Rapports sur la santé
Dispositifs lasers portatifs : niveaux d’utilisation et d’exposition et blessures associées
par Sami S. Qutob, James P. McNamee, John Than et Orly Brion
DOI: https://www.doi.org/10.25318/82-003-x202100800002-fra
Les lasers portatifs comprennent les dispositifs comme les pointeurs laser, qui sont largement disponibles à des fins de démonstration et de divertissement et dont le but est de diriger l’attention vers un objet ou un endroit. Ces dispositifs sont souvent alimentés par des piles, transportables, portatifs et disponibles en différentes longueurs d’onde d’émission et puissances de sortie (p. ex. couleur et intensité). Dans le cadre de cette étude, les dispositifs laser portatifs comprennent les pointeurs pour les présentations, les jeux laser, les jouets à laser ou les gadgets au laser, les torches ou les lampes de poche laser, ainsi que les lasers de recherche et sauvetage. Les lasers portatifs et les pointeurs laser sont de plus en plus offerts sur le marché canadien, et sont donc plus accessibles au public. Des lasers portatifs de grande puissance destinés aux consommateurs ont été définis comme un danger pour la santé et la sécurité humainesNote 1. Santé Canada a entrepris de faire la surveillance des blessures causées par les produits laser portatifs afin d’évaluer l’efficacité des approches actuelles en matière de gestion des risques pour la santé liés à ces produits.
La Commission électrotechnique internationale (CEI) a publié la norme IEC 60825-1, qui propose un système de classification des lasers et des produits laser. Dans cette norme, les produits laser sont catégorisés dans l’ordre suivant (du risque potentiel le plus faible au potentiel le plus élevé), selon leurs propriétés de rayonnement accessibles : classes 1, 1M, 2, 2M, 3R, 3B et 4Note 2Note 3. L’exposition aux faisceaux laser provenant de dispositifs de classe 3R ou inférieure représente un risque minime pour les yeux, car il existe des marges de sécurité adéquates garantissant que le rayonnement transmis à la rétine demeure inférieur au seuil de nuisance dans le temps de réponse instinctive (notamment le réflexe de clignement) suivant l’exposition à la lumière vive. Toutefois, l’exposition à un faisceau laser très puissant (classes 3B et 4), direct ou réfléchi, peut provoquer des lésions oculaires ou cutanées graves (classe 4) et peut également présenter un risque de brûlure. Dans le but d’aider à protéger la santé et la sécurité des Canadiens à mesure que l’offre de dispositifs laser portatifs destinés aux consommateurs augmente au Canada, l’importation, la vente et la fabrication de lasers portatifs qui émettent des rayonnements laser accessibles de classe 3B ou 4, ainsi que la publicité les concernant, sont interdites au Canada depuis 2012 en vertu de la Loi canadienne sur la sécurité des produits de consommationNote 4. Il existe un besoin permanent de renseignements sur le niveau d’utilisation de lasers portatifs ou d’exposition à ces dispositifs chez les Canadiens, ainsi que sur la prévalence des blessures causées par de tels dispositifs, afin de s’assurer que tout risque lié à ces produits soit correctement évalué et que des stratégies appropriées de gestion des risques soient mises en œuvre.
En 2014, Santé Canada a prévu des questions dans l’Enquête sur la santé dans les collectivités canadiennes (ESCC) afin d’examiner le niveau d’utilisation de divers produits laser et des blessures qui en résultent. L’ESCC a révélé que 1,1 %E des répondants ont déclaré avoir été blessés par un dispositif laser. La majorité des blessures concernaient les yeux, souvent en raison de l’exposition à la lumière laser d’un dispositif utilisé par une autre personne. Les traitements esthétiques au laser sont la source de blessures la plus fréquente, suivies des pointeurs laser et de l’utilisation de lasers pour le divertissement (p. ex. jouet, jeu, projecteur de jeu de lumière)Note 5.
