Rapports sur la santé
Comportements sexuels et utilisation du condom et d'autres méthodes de contraception chez les jeunes âgés de 15 à 24 ans au Canada

par Michelle Rotermann et Alexander McKay

Date de diffusion : le 16 septembre 2020

DOI : https://www.doi.org/10.25318/82-003-x202000900001-fra

Les comportements sexuels, l’utilisation du condom et la prévention des grossesses non désirées et des infections transmises sexuellement (ITS) sont d’importants indicateurs de la santé sexuelle et génésique. Les données nationales sur ces indicateurs peuvent aider les secteurs de la santé publique et de l’éducation dans la planification et la mise en œuvre de programmes efficaces pour promouvoir la santé sexuelle. Les données sur l’utilisation du condom présentent un intérêt particulier, car l’utilisation correcte et systématique du condom permet de réduire le risque de transmettre les ITSNote 1 et représente une méthode de contraception efficaceNote 2. Des renseignements sur les raisons expliquant la non-utilisation du condom ou d’autres contraceptifs peuvent aider les gouvernements et les organismes à élaborer des politiques et des initiatives qui promeuvent leur utilisation. Les taux déclarés d’ITS à déclaration obligatoire ont considérablement augmenté depuis 2001, ces infections touchant de façon disproportionnée les jeunes de moins de 30 ansNote 3, et le nombre de grossesses non désirées est estimé à 180 700 chaque année au CanadaNote 4, ce qui souligne le besoin de données liées à la santé sexuelle. Les données de l’Enquête sur la santé dans les collectivités canadiennes (ESCC) de 2015-2016 ont été utilisées pour examiner les taux d’activité sexuelle, le nombre de partenaires sexuels, l’utilisation du condom ou d’autres contraceptifs et les raisons expliquant la non-utilisation du condom chez les jeunes âgés de 15 à 24 ans qui étaient actifs sexuellement au moment de l’enquête.

Méthodes

Sources de données

L’Enquête sur la santé dans les collectivités canadiennes (ESCC) permet de recueillir des renseignements sur l’état de santé, l’utilisation des services de santé et les déterminants de la santé au sein de la population canadienne âgée de 12 ans et plus vivant dans les provinces et les territoiresNote 5Note 6. Sont exclus de l’étude les personnes vivant dans les réserves et dans d’autres établissements autochtones, les personnes vivant dans deux régions sociosanitaires dans le nord du Québec, les membres à temps plein des Forces canadiennes, la population vivant en établissement et les jeunes âgés de 12 à 17 ans vivant en foyer d’accueil. Ces groupes représentent environ 3 % de la population cibleNote 5Note 6.Des détails au sujet de l’ESCC, y compris les bases de sondage, la stratégie d’échantillonnage, la pondération et les questionnaires, sont présentés dans d’autres étudesNote 5Note 6.

Les données ont été recueillies de janvier 2015 à décembre 2016 au moyen d’interviews téléphoniques assistées par ordinateur et d’interviews sur place. La plupart (82 %) des interviews ont été menées par téléphone. Le taux de réponse global tous âges confondus pour 2015-2016 a été de 59,5 %, ce qui correspond à un échantillon final de 110 095 répondantsNote 5Note 6. Les échantillons utilisés aux fins des différentes analyses présentées dans cet article comprenaient jusqu’à 11 330 répondants âgés de 15 à 24 ans, qui ont répondu à l’ESCC par autodéclaration. Des renseignements sur l’admissibilité aux questions et les tailles d’échantillon correspondantes pour chaque analyse sont fournis dans les tableaux de données correspondants.

