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Octobre 2004
Vol. 5, no. 10

L'emploi et le revenu en perspective

Travailleurs peu rémunérés : combien vivent dans des familles à faible revenu?
Lucy Chung

Les analystes du marché du travail et ceux s’attardant sur les questions sociales ne cessent de s’intéresser au travail à faible rémunération. Près de deux millions de Canadiens âgés de 20 ans ou plus travaillent pour moins de 10 $ l’heure et environ le tiers d’entre eux sont les seuls salariés de la famille (Maxwell, 2002).

Plus personne n’échappe aujourd’hui à la précarité économique et sociale du seul fait d’avoir un emploi. Les travailleurs à faible salaire sont moins susceptibles de bénéficier d’avantages sociaux tels qu’un régime de retraite, un régime de soins de santé complémentaire ou un régime de soins dentaires. De plus, les emplois peu rémunérés sont plus susceptibles d’être temporaires ou à temps partiel et moins susceptibles d’être syndiqués. On qualifie de « précaires » les emplois qui n’offrent aucune garantie de continuité, qui sont assortis de conditions de travail et d’une protection réglementaire moindres et qui sont peu rémunérateurs (Rodgers, 1989).

Cependant, la principale question consiste à déterminer si un faible salaire affecte sérieusement la qualité de vie d’une personne. En raison des changements intervenus dans la structure de la famille au fil des ans, le nombre de familles ne comptant qu’un seul soutien économique a diminué, et l’augmentation du taux d’emploi des femmes a fait grimper le nombre de familles à soutiens économiques multiples ou secondaires. En revanche, le nombre de familles monoparentales s’est accru, et l’occupation d’un seul emploi à salaire minimum peut alors ne pas suffire1. À partir des données du recensement, le présent article cherche à déterminer les groupes de personnes qui risquaient d’être à faible salaire en 2000, la proportion, parmi ces personnes, de celles vivant dans une famille à faible revenu et l’évolution de la situation entre 1980 et 2000.

Les plus susceptibles de toucher de faibles gains hebdomadaires

En 2000, environ 1,7 million de Canadiens occupaient un emploi à temps plein peu rémunéré. Cela équivalait à 16 % de tous les employés à temps plein, mais ne représentait qu’une mince augmentation (1 %) en vingt ans (voir Répartition des salariés au Canada). Bien que la proportion globale ait peu changé, certains groupes ont vu leur probabilité d’être faiblement rémunérés monter en flèche (tableau 1).

Les femmes
Les femmes salariées étaient presque deux fois plus susceptibles que les hommes de recevoir une faible rémunération hebdomadaire (graphique A)2. Cela pourrait notamment tenir au fait que les femmes sont plus susceptibles d’occuper des emplois peu rémunérés (Drolet, 2001a et 2001b). Les emplois traditionnels chez les femmes, tels que le travail de bureau, les ventes et les services, procurent en moyenne des gains inférieurs (Statistique Canada, 2003). Les femmes accumulent également moins d’années d’expérience en moyenne puisqu’elles sont plus susceptibles de prendre congé pour des raisons d’ordre familial. Mais comme l’écart entre les gains se rétrécit entre les hommes et les femmes (Drolet, 2001a), la proportion des femmes peu rémunérées a diminué, passant de 26 % en 1980 à 22 % en 2000.

Par contre, le pourcentage d’hommes faiblement rémunérés a progressé pendant ce temps, étant passé de 9 % à 12 %. Cela tient en bonne partie au recul des salaires réels des jeunes hommes durant les années 1980, et ce, dans la plupart des branches d’activité et des professions (Morissette, 1998). L’augmentation du nombre d’hommes occupant des emplois traditionnellement à prédominance féminine comme l’enseignement, les services, le travail de bureau et certaines professions liées à la fabrication, constitue aussi un autre facteur (Hughes, 1990). Bien que les hommes exerçant ces professions gagnent tout de même davantage que les femmes, leur salaire demeure inférieur à celui de la moyenne des employés de sexe masculin3.

Les moins scolarisés
Les personnes sans diplôme d’études secondaires étaient plus souvent faiblement rémunérées que celles dont le niveau de scolarité était plus élevé (graphique B)4. C’était le cas tant des hommes que des femmes. En 2000, tout comme en 1980 d’ailleurs, environ 1 employé sur 4 sans diplôme d’études secondaires touchait de faibles gains hebdomadaires, bien que la probabilité d’avoir un bas salaire se soit accrue pour les hommes dans chaque catégorie de niveau de scolarité.