La présente étude est une analyse de suivi des résultats de l’ESCC de 2019. Contrairement à l’ESCC de 2014, les outils d’arpentage par laser et les dispositifs laser utilisés pour les traitements esthétiques ne sont pas compris dans la présente étude. L’ESCC de 2019 était axée sur la prévalence des blessures causées par l’utilisation d’un dispositif laser portatif ou par l’exposition à la lumière provenant d’un dispositif au cours des 12 mois précédents pour les appareils suivants : pointeurs laser portatifs, jeux laser, jouets à laser ou gadgets au laser, torches laser ou lampes de poche laser et lasers portatifs de recherche et sauvetage. À l’instar de l’étude précédente, les données de l’ESCC de 2019 ont permis de mettre en lumière le niveau d’utilisation de dispositifs laser ou d’exposition à un faisceau laser ainsi que la fréquence et le type de blessure subie, et de déterminer si la blessure était le résultat d’une utilisation personnelle ou par une autre personne. L’étude a également permis de déterminer le type de dispositif laser portatif utilisé et l’endroit où il a été obtenu. Ces renseignements permettront d’enrichir la base de connaissances sur les blessures relatives aux lasers portatifs, et fourniront des renseignements utiles pour soutenir l’évaluation des risques et appuyer les conseils et les recommandations qui reposent sur des données probantes quant au besoin éventuel d’élaborer d’autres stratégies de gestion des risques.
Données et méthodes
Sources de données
L’Enquête sur la santé dans les collectivités canadiennes (ESCC) de Statistique Canada recueille auprès de la population canadienne des données sur la santé qui seront utilisées aux échelons national, provincial et régional. Les données analysées dans cette étude proviennent de la composante de réponse rapide de l’ESCC sur l’utilisation d’un laser portatif, dont les données ont été recueillies de mars à juin 2019. On a posé aux répondants des questions sur leur utilisation d’un dispositif laser portatif ou l’exposition à la lumière d’un tel dispositif au cours des 12 derniers mois.
Le questionnaire de l’ESCC a été soumis directement aux répondants au moyen d’interviews téléphoniques assistées par ordinateur. Le module de réponse rapide de l’ESCC vise la population à domicile âgée de 12 ans et plus dans toutes les provinces canadiennes, à l’exclusion des trois territoires. L’enquête a également exclu les personnes vivant dans les réserves et dans d’autres communautés autochtones dans les provinces, les membres à temps plein des Forces canadiennes, les résidents d’établissements institutionnels ainsi que les résidents des régions sociosanitaires du Nunavik et des Terres-Cries-de-la-Baie-James au Québec. Ensemble, ces exclusions représentent moins de 3 % de la population canadienne âgée de 12 ans et plus.
Dans l’ensemble, 22 527 ménages faisaient partie du champ de l’enquête pour le module sur l’utilisation d’un laser portatif de l’ESCC de 2019, et 12 397 personnes ont répondu à l’enquête, ce qui correspond à un taux de réponse de 55,0 %. Une description détaillée de la méthodologie de l’ESCC et des sources utilisées se trouve sur le site Web de Statistique Canada, à l’adresse Enquête sur la santé dans les collectivités canadiennes - Composante annuelle (ESCC).
Mesures
À l’instar de l’ESCC de 2014, le module sur l’utilisation des lasers portatifs de l’ESCC de 2019 comprenait des questions demandant aux répondants s’ils ont utilisé ou s’ils ont été exposés à un dispositif laser portatif (à l’exclusion des outils d’arpentage par laser et des dispositifs laser utilisés pour des interventions esthétiques ou médicales) au cours des 12 derniers mois. On a ensuite demandé aux répondants qui ont répondu par l’affirmative d’indiquer le type de dispositif laser portatif qu’ils ont utilisé ou auquel ils ont été exposés. On a présenté aux répondants les options de laser portatif suivantes :
- pointeur laser pour les présentations, jouets pour animal domestique, stylo ou stylet;
- laser pour le divertissement, notamment les jeux laser, les jouets à laser ou les gadgets au laser;
- torche ou lampe de poche laser;
- laser de recherche et sauvetage.
On a ensuite demandé aux répondants qui ont déclaré avoir utilisé ou avoir été exposés à un dispositif laser portatif de préciser toute blessure ou tout malaise dont ils ont été victimes, et d’indiquer si des soins administrés par un professionnel de la santé ont été nécessaires. On leur a demandé si la blessure était de nature oculaire ou cutanée, ainsi que la durée du malaise ou de la blessure. Les répondants ont été invités à fournir des réponses sur la blessure ou le malaise le plus grave dont ils ont été victimes.
