note 40. Étant donné que la majorité des personnes ayant consommé du cannabis à des fins NMS et à des fins MANM (71,9 % et 93,4 %, respectivement) au cours de l’année précédente ont déclaré en avoir consommé au cours des trois mois précédents l’interview et qu’aucune différence n’a été observée dans les pourcentages selon l’âge ou le sexe, la fréquence de la consommation au cours des trois mois précédents a été examinée en fonction du type de consommation établi selon les définitions relatives à la période de 12 mois (données non présentées).

En ce qui concerne la consommation de cannabis au cours des trois mois précédents, 26,4 % des consommateurs à des fins NMS ont déclaré en avoir consommé tous les jours ou presque, 22,4 %, toutes les semaines, 16,9 %, tous les mois, et 34,3 %, une ou deux fois (tableau 2). Pour ce qui est des personnes ayant déclaré consommer du cannabis à des fins MANM, la répartition était la suivante : 47,2 % ont déclaré en consommer tous les jours ou presque, 35,5 %, toutes les semaines, 11,7 %, tous les mois, et 5,6 %, une ou deux fois. Une analyse additionnelle a été réalisée pour confirmer que les différences observées entre les groupes de consommateurs à des fins NMS et à des fins MANM ne découlaient pas des critères d’admissibilité : les consommateurs de cannabis à des fins MANM devaient avoir consommé du cannabis à plus d’une reprise pour que les questions sur la consommation de cannabis à des fins médicales leur soient posées. Cependant, un critère semblable ne s’appliquait pas aux consommateurs à des fins NMS. Pour écarter cette possibilité, un second groupe de consommateurs à des fins NMS a été créé, duquel étaient exclues les personnes ayant consommé du cannabis une seule fois. Les résultats ont été comparés avec ceux des consommateurs de cannabis à des fins MANM, et ils sont restés pratiquement identiques.

La consommation quotidienne ou quasi quotidienne de cannabis à des fins NMS était plus courante chez les hommes (31,1 %) et les personnes de 25 à 44 ans (32,4 %) que chez les femmes (19,3 %) et les personnes de 45 ans ou plus (16,1 %). De nombreuses différences sur le plan de l’âge et du sexe des consommateurs de cannabis à des fins MANM ne sont pas statistiquement significatives, en raison probablement de la prévalence inférieure et de la petite taille de l’échantillon. Seule exception, la moitié des consommateurs de cannabis à des fins MANM âgés de 25 à 44 ans ont déclaré consommer du cannabis tous les jours ou presque comparativement au tiers des consommateurs de cannabis à des fins MANM âgés de 45 ans ou plus (55,3 % contre 33,7 %).

Pour la majorité des consommateurs, le cannabis n’entraîne pas de dépendance, de perturbations ou d’autres effets néfastesNote 9Note 10. L’ECTAD comportait un certain nombre de questions qui s’adressaient aux consommateurs plus réguliers de cannabis (les personnes en ayant consommé une seule fois étaient exclues) et qui visaient à examiner les effets néfastes de la consommation sur les consommateurs. Ces questions portaient notamment sur 1) le fait de ressentir un grand désir ou une forte envie de consommer du cannabis, ainsi que d’autres indicateurs de la dépendance au cannabis ou d’une consommation problématique, comme 2) le fait d’avoir eu des problèmes de santé ou des problèmes sociaux, juridiques ou financiers; 3) l’incapacité de combler les attentes; 4) les inquiétudes de la famille et des amis; 5) l’incapacité de réduire ou de cesser sa consommation. Toutes les questions relatives aux effets néfastes de la consommation visaient la période de trois mois précédant l’interview de l’ECTAD. L’effet néfaste le plus fréquent parmi les cinq, soit le fait de ressentir un grand désir ou une forte envie de consommer du cannabis, a été mentionné par 14,1 % des consommateurs de cannabis à des fins NMS et par 22,8 % des consommateurs de cannabis à des fins MANM (tableau 3). La plupart des consommateurs qui ont fait état d’un désir ou d’une envie de consommer étaient des consommateurs quotidiens ou quasi quotidiens (61,6 % des consommateurs à des fins NMS et 69,4 % des consommateurs à des fins MANM) (données non présentées). Parmi les consommateurs de cannabis à des fins NMS, la prévalence des quatre autres indicateurs de la dépendance ou de la consommation possiblement problématique variait de 1,9 % à 4,1 %. Les estimations pour les consommateurs à des fins MANM étaient trop petites pour être publiées.

