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Jusqu'à ce que la mort nous sépare? Le risque de dissolution du premier et du deuxième mariage au Canada

par Warren Clark et Susan Crompton

Depuis les dernières années, presque tout le monde pense au mariage. Alors que le débat sur le mariage des personnes de même sexe a provoqué bien des discussions, de nombreux Canadiens sérieux remettent en question la signification du mariage dans la société d'aujourd'hui.

Le mariage, tel que nous pouvions le définir au cours des 50 ou 60 dernières années, semble perdre de son attrait. Selon les termes d'un chercheur américain, le sociologue Andrew Cherlin, le mariage est en train de se « désinstitutionnaliser », alors que les anciennes normes sociales s'écroulent et que les couples doivent négocier de nouvelles normes de comportement qui soient acceptables pour les deux parties1.

Une chose est certaine, on célèbre maintenant moins de mariages, en partie parce que les jeunes adultes remettent le mariage à plus tard et aussi parce que l'union libre est à la hausse, remplaçant ainsi le mariage chez les Canadiens de tous les âges2. On enregistre aussi plus de divorces; en effet, bien plus du tiers des mariages canadiens se termineront par un divorce avant que les époux ne fêtent leur 30e anniversaire3. Enfin, le mariage n'est plus un préalable pour avoir un enfant. D'ailleurs, de plus en plus d'enfants sont issus de familles composées de mères seules ou de couples non mariés4.

Pourtant, la grande majorité des gens se marie. Dans le présent article, on se réfère à l'Enquête sociale générale — Rétrospective sur la famille de 2001 pour examiner brièvement les caractéristiques de base des Canadiens ayant été mariés une fois, deux fois ou plus de deux fois. Le modèle à risques proportionnels est ensuite utilisé pour définir certains des facteurs associés à la rupture d'un premier et d'un deuxième mariage par le divorce ou la séparation.

Ce qu'il faut savoir sur la présente étude
Le premier mariage
L'âge au moment du mariage et le fait de vivre en union libre sont des facteurs clés dans l'échec du premier mariage
La religion et la langue maternelle sont liées au fait de rester marié
Le deuxième mariage
Le premier échec pourrait contribuer à préparer le prochain
Faire partie d'une minorité est associé à l'échec du mariage subséquent
Le troisième mariage
Croire au mariage fait en sorte que le mariage est plus solide
Résumé

Tableau de l'annexe 1. Certaines caractéristiques sur les Canadiens non célibataires de 25 ans et plus
Tableau de l'annexe 2. Certaines caractéristiques sur les Canadiens de 25 ans et plus mariés deux fois
Tableau de l'annexe 3. Certaines caractéristiques sur les Canadiens de 25 ans et plus s'étant mariés plusieurs fois
Tableau de l'annexe 4. Attitudes et rapport des adultes non célibataires de 25 ans et plus avec la religion, selon le nombre de fois qu'ils se sont mariés

Graphique 1. Environ 9 Canadiens adultes sur 10 s'étant déjà mariés ne l'ont fait qu'une seule fois

Le premier mariage

Selon l'Enquête sociale générale de 2001 (ESG), un peu plus de 16,6 millions d'adultes canadiens, c'est-à-dire 80 % de la population des 25 ans et plus, se sont mariés au moins une fois.

En moyenne, les adultes canadiens se sont mariés pour la première fois vers l'âge de 25 ans (pour 89 % d'entre eux, leur premier mariage est toujours celui dans lequel ils se trouvent). Les mariés avaient environ deux ans et demi de plus que les mariées, soit 26,2 et 23,6 ans, respectivement. (Voir le tableau de l'annexe 1.)

La plupart des gens se sont mariés avec une autre personne célibataire, mais quelques-uns d'entre eux (6 %) ont échangé leurs voeux de premier mariage avec quelqu'un qui avait déjà été marié. Et, même si l'union libre n'était pas très acceptée avant 1980 (lorsque la plupart de ces personnes se fréquentaient), environ 15 % avaient cohabité avec leur conjoint avant le mariage.