Finalement, des questions ont été posées pour aider à déterminer où les répondants se sont procuré leur dispositif laser portatif (p. ex. acheté au Canada ou à l’extérieur du pays dans un magasin de détail, en ligne ou ailleurs, ou non acheté), et si ces derniers, ou quelqu’un d’autre, avaient intentionnellement dirigé la lumière d’un laser portatif vers leurs yeux ou leur peau. Toutes les questions sont accessibles sur le site Web de Statistique Canada Enquête sur la santé dans les collectivités canadiennes (ESCC) réponse rapide Avril - Juin 2019 - Utilisation de lasers portatifs.
Analyse statistique
Les analyses reposaient sur un échantillon de 12 397 répondants (5 665 hommes et 6 732 femmes), âgés de 12 ans et plus, et vivant dans les 10 provinces canadiennes. Toutes les analyses ont été pondérées afin qu’elles soient représentatives de la population canadienne, et elles ont été réalisées à l’aide du système d’analyse statistique (SAS) EG 7.1 (SAS Institute Inc., États-Unis). La procédure SURVEYFREQ du SAS a servi à calculer les pourcentages et les coefficients de variation (c.v.). Les estimations ayant un c.v. dans la fourchette de 16,6 % à 33,3 % ont été marquées d’un E et leur interprétation doit se faire avec prudence; les estimations ayant un c.v. supérieur à 33,3 % ont été supprimées (indication F) en raison de la très grande variabilité de l’échantillonnage. Pour la vérification des écarts de la fréquence entre les groupes sociodémographiques, la procédure SURVEYLOGISTIC a servi à calculer les rapports de cotes et les intervalles de confiance (IC) correspondants, et une correction de Bonferroni a été appliquée pour les comparaisons par paire. Les deux procédures (SURVEYFREQ et SURVEYLOGISTIC) tenaient compte des poids d’échantillonnage et la variance était estimée à l’aide de poids bootstrap. Les différences dans les estimations provenant de différents cycles de l’ESCC (c.-à-d. 2019 par rapport à 2014) ont été mises à l’essai au moyen d’un test Z bilatéral. L’énoncé ESTIMATE de la procédure SURVEYLOGISTIC a servi à vérifier la présence d’une tendance linéaire dans le logarithme du risque de l’utilisation d’un dispositif laser portatif ou de l’exposition à son faisceau laser entre les niveaux de revenu. Il est à noter que, dans l’ensemble du texte, sauf indication contraire, toutes les valeurs entre parenthèses représentent des IC à 95 %. S’il n’y a aucune indication à cet effet dans le texte, les IC à 95 % sont fournis dans les tableaux correspondants.
Résultats
Environ 12,4 % des Canadiens âgés de 12 ans et plus (un nombre estimé à 3 932 067 [IC à 95 % : de 3 606 950 à 4 257 184]) ont déclaré avoir utilisé un dispositif laser portatif ou avoir été exposés à la lumière laser au cours des 12 mois précédents (tableau 1). Une différence statistiquement significative a été constatée entre les hommes et les femmes; la probabilité d’utiliser ou d’être exposé à un dispositif laser portatif étant 1,31 fois plus élevée chez les hommes. Les hommes représentaient 55,3 % (de 50,6 % à 60,0 %) des personnes qui ont utilisé ou ont été exposés aux lasers portatifs. Un niveau significativement plus élevé d’exposition au faisceau laser a été déclaré chez les personnes de moins de 45 ans comparativement à celles de 45 ans et plus (tableau 1). Parmi les utilisateurs de dispositif laser portatif et ceux qui avaient été exposés à son faisceau laser, les hommes et les femmes de moins de 35 ans étaient représentés de manière équivalente : 29,9 % (de 26,0 % à 33,7 %) contre 24,9 % (de 21,1 % à 28,6 %). La proportion de jeunes (âgés de 12 à 17 ans) figurant parmi les utilisateurs ou les personnes exposées s’élevait à 17,7 % (de 15,4 % à 20,0 %).
