Les prêts sur salaire Wendy Pyper
Les « services bancaires marginaux », comme on les appelle communément, ou le « marché parallèle du crédit à la consommation », constituent un secteur en pleine croissance au Canada, avec des points de vente offrant une panoplie de services, dont des prêts « sur salaire » à court terme. L’offre de prêts sur salaire est relativement nouvelle, remontant au début des années 1990. Les 200 et quelques points de vente qui existaient alors aux États-Unis sont passés à environ 22 000 maintenant, avec un volume de prêts annuel de 40 milliards de dollars (Ernst & Young, 2004; Kirchhoff, 2006). La croissance des points de vente a également été rapide au Canada, ces derniers passant d’une poignée seulement à environ 1 200 en 2004 (Kitching et Starky, 2006). Ce secteur d’activité est formé de prêteurs à court terme qui ne sont pas des institutions de dépôt. À ce titre, ils sont actuellement déréglementés pour l’essentiel, puisqu’ils ne sont pas régis par la plupart des lois qui s’appliquent aux institutions financières traditionnelles (CMC, 2004).
Tout en étant très limité par rapport à celui des grandes institutions financières, le secteur financier parallèle exécute un nombre élevé d’opérations (Ramsay, 2000, p. 4). Des préoccupations ont été soulevées relativement aux pratiques douteuses du secteur des prêts sur salaire, dont des frais d’emprunt élevés, une déclaration insuffisante des modalités contractuelles, des modes de recouvrement injustes et un endettement vertigineux résultant de la reconduction1 des prêts (Canada, 2006; ACORN Canada, 2004). Une fois annualisés, les taux d’intérêt et autres frais exigés pour emprunter 100 $ pour 14 jours peuvent varier entre 335 % et 650 %, taux supérieurs aux dispositions prévues par le Code criminel en matière de taux d’intérêt criminel (voir L’abc des prêts sur salaire)2.
Les familles empruntent pour diverses raisons. Elles peuvent être incapables de couvrir les dépenses avec leur revenu ou leurs avoirs actuels — l’étape du cycle de vie, le niveau de scolarité et le revenu sont autant de facteurs qui déterminent si une famille a les ressources financières nécessaires. En outre, les familles n’ont pas toutes les mêmes compétences ni la même expérience en matière de gestion financière, ce qui influe sur leur comportement d’épargne et de dépense.
Pourquoi donc certaines personnes préfèrent-elles emprunter de l’argent par le biais d’un prêt sur salaire plutôt que par l’intermédiaire d’une banque? Certains emprunteurs peuvent préférer la commodité liée à l’emplacement du point de vente et aux heures d’ouverture ainsi que la facilité et la rapidité d’approbation (Environics, 2005). D’autres peuvent opter pour un prêt sur salaire parce qu’ils vivent dans une collectivité mal desservie par les institutions financières traditionnelles (ACORN, 2004). Les personnes dont la cote de crédit est mauvaise ou qui ont déjà fait faillite, ou qui n’ont pas de compte bancaire, peuvent ne pas avoir la possibilité de recourir à des moyens moins coûteux tels que les cartes de crédit, les marges de crédit ou la protection de découvert. Sans les prêts sur salaire, certains consommateurs pourraient se tourner vers des options de crédit moins souhaitables, telles que le prêt usuraire et le crime organisé (CMC, 2002).
L’Enquête sur la sécurité financière (ESF) de 2005 a été la première à fournir de l’information sur l’utilisation des prêts sur salaire, et le présent article examine les caractéristiques, attitudes et comportements des familles qui recourent à ces prêts (voir Source des données et définitions). Comme de nombreux facteurs sont interreliés (l’âge, le type de famille, la scolarité et l’épargne, notamment), une régression logistique a été utilisée (voir Régression logistique). Cette technique permet d’examiner la relation entre, par exemple, l’âge et le prêt sur salaire, les autres caractéristiques familiales spécifiées étant maintenues constantes.
