1 Introduction

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L'impartition consiste en un déplacement d'une partie de la production à l'extérieur de l'entreprise. La délocalisation est un déplacement d'une partie de l'approvisionnement en intrants à l'étranger.

Si le développement économique rapide de la Chine et de l'Inde a amplifié l'intérêt récent pour l'impartition et la délocalisation, ces deux phénomènes sont au cœur de l'économie industrielle qui est axée sur le comportement des entreprises et de l'économie internationale qui est elle axée sur les raisons liées aux échanges entre les nations.

Les décisions relatives à l'impartition affectent les frontières de l'entreprise —ce qui a lieu au sein de l'entreprise et ce qui est effectué à l'extérieur de celle-ci. Les entreprises ont toujours le choix de produire ou d'acheter les intrants dont elles ont besoin pour produire leurs produits. Lorsqu'elles choisissent de produire elles-mêmes les intrants, elles étendent les frontières de l'entreprise. Lorsqu'elles choisissent l'impartition des intrants, elles resserrent les frontières. Dans le premier cas, l'entreprise devient plus intégrée; dans le deuxième cas, une désintégration survient.

La recherche de ce qui détermine les frontières de la production d'une entreprise par opposition à l'achat et à l'assemblage des pièces était le sujet d'un article de renom de Coase en 1937 dans lequel il soutenait que les coûts relatifs des transactions sont au cœur de cette décision — puisque les entreprises qui internalisent la production remplacent un ensemble de marchés externes ayant un prix relativement certain liés à des contrats sans lien de dépendance par des marchés hautement incertains et incomplets (une convention collective) lorsqu'ils choisissent de produire l'intrant à l'interne. Williamson (1975) a poursuivi cette analyse pour y inclure de nombreux facteurs qui influent sur la décision d'internaliser les intrants plutôt que d'en faire l'achat à l'extérieur de l'entreprise.

Un des éléments qui est parfois abordé est l'avantage du principe de la division du travail dans la production interne — l'exemple d'une usine d'épingles de Adam Smith; mais, comme le soulignait Stigler (1951), la spécialisation n'est pas toujours liée à la production interne, même dans l'Angleterre de l'ère industrielle — puisqu'elle était obtenue dans de nombreux établissements du commerce des armes légères à Birmingham, chacun des établissements effectuant une tâche et un assembleur montant les pièces ensemble.

La délocalisation n'est pas nécessairement liée à l'impartition. Elle comprend la décision de faire l'achat à l'extérieur de l'entreprise et à l'étranger. Le choix de faire les achats à l'étranger est au cœur de l'étude du commerce international.

Des décisions relatives à l'impartition ou à la production interne doivent être prises de façon continue pendant que les entreprises expérimentent pour trouver l'équilibre optimal entre production interne et achat à l'extérieur. Au sein d'une même industrie, différentes frontières d'entreprises (modèles d'entreprise variables) coexistent souvent. Par exemple, les entreprises du secteur automobile diffèrent en ce qui a trait au pourcentage de pièces qui sont fabriquées par des filiales internes, par opposition à des tierces parties. Certains transporteurs aériens effectuent la majeure partie de l'entretien à l'interne. D'autres la font faire dans le cadre de contrats sans lien de dépendance. Ce qui est la norme à un moment donné peut changer en raison de la fluctuation des coûts et des avantages de l'impartition. Williamson souligne que les fonctions qui ne peuvent être facilement normalisées, pour lesquelles les contrats externes sont difficiles à superviser et coûteux lorsqu'ils sont rompus, sont souvent effectués à l'interne. Malgré cela, certains éléments externes de ces secteurs peuvent tout de même être impartis afin de maintenir une discipline dans le processus de production interne. Les changements au niveau d'impartition qui vont dans des sens contraires surviennent continuellement au sein de l'économie à mesure que la technologie change — pour rendre la production externe plus économique ou pour rendre la production interne plus souhaitable.

L'intérêt récent pour l'impartition est lié à la notion voulant que de nouvelles forces agissent pour changer les frontières de production des entreprises. Les progrès dans les technologies de transport qui ont permis de réduire les coûts du transport et les nouvelles technologies de l'information et des communications (TIC) qui permettent une plus grande coordination entre des processus de production géographiquement éloignés sont perçus comme étant les principaux moteurs de la désintégration des processus de production.

En même temps, la diminution des obstacles au commerce au cours des 50 dernières années a mené à de plus nombreux échanges. Une partie de ces échanges ont mené à une plus grande importation des intrants pour le processus de production. Cette situation est perçue comme contribuant à davantage de délocalisation — l'approvisionnement en intrants à l'étranger.