Même à scolarité égale, les femmes étaient plus susceptibles que les hommes d’occuper un emploi peu rémunéré. En 2000, la proportion de femmes sans diplôme d’études secondaires qui étaient faiblement rémunérées correspondait au double de celle des hommes (39 % et 19 % respectivement). L’écart s’amenuisait avec la hausse du niveau de scolarité. Si les hommes sans diplôme d’études secondaires étaient plus susceptibles d’être faiblement rémunérés en 2000 que 20 ans plus tôt, le pourcentage dans le cas des femmes a très peu changé.

Les jeunes
La probabilité de recevoir une faible rémunération hebdomadaire en 2000 culminait chez les jeunes employés (âgés de 15 à 24 ans), 45 % d’entre eux étant dans cette situation (graphique C). Ce taux diminuait fortement jusqu’à 55 ans, avant de remonter légèrement. Cela n’est pas surprenant puisque le marché du travail tend à reconnaître à la fois l’expérience et la durée d’occupation de l’emploi. En outre, on retrouve plusieurs jeunes travailleurs dans des branches d’activité offrant des salaires relativement bas, tels les services aux consommateurs. La même tendance était nette en 1980, malgré la proportion moindre de travailleurs à faible salaire (31 % des jeunes travailleurs en 1980 contre 45 % en 2000). Il se peut que l’augmentation du taux d’emploi des femmes ait eu une incidence sur la situation des jeunes travailleurs. La concurrence de plus en plus forte a fait en sorte que les emplois qu’ils avaient l’habitude d’occuper (par exemple, dans les services ou les ventes) sont maintenant sollicités par des femmes, si bien que plus de jeunes qu’auparavant risquent d’être faiblement rémunérés (Sunter, 1994). Encore une fois, dans tous les groupes d’âge, des proportions plus élevées de femmes que d’hommes recevaient de bas salaires. Cependant, bien que le risque de toucher une faible rémunération hebdomadaire ait augmenté de 1980 à 2000 chez les hommes de tous les groupes d’âge, il a diminué chez les femmes de 35 ans ou plus.

Les immigrants
En 2000, les nouveaux immigrants et les immigrants de moyenne date étaient plus à risque de recevoir une faible rémunération hebdomadaire que ceux qui étaient au Canada depuis plus de 15 ans ou que les Canadiens de naissance. Cela pourrait s’expliquer par la phase d’adaptation que traversent les nouveaux venus. La vraisemblance d’avoir de faibles gains hebdomadaires s’est accrue de 1980 à 2000 pour les immigrants, peut-être parce que ceux-ci proviennent maintenant moins d’Europe et des États-Unis que de pays en développement (Borjas, 1991; Picot, 2004). L’expérience à l’étranger de ces derniers est moins reconnue et ils peuvent éprouver plus de difficultés à faire valoir leurs qualifications ou leurs titres de compétences (Picot et Hou, 2003). Si le risque de gagner moins par semaine s’est accru chez les immigrants de sexe masculin5 et les immigrantes de moyenne date, il a cependant fléchi chez les immigrantes de longue date.

Les minorités visibles
Les membres des minorités visibles nés au Canada gagnaient à peu près la même chose que leurs homologues n’appartenant pas à une minorité visible, à peine un point de pourcentage séparant la proportion de l’un et l’autre groupe recevant une faible rémunération hebdomadaire6. On observait un écart plus important entre les immigrants qui appartenaient et ceux qui n’appartenaient pas à une minorité visible (Hum et Simpson, 1998). Il culminait chez les nouveaux immigrants (31 % dans le cas des premiers et 19 % dans celui des seconds) et s’amenuisait avec le temps passé au Canada7.

Entre 1980 et 2000, le risque de recevoir de faibles gains hebdomadaires s’est accru chez les nouveaux immigrants et les immigrants de moyenne date appartenant à une minorité visible8. Il a augmenté chez les nouveaux immigrants et les immigrants de moyenne date de sexe masculin n’appartenant pas à une minorité visible, mais il a diminué chez leurs homologues de sexe féminin.

Les personnes ayant des limitations au travail
Les personnes qui étaient limitées au travail en raison d’un état physique ou mental ou d’un problème de santé étaient plus susceptibles de toucher une faible rémunération hebdomadaire que celles qui ne l’étaient pas. Il est impossible de savoir si leur risque d’avoir de faibles gains hebdomadaires a diminué entre 1980 et 2000 puisqu’on a modifié la question du recensement sur les limitations au travail9.

