Section 4 : Affaires de violence familiale envers les enfants et les jeunes déclarées par la police

par Dyna Ibrahim et Maisie Karam

Les formes de maltraitance des enfants englobent un éventail de comportements qui ont tous des répercussions négatives à court et à long terme sur la victime. La maltraitance comprend les mauvais traitements physiques et affectifs, les sévices sexuels, la négligence, l’exposition à la violence entre partenaires intimes et l’exploitation commerciale ou autre, entraînant un préjudice réel ou potentiel pour la santé de l’enfant, sa survie, son développement ou sa dignité, dans le contexte d’une relation de responsabilité, de confiance ou de pouvoir (Organisation mondiale de la Santé, 2014). Nombreux sont les défis lorsqu’on tente d’estimer la prévalence de la maltraitance des enfants au Canada, étant donné que bon nombre de jeunes victimes ne sont pas conscientes de ce qui leur arrive lorsqu’elles sont agressées, ne savent pas vers qui se tourner ou ne sont pas en mesure de signaler elles-mêmes la violence qu’elles subissent. Les études sur la victimisation des enfants et des jeunes sont rares, puisqu’il n’y a pas beaucoup de sources de données sur la victimisation des enfants de moins de 15 ans.

Selon les données autodéclarées de l’Enquête sociale générale de 2014 sur la victimisation, près du tiers (32 %) des Canadiens de 15 ans et plus vivant dans les provinces ont déclaré avoir subi de la violence physique ou sexuelle, ou les deux, durant l’enfance aux mains d’un membre de la famille ou d’une personne non apparentée; cela correspond à un peu moins de 9 millions de personnes. Une proportion légèrement plus élevée d’hommes (32 %) que de femmes (27 %) ont déclaré avoir subi de la violence durant l’enfance (Perreault, 2015). Ces constatations, ainsi qu’une analyse des répercussions de la maltraitance des enfants autodéclarée sur la vie de ces derniers une fois adultes, seront présentées en détail dans de futurs rapports sur la violence familiale.

S’appuyant sur les données du Programme de déclaration uniforme de la criminalité fondé sur l’affaire et de l’Enquête sur les homicides de 2014, cette section présente de l’information sur les affaires de violence familiale commises envers les enfants et les jeunes de moins de 18 ans et déclarées par la police. L’analyse porte sur la prévalence et les caractéristiques des infractions avec violence envers les enfants et les jeunes lorsque l’auteur présumé est un membre de la famille. Ces renseignements comprennent les types d’infractions selon l’âge et le sexe de la victime, le lien de l’auteur présumé avec la victime, la gravité des blessures et la présence ou non d’une arme. On y présente également une analyse des tendances relatives à certains crimes violents commis à l’endroit des enfants et des jeunes et déclarés par la police afin d’en suivre l’évolution au fil du temps.

La présente section porte sur tous les types d’infractions avec violence prévues au Code criminel qui ont été portées à l’attention de la police en 2014, allant des menaces aux homicides, en passant par la violence physique et sexuelle. Les crimes sans violence, comme le vol et la fraude, toutes les formes de violence qui n’ont pas été corroborées par la police, ainsi que la conduite qui n’est pas visée par le Code criminel, ne sont pas compris dans cette section. De plus, l’analyse fondée sur les données de l’Enquête sur les homicides exclut les homicides qui n’ont pas été résolus par la police. Bien que la présente section contienne des renseignements contextuels importants sur les affaires de violence familiale qui sont portées à l’attention de la police, il se peut qu’elle présente un portrait sous-estimé de la portée réelle de la violence familiale au Canada.

Sauf indication contraire, tous les taux indiqués dans la présente section sont calculés pour 100 000 personnes. La section « Description de l’enquête » contient des renseignements sur les sources de données et les méthodes d’enquête ainsi que des définitions.