Un exemple de situation pour laquelle les frontières de l'entreprise sont restreintes est le cas d'une entreprise qui accroît sa participation à la chaîne d'approvisionnement qui comprend des opérations sans lien de dépendance entre des tierces parties. À l'origine, les chaînes d'approvisionnement étaient surtout intérieures et comprenaient des entreprises d'un même pays; par la suite, ces chaînes d'approvisionnement sont devenues mondiales à mesure que les entreprises tiraient profit des écarts dans les coûts de production et dans les technologies entre les pays.

La désintégration des intrants de matières a été beaucoup plus importante que celle des intrants de services, puisque la majorité des services sont habituellement non échangeables (Feenstra et Hanson, 1999). Cependant, la désintégration des intrants de services et des échanges pour les intrants de services a pris de l'importance depuis le milieu des années 1980, grâce aux progrès des TIC. La technologie de l'information et des communications a changé de façon drastique la capacité commerciale d'un ensemble de services axés sur l'information, ce qui a lancé une révolution dans la capacité commerciale des services (CUNCED, 2004).

Bien que le débat entourant la question de l'impartition et de la délocalisation au Canada ait pris de l'ampleur, peu d'études empiriques ont été menées sur leur importance et leurs incidences. Trefler (2005) utilise des données agrégées et conclut que la délocalisation des services représente une petite fraction de tout le commerce des biens et services, mais qu'elle a crû beaucoup plus rapidement que la croissance du commerce des biens. Il conclut également que la délocalisation des services au Canada est dominée par la délocalisation vers les États-Unis et les autres pays de l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE).

Morissette et Johnson (2006) considèrent que la délocalisation des services aux entreprises n'a pas d'effet sur l'emploi au Canada. Head et Ries (2006) sont d'avis que le commerce des services, comme le commerce des biens, est assujetti à de fortes incidences liées à la distance et la quantité de services disponibles à distance demeure limitée. Ils concluent également que les coûts liés à la distance diminuent avec le temps pour certaines catégories de commerce des services. Yan (2006) conclut que l'impartition à l'étranger a fait croître la demande pour des travailleurs non affectés à la production comparativement à celle pour des travailleurs affectés à la production dans le secteur de la fabrication au Canada en utilisant la régression des données de panel sur les niveaux de parts d'emploi.

S'il y a peu d'études empiriques sur la délocalisation au Canada, il y en a une grande quantité pour les États-Unis et d'autres pays de l'OCDE. Olsen (2006) a répertorié les études empiriques sur les retombées de la délocalisation sur la croissance de la productivité. Il conclut qu'il n'y a pas de modèle clair quant aux effets de la délocalisation sur la productivité. Hartzichronoglou (2006) a examiné des études empiriques sur les retombées de la délocalisation sur les marchés du travail et a conclu qu'elle avait peu d'effet sur l'emploi.

Ce document contribue de différentes façons aux études empiriques sur la délocalisation. D'abord, il offre des preuves empiriques pour le Canada à partir de 1961. Deuxièmement, il complète des études antérieures sur la délocalisation des services en incluant les industries de services. La plupart des études empiriques antérieures sur la délocalisation des services étaient axées sur les industries de la fabrication, en raison de l'absence de données chronologiques constantes pour le secteur des services. Cela est malheureux puisque la majeure partie de la délocalisation des services s'effectue dans les industries de services. Afin de combler l'écart, ce document examine la délocalisation des services dans les secteurs de la fabrication et dans le secteur des services. Troisièmement, ce document offre des preuves empiriques des effets de la délocalisation sur le passage à des activités à grande valeur ajoutée. Les discussions concernant la délocalisation des services ont été axées sur la délocalisation des services comme moyen pour les entreprises et les industries de remonter dans la chaîne de valeur (Sako, 2006). Il y a cependant peu de preuves empiriques quant aux effets de la délocalisation sur le passage à des activités à grande valeur ajoutée.

Les principales données pour l'analyse empirique proviennent d'un ensemble détaillé de données de l'industrie qui utilisent la base de données KLEMS (capital, travail, énergie, matières et services) maintenue par les Comptes de productivité de Statistique Canada. Cette base de données de l'industrie comprend des données chronologiques constantes sur la production brute, l'intrant capital, l'intrant travail et les intrants intermédiaires d'énergie, de matières et de services pour les industries selon le Système de classification des industries de l'Amérique du Nord (SCIAN), 1997 (Baldwin, Gu et Yan, 2007).

Pour le présent document, nous avons développé une mesure de la délocalisation par industrie qui a été fusionnée avec la base de données KLEMS. Cette mesure représente la partie des intrants de matières et de services qui a été importée et elle a été utilisée dans le cadre d'études antérieures sur la délocalisation (p. ex., Feenstra et Hanson, 1996, 1999; Amiti et Wei, 2006; et Morissette et Johnson, 2006).