Aucune différence significative n’a été observée dans la cote exprimant la possibilité d’utiliser un dispositif laser portatif par rapport au niveau de scolarité (tableau 1). Le revenu du ménage était un facteur associé à l’utilisation de lasers portatifs ou à l’exposition à la lumière de ces dispositifs, puisqu’une tendance positive statistiquement significative (p < 0,0001) a été observée à tous les niveaux de revenu. Les cotes étaient significativement plus éle`vées pour les personnes dans les tranches de revenu de 100 000 $ et plus comparativement à celles dans la tranche inférieure de revenu de 39 999 $ ou moins (tableau 1). Des estimations pondérées en pourcentage ont été établies pour chaque groupe d’âge au sein de chaque niveau de revenu. Parmi les groupes d’âge, ce sont les personnes âgées de 18 à 34 ans qui présentaient le niveau d’utilisation le plus élevé de toutes les catégories de revenu (36,5 % [de 5,1 % à 46,4 %] pour la tranche de revenu de 70 000 $ à 99 999 $, 37,3 % [de 4,2 % à 45,5 %] pour la tranche de revenu de 150 000 $ ou plus, 40,1 % [de 5,2 % à 50,3 %] pour la tranche de revenu de 70 000 $ à 99 999 $, et 50,7 % [de 5,5 % à 61,5 %] pour la tranche de revenu de 40 000 $ à 69 999 $), sauf dans la tranche de revenu de 100 000 $ à 149 999 $, qui était représentée par les personnes de 45 ans et plus (30,1 % [de 4,6 % à 39,3 %]). Le niveau d’utilisation chez les personnes âgées de 12 à 17 ans était le plus élevé dans les tranches de revenu de 39 999 $ ou moins (24,1 %E [de 4,5 % à 32,9 %]) et de 150 000 $ ou plus (19,7 % [de 2,5 % à 24,7 %]). Lors de l’examen de l’appartenance ethnique, le niveau d’utilisation ou d’exposition au faisceau était significativement plus élevé chez les personnes de race blanche (13,3 %; rapport de cotes : 1,44 [de 1,13 à 1,82]) que chez celles qui ne sont pas de race blanche. La fréquence de Canadiens qui ont été exposés à des dispositifs laser portatifs ou qui les ont utilisés était considérablement plus faible (rapport de cotes : 0,67 [de 0,48 à 0,93]) au Québec que dans la province de référence qu’est l’Ontario.
Au cours des 12 derniers mois, on a demandé aux utilisateurs de dispositifs laser portatifs, ou à ceux qui ont été exposés à la lumière provenant de ces dispositifs, quels types de dispositifs laser portatifs ils ont utilisés ou auxquels ils ont été exposés (tableau 2). Les types de dispositifs les plus fréquemment déclarés sont, en ordre décroissant, les pointeurs laser portatifs (69,4 %), les jeux laser, les jouets à laser ou gadgets au laser (38,5 %), les torches laser ou les lampes de poche laser (8,2 %) et les lasers de recherche et sauvetage (0,8 %E) (tableau 2).
Des différences entre les sexes ont été observées de façon uniforme pour tous les types de dispositifs laser portatifs, les hommes y étant plus exposés et les utilisant davantage (tableau 2), malgré le fait que les hommes étaient légèrement moins représentés que les femmes dans l’enquête (5 665 hommes et 6 732 femmes). On a estimé que parmi les Canadiens qui ont utilisé des pointeurs laser portatifs ou qui y ont été exposés, 55,8 % étaient des hommes et 44,2 % étaient des femmes, ce qui représente une différence significative entre les sexes (rapport de cotes : 1,32 [de 1,04 à 1,69]). Pour les torches ou lampes de poche laser, l’utilisation était également plus élevée chez les hommes que chez les femmes (rapport de cotes : 1,97 [de 1,03 à 3,76]). Toutefois, la différence n’était pas significative (rapport de cotes : 1,33 [de 0,99 à 1,78]) en ce qui concerne le niveau d’utilisation de jeux laser, de jouets à laser ou de gadgets au laser, ou d’exposition aux faisceaux laser de ces dispositifs, bien qu’elle soit également plus élevée chez les hommes que chez les femmes (56,2 % contre 43,8 %). L’utilisation déclarée de lasers de recherche et sauvetage était trop faible pour évaluer les différences entre les sexes.