Environ 9 non-célibataires canadiens sur 10 (88 %) ont élevé au moins un enfant et, au moment de l'enquête, 60 % d'entre eux avaient encore des enfants qui vivaient avec eux. Le fait d'avoir des enfants tend à ramener les gens vers les lieux de culte qu'ils ont peut-être négligés pendant leur jeunesse5. En effet, la majorité des non-célibataires (86 %) ont déclaré appartenir à une religion. De ce groupe, 42 % avaient assisté à des services religieux au moins une fois par mois dans l'année précédant l'enquête. Les taux correspondants pour les adultes qui ne se sont jamais mariés sont respectivement de 77 % et de 22 %.

Au moment de l'ESG, plus des deux tiers des non-célibataires (69 %) vivaient encore avec leur premier conjoint et ils étaient mariés en moyenne depuis 23,5 ans. Toutefois, chez 23 % des non-célibataires, le premier mariage s'est terminé par une dissolution après environ 11 ans de vie conjugale. Chez les 9 % restants, le premier mariage s'est terminé à la mort du conjoint, après 34 années de vie commune.

L'âge au moment du mariage et le fait de vivre en union libre sont des facteurs clés dans l'échec du premier mariage

En fin de compte, le succès ou l'échec d'un mariage dépend des dynamiques personnelles profondes du couple et de sa situation unique. Cependant, un modèle à risques peut être utilisé pour calculer la probabilité relative que le mariage d'une personne se termine par une séparation ou un divorce, étant donné que la personne possède certaines caractéristiques sociodémographiques. (Voir « Ce qu'il faut savoir sur la présente étude ».)

L'un des facteurs clés associés à la rupture du premier mariage est l'âge des nouveaux mariés. Une personne se mariant à l'adolescence est presque deux fois plus susceptible de voir son mariage se dissoudre comparativement à une personne qui se marie entre 25 et 29 ans. À l'opposé, les personnes qui attendent d'être au moins dans la mi-trentaine avant de se marier courent 43 % moins de risque. (Le rapport des risques instantanés [ou le risque relatif] est estimé pour chaque variable lorsque tous les autres facteurs du modèle sont pris en compte. Voir « Ce qu'il faut savoir sur la présente étude » pour consulter la liste des variables comprises dans le modèle.) La différence d'âge entre les conjoints n'est pas un facteur de risque important si l'époux a plus de cinq ans que son épouse mais le risque est de 29 % plus élevé si l'époux a au-delà de 5 ans de moins.

Les personnes n'ayant pas un diplôme d'études secondaires au moment de leur premier mariage font face à un risque de dissolution du mariage de 38 % plus élevé que celles qui possèdent un diplôme d'études secondaires. Les personnes ayant un diplôme universitaire courent 16 % moins de risque lorsque tous les autres facteurs du modèle sont pris en compte. Cette conclusion peut sembler contradictoire. En effet, on suppose que les personnes ayant un statut socioéconomique inférieur sont les moins en mesure de mettre fin à leur mariage, mais elle corrobore l'idée que les gens dont le statut social est plus élevé — les femmes en particulier — sont plus heureux et moins susceptibles de divorcer6.

L'union libre est fortement associée à une première rupture de mariage. En fait, le risque est de 50 % plus élevé chez les personnes ayant vécu avec leur partenaire avant le mariage que chez celles pour lesquelles ce n'était pas le cas. Cette conclusion est appuyée par de récentes recherches canadiennes démontrant clairement que les mariages précédés d'une union libre sont nettement moins stables que ceux ayant commencé à l'église7, possiblement parce que la tradition du mariage est moins importante pour les personnes qui ont vécu dans une relation conjugale non traditionnelle8.

Tableau 1. Différents facteurs sont associés au risque de dissolution du mariage dans les premiers mariages et les mariages subséquents, mais le fait d'être jeune et marié plus récemment sont des facteurs qui sont communs aux deux

Plus les personnes sont mariées depuis longtemps, plus elles ont de chance de rester ensemble. Par exemple, le risque prévu de dissolution du premier mariage d'une personne qui s'est mariée dans les années 1960 est de 13 % moins élevé que pour une personne qui s'est mariée dans les années 1970. Cependant, le risque est considérablement plus élevé (67 %) pour quelqu'un qui s'est marié dans les années 1990, même lorsque tous les autres facteurs sont pris en considération. La différence au fil des décennies reflète sans doute les attentes changeantes des gens par rapport au mariage, plus particulièrement le changement d'orientation qui est survenu et où l'on est passé d'un mariage axé sur la famille et l'éducation des enfants à un mariage axé sur la réalisation personnelle.

