Rapports sur la santé
Sclérose en plaques : prévalence et conséquences

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par Heather Gilmour, Pamela L. Ramage-Morin et Suzy L. Wong

Date de diffusion : le 17 janvier 2018

Selon les estimations de chaque province, la prévalence de la sclérose en plaques (SP) parmi les Canadiens pourrait être l’une des plus élevées au mondeNote 1Note 2Note 3. La SP est une maladie progressive potentiellement invalidante du système nerveux central qui endommage la myélite, la couche protectrice entourant les nerfs. Cela perturbe la communication à destination et en provenance du cerveau, entraînant des symptômes comme une perte de vision, une perte de coordination et d’équilibre, une fatigue extrême, de la douleur, une dysfonction de la vessie, une perte de cognition, l’engourdissement, un état de faiblesse et des changements d’humeurNote 4Note 5. La nature et la gravité des symptômes varient et peuvent être caractérisées par des périodes de rechute et de rémission.

Bien que la cause de la SP soit inconnue, les différences selon la région, le sexe et l’ethnicité ont mené les chercheurs à examiner les hormones sexuelles, le régime alimentaire, les facteurs génétiques et les conditions environnementales, comme l’exposition au rayonnement ultravioletNote 6Note 7Note 8Note 9. Les résultats ne sont pas concluants et sont compliqués par différentes sources de données (des autodéclarations aux évaluations cliniques) et par certains facteurs, dont les changements dans la composition de la population en raison de l’accroissement naturel et de la migrationNote 2Note 8.

La présente étude examine la prévalence de la SP et ses conséquences sur les personnes ayant reçu le diagnosticNote 6. La SP parmi les Canadiens vivant dans les ménages privés est fondée sur des données autodéclarées tirées de deux enquêtes représentatives à l’échelle nationale : le Fichier sur la prévalence des problèmes neurologiques de 2010-2011 et l’Enquête sur les personnes ayant des problèmes neurologiques au Canada de 2011. Les renseignements détaillés tirés de l’enquête sont présentés pour les résidents à domicile âgés de 15 ans et plus, y compris l’âge au moment du diagnostic, la comorbidité, le traitement et les conséquences. La prévalence de la SP parmi les résidents des hôpitaux de soins de longue durée, fondée sur l’Enquête sur les problèmes neurologiques dans les établissements au Canada de 2011-2012, est déclarée pour la première fois. Les décès attribuables à la SP proviennent de la Statistique de l’état civil — Base canadienne de données sur les décès (voir Les données).

Prévalence

En 2010-2011, d’après les plus récentes données représentatives à l’échelle nationale, on a estimé que 93 500 Canadiens ont déclaré avoir reçu un diagnostic de SP. Se situant à 290 cas pour une population de 100 000 personnes (tableau 1), la prévalence dépassait celle de nombreux autres pays et elle était supérieure à ce qui avait été déclaré dans les études canadiennes antérieuresNote 2Note 10. Les estimations mondiales varient grandement et les différentes méthodologies rendent les comparaisons directes entre les études difficiles. Le Royaume-Uni, par exemple, a déclaré un taux de 203 pour 100 000 personnes; la Suède, 189; l’Équateur, 3,2Note 6Note 11Note 12. On pense que la prévalence accrue au cours des récentes années est attribuable au temps de survie plus long et aux avancées dans le diagnostic plutôt qu’aux changements dans le risque de la maladieNote 13Note 14.

Les femmes sont de deux à trois fois plus susceptibles que les hommes d’être atteintes de SP. On croit que le déséquilibre dans le rapport entre les sexes augmente dans plusieurs pays, y compris le CanadaNote 13, où 2,6 femmes ont déclaré être atteintes de SP pour chaque homme ayant reçu le même diagnostic. La disparité se reflète dans les estimations de la prévalence de 418 cas pour 100 000 femmes et 159 cas pour 100 000 hommes.

La SP est beaucoup plus courante chez les personnes qui vivent dans des hôpitaux de soins de longue durée. En 2011-2012, on a estimé que 3 800 résidents d’établissements de soins de longue durée ont déclaré être atteints de SP, ce qui équivaut à 1 460 cas pour 100 000 personnes (IC à 95 % : 1 380 à 1 540). À l’instar de la population à domicile, les femmes étaient considérablement plus susceptibles que les hommes d’avoir la SP. La prévalence atteignait un sommet dans le groupe d’âge de 45 à 64 ans.