Les gens vivant avec des personnes apparentées
Les gens qui habitent avec des personnes qui leur sont apparentées mais qui ne font pas partie d’une famille de recensement sont très à risque de recevoir une faible rémunération hebdomadaire (graphique D). La fréquence des travailleurs peu rémunérés parmi ce groupe a crû, étant passée de 23 % en 1980 à 28 % en 200010. Ces données ne permettent pas d’établir si cette cohabitation découle d’un besoin ou de certaines obligations familiales.

Les mères seules
En 2000, près de 1 mère seule sur 4 qui étaient salariées touchait une faible rémunération hebdomadaire (23 %). Comme elles requièrent des horaires flexibles pour conduire leurs enfants à l’école ou à la garderie, les mères seules peuvent se buter à de moins bonnes perspectives d’emploi. Elles ont également tendance à choisir des professions et des branches d’activité dont il est facile de joindre les rangs ou d’en sortir, comme les services aux consommateurs, où les salaires sont généralement moindres11. De plus, compte tenu du fardeau d’élever seules leurs enfants, les mères seules sont souvent en moins bonne santé que les mères ayant un conjoint (Pérez et Beaudet, 1999). Cela pourrait également les dissuader d’occuper un emploi bien rémunéré dans un milieu stressant.

Les personnes hors famille
Les personnes hors famille étaient également susceptibles de toucher de faibles gains hebdomadaires, celles de moins de 40 ans l’étant plus que leurs aînées (25 % et 17 % respectivement). Alors que les femmes hors famille étaient plus susceptibles que leurs homologues masculins d’être peu rémunérées, la proportion a reculé entre 1980 et 2000, surtout chez les femmes de 40 ans ou plus. Parmi les hommes hors famille, le risque de toucher une faible rémunération hebdomadaire s’est accru chez ceux de moins de 40 ans et a fléchi chez les 40 ans ou plus.

Travailleurs peu rémunérés vivant dans une famille à faible revenu

Les personnes les plus serrées financièrement du fait d’avoir un emploi peu rémunéré vivent dans une famille à faible revenu. En 2000, 30 % des 1,7 million de travailleurs à temps plein recevant une faible rémunération hebdomadaire faisaient partie d’une famille à faible revenu, ce qui est une proportion semblable à celle de 1980 (tableau 2)12.

Les personnes hors famille ou vivant seules
La plupart des groupes de travailleurs faiblement rémunérés ne sont pas tellement plus à risque d’être à faible revenu que les autres groupes. Mais certains sont plus vulnérables que d’autres. Plus des trois quarts des personnes hors famille et plus des deux tiers des personnes vivant seules qui touchaient de faibles gains hebdomadaires en 2000 vivaient dans un ménage à faible revenu (graphique E). Les membres de ces deux groupes touchent un revenu personnel qui équivaut au revenu familial, et le fait de ne pas habiter avec des partenaires économiques les met en situation d’insécurité financière. Quoi qu’il en soit, leur risque de vivre en situation de faible revenu a diminué de 1980 à 2000, la proportion ayant reculé de 3 points de pourcentage dans le cas des personnes vivant seules et de 5 points dans celui des personnes hors famille. Les femmes hors famille peu rémunérées de 40 ans ou plus ont, en particulier, vu leur probabilité d’être à faible revenu chuter de 10 points de pourcentage, passant de 79 % à 69 %.

Les parents seuls
Les parents seuls qui ont de faibles gains hebdomadaires risquent également d’être à faible revenu. En 2000, 56 % des mères seules et 53 % des pères seuls touchant une faible rémunération avaient aussi un faible revenu familial. Ces personnes constituaient la plupart du temps les seuls soutiens de la famille. À l’opposé, seulement 14 % des femmes mariées peu rémunérées avaient un faible revenu familial. Les mères seules étaient cependant moins susceptibles de se trouver dans cette situation en 2000 qu’en 198013.