Définitions

Le pourcentage des jeunes âgés de 15 à 24 ans qui avaient eu au moins une fois une relation sexuelle reposait sur la question suivante : « Avez-vous déjà eu des relations sexuelles? Veuillez inclure les relations sexuelles vaginales et anales. » La question suivante a été posée aux répondants qui ont déclaré avoir déjà eu des relations sexuelles au sujet de leurs partenaires sexuels au cours de la dernière année : « Au cours des 12 derniers mois, avez-vous eu des relations sexuelles avec une femme ou un homme? » On a demandé aux répondants qui ont déclaré avoir eu des relations sexuelles avec une femme ou un homme le nombre de partenaires différents (femmes ou hommes) qu’ils avaient eu. Les répondants étaient considérés comme ayant eu de multiples partenaires sexuels s’ils ont déclaré avoir eu plus d’un partenaire au cours de la dernière année, peu importe le sexe des partenaires.

Les estimations de l’utilisation du condom la dernière fois que le répondant avait eu une relation sexuelle reposaient sur la question suivante : « Est-ce que vous ou votre partenaire avez utilisé un condom la dernière fois que vous avez eu une relation sexuelle? » La question sur l’utilisation du condom n’a pas été posée aux répondantes qui ont déclaré avoir eu une relation sexuelle avec une femme la dernière fois. Le type de condom n’était pas précisé. On a demandé aux répondants qui ont déclaré ne pas avoir utilisé un condom la dernière fois qu’ils ont eu une relation sexuelle pour quelle raison ils ne l’avaient pas fait. Jusqu’à neuf raisons étaient fournies, et ont été ramenées à huit (le cas échéant, p. ex. on n’a pas posé de questions au sujet de la grossesse aux hommes qui avaient déclaré avoir eu une relation sexuelle avec un autre homme la dernière fois), et les répondants pouvaient choisir toutes les réponses qui s’appliquaient : 1) les répondants ou leur partenaire étaient enceintes ou essayaient de tomber enceintes (raisons distinctes au départ); 2) ils ne pensaient pas qu’il y avait un risque de grossesse; 3) ils ne pensaient pas qu’il y avait un risque d’infection transmissible sexuellement, y compris le virus de l’immunodéficience humaine (VIH); 4) ils étaient dans une relation monogame; 5) ils n’avaient pas de condom ou d’autre protection à ce moment-là; 6) ils avaient utilisé une autre méthode de protection; 7) ils n’aimaient pas les condoms; 8) autre.

Les estimations de l’utilisation d’autres contraceptifs reposaient sur la question suivante : « Quelles autres méthodes de protection votre partenaire ou vous-même avez utilisées la dernière fois que vous avez eu une relation sexuelle? » Jusqu’à 12 catégories étaient fournies et ont été ramenées à 6 groupes pour minimiser la suppression de cellules : 1) le contraceptif oral; 2) le retrait ou le coït interrompu; 3) un dispositif intra-utérin ou un contraceptif réversible à action prolongée; 4) d’autres méthodes hormonales, comme l’injection, l’implant, l’anneau ou le timbre vaginal contraceptif; 5) d’autres méthodes, comme la vasectomie ou la stérilisation tubaire, la mousse ou le gel spermicide, la méthode rythmique ou autre; 6) aucune (catégorie obtenue à partir d’autres réponses). Les répondants pouvaient choisir plus d’une méthode.

Les questions sur l’utilisation du condom et sur la raison expliquant la non-utilisation du condom ou d’une autre méthode de contraception n’ont pas été posées aux répondantes qui ont déclaré avoir eu une relation sexuelle avec une femme la dernière fois. Seuls les hommes ayant déclaré avoir eu une relation sexuelle avec une femme la dernière fois et seules les femmes ayant déclaré avoir eu une relation sexuelle avec un homme la dernière fois ont été inclus dans l’analyse des méthodes de contraception.

Les estimations de l’utilisation des contraceptifs d’urgence au cours de la dernière année chez les femmes âgées de 15 à 24 ans actives sexuellement qui ont déclaré avoir eu des relations sexuelles avec un partenaire masculin reposaient sur la question suivante : « Au cours des 12 derniers mois, avez-vous utilisé un contraceptif oral d’urgence? »

Le sexe du répondant a été évalué en demandant au répondant s’il était un homme ou une femme et en ne fournissant que ces deux catégories de réponse, mais les cycles subséquents de l’Enquête sur la santé dans les collectivités canadiennes incluent l’identité de genreNote 7.