Le malaise éprouvé ou la blessure subie au cours des 12 derniers mois a été évalué chez les Canadiens qui ont déclaré avoir utilisé des dispositifs laser portatifs ou y avoir été exposés. Les blessures et les malaises comprenaient ceux liés à la peau (p. ex. brûlures, changements de pigmentation, cicatrices) et aux yeux (p. ex. objets flottants visibles, aveuglement par l’éclair, perte de vision). Moins de 1 %E des utilisateurs ont déclaré avoir éprouvé un malaise ou subi une blessure (tableau 3). Le nombre de blessures déclarées était trop faible pour évaluer la durée de la blessure ou du malaise, l’occurrence d’une perte de vision partielle ou complète ou la nécessité de soins administrés par un professionnel de la santé. Parmi les utilisateurs de dispositifs laser portatifs et ceux qui ont été exposés à la lumière de ces dispositifs, 27,9 % ont indiqué qu’eux-mêmes, ou quelqu’un d’autre a dirigé intentionnellement le faisceau laser d’un tel dispositif vers leurs yeux ou leur peau (tableau 3).
Enfin, on a demandé aux utilisateurs de dispositifs laser portatifs ou ceux qui ont été exposés à ces dispositifs où ils en ont fait l’acquisition. Une grande proportion d’entre eux a déclaré s’être procuré les dispositifs dans un magasin de détail au Canada (40,5 %), puis grâce à l’achat en ligne (3,8 %E) (tableau 3). Toutefois, la majorité des répondants ont indiqué ne pas avoir acheté le dispositif qu’ils ont utilisé ou auquel ils ont été exposés (56,3 %).
Discussion
En 2014, Santé Canada a mené une enquête sur le niveau d’utilisation de dispositifs laser ou d’exposition aux faisceaux laser émis par ces dispositifs au cours des 12 derniers mois, dans le cadre de l’Enquête sur la santé dans les collectivités canadiennes (ESCC) représentative de la population nationale. Les questions de l’ESCC visaient à combler une lacune dans les connaissances et à obtenir des renseignements utiles sur l’utilisation, par les Canadiens, de dispositifs laser ou sur l’exposition à la lumière émise par de tels dispositifs, ainsi que sur le nombre de blessures qui y sont associées, sur lesquels reposeront les décisions en matière de gestion des risques liés à ces dispositifs.
Selon l’enquête de 2014, on estime que 14,5 millions (48,1 %) de Canadiens âgés de 12 ans et plus ont utilisé ou ont été exposés à des faisceaux provenant de dispositifs laser au cours des 12 mois précédents. Environ 1,1 %E (de 0,7 % à 1,4 %) d’entre eux ont subi une forme quelconque de malaise ou de blessure. Ces affections étaient le plus souvent associées à des traitements esthétiques par laser et à des lasers portatifs utilisés à des fins de divertissement (p. ex. jouet, jeu, projecteur de jeu de lumière), les pointeurs laser portatifs représentant 26,3 %E (de 11,7 % à 40,9 %) de tous les répondants blessés. La présente enquête, qui est fondée sur les données de l’ESCC de 2019, porte principalement sur l’utilisation de dispositifs laser portatifs ou sur l’exposition au rayonnement de ces dispositifsNote 5.
Les résultats de la recherche de l’enquête de 2014 ont révélé que les pointeurs laser (11,1 %) et les lasers utilisés à des fins de divertissement (9,7 %) représentaient la majorité des produits laser portatifs (à l’exclusion des lasers médicaux et esthétiques) que les répondants ont déclaré avoir utilisés ou auxquels ils ont été exposésNote 5. Bien que la présente étude exclue l’utilisation de laser à des fins esthétiques et médicales ou l’exposition à la lumière d’un dispositif laser (ce qui rend la comparaison directe entre les études plus difficile), les pointeurs laser représentaient tout de même la majorité (69,4 %) de tous les lasers portatifs que les répondants ont utilisés ou auxquels ils ont été exposés. Une tendance positive importante (p < 0,0001) a été observée en ce qui concerne la cote exprimant la possibilité d’utilisation de lasers portatifs ou d’exposition à ces dispositifs selon le niveau de revenu : plus le revenu du ménage est élevé, plus la cote exprimant la possibilité d’utiliser ou d’être exposé à ces dispositifs est grande. L’utilisation accrue de dispositifs laser portatifs ou l’exposition à la lumière émise par ces dispositifs chez les personnes ayant un revenu plus élevé peut être liée à l’abordabilité de ces dispositifs. On peut supposer qu’avec un revenu disponible du ménage plus élevé, la possibilité que des jeunes se retrouvent en possession d’un laser portatif serait plus élevée. Toutefois, la proportion des personnes âgées de 12 à 17 ans était représentée de façon égale dans les tranches de revenu du ménage la plus faible et la plus élevée. Cela pourrait être attribuable au fait que les coûts de fabrication de ces dispositifs sont de moins en moins élevés, ce qui les rend plus abordables pour un nombre croissant de CanadiensNote 6Note 7. Cette situation est préoccupante, car une augmentation de la proportion de dispositifs laser portatifs peut représenter un risque accru pour la santé des Canadiens si des produits laser de grande puissance sont mis en vente. Pour contribuer à protéger la santé des consommateurs contre les risques que peuvent poser les produits laser de grande puissance, il a été interdit au Canada d’importer, de vendre, de fabriquer et de faire la publicité de ces produitsNote 4.