La jeunesse est un facteur du recours aux prêts sur salaire
En 2005, moins de 3 % des familles (353 300) ont déclaré avoir contracté un prêt sur salaire au cours des trois années précédentes. Toutefois, ce recours varie selon les caractéristiques démographiques et socioéconomiques (graphique A). Un quart des familles qui se sont prévalues d’un prêt sur salaire avaient un principal soutien économique âgé de 15 à 24 ans, contre 6 % des familles non emprunteuses3. De même, les familles ayant eu recours à un prêt sur salaire avaient moins souvent un principal soutien économique de 45 ans ou plus (17 % contre 53 %). Divers facteurs peuvent expliquer ces différences, dont le cycle de vie de l’épargne et du revenu ainsi qu’une expérience variable de la gestion financière.
Vue sous un angle différent, l’incidence du recours aux prêts sur salaire a varié notablement selon l’âge du principal soutien (tableau 1). Moins de 1 % des familles ayant un principal soutien économique de 45 ans ou plus ont contracté un prêt sur salaire, contre 10 % des jeunes familles (principal soutien âgé de 15 à 24 ans). Même après prise en compte de variables financières clés telles que le revenu et les soldes bancaires, les jeunes familles étaient plus susceptibles d’avoir obtenu un prêt sur salaire. Par rapport au groupe de référence (principal soutien âgé de 35 à 44 ans), les jeunes familles étaient 3 fois plus susceptibles d’avoir eu recours à un prêt sur salaire.
Le type de famille peut aussi faire une différence pour plusieurs raisons5. Le paiement des factures peut être plus difficile si le revenu doit assurer la subsistance d’un plus grand nombre de membres de la famille. Les dépenses d’éducation des enfants peuvent causer des contraintes financières à la famille. À première vue, les personnes seules et les couples mariés avec enfants étaient beaucoup plus susceptibles que les couples sans enfants d’avoir contracté un prêt sur salaire (3,6 %, 3,5 % et 1,6 % respectivement). Mais après prise en compte des autres caractéristiques démographiques, financières et comportementales, le type de famille lui-même n’était pas lié à l’utilisation des prêts sur salaire.
Les familles dont le principal soutien avait un diplôme d’université ont moins souvent déclaré avoir eu recours à un prêt sur salaire — seulement 1,3 %, contre plus de 3 % des détenteurs d’un diplôme d’études secondaires ou d’un certificat d’études postsecondaires. Cette différence peut être attribuable au fait que les diplômés d’université ont un revenu plus élevé ou sont plus au courant des options de crédit, de leurs coûts et des conséquences d’un endettement excessif (Stegman et Faris, 2003, p. 16). Mais après prise en compte des autres caractéristiques familiales, la scolarité n’était pas liée à l’utilisation des prêts sur salaire.
Prêts sur salaire, revenu et épargne liquide
Une des conditions pour obtenir un prêt sur salaire est souvent d’avoir un revenu régulier. Il n’est donc pas surprenant que les familles sans soutien soient moins susceptibles que celles qui en comptent au moins un d’avoir obtenu un prêt sur salaire (ratio de probabilité de 0,3).
On pourrait s’attendre à ce que le revenu soit lié aux prêts sur salaire et, effectivement, les familles à faible revenu6 (après impôt) étaient deux fois plus susceptibles que les autres d’avoir utilisé un prêt sur salaire — 4,6 %, contre 2,3 % (ces données ne sont pas illustrées). Une autre ventilation montre que les familles aux revenus plus élevés avaient une incidence d’utilisation beaucoup moindre de ces prêts — 1,4 % pour celles gagnant plus de 66 000 $, contre 3,0 % pour celles dont le revenu varie entre 40 001 $ et 66 000 $.
Les avoirs disponibles, surtout l’épargne liquide dans des comptes bancaires, peuvent également servir en cas de besoin. Près de 6 % des familles ayant un solde bancaire de 500 $ ou moins avaient contracté un prêt sur salaire, contre seulement 1 % de celles dont le solde variait entre 2 001 $ et 8 000 $7.