L’orientation sexuelle a été évaluée en demandant aux répondants s’ils se considéraient comme hétérosexuels (décrit comme ayant des « relations sexuelles avec des personnes du sexe opposé »), lesbiennes ou gais (« relations sexuelles avec des personnes du même sexe ») ou bisexuels (« relations sexuelles avec des personnes des deux sexes »).

Technique d’analyse

Des fréquences pondérées et des tableaux croisés ont été calculés pour examiner, selon certaines caractéristiques, des estimations de l’activité sexuelle au moment de l’enquête, de l’utilisation du condom et d’autres contraceptifs (y compris l’utilisation d’un contraceptif d’urgence) et des raisons expliquant leur non-utilisation. Pour tenir compte des effets du plan de sondage, des coefficients de variation et des intervalles de confiance à 95 % ont été estimés au moyen de la méthode du bootstrapNote 8.Des tests t ont été utilisés pour calculer les différences entre les estimations de la prévalence, et les résultats au seuil de p < 0,05 ont été considérés comme étant significatifs sur le plan statistique. Afin de tenir compte de la sous-estimation des erreurs-types attribuable au plan de sondage complexe, des poids bootstrap ont été utilisés au moyen de la version 11.0 de SUDAAN exécutable en SASNote 8.

Résultats

Activité sexuelle

Dans l’Enquête sur la santé dans les collectivités canadiennes de 2015-2016, environ 2,2 millions de jeunes âgés de 15 à 24 ans au Canada (ou plus de la moitié, 54,1 %) ont déclaré avoir eu des relations sexuelles (vaginales ou anales) au cours des 12 derniers mois (tableau 1). Dans l’ensemble, 59,6 % d’entre eux ont déclaré avoir déjà eu des relations sexuelles, mais pour certains, ce n’était pas au cours des 12 derniers mois (données non présentées). Chez les jeunes âgés de 20 à 24 ans, 78,3 % ont déclaré avoir eu des relations sexuelles, une proportion supérieure aux pourcentages observés chez les jeunes âgés de 18 à 19 ans (57,6 %) et de 15 à 17 ans (23,3 %) (données non présentées).

La probabilité d’avoir eu des relations sexuelles au cours des 12 derniers mois augmentait aussi en fonction de l’âge (tableau 1). À l’âge de 20 à 24 ans, 71,5 % des jeunes ont déclaré avoir eu des relations sexuelles au cours des 12 derniers mois, comparativement à 52,4 % des jeunes âgés de 18 à 19 ans et à 20,6 % des jeunes âgés de 15 à 17 ans. Il était aussi plus courant d’être actif sexuellement au moment de l’enquête chez les hommes gais (71,3 %) que chez les hommes hétérosexuels (53,2 %). Chez les femmes, les pourcentages de celles qui ont déclaré être actives sexuellement étaient comparables, peu importe l’orientation sexuelle (55,5 % des femmes hétérosexuelles, 58,6 % des femmes lesbiennes et 62,3 % des femmes bisexuelles), ce qui équivaut à environ 55 femmes sur 100 qui étaient actives sexuellement.

Dans les provinces de l’Atlantique (61,2 % à 63,9 %) et au Québec (62,2 %), 6 jeunes sur 10 ont déclaré avoir eu des relations sexuelles au cours des 12 derniers mois, tandis qu’au Yukon (67,7 %) et dans les Territoires du Nord-Ouest (71,4 %), cette proportion passait à 7 jeunes sur 10. Ces estimations sont significativement supérieures à celles produites pour le reste du Canada (autres provinces et territoires combinés). En revanche, les jeunes du Manitoba (44,5 %) et de l’Ontario (50,1 %) étaient moins susceptibles d’avoir eu des relations sexuelles que les jeunes du reste du Canada.