La douleur est la principale raison médicale motivant la consommation de cannabis

Plus de la moitié (52,9 %) des personnes ayant consommé du cannabis à des fins MANM au cours de l’année précédente ont indiqué le soulagement de la douleur comme principale raison de leur consommation à des fins médicales (tableau 4). Le traitement de l’anxiété, de la nervosité et de la dépression (18,6 %) et le traitement de l’insomnie (18,3 %) figuraient également parmi les autres raisons mentionnées fréquemment. Peut-être en raison de la taille de l’échantillon, aucune autre différence statistiquement significative n’a été relevée.

La consommation d’autres drogues illicites est fréquente chez les consommateurs de cannabis, sans égard au type de consommation

Chez les personnes ayant consommé du cannabis à des fins NMS et à des fins MANM au cours de l’année précédente, près de 1 consommateur sur 6 a déclaré avoir consommé d’autres drogues illicites (comme de l’ecstasy, des hallucinogènes ou de la cocaïne) au cours de l’année précédente. Il s’agit d’une proportion beaucoup plus élevée que celle observée chez les personnes qui ont déclaré ne pas avoir consommé de cannabis (moins de 0,5 %) (tableau 5). Près de la moitié de tous les consommateurs de cannabis à des fins MANM ont déclaré avoir consommé au moins un médicament psychotrope (principalement des sédatifs et des analgésiques opioïdes). Il s’agit d’un taux de 2 à 2,3 fois plus élevé que celui des consommateurs de cannabis à des fins NMS et des personnes qui ne consomment pas de cannabis. En outre, les consommateurs de cannabis à des fins NMS et à des fins MANM étaient plus susceptibles que les personnes ne consommant pas de cannabis d’admettre consommer ces médicaments pour des raisons autres que les fins thérapeutiques prescrites, notamment pour être dans un état d’euphorie ou pour améliorer leur humeur. L’usage quotidien du tabac et la consommation abusive d’alcool étaient aussi beaucoup plus courantes chez les consommateurs de cannabis, quelles que soient les fins de la consommation, que chez les personnes ne consommant pas de cannabis.

Discussion

Pour la première fois, il a été possible de distinguer les consommateurs de cannabis à des fins NMS des consommateurs de cannabis à des fins MANM dans l’ECTAD. En 2015, parmi les résultats pour les Canadiens de 15 ans ou plus, 9,5 % des répondants ont déclaré consommer du cannabis à des fins NMS, et près de 3 % ont mentionné qu’ils en consomment à certaines fins médicales autodéfinies (c.-à-d. la consommation à des fins MANM). Les personnes qui font état d’une certaine consommation à des fins médicales font toujours partie du groupe minoritaire de consommateurs de cannabisNote 15Note 17Note 22Note 28Note 41. D’autres études de Statistique Canada montrent aussi que la majorité des dépenses des ménages en ce qui concerne le cannabis sont réservées à la consommation de cannabis à des fins non médicalesNote 42.

Dans les études précédentes, de nombreuses différences sociodémographiques, notamment un taux supérieur de consommation de cannabis au cours de l’année précédente chez les hommes, les adolescents et les jeunes adultes, ainsi que chez les résidents de la Colombie-Britannique, ont été observéesNote 41Note 43Note 44. Le taux plus faible de consommation à des fins MANM au Québec peut découler de l’existence du Registre cannabis Québec, qui exige que le médecin prescripteur surveille les effets du cannabis prescrit; cette exigence peut dissuader les médecins d’en prescrireNote 45. Évidemment, la consommation à des fins MANM déclarée dans le cadre d’une enquête et l’inscription à un programme d’accès au cannabis médical ne sont pas les mêmes. Il ne faut donc pas s’attendre à ce que les résultats en fonction de l’autodéclaration soient les mêmes que ceux associés à l’inscription. Selon d’autres études qui comparaient le nombre autodéclaré de consommateurs de cannabis à des fins médicales au nombre autodéclaré de consommateurs à des fins médicales qui ont une autorisation, la majorité des consommateurs à des fins médicales n’ont pas d’autorisation médicale officielleNote 29. Cela peut aussi signifier que de nombreux professionnels de la santé ne savent pas que leurs patients consomment du cannabis en plus d’autres médicaments d’ordonnance, ce qui peut être une situation potentiellement dangereuse.