Le fait d'avoir des enfants réduit significativement le risque prévu d'un échec du premier mariage. Ainsi, ce risque est de 73 % moins élevé chez les personnes ayant des enfants que chez celles qui sont mariées et sans enfant, après avoir tenu compte de toutes les autres variables du modèle. Cette conclusion soutient le fait que, même si les enfants peuvent exercer des pressions sur la relation entre adultes, la dissolution du mariage est en réalité moins susceptible de se produire parmi les couples ayant des enfants que chez ceux qui n'en ont pas, une observation s'avérant juste dans la plupart des sociétés et des cultures9.

La religion et la langue maternelle sont liées au fait de rester marié

Les croyances religieuses peuvent aussi avoir un effet protecteur sur le premier mariage. Même si l'appartenance religieuse ne semble pas significative, la pratique religieuse est associée à la durabilité du mariage. Chez les personnes assistant à des services religieux pendant l'année, même si ce n'est qu'à quelques occasions, le risque prévu de dissolution de mariage est de 10 % à 31 % moins élevé que chez celles qui n'y assistent pas du tout. Ceci exclut le fait d'assister à des services lors d'occasions spéciales comme les mariages, baptêmes ou funérailles.

L'ESG ne fournit pas de renseignements sur le patrimoine culturel des répondants. Néanmoins, en supposant que la langue constitue un moyen important pour transmettre les valeurs et les normes dans un groupe social, la langue maternelle peut être utilisée comme un indicateur indirect des attitudes auxquelles une personne a été exposée pendant son enfance.

Chez les personnes vivant à l'extérieur du Québec et dont la langue maternelle n'est ni l'anglais ni le français, le risque de dissolution du premier mariage est significativement plus bas que chez le groupe de référence (les anglophones vivant à l'extérieur du Québec), le taux étant de presque 26 % moins élevé. La grande majorité de ces allophones indiquent qu'au moins un de leurs parents est né en Asie ou en Europe. Ces cultures ont tendance à avoir des traditions qui accordent une grande importance au mariage et à la famille.

Par ailleurs, le risque de dissolution du mariage est encore moins élevé chez les francophones du Québec (29 % plus bas) que chez les anglophones résidant à l'extérieur de la province. Ce résultat laisse assez perplexe, parce que le Québec affiche un taux de divorce plus élevé que n'importe où ailleurs10. Les unions libres y sont beaucoup plus acceptées, l'attitude étant en général plus libérale sur le plan social que dans le reste du pays11. En réalité, le fait d'être un Québécois francophone n'est plus un facteur significatif dans la diminution du risque de dissolution du premier mariage si les variables sur les attitudes sont retirées du modèle à risques (c'est-à-dire l'importance d'être en couple, d'être marié et d'avoir des enfants. Les résultats du modèle ne sont pas présentés).

Le deuxième mariage

Dans une citation célèbre, le Dr Samuel Johnson, grand lexicographe anglais du XVIIIe siècle, a qualifié le remariage de « triomphe de l'espoir sur l'expérience »12. Toutefois, environ 43 % des adultes canadiens dont le premier mariage s'est terminé par un divorce s'étaient mariés de nouveau avant l'ESG13, tout comme environ 16 % de ceux dont le premier conjoint était décédé.

Les Canadiens s'étant mariés une deuxième fois avaient 39 ans en moyenne au moment de leur mariage. Plus de la moitié (55 %) avaient prononcé des voeux avec quelqu'un qui avait aussi été marié auparavant, et plus du tiers (37 %) avaient déjà vécu en union libre avec leur nouveau conjoint.

Au moment de l'ESG, environ 1,3 million d'entre eux (71 %) étaient encore mariés à leur deuxième conjoint depuis presque 13 ans. Nous avons de bonnes raisons de croire que ces mariages dureront. Des recherches américaines révèlent que les remariages après l'âge de 40 ans sont plus stables que les premiers mariages14. En outre, le modèle à risques prévoit que, lorsque tous les autres facteurs sont pris en compte, les Canadiens dans la quarantaine, au moment d'un remariage, courent deux fois moins de risque de voir leur mariage se dissoudre, comparativement à ceux de moins de 30 ans. Même pour ceux qui se remarient dans la trentaine, le risque de rupture est de 27 % moins élevé.