Le revenu et l’épargne liquide sont liés et, en tant qu’indicateurs de la capacité financière, jouent tous deux un rôle dans l’utilisation des prêts sur salaire. Lorsque le modèle comprend le revenu familial à l’exclusion de l’épargne liquide, le revenu est important (ces données ne sont pas illustrées); mais lorsqu’ils sont tous deux pris en compte, l’épargne intervient fortement dans l’utilisation des prêts sur salaire, et le revenu disparaît comme prédicteur. Ce fait illustre que le revenu n’est pas l’unique facteur; d’autres aspects de la capacité financière d’une famille interviennent dans le recours aux prêts sur salaire. Après prise en compte des autres caractéristiques familiales, les familles ayant tout au plus 500 $ dans leur compte bancaire étaient beaucoup plus susceptibles (2,6 fois) que celles ayant de 2 001 $ à 8 000 $ d’avoir contracté un prêt sur salaire, ce qui n’est guère surprenant, puisque la disponibilité de fonds pour payer les dépenses fait en sorte que les familles n’ont pas à chercher ailleurs.
Si l’argent en banque est un indicateur des avoirs disponibles, la valeur nette, c’est-à-dire la différence entre la valeur totale des avoirs et la somme totale des dettes, est une mesure plus vaste de la santé financière. Fait non surprenant, le recours aux prêts sur salaire était plus fréquent chez les familles situées à l’extrémité inférieure de la répartition de la valeur nette (graphique B). En fait, 7,1 % des familles du cinquième inférieur de la valeur nette ont contracté un prêt sur salaire, contre seulement 1,5 % de celles du cinquième intermédiaire (ces données ne sont pas illustrées). Plus de la moitié des familles qui ont recouru aux prêts sur salaire se situaient dans le 20 % inférieur et près de huit sur 10, dans le 40 % inférieur.
La propriété résidentielle, avoir non liquide et indicateur de l’étape du cycle de vie, est également liée à l’incidence des prêts sur salaire. Alors que moins de 2 % des propriétaires-occupants avec hypothèque avaient contracté un prêt sur salaire, les locataires étaient presque trois fois plus nombreux à avoir eu recours à cette méthode. Vu autrement, sept familles sur 10 qui ont recouru à un prêt sur salaire étaient des locataires (37 % pour celles qui n’ont pas emprunté). Parmi les explications possibles de cette différence figure l’effet de l’âge et du revenu (Lefebvre, 2002; Luffman, 2006).
Stratégies financières
Les cartes de crédit remplacent avantageusement l’argent liquide. Plus de huit familles sur 10 qui n’ont pas eu recours à un prêt sur salaire disposaient de cartes de crédit, comparé à moins de six sur 10 pour les familles qui en ont obtenu un (tableau 2). L’absence d’une carte de crédit peut mener au recours à d’autres solutions pour faire face à un manque de fonds à court terme. Moins de 2 % des familles titulaires d’une carte de crédit ont recouru à un prêt sur salaire (tableau 1). Parmi les familles sans carte de crédit et auxquelles une carte n’avait pas été refusée, cette incidence s’élevait à 5,4 %; dans le cas de celles qui avaient essuyé un refus, elle atteignait 11,4 %. Même après prise en compte des autres caractéristiques familiales, les familles sans carte de crédit étaient plus susceptibles d’avoir contracté un prêt sur salaire — deux fois plus pour celles à qui une carte n’avait pas été refusée et plus de trois fois davantage pour celles ayant essuyé un refus.
Si l’utilisation d’une carte de crédit n’est pas nécessairement problématique, le paiement d’une partie seulement du montant dû à temps entraîne des frais d’intérêt8. Parmi les titulaires d’une carte de crédit, près des trois quarts de ceux qui n’ont pas recouru à un prêt sur salaire réglaient habituellement leur solde chaque mois, contre un peu plus de la moitié des utilisateurs de prêts sur salaire (tableau 2).
Le retard dans le paiement des factures peut également indiquer une difficulté à faire face aux dépenses ou des problèmes de gestion financière générale. Les familles dont les factures où les prêts étaient en souffrance étaient nettement plus susceptibles que les autres de recourir aux prêts sur salaire (4,3 fois), même après prise en compte des autres caractéristiques de la famille.
Plusieurs autres indicateurs d’antécédents financiers confirment que les familles qui ont contracté un prêt sur salaire font souvent face à des difficultés financières. Par exemple, non seulement les utilisateurs de prêts sur salaire étaient-ils plus susceptibles d’être en retard dans le paiement des factures ou des prêts, mais un sur sept acquittait aussi son loyer ou son versement hypothécaire en retard, ce qui est nettement supérieur à ceux qui n’ont pas eu recours à un prêt sur salaire (un sur 40).
