Rapports sur l'incapacité et l’accessibilité au Canada
Écart salarial entre les personnes ayant une incapacité et les personnes sans incapacité, 2019

Principales constatations

• Parmi les personnes âgées de 16 ans et plus, celles ayant une incapacité gagnent 21,4 % de moins que les personnes sans incapacité.
• En ce qui concerne le type d’incapacité, l’écart salarial était particulièrement important entre les personnes ayant une incapacité cognitive et les personnes sans incapacité (46,4 %).
• Des différences de rémunération ont également été observées selon le sexe, car les hommes et les femmes ayant une incapacité gagnaient moins que leurs homologues sans incapacité.
• Le revenu des travailleurs à temps plein ayant une incapacité différait de celui des travailleurs sans incapacité, mais il était similaire chez les travailleurs à temps partiel ayant une incapacité et les travailleurs sans incapacité.
• Dans la population en âge de travailler (de 25 à 64 ans), l’écart salarial chez les personnes ayant une incapacité était similaire à celui de la population totale (22,2 %).

Introduction

L’emploi et le revenu peuvent être un élément important du bien-être économique global d’un individu. Les personnes ayant une incapacité doivent souvent composer avec des obstacles liés à l’emploi, ce qui se traduit par des taux inférieurs d’emploi, un revenu plus faible, une capacité réduite de travailler à temps plein ou des taux plus élevés de travail à temps partiel involontaire^{Note Note Note} . L’un des domaines prioritaires de la Loi canadienne sur l’accessibilité est de cerner, d’éliminer et de prévenir les obstacles à l’emploi. L’élimination et la prévention des obstacles devraient permettre de réduire les différences de revenu et les écarts salariaux entre les personnes ayant une incapacité et celles sans incapacité. 

La différence en ce qui concerne le revenu annuel entre les divers groupes de population, par exemple les hommes et les femmes ou les personnes avec ou sans incapacité, fait partie de la compréhension des inégalités économiques. Les inégalités économiques ont des répercussions sur la santé et le bien-être, car le revenu est souvent considéré comme le déterminant social le plus important de la santé^Note .

L’analyse de l’écart salarial est une technique couramment utilisée qui résume les différences de rémunération entre les populations, en une seule statistique. L’écart salarial entre les sexes est souvent utilisé pour représenter l’iniquité salariale entre les hommes et les femmes, ce qui contribue à la compréhension globale de l’inégalité entre les sexes^Note . Certaines études sur l’écart salarial relatif aux personnes ayant une incapacité ont mis en évidence divers facteurs, notamment les exigences et les caractéristiques d’emploi, le type d’incapacité, la sévérité de l’incapacité ou le moment de l’apparition de l’incapacité, la discrimination ainsi que les caractéristiques sociodémographiques des travailleurs^{Note Note} .

À l’aide des données de l’Enquête canadienne sur le revenu (ECR) de 2019^Note , le présent rapport étudie l’écart salarial entre les personnes ayant une incapacité et celles sans incapacité en examinant différents facteurs sociodémographiques et les caractéristiques d’emploi.

Les personnes ayant une incapacité gagnent en moyenne moins que les personnes sans incapacité

En 2019, le revenu annuel moyen des Canadiens âgés de 16 ans et plus était inférieur chez les personnes ayant une incapacité (43 400 $), par rapport aux personnes sans incapacité (55 200 $; tableau 1). Cela se traduit par un écart salarial de 21,4 % entre les deux groupes, ce qui signifie que les personnes ayant une incapacité gagnent environ 21,4 % de moins que leurs homologues sans incapacité.



Bien que le revenu moyen et l’écart salarial soient des mesures importantes des différences observées au chapitre de la rémunération, il est également utile d’examiner la répartition des revenus. L’analyse de la répartition des revenus peut mettre en lumière des inégalités qui peuvent être moins évidentes avec d’autres mesures. Les différences de revenu entre les personnes ayant une incapacité et celles sans incapacité persistent dans la plupart des échelles de rémunération (graphique 1). Une proportion plus élevée de personnes ayant une incapacité (30,1 %) que de personnes sans incapacité (23,2 %) avait un revenu d’emploi inférieur à 20 000 $. À l’inverse, les personnes sans incapacité (12,1 %) étaient près de deux fois plus susceptibles d’avoir un revenu de 100 000 $ et plus, par rapport à leurs homologues ayant une incapacité (6,2 %). Ces résultats concordent avec les recherches antérieures selon lesquelles les personnes ayant une incapacité sont souvent sous-représentées dans les niveaux de revenu supérieurs et plus susceptibles de vivre sous le seuil de la pauvreté^Note .