La plus grande maturité des partenaires est l'une des raisons expliquant pourquoi le risque de dissolution diminue lorsque les partenaires sont plus âgés au moment du remariage. Dans une étude américaine, on peut lire que la qualité de la relation dans le couple est meilleure lorsque les deux conjoints en sont à leur deuxième mariage. Ces couples ont obtenu de meilleurs résultats pour les mesures dont les raisons du mariage reposaient sur l'intimité, comparativement à d'autres genres de couples, et ils ont obtenu des résultats moins élevés pour les mesures dont les raisons ne relevaient pas du couple15. En ce qui concerne le « bagage psychologique » dont leur nouveau mariage peut hériter, il semblerait que l'effet du divorce sur le bonheur dans l'ensemble, la dépression et la santé en général soit significatif, mais faible une fois que les variables démographiques ne sont pas prises en compte16.

Le premier échec pourrait contribuer à préparer le prochain

Cependant, plus de 1 Canadien sur 5 qui s'est remarié a quitté son deuxième conjoint après une période de 7,6 ans en moyenne. Il est encore plus difficile de comprendre que le mariage subséquent d'une personne se termine par une rupture, alors que le premier s'était également terminé ainsi.

Certaines des théories en recherches sociales qui ont permis d'expliquer l'échec du remariage comprennent : une psychologie personnelle faisant en sorte que la personne soit plus encline à mettre un terme aux relations; un comportement acquis, c'est-à-dire que la personne a résolu le problème du mariage précédent en divorçant; un manque de soutien social pour les remariages; ainsi qu'un plus petit groupe de candidats adéquats disponibles pour le remariage, ce qui réduit la probabilité de trouver un partenaire compatible17.

Les deux premières hypothèses suggèrent que les antécédents conjugaux peuvent aider à expliquer la cause de l'échec du mariage subséquent. Tel qu'il est démontré ci-dessus, le premier et le deuxième mariages ayant eu lieu à un jeune âge sont moins susceptibles de réussir, probablement parce que l'échec a tendance à se répéter si une personne n'a pas repensé son « style matrimonial ». Les adultes ayant divorcé deux fois avaient trois ans de moins que leurs homologues encore mariés, tant la première fois (22 contre 25) que la deuxième fois (environ 36 contre presque 40) qu'ils se sont mariés.

Il est quand même intéressant de constater que l'union libre, qui est beaucoup plus courante chez les personnes qui se sont mariées deux fois que chez celles qui se sont mariées une fois et qui est fortement liée à la rupture d'un premier mariage, n'est pas un facteur significatif dans la dissolution d'un mariage subséquent, une fois que toutes les autres variables ont été prises en compte.

Plusieurs chercheurs ont reconnu l'importance du soutien social dans la réussite du remariage. Le soutien reçu de la famille et des amis joue un rôle significatif dans la qualité de la relation matrimoniale, plus particulièrement chez les couples où les deux partenaires sont remariés18. À l'opposé, peu de soutien social contribue à la détresse psychologique dont les gens ayant divorcé ont fait état, en particulier ceux qui ont rompu plus d'une fois un mariage19.

Faire partie d'une minorité est associé à l'échec du mariage subséquent

Le choix du partenaire pour un deuxième mariage a intéressé les sociologues assez longtemps pour qu'ils en arrivent à deux théories concurrentes. La première, « l'hypothèse d'apprentissage », propose qu'une personne recherche quelqu'un qui lui ressemble après l'échec d'un mariage avec un conjoint différent d'elle. La deuxième, « l'hypothèse du marché matrimonial », soutient que les personnes se retrouvent avec un partenaire différent d'elles à cause du nombre limité de candidats disponibles pour un remariage20.

Aucune des deux hypothèses n'a éclipsé l'autre et les résultats du modèle à risques proportionnels de l'ESG sont également non concluants.