Âge au moment du diagnostic

Au Canada et dans d’autres paysNote 11Note 15 la SP est habituellement diagnostiquée avant l’âge de 50 ans; 82 % des résidents à domicile âgés de 15 ans et plus ont déclaré que la SP avait été diagnostiquée entre 20 et 49 ans (IC à 95 % : 75,9 à 86,5). L’âge moyen auquel les personnes ressentent des symptômes pour la première fois était de 32 ans, et elles reçoivent un diagnostic environ cinq ans plus tard, à 37 ans.

Conformément aux travaux précédentsNote 16Note 17 le temps entre le début des symptômes et le diagnostic était plus long pour les femmes que pour les hommes, et pour les personnes dont les symptômes sont apparus à un plus jeune âge (tableau 2). L’intervalle entre l’apparition des symptômes et le diagnostic était de 5,4 ans pour les femmes, comparativement à 2,6 ans pour les hommes (p < 0,01). L’intervalle était plus long pour les personnes dont les symptômes ont commencé avant l’âge de 20 ans, et plus court pour celles dont les symptômes sont apparus à l’âge de 40 ans ou plus, comparativement à celles dont les symptômes sont apparus entre 30 et 39 ans. Les personnes atteintes de SP avaient vécu avec la maladie en moyenne pendant 15 ans, même si pour certaines, la période s’est prolongée au-delà de 50 ans.

Comorbidité non neurologique

Les recherches ont démontré que les comorbidités de la SP ont des répercussions sur la progression de l’incapacité, la qualité de vie, la nécessité de recevoir des soins de santé et le risque de mortalitéNote 18Note 19Note 20. Dans la présente étude, les personnes âgées de 15 ans et plus atteintes de SP étaient environ 15 fois plus susceptibles que la population en général de déclarer une incontinence urinaire ou fécale (59 % par rapport à 4 %), qui pourrait être attribuable en partie aux dommages causés aux parcours neurologiques du cerveau à la vessie et aux intestinsNote 21Note 22 (figure 1). Elles étaient plus de trois fois plus susceptibles d’avoir un trouble de l’humeur (22 % par rapport à 7 %). On croit qu’une combinaison de facteurs biologiques, comportementaux, psychologiques et liés à la maladie contribue à ce schémaNote 23. En revanche, la prévalence du diabète, des maladies cardiovasculaires et de l’hypertension artérielle parmi les personnes atteintes de SP n’était pas très différente de celle de la population en général, et d’autres recherches ont permis de découvrir un risque réduit de cancer parmi les patients atteints de SPNote 24.

Répercussions

Pour les participants à l’enquête atteints de SP et d’autres problèmes neurologiques, il est impossible de séparer les répercussions qui pourraient être attribuables à la SP de celles qui pourraient être attribuables aux autres troubles. Par conséquent, l’analyse des répercussions de la SP a été limitée aux personnes dont le seul problème neurologique était la SP (68 %; IC à 95 % : 62 à 74). Autrement, cela pourrait introduire un biais si les personnes atteintes de multiples problèmes neurologiques subissent plus de répercussions dans l’ensemble.

Environ les deux tiers de ces personnes ont déclaré que la SP avait modérément, beaucoup ou énormément affecté leur vie (tableau 3). Le tiers restant ont déclaré que leur vie avait été très peu ou pas du tout affectée.

Il est difficile de généraliser à propos des répercussions de la SP, car elle peut se manifester de nombreuses façons et toucher différentes parties du corps à divers degrés. Même si 57 % des personnes atteintes de SP pouvaient marcher sans aide, près du tiers (31 %) avaient besoin d’un fauteuil roulant, d’une aide mécanique, comme une canne ou une marchette, ou de l’aide d’une autre personne; 12 % ne pouvaient pas marcher du tout. Un peu plus de la moitié (53 %) n’éprouvaient habituellement aucune douleur, tandis que le reste des personnes a déclaré ressentir de la douleur les empêchant de s’adonner à un petit nombre d’activités (21 %) ou à certaines ou la plupart des activités (25 %). Près des deux tiers (62 %) des personnes avaient de la difficulté à avoir une bonne nuit de sommeil.

En plus des effets physiques, la SP pourrait avoir des répercussions cognitives à toute étape de la maladie. La moitié (50 %) des personnes dont le seul problème neurologique était la SP avaient de la difficulté à se souvenir de la plupart des choses ou à réfléchir à des problèmes et à les résoudre.

La SP était limitative d’autres façons. Environ le tiers des participants ont déclaré qu’elle les avait empêchés de conduire (30 %) ou qu’elle avait compromis leurs possibilités sur le plan des études (32 %). Plus de la moitié (58 %) ont vécu au moins quelques limitations dans les possibilités liées à l’emploi; 44 % ont qualifié ces limitations de « nombreuses » ou « d’énormes ». De même, 43 % des participants ont indiqué que la SP avait des répercussions négatives sur leurs interactions sociales; par exemple, ils se sentaient mis de côté ou gênés, ou avaient l’impression que les autres n’étaient pas à l’aise en leur présence ou les évitaient.