En 2014, le niveau d’utilisation de dispositifs laser ou d’exposition au faisceau laser dans certaines catégories de dispositifs laser, comme les lasers aux fins de divertissement ou de mesure, présentait des différences significatives entre les sexes : les hommes déclaraient une fréquence d’utilisation plus élevée que les femmesNote 8. De ce fait, la présente étude a permis de déterminer que les hommes représentaient la majorité des utilisateurs de dispositifs laser portatifs. On a également constaté que l’âge était un facteur dans l’utilisation de tous les types de lasers portatifs ou de l’exposition à la lumière de ces dispositifs, et plus particulièrement des pointeurs laser. Pour tous les lasers portatifs, le niveau d’utilisation chez les adolescents (âgés de 12 à 17 ans) était plus élevé que dans tous les autres groupes d’âge (tableau 1). Lors de l’examen des pointeurs laser seulement, l’utilisation et l’exposition chez les adolescents (15,4 % [de 12,2 % à 18,6 %]) étaient plus élevées que chez les 35 ans et plus. Dans l’enquête de 2014, l’utilisation de pointeurs laser et l’exposition à ces dispositifs (21,8 % [de 18,9 % à 24,8 %]) étaient également les plus élevées chez les adolescents. Dans les deux enquêtes, les personnes appartenant au groupe d’âge des 18 à 34 ans étaient les principaux utilisateurs de dispositifs laser portatifs, et de pointeurs laser en particulier, et les plus exposées à la lumière de ceux-ci (2014; 40,3 % [de 37,1 % à 43,4 %], par rapport à 2019; 41,8 % [de 36,8 % à 46,8 %]).
Lors de l’évaluation de la prévalence des blessures causées par un laser portatif, seulement 0,7 %E des utilisateurs qui font partie de la présente étude ont déclaré avoir éprouvé un malaise ou subi une blessure. La faible prévalence de malaises ou de blessures causés par un laser a rendu impossible l’analyse des différences liées à l’âge et au sexe. Toutefois, une enquête menée en 2018 auprès de spécialistes canadiens de la santé oculaire a révélé que le nombre de blessures aux yeux causées par un laser déclarées par les répondants a augmenté chaque année entre 2013 et 2017. Les résultats de l’enquête ont révélé que la prévalence des blessures était plus élevée chez les hommes (82,5 %), et la prévalence des blessures aux yeux causées par les lasers portatifs chez les enfants (âgés de 2 à 14 ans) et les jeunes adultes (âgés de 15 à 29 ans) était surreprésentée par rapport à la répartition de la population canadienneNote 8. Cette constatation est compatible avec de nombreux cas publiés de blessures aux yeux causées par un laser chez les jeunes hommes et les enfantsNote 2Note 7Note 9Note 10Note 11Note 12Note 13Note 14Note 15Note 16Note 17Note 18Note 19Note 20Note 21Note 22Note 23Note 24Note 25Note 26. Toutefois, la prévalence des blessures causées par un laser portatif peut être sous-représentée, puisque la plupart des cas peuvent avoir été diagnostiqués par erreur comme étant une maladie oculaire, ou être attribuable à l’absence d’antécédents d’exposition, particulièrement chez les enfants. Heureusement, de nouvelles méthodes de diagnostic des dommages rétiniens dus au laser peuvent montrer la véritable prévalence des dommages, en permettant de distinguer les blessures rétiniennes causées par un laser des autres troubles rétiniensNote 27. Pris dans leur ensemble, ces résultats donnent à penser que les jeunes hommes canadiens, en particulier, peuvent présenter un risque plus élevé de blessure causée par des dispositifs laser portatifs.