Même si une éducation supérieure est un facteur protecteur de premier ordre contre la dissolution du premier mariage, il est beaucoup moins important pour la dissolution d'un mariage subséquent. Ceci semble laisser croire qu'il y a peut-être davantage de similitudes au niveau de l'éducation entre les partenaires d'un deuxième mariage. Cette interprétation est soutenue par une étude hollandaise menée auprès d'adultes récemment remariés, dans laquelle on rapporte que les deux sexes ont tendance à choisir un deuxième partenaire qui est plus instruit que leur premier; les hommes ont davantage tendance à se remarier avec une femme dont le niveau de scolarité est le plus près du leur21.

Par ailleurs, les résultats du modèle semblent aussi exprimer la difficulté de trouver un partenaire compatible une deuxième fois lorsqu'une personne fait partie d'une petite population. Deux variables n'ayant joué aucun rôle dans la dissolution du premier mariage sont significativement associées à la rupture des mariages subséquents. Premièrement, le risque pour un francophone vivant à l'extérieur du Québec est de 83 % plus élevé que pour un anglophone, lorsque tous les facteurs du modèle sont contrôlés. Deuxièmement, adhérer à une croyance religieuse autre que celle des églises catholiques ou protestantes dominantes augmente le risque de 135 %, comparativement au fait de n'avoir aucune appartenance religieuse.

C'est maintenant une vérité de la Palisse de dire que les enfants du conjoint contribuent grandement à l'effondrement des deuxièmes mariages. Il est tentant de penser ainsi et les adolescents en particulier peuvent mettre n'importe quel lien du mariage à l'épreuve, mais les études ne sont pas concluantes à ce sujet : dans certaines, on soutient qu'ils sont un facteur de premier ordre dans l'échec du remariage22, alors que dans d'autres, on reconnaît qu'ils contribuent à la satisfaction matrimoniale des adultes23. Le modèle de l'ESG prévoit que, lorsque toutes les autres variables sont prises en compte, la présence des enfants dans le ménage au moment d'un mariage subséquent n'est pas associée à la dissolution du mariage.

Le modèle à risques proportionnels indique aussi que certains facteurs liés à la réussite ou à l'échec du mariage sont tout simplement hors du contrôle d'une personne. Par exemple, les femmes courent le même risque que les hommes de vivre la dissolution d'un mariage subséquent, ce qui est assez surprenant, parce que le risque était significativement inférieur pour ce qui est de la rupture d'un premier mariage. La réponse se trouve peut­être dans l'attitude des femmes par rapport au mariage, puisque les données sont différentes lorsque les variables sur les attitudes sont retirées du modèle. Si le risque prévu est calculé en utilisant seulement les variables sociodémographiques, dans un premier mariage, les hommes et les femmes courent un risque égal de dissolution, mais dans le cas d'un mariage subséquent, les femmes courent 30 % plus de risque que les hommes de vivre une rupture. (Les résultats du modèle ne sont pas présentés.)


Le troisième mariage

En 2001, selon l'ESG, près de 137 500 adultes canadiens avaient été mariés plus de deux fois. Ce nombre représente moins de 1 % de la population de non-célibataires de 25 ans et plus. Ils s'étaient pratiquement tous mariés trois fois.

Sauf pour ce qui est de leur habitude à l'égard du mariage, sur le plan sociodémographique, rien ne distingue ces Canadiens se mariant plusieurs fois des autres Canadiens. Ils se sont mariés pour la troisième fois à un âge moyen de presque 46 ans, généralement avec quelqu'un qui a aussi déjà été marié. Avant la cérémonie, près du tiers (38 %E) avaient vécu en union libre avec leur troisième conjoint.

Et, même si 71 % d'entre eux venaient de célébrer leur 8e anniversaire de mariage avec leur plus récent partenaire, près du quart (23 %E) avaient mis fin à leur mariage après moins de quatre ans de vie commune.

Certains chercheurs croient qu'il y a des preuves crédibles que [traduction] « … les personnes se mariant plusieurs fois sont différentes de celles qui ne se remarient qu'une seule fois, pour ce qui est de leur personnalité et de leur comportement [sic] »24. En 1990, une étude américaine portant expressément sur les personnes se mariant plusieurs fois a conclu que les hommes et les femmes qui se sont mariés de nombreuses fois ont des niveaux d'anxiété plus élevés que ceux qui ne se sont mariés qu'une fois ou deux. Les femmes s'étant mariées plusieurs fois ont aussi déclaré qu'elles ressentaient davantage de détresse psychologique que les autres femmes mariées, même après avoir pris en compte leurs antécédents de divorce25.