Partenaires multiples

En 2015-2016, une proportion estimée à 37,1 % des jeunes âgés de 15 à 24 ans qui étaient actifs sexuellement au moment de l’enquête a déclaré avoir eu plus d’un partenaire au cours des 12 derniers mois (tableau 1). Il était plus fréquent chez les hommes que chez les femmes d’avoir eu de multiples partenaires sexuels (42,6 % comparativement à 31,4 %, respectivement). Chez les hommes, il était plus courant d’avoir eu des relations sexuelles avec plus d’un partenaire à un âge plus avancé. Par exemple, 45,0 % des hommes âgés de 20 à 24 ans ont déclaré avoir eu de multiples partenaires sexuels au cours de la dernière année, comparativement à 32,8 % des hommes âgés de 15 à 17 ans. Chez les femmes, le contraire était vrai. Les femmes plus jeunes étaient plus susceptibles de déclarer avoir eu de multiples partenaires sexuels au cours de la dernière année (p. ex. 36,7 % des femmes âgées de 15 à 17 ans comparativement à 29,2 % des femmes âgées de 20 à 24 ans). Plus des deux tiers (67,4 %) des hommes gais et près des trois quarts (72,5 %) des hommes bisexuels ont déclaré avoir eu des relations sexuelles avec plus d’un partenaire, une proportion significativement supérieure à l’estimation pour les hommes hétérosexuels (41,5 %). En revanche, le nombre de partenaires sexuels déclaré par les femmes hétérosexuelles et lesbiennes était comparable (30,4 % et 30,6 %, respectivement). Il était plus courant d’avoir eu de multiples partenaires chez les femmes qui s’identifiaient comme étant bisexuelles (47,5 %).

Utilisation du condom

Chez les jeunes âgés de 15 à 24 ans qui étaient actifs sexuellement au moment de l’enquête, 60,1 % ont déclaré avoir utilisé un condom la dernière fois qu’ils ont eu une relation sexuelle (tableau 2). Les hommes étaient plus susceptibles que les femmes d’avoir utilisé un condom (65,0 % comparativement à 54,9 %, respectivement). La probabilité d’avoir utilisé un condom diminuait également avec l’âge, passant de 79,9 % chez les jeunes âgés de 15 à 17 ans à 55,1 % chez les jeunes âgés de 20 à 24 ans. Aucune différence n’a été observée pour ce qui est de l’utilisation du condom selon l’orientation sexuelle. La prévalence de l’utilisation du condom était plus élevée en Ontario (67,0 %) et en Saskatchewan (70,2 %) que dans le reste du Canada, et elle était plus faible au Québec (48,0 %). L’utilisation du condom était aussi est plus courante chez les jeunes qui avaient eu de multiples partenaires au cours des 12 derniers mois (66,3 %) qu’elle l’était chez les jeunes qui avaient eu un seul partenaire (55,9 %).

On a demandé aux jeunes qui ont déclaré ne pas avoir utilisé un condom la dernière fois qu’ils ont eu une relation sexuelle d’en indiquer les raisons : 47,6 % d’entre eux ont déclaré être dans une relation monogame et 47,2 % ont déclaré avoir utilisé une autre méthode de contraception (tableau 3). Environ le quart (24,0 %) des non-utilisateurs du condom ne pensaient pas qu’il y avait un risque d’infection transmise sexuellement tandis qu’environ 1 jeune sur 5 a déclaré ne pas aimer en utiliser (21,8 %) ou ne pensait pas qu’il y avait un risque de grossesse (18,2 %). Aucune différence significative sur le plan statistique n’a été observée dans les taux d’utilisation du condom selon l’orientation sexuelle. Les hommes et les femmes avaient aussi tendance à choisir des raisons similaires expliquant la non-utilisation du condom, à quelques exceptions près. Les femmes étaient plus susceptibles d’indiquer la monogamie ou la grossesse (y compris le fait d’essayer de concevoir un enfant) comme raisons expliquant la non-utilisation du condom, tandis que les hommes étaient plus susceptibles d’indiquer ne pas en avoir eu accès. Les raisons expliquant la non-utilisation du condom étaient parfois différentes selon l’âge ou le nombre de partenaires sexuels. Par exemple, plus de la moitié (50,5 %) des jeunes âgés de 20 à 24 ans ont indiqué être dans une relation monogame comme raison expliquant la non-utilisation du condom, une proportion significativement supérieure au tiers (32,9 %) des jeunes âgés de 15 à 17 ans ou aux 38,3 % des jeunes âgés de 18 à 19 ans qui ont choisi cette raison. Un pourcentage plus élevé de jeunes âgés de 20 à 24 ans ont indiqué la grossesse ou le fait de tenter de concevoir un enfant comme raisons expliquant la non-utilisation du condom que leurs homologues plus jeunes.