Début de l'encadré

Faits saillants

Trois enfants et jeunes sur cinq victimes de violence familiale déclarée par la police ont été agressés par un parent

  • En 2014, on a dénombré environ 53 600 enfants et jeunes (17 ans et moins) victimes de crimes violents. Les enfants et les jeunes représentaient 17 % des victimes de crimes violents déclarés par la police en 2014 (tableau 4.1).
  • Parmi les enfants et les jeunes victimes, environ 16 300 (31 %) ont subi de la violence familiale aux mains d’un parent, d’un frère ou d’une sœur, d’un membre de la famille élargie ou d’un conjoint. La majorité de ces victimes (61 %) ont été maltraitées par un parent. Chez les victimes de violence familiale les plus jeunes (celles âgées de moins d’un an), l’auteur présumé était le plus souvent un parent (89 %) (tableau 4.2).
  • Les taux de violence familiale les plus élevés ont été observés chez les jeunes de 12 à 17 ans, alors que le taux le plus faible a été enregistré chez les nourrissons de moins d’un an. Toutefois, il est possible que de nombreuses formes de violence envers les enfants les plus jeunes ne soient pas signalées pour différentes raisons (tableau 4.3).
  • En 2014, les filles étaient plus susceptibles d’être victimes de violence familiale déclarée par la police que les garçons (274,4 pour 100 000 filles de moins de 18 ans par rapport à 189,7 pour 100 000 garçons de moins de 18 ans) (tableau 4.3).
  • Le risque d’être victime de violence familiale était le plus élevé à l’âge de 15 ans tant chez les garçons (247,5 pour 100 000 garçons) que chez les filles (534,6). Toutefois, les filles âgées de 14 à 17 ans étaient deux fois plus susceptibles d’être agressées que les garçons (tableau 4.3).

Le taux d’agressions sexuelles commises sur des filles et déclarées par la police est quatre fois plus élevé que celui observé chez les garçons

  • En 2014, les voies de fait représentaient la forme la plus courante de violence familiale commise envers les enfants et les jeunes et déclarée par la police (134,4 pour 100 000 enfants et jeunes de moins de 18 ans), suivies des infractions sexuelles (73,9) (tableau 4.4).
  • Alors que les taux de voies de fait envers les enfants et les jeunes commises par un membre de la famille étaient semblables chez les victimes féminines et masculines, le taux d’agressions sexuelles à l’endroit des filles était plus de 4 fois supérieur à celui observé chez les garçons (121,8 par rapport à 28,5) (tableau 4.4).
  • Les enlèvements et les rapts ont continué d’être relativement rares parmi les affaires de violence familiale déclarées par la police en 2014. Plus précisément, la police a déclaré que 387 enfants et jeunes ont été victimes d’enlèvement ou de rapt, ce qui représente un taux de 5,6 pour 100 000 enfants et jeunes (tableau 4.4).
  • Parmi les 316 enfants et jeunes victimes d’homicides dans la famille enregistrés au cours de la période de 2004 à 2014, les causes de décès les plus fréquentes étaient les coups portés (25 %), l’étranglement, la suffocation ou la noyade (25 %) et les coups de couteau (17 %). Environ la moitié (51 %) des enfants et des jeunes victimes d’homicide dans la famille entre 2004 et 2014 étaient âgés de moins de 4 ans (tableau 4.5).
  • La plupart des homicides dans la famille commis contre des enfants et des jeunes étaient motivés par la frustration, la colère ou le désespoir (62 %). Dans près de 1 homicide sur 10 dans la famille contre des enfants et des jeunes, la police n’a pas été en mesure de déclarer un mobile apparent (9 %) (tableau 4.6).

Le taux de violence familiale commise envers les enfants et les jeunes et déclarée par la police est le plus élevé en Saskatchewan et le plus faible en Ontario