Croire au mariage fait en sorte que le mariage est plus solide

Le profil psychologique, bien qu'il soit bref, peut aider à faire la lumière sur une conclusion contre-intuitive tirée de l'ESG. On serait porté à penser que les personnes se mariant plusieurs fois croient ardemment en la valeur du mariage et de la famille, mais les données semblent exprimer une toute autre histoire.

Avec un taux de 69 %, les gens se mariant plusieurs fois sont beaucoup moins susceptibles de dire qu'être marié est important ou très important pour leur bonheur, comparativement à 82 % des personnes ne s'étant mariées qu'une seule fois (y compris les personnes divorcées ou veuves et celles qui sont encore mariées). Bien sûr, les croyances profondes peuvent être changées selon l'expérience de la personne, plus particulièrement une expérience très négative comme l'échec de son mariage. Mais ce manque d'engagement face au mariage peut devenir une prophétie auto-accomplie, puisqu'il est un facteur clé associé à l'échec du mariage. Les personnes ne croyant pas que le mariage contribue à leur bonheur courent un risque prévu d'échouer tant leur premier mariage que leur mariage subséquent, qui est de 170 % à 330 % plus élevé que chez les gens qui croyaient que c'est très important, une fois que toutes les autres variables sont prises en compte.

De la même façon, les gens se mariant plusieurs fois sont à peine ou presque deux fois plus susceptibles de déclarer ne pas vouloir rester dans un mariage difficile, même pour le bien de leurs enfants (dans une proportion de 50 % comparativement à 28 % pour les personnes s'étant mariées une fois). Bien sûr, il s'agit probablement d'une question très hypothétique pour la plupart des personnes ne s'étant mariées qu'une seule fois, car elles pourraient exagérer leur situation, alors que les personnes se mariant plusieurs fois pourraient avoir une vision plus réaliste de ce qu'ils sont prêts à tolérer. Néanmoins, comparativement à ceux qui croient qu'ils resteraient dans un mariage qui n'a aucune chance de réussir pour le bien-être de leurs enfants, le risque prévu de dissolution d'un premier ou d'un deuxième mariage est de 69 % à 116 % plus élevé chez les personnes qui sont préparées à abandonner la relation.


Résumé

Les événements actuels peuvent laisser croire que l'institution du mariage est en déroute. Certaines personnes pourraient affirmer que le fait que la société accepte les exigences de chaque personne en fonction de sa réalisation personnelle a autorisé les personnes irresponsables et hédonistes à passer d'un conjoint à l'autre.

Cependant, le mariage semble toujours avoir une aura qui le place au-dessus d'un simple mode de vie. La plupart des Canadiens se marient une fois et seulement une fois; moins de 1 % des gens se marient plus de deux fois. Les couples mariés ont un « plus grand engagement » et une « meilleure qualité de relation » que les personnes vivant en union libre26, ce qui reflète la nature transcendante du mariage et des liens du mariage eux-mêmes.

Les facteurs associés à la rupture du premier mariage ont tendance à être différents de ceux qui sont des facteurs de risques significatifs pour la dissolution d'un mariage subséquent. Cependant, en général, la probabilité prévue que le mariage soit un succès est plus élevée chez les personnes se mariant dans la trentaine, qui n'ont pas vécu en union libre avant le mariage, ont des enfants, assistent à des services religieux, détiennent un diplôme universitaire et croient que le mariage est important pour être heureux.


Notes :

  1. A. Cherlin, « The Deinstitutionalization of American Marriage », Journal of Marriage and Family, vol. 66, no 4, p. 848 à 861.

  2. A. Milan, « Les familles : 100 ans de continuité et de changement », Tendances sociales canadiennes, printemps 2000, no 56, p. 2 à 13; Statistique Canada, « Le point sur les familles », Tendances sociales canadiennes, été 2003, no 69, p. 11 à 13.

  3. Statistique Canada, Le Quotidien, 9 mars 2005.

  4. Statistique Canada, 2003.

  5. W. Clark, « L'évolution de la pratique religieuse », Tendances sociales canadiennes, hiver 2000, no 59, p. 27 à 31, 2000.