Le fait de ne pas aimer utiliser le condom comme raison expliquant leur non-utilisation était plus souvent déclaré par les jeunes qui avaient de multiples partenaires (27,5 % comparativement à 19,3 % des jeunes ayant eu un seul partenaire sexuel). Les taux de non-utilisation d’un condom parce qu’ils n’en avaient pas accès étaient près de trois fois plus élevés chez les jeunes âgés de 15 à 17 ans (25,7 %) que chez les jeunes âgés de 20 à 24 ans (8,6 %), et cette raison était aussi plus souvent choisie par les jeunes ayant déclaré avoir eu de multiples partenaires sexuels (14,4 % comparativement à 8,7 % des jeunes ayant eu un seul partenaire sexuel).

Autres méthodes de contraception en général et utilisées en combinaison avec un condom (double utilisation)

Près de la moitié (48,3 %) des jeunes âgés de 15 à 24 ans actifs sexuellement au moment de l’enquête ont déclaré qu’ils utilisaient ou que leur partenaire utilisait un contraceptif oral (CO) la dernière fois qu’ils ont eu une relation sexuelle (tableau 4). L’utilisation d’autres méthodes de contraception, y compris le retrait, le dispositif intra-utérin (DIU) ou le contraceptif réversible à action prolongée (CRAP), d’autres contraceptifs hormonaux, comme l’anneau ou le timbre vaginal contraceptif, ou d’autres méthodes, était moins courante (5 % ou moins). L’utilisation d’un CO diminuait avec l’âge, passant de 53,7 % à l’âge de 15 à 17 ans à 46,2 % chez les jeunes âgés de 20 à 24 ans. En revanche, l’utilisation d’un DIU ou d’un CRAP augmentait en fonction de l’âge. Les plus jeunes utilisateurs d’un CO étaient aussi plus susceptibles que leurs homologues utilisateurs d’un CO plus âgés d’avoir aussi utilisé un condom (72,3 % comparativement à 44,0 %, respectivement).

Dans l’ensemble, le nombre de jeunes âgés de 15 à 24 ans qui risquaient de tomber enceintes ou dont la partenaire risquait de tomber enceinte et qui n’ont pas utilisé le condom ou une autre méthode de contraception la dernière fois qu’ils ont eu une relation sexuelle a été estimé à plus d’un cinquième (22,9 %). Les hommes (18,2 %) et les jeunes âgés de 15 à 17 ans (6,5 %) étaient moins susceptibles de déclarer n’avoir utilisé aucune méthode de contraception.

Contraceptif d’urgence

Dans l’Enquête sur la santé dans les collectivités canadiennes, 1 femme âgée de 15 à 24 ans active sexuellement sur 10 (10,6 %) a déclaré avoir utilisé un contraceptif d’urgence (CU) au cours des 12 derniers mois (tableau 5). Il n’y avait pas de différence significative quant à l’utilisation d’un CU selon l’âge, la région géographique, l’utilisation du condom ou l’utilisation d’autres méthodes de contraception. En revanche, les femmes qui ont déclaré avoir eu plus d’un partenaire au cours des 12 derniers mois étaient près de deux fois plus susceptibles d’avoir utilisé un CU (15,8 %) que celles qui ont déclaré avoir eu un seul partenaire (8,2 %).