Traitement

Il n’y a aucune cure pour la SP, même si des traitements sont disponibles pour aider à gérer le troubleNote 14, y compris des produits pharmaceutiques, la physiothérapie, l’ergothérapie, la réadaptation cognitive et les thérapies complémentaires et non conventionnellesNote 7. L’utilisation de la « thérapie de libération », un traitement controversé qui dilate les veines rétrécies du couNote 25, est infondée pour la gestion de la SP, selon les résultats récents d’un vaste essai clinique mené au CanadaNote 26.

Une majorité (83 %) de Canadiens âgés de 15 ans et plus atteints de SP ont indiqué avoir utilisé un ou plusieurs traitements (tableau 4). De ce nombre, 84 % ont consommé des médicaments et 49 % ont suivi une thérapie de réadaptation. La consultation (27 %) et la médecine douce (25 %) faisaient également partie des traitements utilisés. De faibles pourcentages de personnes ont déclaré le sondage urinaire et la thérapie de libération. Parmi les personnes ayant reçu un traitement, 39 % ont déclaré un type, et le reste des participants (61 %) a eu recours à plusieurs stratégies de traitement.

Décès

Les personnes atteintes de SP ont une espérance de vie plus courteNote 20Note 27, la cause de décès la plus courante étant la SP en soi ou des complications connexes telles que les infections. En 2013, sur le nombre total de 252 338 décès survenus au Canada, la SP était la cause sous-jacente de 521 décès (1,5 pour 100 000 personnes). Il s’agissait d’une cause de décès moins courante que la maladie de Parkinson (2 354 décès; 6,7 pour 100 000) et la maladie d’Alzheimer (6 345 décès; 17,9 pour 100 000), mais plus courante que l’épilepsie (240 décès; 0,7 pour 100 000) et la paralysie cérébrale (160 décès; 0,5 pour 100 000).

Conclusion

La présente étude offre des estimations les plus récentes à l’échelle nationale de la prévalence de la SP et met en lumière les nombreuses répercussions particulières à la maladie sur la vie des personnes atteintes de SP. La prévalence de la SP au Canada compte parmi celles les plus déclarées dans le monde. On estime que 93 500 Canadiens vivant dans des ménages privés et 3 800 personnes vivant dans des hôpitaux de soins de longue durée sont atteints de SP. Elle est plus souvent diagnostiquée entre 20 et 49 ans.

Contrairement aux troubles neurologiques comme la démenceNote 28 et la maladie de ParkinsonNote 29 qui ont tendance à se développer à des âges plus avancés, la SP est plus courante chez les adultes plus jeunes. La durée plus longue et la possibilité d’une perte de productivité précoce attribuable à l’incapacité physique, à la fatigue, à la comorbidité et au besoin d’assistance ont des répercussions sur les coûts de la SP pour la sociétéNote 12.

Remerciements

Statistique Canada remercie de leur contribution et de leurs conseils tous les participants à l’élaboration du contenu sur les problèmes neurologiques de l’Enquête sur la santé dans les collectivités canadiennes, de l’Enquête sur les personnes ayant des problèmes neurologiques au Canada et de l’Enquête sur les problèmes neurologiques dans les établissements au Canada. Ce contenu a été élaboré conjointement par la Division de la statistique de la santé de Statistique Canada et l’Agence de la santé publique du Canada (ASPC), avec la participation des membres du groupe consultatif d’experts sur les maladies neurologiques de l’ASPC. Il a été sélectionné en fonction des objectifs et des besoins en données spécifiés par l’ASPC. Le parrainage a été assuré par l’ASPC dans le cadre de l’Étude nationale de la santé des populations relative aux maladies neurologiques. Nous remercions particulièrement Gisèle Carriere pour sa révision et ses commentaires éclairés.

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Les données

Source des données

La présente étude est fondée sur des données transversales représentatives de la population nationale tirées des sources suivantes : l’Enquête sur la santé dans les collectivités canadiennes (ESCC) de 2011 (63 542 participants; taux de réponse de 69,8 %); le Fichier sur la prévalence des problèmes neurologiques (285 971 participants; taux de réponse de 70,6 %) tiré de l’Enquête sur la santé dans les collectivités canadiennes (ESCC) de 2010 et de 2011; l’Enquête sur les personnes ayant des problèmes neurologiques au Canada (EPPNC) de 2011 (4 569 participants; taux de réponse de 81,6 %); l’Enquête sur les problèmes neurologiques dans les établissements au Canada de 2011-2012 (4 245 établissements; taux de réponse de 63,5 %), dont les données sont accessibles à partir du tableau CANSIM 105-1305. Une description de ces enquêtes est offerte dans des études parues antérieurementNote 28Note 29Note 30Note 31. Les données sur les décès sont tirées de la Base canadienne de données sur l’état civil, et sont accessibles à partir des tableaux CANSIM 102-0526 et 102-0551. La documentation est publiée à l’adresse www.statcan.gc.ca. L’analyse des personnes âgées de 15 ans et plus au sein de la population à domicile dont le seul problème neurologique était la SP repose sur un échantillon de 525 participants (122 hommes, 403 femmes) à l’EPPNC.