Les hommes
Tandis que la fréquence de vivre en situation de faible revenu s’est légèrement accrue chez les femmes peu rémunérées, elle a diminué de trois points de pourcentage chez les hommes, étant passée de 39 % à 36 %. Bien que les employées à temps plein soient plus susceptibles que leurs homologues masculins de réaliser de faibles gains hebdomadaires, les hommes peu rémunérés sont plus à risque de faire partie d’une famille à faible revenu. En 2000, la proportion d’hommes à faible rémunération hebdomadaire vivant dans une famille à faible revenu (36 %) dépassait celle des femmes (25 %). Fait à souligner, près de la moitié des hommes d’âge moyen (ceux âgés de 35 à 44 ans) occupant un emploi peu rémunéré vivaient dans une famille à faible revenu, comparativement à 26 % de leurs homologues de sexe féminin. Cela suppose que, dans ce groupe d’âge, plus de femmes que d’hommes à faible rémunération vivent avec des membres de leur famille (par exemple, un conjoint) pouvant compenser leurs faibles gains.

Les nouveaux immigrants
La proportion des nouveaux immigrants de minorités visibles qui étaient peu rémunérés et qui vivaient en situation de faible revenu n’a pas changé de manière significative entre 1980 et 2000. Toutefois, cela n’était pas le cas pour les autres groupes de nouveaux immigrants. En effet, le risque chez les hommes est passé de 46 % à 60 %, et celui des femmes, de 21 % à 32 %14. Par contre, il a diminué chez leurs homologues nés au Canada. Plus de la moitié des nouveaux immigrants de sexe masculin occupant des emplois peu rémunérés vivaient dans une famille à faible revenu en 2000, soit 53 % dans le cas des minorités visibles et 60 % dans celui des autres groupes.

Employés à temps plein peu rémunérés et vivant dans une famille à faible revenu

En 2000, 5 % de tous les employés à temps plein étaient faiblement rémunérés et vivaient dans une famille à faible revenu (tableau 3). Mais cette moyenne occulte encore une fois certains écarts substantiels entre les groupes. Par exemple, plus de 22 % des femmes hors famille travaillant à temps plein touchaient de faibles gains hebdomadaires et vivaient en situation de faible revenu, comparativement à 16 % des hommes hors famille. Chez les mères seules, la proportion était de 13 % et chez les pères seuls, elle était inférieure à la moitié de cela. Les nouveaux immigrants et les immigrants de moyenne date, en particulier ceux de minorités visibles, étaient également plus susceptibles de vivre dans une famille à faible revenu et d’occuper un emploi peu rémunéré.

La proportion générale d’employés faiblement rémunérés vivant au sein d’une famille à faible revenu n’a presque pas changé de 1980 à 2000. Cela ne signifie toutefois pas qu’il s’agissait des mêmes personnes. En fait, les travailleurs plus jeunes, les nouveaux immigrants et les immigrants de moyenne date (surtout les hommes immigrants appartenant à une minorité visible) ainsi que les hommes hors famille de moins de 40 ans ont vu s’accroître leurs risques d’être faiblement rémunérés et de toucher un faible revenu familial. Par contre, les femmes hors famille peu rémunérées ont vu les leurs diminuer.

Même si leur proportion n’a pas changé, les employés faiblement rémunérés ont vu leur rémunération hebdomadaire moyenne fléchir entre 1980 et 2000. En fait, tandis que la rémunération hebdomadaire moyenne des employés à temps plein s’est accrue de 11 %, étant passée de 785 $ en 1980 à 868 $ en 2000 (tableau 4), celle des travailleurs peu rémunérés a diminué, ayant glissé de 251 $ à 231 $ (-8 %). Elle a régressé encore plus chez les travailleurs faiblement rémunérés vivant dans une famille à faible revenu, étant passée de 211 $ à 175 $ (-17 %) [tableau 5]. Ainsi, bien que leur fréquence au sein des familles à faible revenu n’ait pas augmenté, les travailleurs peu rémunérés semblaient se retrouver dans une situation pire qu’avant.

La plupart des employés faiblement rémunérés ont vu leurs gains hebdomadaires moyens diminuer. Certains ont été touchés plus que d’autres. Les personnes sans diplôme d’études secondaires ont subi une chute de 9 % de leurs gains. Les immigrantes peu rémunérées ont accusé un recul plus marqué que les immigrants de sexe masculin, même si la vraisemblance d’être faiblement rémunéré s’est accrue chez ces derniers. En outre, les femmes de minorités visibles ont connu une plus forte baisse que leurs homologues n’appartenant pas à une minorité visible. Bien que les mères seules aient vu leurs gains connaître une baisse du même ordre que celle des femmes mariées (8 %), les gains des pères seuls ont reculé de près de 3 points de pourcentage de plus que ceux des hommes mariés.