Selon l’ECTAD de 2015, un pourcentage plus élevé de personnes ayant déclaré que leur santé mentale et physique est passable ou mauvaise ont indiqué avoir consommé du cannabis au moins quelques fois à des fins médicales au cours de l’année précédente. Le lien entre une moins bonne santé et la consommation de cannabis à des fins médicales a été observé à maintes reprisesNote 17Note 18Note 19Note 22Note 24Note 27Note 29. Cependant, il n’est pas possible d’établir si la consommation de cannabis donne lieu à un mauvais état de santé ou si les personnes en mauvaise santé et les personnes handicapées consomment du cannabis pour gérer leurs symptômes.

Cette étude conclut également que les consommateurs de cannabis, quelles que soient les fins de la consommation, sont beaucoup plus susceptibles d’être des fumeurs quotidiens de cigarettes, d’être de grands buveurs ou de consommer d’autres drogues illicites que les personnes qui n’en consomment pas. Le lien entre les comportements influant sur la santé qui sont reconnus pour avoir un effet néfaste sur la santé et la consommation de cannabis est aussi bien établiNote 17Note 27Note 27Note 43Note 46. Deux théories peuvent expliquer cette situation. Tout d’abord, une exposition précoce au cannabis et à d’autres drogues, y compris l’alcool et la nicotine, permet de prévoir la consommation et l’abus d’autres drogues et la dépendance à une étape ultérieure de la vie. Ensuite, selon la théorie des vulnérabilités corrélées, certaines personnes peuvent être prédisposées, de manière générale, à consommer des médicaments ou à adopter d’autres comportements à risqueNote 9Note 11Note 47. En outre, la consommation de cannabis à des fins MANM au cours de l’année précédente était plus courante chez les personnes qui vivaient dans un ménage à faible revenu que chez celles qui vivaient dans un ménage à revenu supérieur. La corrélation entre le statut sociodémographique inférieur (défini de différentes manières, y compris l’utilisation du type d’assurance maladie, comme Medicaid, comme mesure de substitution pour le faible revenu) et la consommation à des fins médicales a été observée dans le passéNote 15Note 17Note 27Note 30. En l’absence de données longitudinales, il est impossible de déterminer avec certitude si la consommation de cannabis à des fins médicales contribue au faible revenu.

Même si les personnes déclarant consommer du cannabis à des fins thérapeutiques ou médicales énumèrent des problèmes de santé pour lesquels il n’y a pas de données scientifiques à l’appuiNote 6, dans l’ensemble, elles s’entendent de manière quasi universelle sur les types de problèmes principaux ou comorbidités. Parmi ces problèmes, mentionnons la douleur, les différents troubles mentaux, et l’insomnie ou les troubles de sommeilNote 16Note 19Note 23Note 24Note 26Note 30.

Selon les données de l’ECTAD de 2015, ainsi que celles d’autres études, une proportion significativement plus élevée de consommateurs de cannabis à des fins MANM que de consommateurs à des fins NMS consomment du cannabis pour quelque raison que ce soit de manière quotidienne ou quasi quotidienneNote 18Note 22. Une telle consommation peut être associée à la l’utilisation de cannabis comme médicament ou comme méthode de gestion et d’atténuation des symptômes. Il est aussi possible que les consommateurs plus réguliers développent un certain niveau de tolérance et, par conséquent, ont besoin d’en consommer plus fréquemment ou à des doses plus élevéesNote 47.

Limites

Cette étude, fondée sur un échantillon représentatif de la population de toutes les provinces canadiennes, présente de nombreux points forts, notamment une analyse approfondie de la prévalence de la consommation de cannabis et des facteurs associés à la consommation en fonction du type de consommation. Pour la première fois, ce type d’analyse peut être réalisé au moyen de l’ECTAD, puisque son premier cycle et son précurseur, l’Enquête de surveillance de l’usage du tabac au Canada (ESUTC), ne comprenaient pas de questions au sujet de la consommation de cannabis à des fins médicales. Néanmoins, les résultats de la présente étude doivent être interprétés en tenant compte de plusieurs limites.