Description du graphique 1



Tableau de données du graphique 1
Sommaire du tableau
Le tableau montre les résultats de Tableau de données du graphique 1. Les données sont présentées selon Revenu d’emploi (titres de rangée) et Personnes ayant une incapacité et Personnes sans incapacité (catégorie de référence), calculées selon pourcentage unités de mesure (figurant comme en-tête de colonne).

Revenu d’emploi	Personnes ayant une incapacité	Personnes sans incapacité (catégorie de référence)
	pourcentage
Moins de 20 000 $	30.1Note *	23.2
De 20 000 $ à 39 999 $	23.8Note *	19.7
De 40 000 $ à 59 999 $	20.0	20.8
De 60 000 $ à 79 999 $	13.0Note *	15.3
De 80 000 $ à 99 999 $	6.9Note *	9.0
100 000 $ et plus	6.2Note *	12.1
Note * valeur significativement différente de l’estimation pour la catégorie de référence (p < 0,05) Retour à la référence de note * referrer Source : Statistique Canada, Enquête canadienne sur le revenu, 2019.

Un examen plus approfondi des types d’incapacité^Note a révélé plus de différences sur le plan du revenu et de l’écart salarial. Bien que chaque type d’incapacité soit associé à un revenu annuel moyen inférieur à celui des personnes sans incapacité (tableau 2), les personnes ayant certains types d’incapacité s’en sont le moins bien tirées. Les personnes ayant une incapacité cognitive gagnaient plus de 46 % de moins et celles ayant une incapacité liée à la santé mentale gagnaient 31 % de moins que les personnes sans incapacité. L’écart avec les personnes sans incapacité s’est rétréci pour les personnes ayant une incapacité physique (20,7 %), auditive (12,3 %) ou visuelle (12,3 %).



L’écart salarial relatif aux personnes ayant une incapacité persiste chez les femmes et les hommes

Lorsqu’on analyse le revenu annuel des personnes ayant une incapacité et celui des personnes sans incapacité chez les hommes et les femmes, on constate des différences^Note . Les hommes ayant une incapacité étaient plus susceptibles d’avoir un revenu annuel moyen inférieur à celui des hommes sans incapacité (48 700 $ par rapport à 64 300 $), tout comme les femmes ayant une incapacité, par rapport aux femmes sans incapacité (38 900 $ et 45 100 $, respectivement; tableau 1). Chez les hommes, l’écart salarial qui en a résulté entre les personnes ayant une incapacité et les personnes sans incapacité était de 24,3 %, tandis que chez les femmes, il était de 13,7 % entre les deux populations.

À l’inverse, lorsqu’on examine l’écart salarial entre les sexes en fonction de la situation vis-à-vis de l’incapacité (tableau 3), les femmes ayant une incapacité gagnaient environ 20 % de moins que les hommes ayant une incapacité. Parmi les personnes sans incapacité, les femmes gagnaient près de 30 % de moins que les hommes.



L’écart salarial différait selon le groupe d’âge; il était plus important chez les groupes d'âge plus avancés que chez les groupes plus jeunes (tableau 1). Parmi les plus jeunes travailleurs (de 25 à 34 ans), les personnes ayant une incapacité gagnaient 14 % de moins que les personnes sans incapacité. En revanche, parmi les travailleurs âgés (de 45 à 64 ans), les personnes ayant une incapacité gagnaient environ 27 % de moins que leurs homologues sans incapacité.

Des niveaux de scolarité plus élevés sont souvent associés à des taux d’emploi et un revenu supérieurs. Chez les personnes avec et sans incapacité, le revenu moyen augmentait au fur et à mesure que le niveau de scolarité augmentait (tableau 1). En outre, parmi les personnes ayant un niveau de scolarité similaire, les personnes ayant une incapacité avaient un revenu plus faible que celles sans incapacité. L’écart salarial entre les personnes ayant une incapacité et celles sans incapacité était plus important chez les personnes ayant fait des études postsecondaires partielles (20,9 %) et celles détenant un baccalauréat ou un grade supérieur (16,0 %) que chez celles ayant un diplôme d’études secondaires ou moins (10,9 %).

Les personnes ayant une incapacité sont plus susceptibles de travailler à temps partiel, mais ont un revenu annuel similaire à celui des travailleurs à temps partiel sans incapacité 

En ce qui concerne l’horaire de travail, les personnes ayant une incapacité étaient moins susceptibles de travailler à temps plein et plus susceptibles de travailler à temps partiel que les personnes sans incapacité (tableau 4). De plus, les travailleurs à temps plein ayant une incapacité gagnaient en moyenne moins (56 100 $) que leurs homologues sans incapacité (67 300 $; tableau 5).