Bien que la rémunération hebdomadaire moyenne des travailleurs peu rémunérés ait fléchi de 8 %, leurs gains annuels ont augmenté de 6 %, ce qui laisse entendre qu’ils ont travaillé un plus grand nombre de semaines (tableau 6)15. La baisse de plus de 1 500 $ des gains familiaux moyens a été tempérée par une augmentation de près de 1 500 $ des autres revenus et transferts. Ainsi, le revenu moyen de la famille économique des travailleurs peu rémunérés n’a pas connu de variation significative de 1980 à 2000, si bien que la proportion de 30 % de travailleurs faiblement rémunérés vivant dans une famille à faible revenu est restée la même16.

Résumé

La proportion d’employés à temps plein faiblement rémunérés a peu changé au cours des deux dernières décennies (15 % en 1980 et 16 % in 2000), et la proportion de travailleurs peu rémunérés vivant dans une famille à faible revenu est restée à 30 %. Par conséquent, le pourcentage d’employés à temps plein qui étaient à la fois faiblement rémunérés et qui vivaient en situation de faible revenu est lui aussi demeuré inchangé à 5 %.

Les personnes les plus susceptibles d’avoir une faible rémunération hebdomadaire étaient les femmes, les personnes sans diplôme d’études secondaires, les jeunes adultes, les nouveaux immigrants et les immigrants de moyenne date appartenant à une minorité visible, les personnes vivant avec des gens apparentés, les mères seules, les personnes hors famille de moins de 40 ans et les personnes ayant une limitation au travail.

Les personnes les plus à risque d’être peu rémunérées et de vivre dans une famille à faible revenu étaient les jeunes adultes, les nouveaux immigrants et les immigrants de moyenne date faisant partie d’une minorité visible, les mères seules et les personnes hors famille.

De 1980 à 2000, les gains hebdomadaires moyens des travailleurs faiblement rémunérés ont diminué de 8 %, tandis que ceux des employés à temps plein ont progressé de 11 %. Cependant, la proportion des travailleurs peu rémunérés vivant dans une famille à faible revenu est demeurée à un peu moins du tiers.

Source des données et définitions

La présente étude s’appuie sur les données des recensements de 1981 à 2001. Il est difficile d’établir les salaires horaires à partir des données du recensement parce que les heures de travail hebdomadaires renvoient à la semaine qui précède le recensement (habituellement en mai ou en juin), tandis que les gains annuels et les semaines travaillées se rapportent à l’année précédente.

Pour surmonter cette difficulté, seules les personnes qui travaillaient surtout à temps plein au cours de l’année précédant le recensement ont été choisies. Leur rémunération hebdomadaire a été calculée en divisant leurs gains annuels par le nombre de semaines travaillées. La faible rémunération se définit dans le présent contexte comme un montant de moins de 375 $ par semaine en dollars de 2000 (en se servant de déflateurs provinciaux). Partant de l’hypothèse de semaines de 37,5 heures de travail, cette définition s’étend aux personnes dont les gains horaires étaient inférieurs à 10 $ l’heure, le seuil qu’ont utilisé certaines des études précédentes.

L’échantillon se composait de personnes âgées de 15 à 64 ans qui n’étudiaient pas à temps plein, travaillaient surtout à temps plein et avaient reçu un salaire ou une rémunération mais aucun revenu d’un travail autonome pendant l’année précédant le recensement.

Les nouveaux immigrants sont arrivés au Canada durant les cinq années précédant l’année de référence du recensement. Les immigrants de moyenne date sont arrivés de 6 à 15 ans auparavant, et les immigrants de longue date, plus de 15 ans auparavant. Par exemple, pour l’année de référence 2000, les nouveaux immigrants sont arrivés entre 1995 et 1999, les immigrants de moyenne date, entre 1985 et 1994, et les immigrants de longue date, avant 1985.

Les personnes hors famille vivent avec d’autres personnes, mais elles ne leur sont pas apparentées et elles ne partagent pas leur revenu avec celles-ci (par exemple, les pensionnaires ou les colocataires).