Limites
Il existe plusieurs limites dont il faut tenir compte lors de l’interprétation des résultats de la présente étude. L’une des limites de l’étude est que, bien que celle-ci fournisse une liste des différents types de dispositifs laser portatifs disponibles, la catégorisation des dispositifs portatifs par les répondants dépend de leur connaissance du produit et de l’éventuelle publicité mensongère du produit en tant que dispositif laser. Par exemple, un dispositif annoncé comme une torche ou une lampe de poche « laser » peut contenir une diode électroluminescente plutôt qu’une diode laser. Toutefois, les répondants ont pu demander à l’intervieweur de préciser ce qui est considéré comme un dispositif laser portatif. Il est difficile de faire des comparaisons directes entre les données de l’ESCC de 2014 et de 2019 en raison d’un changement de priorité : en 2014, le but de l’enquête était de documenter l’utilisation des dispositifs laser et l’exposition aux faisceaux laser de tels dispositifs (y compris pour les interventions esthétiques), tandis qu’en 2019, l’enquête se penchait seulement sur les dispositifs laser portatifs. De plus, en raison du remaniement de l’ESCC en 2015, les stratégies de répartition des échantillons ont changé, notamment la sélection de nouvelles périodes de référence, les répartitions de l’échantillon et les méthodologies de pondération et d’estimationNote 28. Comme dans l’étude de 2014, les malaises et les blessures ont été classés dans la même catégorie, ce qui ne permet pas de déterminer le type particulier de blessure subie par chaque type de tissu (p. ex. perte de vision) ou par la peau (p. ex. brûlures, changement de pigmentation, cicatrices). Pour contourner cette limite, des questions ont été posées sur les blessures aux yeux ou à la peau qui ont nécessité un traitement par un professionnel de la santé. Toutefois, les cas déclarés de malaise et de blessure doivent être interprétés avec prudence en raison du petit nombre de réponses. La force de cette étude réside dans son grand échantillon, soit 12 397 répondants, ce qui représente un taux de réponse global de 55,0 %, et qu’elle fournit des données représentatives à l’échelle nationale.
Conclusion
On estime que près de 4 millions de Canadiens ont utilisé ou ont été exposés à des dispositifs laser portatifs, la majorité de ces dispositifs étant des pointeurs laser. On a constaté que les jeunes Canadiens (âgés de 12 à 17 ans) présentaient le niveau d’utilisation le plus élevé de dispositifs laser portatifs ou d’exposition au rayonnement de ces dispositifs. Parmi les utilisateurs, les hommes étaient significativement plus susceptibles que les femmes d’utiliser tous les types de lasers portatifs, à l’exception des jeux laser, des jouets à laser ou des gadgets au laser, puisque les différences n’étaient pas statistiquement significatives. On a estimé qu’environ le quart des Canadiens qui ont utilisé des lasers portatifs ou qui ont été exposés à de tels dispositifs ont reçu un faisceau laser délibérément pointé vers leurs yeux ou leur peau par une autre personne ou pendant que le dispositif était sous leur contrôle. Cette fréquence élevée de mauvaise utilisation est préoccupante, car l’exposition intentionnelle et prolongée aux faisceaux laser, par soi-même ou par une autre personne, augmente considérablement le risque de blessure, en contournant les réponses instinctives normales Cela mène au dépassement des limites de dose de rayonnement, surtout si les utilisateurs ont accès à des dispositifs laser de grande puissance. Cependant, les utilisateurs ont rarement déclaré un malaise ou une blessure aux yeux ou à la peau causés par les faisceaux de dispositifs laser portatifs. La plupart des dispositifs laser portatifs n’ont pas été achetés, mais plutôt obtenus par d’autres moyens (p. ex. en cadeau) ou, s’ils ont été achetés, ils ont été acquis dans un magasin de détail au Canada. Une petite fraction des utilisateurs a indiqué avoir acheté ces dispositifs en ligne. Bien que le nombre de répondants ayant déclaré avoir été blessés par des dispositifs laser portatifs était faible, une surveillance continue semble prudente afin d’évaluer l’efficacité des approches actuelles en matière de gestion des risques pour ces produits laser.
- Date de modification :