  6. T. Burnham et J. Phelan, Mean Genes, New York (NY), Penguin Books, 2000.

  7. C. Le Bourdais, G. Neill et P. Turcotte, « L'évolution des liens conjugaux », Tendances sociales canadiennes, printemps 2000, no 56, p. 15 à 18.

  8. A. Milan, « Accepteriez-vous de vivre en union libre? », Tendances sociales canadiennes, automne 2003, no 70, p.  2 à 6.

  9. T. Burnham et J. Phelan, Mean Genes, New York (NY), Penguin Books, 2000; Robert Wright, The Moral Animal: Why we are the way we are – The new science of evolutionary psychology, New York, Vintage Books, 1994.

  10. Selon les données de 2003, 50 % des mariages au Québec se sont soldés par un divorce au cours des 30 années suivant l'union. Statistique Canada, Le Quotidien, 9 mars 2005.

  11. M. Adams, Fire and Ice: The United States, Canada and the myth of converging values, Toronto, Penguin Canada, 2003, p. 77 à 102.

  12. Bartlett's Familiar Quotations: Fifteenth and 125th Anniversary Edition, publié sous la direction Emily Morrison Beck (éd.), Little, Brown and Company, New York, vol. 354, no 22, 1980.

  13. Aux États-Unis, le taux de remariage était d'environ 75 % dans les années 1990. M. Coleman, L. Ganong et M. Fine, « Reinvestigating Remarriage: Another decade of Progress », Journal of Marriage and the Family, vol. 62, no 4, p. 1288 à 1307, 2000.

  14. Coleman, Ganong et Fine, 2000.

  15. Les raisons intrinsèques du mariage sont basées sur le couple et liées au niveau d'intimité, par exemple : « Nous sommes intimes et près l'un de l'autre. Nous avons des façons spéciales de nous démontrer de l'affection et d'exprimer ce que nous ressentons ». Les raisons extrinsèques étaient davantage liées à ce que l'autre leur apportait : « Il ou elle sait ce que je veux. Il ou elle répond à mes besoins. Mes parents seraient d'accord que je la ou le fréquente. Mes amis aiment cette personne. Les gens sont impressionnés par mon choix ». L.A. Kurdek, « Relationship Quality for Newly Married Husbands and Wives: Marital History, Stepchildren, and Individual-Difference Predictors », Journal of Marriage and the Family, vol. 51, no 4, p. 1053 à 1064.

  16. L.A.Kurdek, « The Relations between Reported Well-Being and Divorce History, Availability of a Proximate Adult, and Gender », Journal of Marriage and the Family, vol. 53, no 1, p. 71 à 78.

  17. Coleman, Ganong et Fine, 2000; E. Vemer, M. Coleman, L.-H. Ganong et H. Cooper, « Marital Satisfaction in Remarriage: A Meta-Analysis », Journal of Marriage and the Family, vol. 53, no 1, p. 713 à 725, 1989; Kurdek, 1989; J. Gelissen, « Assortative mating after divorce: a test of two competing hypotheses using marginal models », Social Science Research, vol. 33, p. 361 à 384, 2004.

  18. Kurdek, 1989.
  19. L.A. Kurdek, « Divorce History and Self-Reported Psychological Distress in Husbands and Wives », Journal of Marriage and the Family, vol. 52, no 3, p. 701 à 708.

  20. Gelissen, 2003.

  21. Gelissen, 2003.

  22. Coleman, Ganong et Fine, 2000.

  23. Vemer, Coleman, Ganong et Cooper, 1989; Kurdek, 1989.

  24. Vemer, Coleman, Ganong et Cooper, 1989.

  25. Kurdek, 1990.

  26. Z. Wu et C.M. Schimmele, « Repartnering after First Union Disruption », Journal of Marriage and the Family, février 2005, no 67, p. 27 à 36.

Article complet (PDF)

Auteurs

Warren Clark est analyste principal et Susan Crompton est rédactrice en chef de Tendances sociales canadiennes. Vous pouvez les rejoindre en leur envoyant un courriel à cstsc@statcan.gc.ca.


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Date de modification : 2008-11-21 Avis importants