Les seuils de faible revenu (SFR) s’établissent dans le contexte de l’Enquête sur les dépenses des ménages (ou l’ancienne Enquête sur les dépenses des familles). Il s’agit du niveau de revenu à partir duquel une famille consacre à ses besoins fondamentaux 20 points de pourcentage de plus que la moyenne de son revenu avant impôt et après transferts. Les SFR varient selon la taille de la famille et de la collectivité. En 2000, par exemple, le SFR d’une famille de deux personnes vivant dans une collectivité de 500 000 habitants ou plus était de 22 964 $. Celui d’une famille de sept personnes ou plus vivant dans la même région était de 46 793 $.

Notes

  1. De 1980 à 2000, la proportion de parents seuls parmi les employés à temps plein est passée de 3,6 % à 5,7 %.

  2. Toute comparaison faite dans le présent article est statistiquement significative au niveau de 5 %.

  3. L’évolution de la structure et des responsabilités familiales depuis 1980 peut également avoir alimenté l’augmentation de la proportion des hommes occupant un emploi faiblement rémunéré. Étant donné qu’ils s’intéressent davantage aux enfants et qu’ils s’occupent d’eux de plus en plus, il est possible que les hommes privilégient les emplois offrant des horaires plus flexibles aux emplois mieux rémunérés mais qui exigent plus d’heures de travail (Marshall, 1998). Mais cette situation prévaut sans doute davantage chez les hommes mieux rémunérés ayant les moyens de subir une légère baisse salariale. De plus, comme les femmes sont plus actives sur le marché du travail et accèdent à des emplois mieux rémunérés, il se peut que les hommes ne soient plus le principal soutien économique de la famille.

  4. À la fin des années 1990, le titulaire d’une maîtrise ou d’un doctorat gagnait en moyenne deux fois plus qu’une personne sans diplôme d’études secondaires (Statistique Canada, 1998).

  5. Cela concorde avec d’autres études selon lesquelles les gains à l’arrivée des cohortes de nouveaux immigrants se sont effrités au cours des deux dernières décennies (Frenette et Morissette, 2003; Aydemir et Skuterud, 2004).

  6. Cependant, cela dissimule les effets compensateurs entre les hommes et les femmes. Les hommes nés au Canada qui appartiennent à une minorité visible sont plus susceptibles d’être faiblement rémunérés que les hommes nés au pays qui n’appartiennent pas à une minorité visible, alors que la situation inverse prévaut chez les femmes.

  7. Cela coïncide avec d’autres études récentes selon lesquelles les immigrants appartenant à une minorité visible sont plus susceptibles d’être faiblement rémunérés que les autres immigrants (Palameta, 2004).

  8. L’augmentation de la fréquence de travailleuses peu rémunérées chez les nouvelles immigrantes membres des minorités visibles n’est pas significative au niveau de 5 %.

  9. Le libellé de la question a été modifié pour le Recensement de la population de 2001. Il est passé de « Cette personne est-elle limitée dans ses activités à cause d’une incapacité physique, d’une incapacité mentale ou d’un problème de santé chronique : a) à la maison? b) à l’école ou au travail? c) dans d’autres activités? » à « Est-ce qu’un état physique ou un état mental ou un problème de santé réduit la quantité ou le genre d’activités que cette personne peut faire : a) à la maison? b) au travail ou à l’école? c) dans d’autres activités? ».

  10. La majorité des travailleurs peu rémunérés de ce groupe sont des Canadiens de naissance n’appartenant pas à une minorité visible.

  11. Selon le Recensement de 2001, 44 % des mères seules qui étaient salariées travaillaient dans les services (services administratifs et de soutien; gestion des déchets et assainissement; enseignement; soins de santé et assistance sociale; arts, spectacles et loisirs; hébergement et restauration; et autres).

  12. Le revenu familial correspond au revenu avant impôt et après transferts de tous les membres de la famille. Une personne hors famille est traitée comme une famille économique.

  13. La diminution du risque dans le cas des mères seules et des femmes hors famille âgées de 40 ans ou plus qui étaient peu rémunérées était respectivement attribuable à une hausse des transferts gouvernementaux et à une croissance des gains annuels.

  14. La baisse considérable des gains du conjoint et des autres membres de la famille en est la principale raison.

  15. En 1980, les employés à temps plein ont travaillé en moyenne 44 semaines, comparativement à 47 en 2000.

  16. Le peu de variation du revenu familial moyen corrigé selon la taille de la famille chez les travailleurs peu rémunérés dans les familles à faible revenu suppose que la proportion inchangée de travailleurs peu rémunérés en situation de faible revenu n’a pas dissimulé une détérioration quelconque de leur situation financière.