Discussion

La présente étude repose sur un échantillon représentatif de la population et peut être généralisée à la population canadienne en 2015-2016. Elle fournit des renseignements actuels sur plusieurs indicateurs importants de la santé sexuelle.

Selon l’Enquête sur la santé dans les collectivités canadiennes (ESCC) de 2015-2016, plus de la moitié (54,1 %) des jeunes âgés de 15 à 24 ans étaient actifs sexuellement au moment de l’enquête, près des deux tiers (60,1 %) ont déclaré avoir utilisé un condom la dernière fois qu’ils ont eu une relation sexuelle, près de la moitié (48,3 %) ont déclaré utiliser un contraceptif oral (CO) et un peu plus du tiers (37,1 %) ont déclaré avoir eu de multiples partenaires sexuels au cours des 12 derniers mois. Ces renseignements actuels peuvent aider les gouvernements et les organismes à cerner des sous-populations à risque et à élaborer des initiatives visant à favoriser des comportements sexuels plus sécuritaires.

Le cycle de 2015-2016 de l’ESCC peut ne pas être comparable aux cycles précédents de l’ESCC, en raison des changements de mode de collecte, des bases de sondage, de l’admissibilité à certaines questions et de la terminologie utilisésNote 9.. En outre, dans l’ESCC de 2015-2016, une relation sexuelle était définie comme une étant une « relation sexuelle vaginale et anale », tandis que dans les cycles précédents, aucune définition n’était fournie. En raison de ces changements, les différences dans les pourcentages des jeunes âgés de 15 à 24 ans qui ont déclaré avoir déjà eu une relation sexuelle (59,6 % en 2015-2016 comparativement à 66 %Note 10 en 2009-2010), avoir utilisé un condom (60,1 % comparativement à 67,9 %Note 10) ou avoir eu de multiples partenaires sexuels (37,1 % comparativement à 32,5 %10) sont difficiles à interpréter.

Plusieurs constatations de cette étude, notamment que l’utilisation du condom diminue en fonction de l’âge et est moins courante chez les femmes et les jeunes qui ont déclaré avoir eu moins de partenaires sexuels, sont conformes aux résultats présentés dans les études publiéesNote 10Note 11Note 12Note 13. Malgré la variété des méthodes de contraception, les condoms et le CO sont, et de loin, les méthodes de contraception les plus couramment utilisées déclarées dans le cadre de l’ESCC, et cette constatation est aussi conforme à d’autres études menées à l’aide d’échantillons canadiensNote 11Note 14. Dans l’ESCC, environ la moitié des utilisateurs d’un CO (ou leurs partenaires) ont déclaré avoir aussi utilisé un condom la dernière fois qu’ils ont eu une relation sexuelle. Ce taux de double utilisation, à savoir l’utilisation d’autres méthodes de contraception en combinaison avec un condom, est plus élevé dans la présente étude que celui signalé dans d’autres études, mais la variation du plan des études, des populations incluses et des définitions utilisées peuvent expliquer certaines ou l’ensemble de ces différencesNote 11Note 14. Il convient de souligner que les méthodes de contraception non barrières, comme le CO, n’offrent aucune protection contre les infections transmises sexuellement (ITS), ce qui explique pourquoi la double utilisation demeure importanteNote 15.

Les personnes qui sont dans une relation monogame peuvent percevoir que le risque de contracter une ITS est réduit et que l’utilisation du condom n’est par conséquent pas nécessaireNote 16Note 17. Dans le cadre de l’ESCC, près de la moitié des non-utilisateurs du condom ont déclaré la monogamie comme raison expliquant la non-utilisation du condom. Ce raisonnement peut contribuer à accroître le risque d’ITS, étant donné que d’autres études ont indiqué que la monogamie n’est souvent pas une stratégie de prévention efficace des ITSNote 17Note 18.

En 2015-2016, plus du cinquième des jeunes âgés de 15 à 24 ans actifs sexuellement et qui risquaient de tomber enceintes ou dont la partenaire risquait de tomber enceinte ont déclaré ne pas avoir utilisé un condom ou une autre méthode de contraception la dernière fois qu’ils ont eu une relation sexuelle. La grossesse ou le fait de tenter de concevoir un enfant ne sont probablement pas les raisons pouvant expliquer la majorité de ces relations sexuelles non protégées.