En revanche, parmi les travailleurs à temps partiel, on ne constatait aucune différence pour ce qui est du revenu annuel moyen entre les personnes ayant une incapacité et les personnes sans incapacité. L’écart salarial entre les personnes ayant une incapacité et les personnes sans incapacité était plus important parmi les travailleurs à temps plein que parmi les travailleurs à temps partiel. Les travailleurs à temps plein ayant une incapacité gagnaient 16,6 % de moins que les travailleurs à temps plein sans incapacité.

 

Bien que les personnes ayant une incapacité qui travaillent à temps partiel soient plus susceptibles que les personnes sans incapacité de déclarer qu’elles veulent travailler à temps plein^Note , il n’y a pas de différence concernant le revenu moyen entre les personnes ayant une incapacité et celles sans incapacité qui souhaitent travailler à temps plein.

On observe une tendance similaire lorsqu’on examine le revenu annuel et l’écart salarial en fonction du nombre habituel d’heures travaillées par semaine. On ne constatait aucune différence pour ce qui est du revenu moyen entre les personnes ayant une incapacité et celles sans incapacité qui travaillaient moins de 30 heures par semaine; toutefois, il y avait des variations entre les personnes qui travaillaient 30 heures ou plus. Parmi les personnes qui travaillaient de 30 heures à moins de 40 heures par semaine, celles ayant une incapacité gagnaient environ 17 % de moins que les personnes sans incapacité. Cet écart était encore plus grand parmi les personnes qui travaillaient 40 heures ou plus par semaine, puisque les personnes ayant une incapacité gagnaient près de 21 % de moins que celles sans incapacité.

Dans les emplois permanents et temporaires, les personnes ayant une incapacité gagnent moins que celles sans incapacité

La durée d’occupation de l’emploi, c’est-à-dire le temps passé à son emploi actuel, peut avoir une incidence sur le revenu. Lorsqu’on examine la durée d’occupation de l’emploi, on constate encore une fois des différences entre les personnes ayant une incapacité et celles sans incapacité. Quelle que soit la durée d’occupation de leur emploi, le revenu des personnes ayant une incapacité était en moyenne moins élevé que celui des personnes sans incapacité. L’écart salarial le plus important entre les personnes ayant une incapacité et les personnes sans incapacité a été observé chez celles qui occupaient leur emploi actuel depuis 5 ans jusqu’à moins de 10 ans (25,4 %).

La probabilité d’être membre d’un syndicat ou couvert par une convention collective ne différait pas selon la situation vis-à-vis de l’incapacité. Autrement dit, les travailleurs ayant une incapacité étaient tout aussi susceptibles que leurs homologues sans incapacité d’occuper un emploi syndiqué ou d’être couverts par une convention collective. Toutefois, dans les deux cas, le revenu moyen des personnes ayant une incapacité était inférieur à celui des personnes sans incapacité. L’écart salarial était plus important chez les personnes qui n’étaient pas membres d’un syndicat ou qui n’étaient pas couvertes par une convention collective, car les personnes ayant une incapacité gagnaient 25,7 % de moins que les personnes sans incapacité.

En ce qui concerne le statut d’emploi permanent ou temporaire^Note , les personnes ayant une incapacité et celles sans incapacité étaient tout aussi susceptibles les unes que les autres d’être employées de façon permanente ou temporaire. Cependant, encore une fois, il y avait des différences en ce qui concerne le revenu moyen entre les deux populations parmi les personnes occupant un emploi permanent et celles ayant un emploi non permanent. Les personnes ayant une incapacité occupant un emploi permanent avaient en moyenne un revenu inférieur (50 900 $) à celui des personnes sans incapacité (64 000 $), ce qui signifie que les personnes ayant une incapacité gagnent 20,5 % de moins que les personnes sans incapacité. On observait un écart salarial similaire chez les personnes occupant un emploi non permanent, car les personnes ayant une incapacité touchaient en moyenne un revenu inférieur et présentaient un écart salarial de 17 % par rapport aux personnes sans incapacité.

L’écart salarial relatif aux personnes ayant une incapacité dans la population en âge de travailler est similaire à celui de la population totale

L’écart salarial chez les personnes ayant une incapacité a été examiné au sein de la population en âge de travailler, car il s’agit d’une autre façon courante d’analyser l’écart salarial. Des recherches antérieures sur l’écart salarial entre les sexes ont démontré que cet écart est similaire pour la population totale et la population en âge de travailler^Note .