Documents consultés

  • AYDEMIR, Abdurrahman Bekir, et Mikal SKUTERUD. Explication de la détérioration des gains au niveau des cohortes d’immigrants au Canada, 1966-2000, no 11F0019MIF au catalogue de Statistique Canada, Ottawa, 2004, no 225, série « Documents de recherche, Direction des études analytiques ».

  • BORJAS, George J. « Immigration and self-selection », Immigration, Trade and the Labour Market, publié sous la direction de John M. Abowd et Richard B. Freeman, Chicago, University of Chicago Press, 1991.

  • DROLET, Marie. « Écart salarial entre hommes et femmes », L’emploi et le revenu en perspective, no 75-001-XIF au catalogue de Statistique Canada, décembre 2001a, vol. 2, no 12, édition en ligne.

  • DROLET, Marie. L’écart persistant : nouvelle évidence empirique concernant l’écart salarial entre les hommes et les femmes au Canada, no 11F0019MIF au catalogue de Statistique Canada, Ottawa, 2001b, no 157, série « Documents de recherche, Direction des études analytiques ».

  • FRENETTE, Marc, et René MORISSETTE. Convergeront-ils un jour? Les gains des travailleurs immigrants et de ceux nés au Canada au cours des deux dernières décennies, no 11F0019MIF au catalogue de Statistique Canada, Ottawa, 2003, no 215, série « Documents de recherche, Direction des études analytiques ».

  • HUGHES, Karen D. « Échanges au sein des professions non traditionnelles, 1971-1986 », L’emploi et le revenu en perspective, no 75-001-XPF au catalogue de Statistique Canada, été 1990, vol. 2, no 2, p. 62 à 72.

  • HUM, Derek, et Wayne SIMPSON. Possibilités salariales pour les minorités visibles au Canada, no 98-17 au catalogue de Statistique Canada, Ottawa, 1998, série « Documents de travail sur la Dynamique du revenu et du travail ».

  • MARSHALL, Katherine. « Les pères au foyer », L’emploi et le revenu en perspective, no 75-001-XPF au catalogue de Statistique Canada, printemps 1998, vol. 10, no 1, p. 9 à 15.

  • MAXWELL, Judith. Smart social policy – “Making work pay”, Ottawa, Réseaux canadiens de recherche en politiques publiques, 2002, rapport de recherche, résumé en français sous le titre Une politique sociale intelligente – « Faire en sorte que le travail paie ».

  • MORISSETTE, René. « Dégradation de la situation des jeunes hommes par rapport au marché du travail », Les marchés du travail, les institutions sociales et l’avenir des enfants au Canada, publié sous la direction de Miles Corak, no 89-553-XIB au catalogue de Statistique Canada, Ottawa, 1998, chap. 3, p. 35 à 56.

  • PALAMETA, Boris. « Le faible revenu chez les immigrants et les minorités visibles », L’emploi et le revenu en perspective, no 75-001-XIF au catalogue de Statistique Canada, avril 2004, vol. 5, no 4, édition en ligne.

  • PÉREZ, Claudio, et Marie P. BEAUDET. « La santé des mères seules », Rapports sur la santé, no 82-003-XIF au catalogue de Statistique Canada, automne 1999, vol. 11, no 2, p. 23 à 36.

  • PICOT, Garnett. Dégradation du bien-être économique des immigrants et causes possibles, no 11F0019MIF au catalogue de Statistique Canada, Ottawa, 2004, no 222, série « Documents de recherche, Direction des études analytiques ».

  • PICOT, Garnett, et Feng HOU. La hausse du taux de faible revenu chez les immigrants au Canada, no 11F0019MIF au catalogue de Statistique Canada, Ottawa, 2003, no 198, série « Documents de recherche, Direction des études analytiques ».

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  • STATISTIQUE CANADA. Les gains des Canadiens : gagner sa vie dans la nouvelle économie, no 96F0030XIF2001013 au catalogue, Ottawa, 2003, Recensement de 2001, série « Analyses ».

  • SUNTER, Deborah. « Les jeunes en attente… », L’emploi et le revenu en perspective, no 75-001-XPF au catalogue de Statistique Canada, printemps 1994, vol. 6, no 1, p. 37 à 43.

Article intégral en format PDF

Auteur
Lucy Chung est au service de la Division de l’analyse des entreprises et du marché du travail. On peut la joindre au 951-1903 ou à perspective@statcan.gc.ca.


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Date de modification : 2014-05-14 Avis importants