De nombreux utilisateurs de prêts sur salaire ont souvent des dépenses supérieures au revenu…
Les habitudes de dépenses peuvent être différentes dans les familles qui ont recours à un prêt sur salaire. Dans leur cas, les dépenses sont souvent supérieures au revenu, d’où une difficulté à joindre les deux bouts de mois en mois. Quatre familles sur 10 ont ainsi déclaré que leurs dépenses étaient plus élevées que leur revenu, beaucoup plus que les familles qui n’ont pas recouru à un tel prêt (moins de deux sur 10). Le rapport entre les dépenses et le revenu peut être influencé par le stade du cycle de vie où se trouve la famille9. Par exemple, les jeunes familles peuvent avoir des besoins matériels plus importants alors qu’elles bâtissent leur ménage et investissent dans leur éducation et leur formation. Les familles plus âgées, par contre, ont eu plus de temps pour accumuler des économies dans lesquelles elles peuvent puiser en cas de besoin.
…et ils se départissent plus souvent de leurs biens
Des stratégies autres que le recours aux cartes de crédit permettent de faire face aux dettes, dont la vente d’un avoir ou d’un bien à un prêteur sur gage. Parmi les familles qui ont contracté un prêt sur salaire, un sixième avaient vendu un bien pour payer une dette et un cinquième avaient recouru à un prêteur sur gage, ce qui est beaucoup plus élevé que pour les familles n’ayant pas recouru à un tel prêt (1 sur 20 et 1 sur 50 respectivement). Ces mesures extrêmes indiquent un besoin urgent. De plus, les utilisateurs de prêts sur salaire étaient plus de deux fois plus susceptibles d’avoir déjà déclaré faillite, un indicateur encore plus clair de difficultés financières (15 % contre 6 %)10.
Les utilisateurs de prêts sur salaire n’ont souvent pas d’autres recours
Presque la moitié des familles qui ont eu recours à un prêt sur salaire ont déclaré n’avoir personne à qui s’adresser pour obtenir une aide financière afin de faire face à une difficulté financière, ce qui est nettement plus que les autres familles (32 %) (tableau 2). Il semble que ces familles ont peu d’options pour obtenir de l’aide. Pour examiner plus en détail ces options, l’enquête a prévu d’autres questions du genre « Que se passerait-il si… » sur les recours possibles pour surmonter des moments difficiles.
La manière de faire face à une dépense imprévue varie aussi considérablement entre utilisateurs et non-utilisateurs de prêts sur salaire (graphique C). Pour une dépense de 500 $, six familles non utilisatrices sur 10 ont affirmé qu’elles puiseraient dans leurs économies, près du double de la proportion des familles utilisatrices (33 %). De plus, les non-utilisateurs ont souvent indiqué qu’ils utiliseraient une marge de crédit (19 % contre 10 %)11. Emprunter à un ami ou un proche a été plus souvent mentionné par les utilisateurs de prêts sur salaire — 27 %, contre seulement 12 %. Plus d’un quart de ces familles ne pouvaient faire face à une dépense imprévue de 500 $, presque quatre fois plus par rapport aux non-utilisateurs (7 %).
Une dépense imprévue de 5 000 $ est un obstacle beaucoup plus sérieux. Pour une dépense de cette ampleur, 35 % des familles non utilisatrices d’un prêt sur salaire puiseraient dans leurs économies et 25 % utiliseraient une marge de crédit; dans le cas des familles qui ont contracté un prêt sur salaire, ces chiffres s’établissaient à 10 % et à 14 %. Ces approches financières plus courantes ont été mentionnées plus souvent par les non-utilisateurs de prêts sur salaire. Seulement 17 % des non-utilisateurs étaient totalement incapables de faire face à une telle dépense, contre près de la moitié des familles utilisatrices. À l’évidence, ces options diffèrent, probablement en raison d’une combinaison de circonstances financières et de rapports différents avec les autres instruments de crédit.
Résumé
Les prêts sur salaire sont une petite part mais une part croissante du marché parallèle du crédit à la consommation offrant des services financiers au Canada. Les rapports abondent sur les taux d’intérêt exorbitants, et la nécessité d’accroître les contrôles et les règlements dans ce secteur d’activité a été discutée12.