Environ 1 femme active sexuellement sur 10 au Canada a déclaré avoir utilisé un contraceptif d’urgence (CU) au cours de la dernière année. Cette proportion est probablement plus élevée que les 11 % d’utilisation d’un CU au cours de la vie déclarés aux États-Unis, en supposant que des périodes de référence plus longues présentent une corrélation avec des estimations plus élevéesNote 19. Bien qu’aucune différence n’ait été observée dans l’utilisation d’un CU selon l’âge dans les données de l’ESCC, une étude pilote non probabiliste menée en Ontario a permis de conclure que l’utilisation d’un CU était plus courante chez les personnes âgées de 20 à 29 ans que chez les femmes plus jeunes ou plus âgées. Les principales raisons de l’utilisation d’un CU étaient liées à la rupture des condoms et au fait de ne pas avoir utilisé une autre méthode de contrôle des naissancesNote 20.Il n’a pas été possible de trouver d’autres estimations pour la population canadienne.

Limites

Bien que des mesures d’assurance de la qualité aient été utilisées à chaque étape de la collecte et du traitement des données, et que les intervieweurs aient reçu une formation approfondie, les données de l’Enquête sur la santé dans les collectivités canadiennes (ESCC) de 2015-2016 présentent plusieurs limites. Les données sont autodéclarées et sujettes à des biais attribuables à la désirabilité sociale et à la remémoration. La désirabilité sociale désigne la tendance à modifier ses réponses afin de faire bonne impression. En particulier, la réticence à divulguer une orientation sexuelle dans le cadre d’une enquête peut entraîner un biais attribuable à la classification erronéeNote 21. De plus, les identités liées à l’orientation sexuelle qui allaient au-delà de l’hétérosexualité, de l’homosexualité et de la bisexualité n’ont pas été examinées et la catégorie de réponse « autre » n’était pas offerteNote 22. Il demeure difficile de quantifier l’incidence de ces limites sur les estimations liées aux comportements sexuels ou à l’orientation sexuelle, et les répondants peuvent avoir une perception différente de ce qui est « désirable », selon leur âge, leur sexe ou d’autres caractéristiquesNote 23.

Dans le but de maintenir sa pertinence et sa qualité, l’ESCC a été remaniée pour le cycle 2015-2016 et des changements ont été apportés au contenu, à la méthodologie, aux bases de sondage et aux stratégies de collecte. Par conséquent, les comparaisons avec les cycles précédents de l’ESCC sont difficiles à interpréterNote 9. Les données sont transversales et permettent par conséquent d’observer les associations entre les variables à un seul moment dans le temps. La petite taille des échantillons dans certaines parties de l’analyse peut aussi avoir réduit la capacité d’obtenir une signification statistique.

Conclusion

Les enquêtes permettant de recueillir des données sur le comportement sexuel, la contraception et l’utilisation du condom demeurent importantes pour éclairer et appuyer la promotion et les programmes de surveillance de la santé. Un grand nombre de jeunes au Canada sont actifs sexuellement et ne prennent pas les mesures indiquées pour réduire les résultats pouvant avoir une incidence négative sur leur santé sexuelle et génésique. La pandémie de COVID-19 continue de toucher les Canadiens à de nombreux égards, parfois inattendus. En l’occurrence, étant donné que l’accès au dépistage et au traitement des infections transmises sexuellement (ITS) peut être limité en raison de la COVID-19, il peut être nécessaire d’insister davantage sur l’importance d’adopter des pratiques sexuelles sécuritaires. Les résultats de l’Enquête sur la santé dans les collectivités canadiennes de 2015-2016 donnent à penser que de grandes proportions de jeunes actifs sexuellement au Canada risquent fortement d’avoir une grossesse non désirée ou de contracter une ITS.

Références
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