  • Comme c’était le cas pour la criminalité en général (Boyce, 2015), en 2014, les taux de violence familiale à l’endroit des enfants et des jeunes avaient tendance à être plus élevés dans les territoires que dans les provinces. Ainsi, le Nunavut (1 420,5 pour 100 000 enfants et jeunes) a enregistré le plus fort taux de violence familiale à l’endroit des enfants et des jeunes déclarée par la police, suivi des Territoires du Nord-Ouest (932,4) et du Yukon (886,3). Parmi les provinces, le taux de violence familiale à l’endroit des enfants et des jeunes déclarée par la police était le plus élevé en Saskatchewan (461,4) et le plus faible en Ontario (161,8) (tableau 4.7).
  • Parmi les régions métropolitaines de recensement (RMR), Saguenay a affiché le plus haut taux (531,5) de violence familiale envers les enfants et les jeunes déclarée par la police en 2014, alors qu’Ottawa et Guelph ont enregistré les taux les plus bas (95,9 et 96,4 respectivement). En général, le taux de violence familiale envers les enfants et les jeunes déclarée par la police dans les régions autres que les RMR (369,3) était deux fois plus élevé que le taux global enregistré dans les RMR (181,7) (tableau 4.8).

Les filles sont plus à risque d’être victimes d’agression sexuelle aux mains d’un membre de la famille

  • De 2009 à 2014, les voies de fait simples (niveau 1) sont demeurées la forme de violence familiale commise envers les enfants et les jeunes la plus souvent déclarée, malgré une diminution de 16 % du taux observé au cours de cette période. Le taux de voies de fait simples commises envers les filles victimes de violence familiale a reculé de près de 19 % de 2009 à 2014, alors que le taux observé chez les garçons a diminué de 13 % (tableau 4.9).
  • Dans l’ensemble, le taux d’agressions sexuelles de niveau 1 contre des enfants et des jeunes, qui représentaient presque toutes les agressions sexuelles dans la famille commises contre des enfants et des jeunes (99 %), a diminué de 14 % par rapport à 2009. De 2009 à 2014, les taux d’agressions sexuelles de niveau 1 contre des enfants et des jeunes étaient constamment plus de quatre fois plus élevés chez les victimes de sexe féminin (tableau 4.9).

Fin de l'encadré

Tableaux de données détaillés

Tableau 4.1 Victimes d’un crime violent déclaré par la police, selon le type d'infraction et le groupe d’âge de la victime, Canada, 2014
Tableau 4.2 Enfants et jeunes de 0 à 17 ans qui ont été victimes de violence familiale, affaires déclarées par la police, selon le groupe d’âge de la victime et le lien de l’auteur présumé avec celle-ci, Canada, 2014
Tableau 4.3 Enfants et jeunes de 0 à 17 ans qui ont été victimes de violence familiale, affaires déclarées par la police, selon le sexe et l'âge de la victime, Canada, 2014
Tableau 4.4 Enfants et jeunes de 0 à 17 ans qui ont été victimes de violence familiale, affaires déclarées par la police, selon le sexe de la victime et le type d’infraction, Canada, 2014
Tableau 4.5 Enfants et jeunes de 0 à 17 ans qui ont été victimes d’un homicide dans la famille, selon le groupe d’âge de la victime et la cause du décès, Canada, 2004 à 2014
Tableau 4.6 Enfants et jeunes de 0 à 17 ans qui ont été victimes d’un homicide dans la famille, selon le groupe d’âge de la victime et le mobile, Canada, 2004 à 2014
Tableau 4.7 Enfants et jeunes de 0 à 17 ans qui ont été victimes de violence familiale, affaires déclarées par la police, selon le sexe de la victime et la province ou le territoire, 2014
Tableau 4.8 Enfants et jeunes de 0 à 17 ans qui ont été victimes de violence familiale, affaires déclarées par la police, selon le sexe de la victime et la région métropolitaine de recensement, 2014
Tableau 4.9 Enfants et jeunes de 0 à 17 ans qui ont été victimes de certaines infractions avec violence dans la famille, affaires déclarées par la police, selon le sexe de la victime, 2009 à 2014

Références

BOYCE, Jillian. 2015. « Statistiques sur les crimes déclarés par la police au Canada, 2014 », Juristat, produit no 85-002-X au catalogue de Statistique Canada.

Organisation mondiale de la Santé. 2014. « La maltraitance des enfants », Aide-mémoire no 150 (site consulté le 19 novembre 2015).

PERREAULT, Samuel. 2015. « La victimisation criminelle au Canada, 2014 », Juristat, produit no 85-002-X au catalogue de Statistique Canada.

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