Définitions

On a demandé aux participants à l’enquête s’ils avaient des problèmes neurologiques particuliers (y compris la sclérose en plaques) qui avaient duré ou qui devaient durer au moins six mois et qui avaient été diagnostiqués par un professionnel de la santé. Les problèmes de santé chroniques non neurologiques étaient l’incontinence urinaire ou intestinale, l’hypertension artérielle (avec prise de médicaments au cours du mois précédent), la maladie cardiaque, le diabète (sauf le diabète gestationnel) et les troubles de l’humeur.

Les catégories de réponse à la question « Dans l’ensemble, dans quelle mesure pensez-vous que votre problème neurologique affecte votre vie? » étaient « pas du tout », « un peu », « moyennement », « beaucoup » ou « énormément ». Les composantes de mobilité, de douleur et de cognition de l’indice de l’état de santé-Mark 3Note 32 fournissent des descriptions de la santé fonctionnelle et ont été adaptées afin d’être utilisées dans le cadre de l’ESCC et de l’EPPNC.

Les réponses à la question « Dans quelle mesure pensez-vous que votre problème neurologique a limité votre capacité à passer une bonne nuit de sommeil? » ont été regroupées en deux catégories : « pas du tout » par opposition à « un peu/moyennement » ou « beaucoup/énormément ».

Les participants à l’enquête âgés de plus de 16 ans qui avaient un permis de conduire en règle se sont fait demander si leur problème neurologique les avait empêchés de conduire.

Des questions distinctes ont été posées pour déterminer dans quelle mesure la maladie limitait les possibilités liées à l’éducation et à l’emploi. Les réponses ont été regroupées en trois catégories : « pas du tout », « un peu/moyennement » ou « beaucoup/énormément ».

Aux personnes atteintes d’un problème de santé neurologique, on a posé quatre questions sur les interactions sociales. Celles qui ont répondu « tout le temps » ou « souvent » plutôt que « quelquefois », « rarement » ou « jamais » ont été considérées comme des personnes dont les interactions sociales étaient affectées par le problème de santé.

Analyse

Les fréquences pondérées, les totalisations croisées et les moyennes ont été calculées afin d’examiner la prévalence de la SP et les conséquences de la maladie. Pour tenir compte des effets du plan d’enquête, on a estimé des erreurs-types et des coefficients de variation au moyen de la technique bootstrapNote 33Note 34.

Limites

Les taux de prévalence des problèmes neurologiques diagnostiqués sont fondés sur les diagnostics autodéclarés ou déclarés par les personnes qui ont répondu par procuration à l’enquête, dans le cas des enquêtes-ménages, et par le personnel administratif dans le cas des établissements; ils n’ont fait l’objet d’aucune vérification à partir d’une autre source. On ne sait pas si la prévalence est, par conséquent, sous-estimée ou surestimée; quoi qu’il en soit, cela limite la comparabilité avec les études qui ont utilisé des données administratives ou des cas déterminés à l’aide d’une évaluation clinique ou d’un examen des dossiersNote 8. Dans le cas des résidents dans les établissements, seules les données sur la prévalence étaient disponibles. En conséquence, la plupart des analyses portent sur la population à domicile et ne représentent pas les personnes vivant dans les établissements de soins de longue durée. L’analyse détaillée sur les personnes atteintes de SP dans la population à domicile (fondée sur l’EPPNC) se limite aux personnes de 15 ans et plus. Des incohérences sont ressorties entre l’ESCC et l’EPPNC en ce qui concerne les participants reconnus comme étant atteints de SP. Ainsi, 119 des participants qui souffraient de SP selon l’ESCC n’en souffraient pas selon l’EPPNC, et 21 des participants à l’EPPNC qui étaient atteints de SP ne l’étaient pas selon l’ESCC. Ces incohérences pourraient s’expliquer par des différences dans la façon de répondre aux questions de chaque enquête ou en matière d’admissibilité aux enquêtes en fonction de questions de sélection. Des renseignements détaillés à ce sujet sont présentés ailleursNote 35.

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Références
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