L’idéal aurait été de pouvoir créer un troisième groupe bien distinct de consommateurs de cannabis à des fins médicales seulement. Cependant, les questions de l’enquête ne permettaient pas de faire cette distinction. Or, les différences entre les consommateurs de cannabis à des fins NMS et à des fins MANM auraient pu être moindres si la distinction avait été possible. En outre, il n’y avait pas de renseignements sur la source de recommandation médicale, sur le fait que des conseils d’un professionnel de la santé avaient été demandés ou obtenus, ni sur la quantité de cannabis consommé ayant servi dans le cadre du traitement d’un problème de santé par rapport à la quantité consommée à des fins non médicales

Les renseignements fournis dans le cadre de l’enquête sont autodéclarés et ne sont pas validés. La désirabilité sociale et la crainte de représailles, qui sont toutes les deux des sources éventuelles de biais, peuvent être particulièrement pertinentes dans le cadre de cette analyse. Par désirabilité sociale, on entend une tendance des répondants qui modifient leurs réponses pour projeter une image favorable d’eux-mêmesNote 48. Les perceptions relatives à ce qui est « désirable » peuvent aussi différer en fonction de l’âge, du sexe et d’autres caractéristiques socioéconomiques du répondant. Certains répondants peuvent sous-déclarer leur consommation de drogues, tandis que d’autres peuvent l’exagérer. Il est aussi possible que la consommation à des fins médicales soit exagérée, surtout si les consommateurs croient que ce type de consommation de cannabis est plus acceptable ou légitimeNote 30.

L’ECTAD a pour objectif principal de surveiller l’usage du tabac, la consommation d’alcool et des aspects sélectionnés de la consommation de droguesNote 32. C’est pourquoi la taille des échantillons est parfois petite, ce qui exige des définitions plus générales des variables ou le regroupement de catégories et de variables (p. ex. la consommation d’héroïne et de cocaïne au cours de l’année précédente a été regroupée pour éviter la suppression de cellules). Dans le cas de certaines analyses, la petite taille de l’échantillon peut avoir nui à la capacité d’obtenir une signification statistique. En outre, les covariables pertinentes n’étaient pas toutes accessibles, comme l’intensité ou la durée de la consommation de cannabis, les quantités consommées, la quantité et le niveau d’ingrédients actifs, l’intensité de la douleur et la question de savoir si le cannabis remplaçait d’autres médicaments. En outre, des données substitutives du revenu des ménages dans un recensement axé sur une aire ont été remplacées, parce que des données sur le revenu des ménages individuels n’ont pas été recueillies.

Les données sont transversales. Il n’était donc pas possible d’établir la causalité. En outre, l’ECTAD exclut les personnes qui ne vivent pas dans des ménages privés, comme les itinérants et les détenus. C’est pourquoi les estimations relatives à la consommation de cannabis peuvent être inférieures à celles obtenues si ces populations avaient été comprises. L’ECTAD n’est pas réalisée dans les territoires.

Conclusion

Il s’agit de la première étude nationale complète au sujet des caractéristiques et des tendances en matière de consommation des consommateurs de cannabis par type de consommation (consommation à des fins NMS ou consommation à des fins MANM) au Canada. Les politiques modifiées concernant la légalisation, la réglementation et la restriction de la consommation de cannabis à des fins non médicales et l’évolution de l’acceptation sociale en ce qui concerne la consommation de cannabis continueront d’avoir une incidence sur les tendances en matière de consommation et les raisons déclarées qui motivent la consommation. Les résultats dressent un portrait détaillé des facteurs communs aux deux types de consommateurs de cannabis étudiés, ainsi que des facteurs plus courants chez les personnes qui consomment du cannabis à des fins MANM. Ces facteurs comprennent une moins bonne santé générale et mentale, un faible revenu, ainsi que la consommation d’autres médicaments psychotropes. Une meilleure compréhension de tous les consommateurs peut servir dans le cadre de programmes visant à identifier les personnes susceptibles de devenir dépendantes au cannabis et d’avoir des problèmes connexes, et peut aider à créer des stratégies pour réduire au minimum les effets néfastes possibles du cannabis, quelles que soient les fins de la consommation. Des renseignements additionnels sur la consommation à des fins médicales, y compris l’autorisation, la recommandation ou la participation aux programmes visés par le Règlement sur l’accès au cannabis à des fins médicales, ainsi que la fréquence de la consommation de cannabis à des fins médicales pourraient être utiles dans le cadre d’études futures.

Annexe

Références
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