Parmi les personnes de 25 à 64 ans, les personnes ayant une incapacité (49 700 $) avaient en moyenne un revenu inférieur à celui des personnes sans incapacité (63 900 $), ce qui représente un écart salarial de 22,2 % entre les deux populations. Ces résultats sont similaires à ceux de la population totale en ce qui concerne les différences de revenu annuel moyen et l’écart salarial entre les personnes ayant une incapacité et celles sans incapacité. 

Conclusion

Il est essentiel de cerner et de mieux comprendre les inégalités de revenu pour suivre les progrès vers un Canada plus inclusif. Les résultats du présent rapport démontrent qu’il existe une différence notable entre le revenu des personnes ayant une incapacité et celui des personnes sans incapacité. De plus, cet écart salarial relatif aux personnes ayant une incapacité persistait lorsqu’on examinait celui-ci en fonction du sexe, du groupe d’âge et du niveau de scolarité.

Les résultats mettent également en évidence les différences en ce qui concerne l’écart salarial relatif aux personnes ayant une incapacité selon plusieurs caractéristiques d’emploi. Il existe des disparités de revenu entre les personnes ayant une incapacité et celles sans incapacité chez les travailleurs à temps plein, mais pas chez les travailleurs à temps partiel. Les personnes ayant une incapacité gagnaient moins que les personnes sans incapacité lorsque le revenu est examiné en fonction de la durée d’occupation de leur emploi actuel, de la situation syndicale et du statut d’emploi permanent ou temporaire.

Les travaux futurs pourraient examiner la tendance de l’écart salarial relatif aux personnes ayant une incapacité au fil du temps, en particulier pour étudier les répercussions de la pandémie de COVID-19 et pour mesurer l’incidence de la mise en œuvre de la Loi canadienne sur l’accessibilité. En outre, une analyse plus détaillée pourrait être effectuée afin d’examiner l’écart salarial « ajusté » et déterminer dans quelle mesure l’écart s’explique par diverses caractéristiques sociodémographiques et professionnelles.

Source de données, méthodes et définitions

Le présent rapport s’appuie sur l’Enquête canadienne sur le revenu (ECR), qui est une enquête transversale nationale visant à brosser un portrait du revenu et des sources de revenu des Canadiens, selon leurs caractéristiques personnelles et celles de leur ménage. Il s’agit d’une enquête annuelle, généralement menée de janvier à juin. La période de référence est l’année civile précédant la collecte. L’ECR est administrée à un sous-échantillon de répondants à l’Enquête sur la population active. La taille de l’échantillon obtenue pour l’ECR est d’environ 72 000 ménages.

L’ECR de 2019 identifie les personnes ayant une incapacité au moyen de la version abrégée des questions d’identification des incapacités (QII), qui sont fondées sur le modèle social de l’incapacité et ont été posées à un membre du ménage, âgé de 16 ans et plus, sélectionné au hasard. Les QII permettent d’abord de déterminer la mesure dans laquelle les répondants éprouvent des difficultés dans 10 domaines de fonctionnement, puis à quelle fréquence leurs activités quotidiennes sont limitées par ces difficultés. Seules les personnes ayant déclaré une limitation de leurs activités quotidiennes sont considérées comme ayant une incapacité.

Le présent rapport applique la même méthodologie que celle servant pour l’écart salarial entre les sexes afin d’analyser l’écart salarial relatif aux personnes ayant une incapacité. Plusieurs approches peuvent être utilisées pour cette mesure, qui peuvent différer selon les personnes sur lesquelles les estimations sont fondées, le type de revenus inclus et la façon dont les revenus sont calculés. Cette analyse adopte une approche plus inclusive qui consiste à tenir compte du revenu annuel moyen de tous les travailleurs (peu importe leur statut d'emploi à temps plein ou à temps partiel).

Dans ce rapport, l’écart salarial relatif aux personnes ayant une incapacité est fondé sur le ratio salarial entre les personnes ayant une incapacité et les personnes sans incapacité, qui est calculé en divisant le revenu annuel moyen des personnes ayant une incapacité par le revenu annuel moyen des personnes sans incapacité. Ce ratio est ensuite soustrait de 1 et multiplié par 100, ce qui donne l’écart salarial présenté comme le pourcentage de ce que les personnes ayant une incapacité gagnent en moins par rapport aux personnes sans incapacité. L’analyse ne porte que sur les employés rémunérés au cours de l’année de référence, de sorte que les travailleurs autonomes sont exclus.