L’Enquête sur la sécurité financière jette un éclairage sur les personnes qui recourent aux prêts sur salaire et sur les caractéristiques familiales liées à ce recours. L’âge est un facteur clé. En effet, après prise en compte des autres caractéristiques familiales, les jeunes familles étaient trois fois plus susceptibles d’avoir contracté un prêt sur salaire que celles dont le principal soutien était âgé de 35 à 44 ans.
Les attributs financiers sont également liés au recours aux prêts sur salaire, même après prise en compte des autres caractéristiques. Les familles ayant peu d’épargne ou sans carte de crédit, particulièrement celles qui avaient essuyé un refus, étaient beaucoup plus susceptibles d’avoir utilisé un prêt sur salaire. Sans épargne ou sans carte de crédit, et face à des difficultés financières, ces familles ont peut-être eu recours à un prêt sur salaire pour joindre les deux bouts entre deux chèques de paie.
Les familles en retard dans le paiement des factures ou des prêts étaient plus de quatre fois davantage susceptibles d’avoir contracté un prêt sur salaire, même après prise en compte d’autres caractéristiques clés telles que le revenu et l’épargne. Quatre familles sur 10 qui ont contracté un prêt sur salaire avaient des dépenses plus élevées que leur revenu, beaucoup plus que les familles qui n’ont pas sollicité un tel prêt. Ces facteurs indiquent une relation entre les difficultés financières et le recours aux prêts sur salaire.
Presque la moitié des familles qui ont eu recours à un prêt sur salaire ont déclaré n’avoir personne à qui s’adresser en cas de difficulté financière. Plus d’un quart de ces familles ont déclaré qu’elles ne pouvaient faire face à une dépense imprévue de 500 $, et près de la moitié, à une dépense de 5 000 $. Les méthodes traditionnelles, telles que l’utilisation des économies ou d’une marge de crédit, étaient mentionnées moins souvent par ces familles.
Si l’Enquête sur la sécurité financière ne nous dit pas directement pourquoi les familles ont recours à un prêt sur salaire, d’importants indicateurs de difficultés financières passées et présentes donnent à penser que les familles qui le font n’ont guère d’autres choix.
Source des données et définitions
L’Enquête sur la sécurité financière (ESF), menée auprès d’environ 5 300 familles, a permis de recueillir des données sur les avoirs et les dettes des familles et des individus de mai à juillet 2005. Les résidents des territoires, les ménages des réserves indiennes, les membres à temps plein des Forces armées et les pensionnaires d’un établissement institutionnel étaient exclus. Les données recueillies portent sur la valeur des principaux avoirs financiers et non financiers ainsi que sur les montants dus. Le volet « comportements et attitudes » du questionnaire de l’ESF comprend des questions sur la façon dont les finances sont gérées.
Si l’ESF demandait aux répondants d’indiquer s’ils avaient emprunté de l’argent par le biais d’un prêt sur salaire au cours des trois dernières années, d’autres questions n’étaient pas fondées sur cette période de référence. Certaines questions étaient liées à l’état au moment de l’enquête (âge, type de famille, scolarité, avoirs et dettes, présence d’un budget, utilisation de cartes de crédit), d’autres étaient basées sur 2004 (revenu, retard dans les paiements et plusieurs questions de stratégie financière), et la déclaration de faillite est fondée sur le fait d’avoir déjà fait faillite. Si ces différences dans les périodes de référence peuvent entraîner certaines erreurs, la méthodologie utilisée dans cette étude respecte celle suivie par Stegman et Faris (2003). De plus, en raison du biais de rappel, les répondants sont moins susceptibles de se souvenir d’événements survenus il y a longtemps (Horvath, 1982; Hassan, 2006); par conséquent, l’utilisation déclarée des prêts sur salaire devrait être très contemporaine des variables de contrôle.
Argent emprunté par le biais d’un prêt sur salaire : la question suivante a servi à déterminer si une famille avait obtenu un prêt sur salaire : Au cours des trois dernières années, l’un d’entre vous a-t-il emprunté de l’argent par le biais d’un prêt sur salaire?
Le terme famille désigne une famille économique ou une personne seule. La famille économique est un groupe de deux personnes ou plus vivant dans le même logement et qui sont apparentées par le sang, le mariage, l’union de fait ou l’adoption. Une personne seule est une personne non âgée vivant seule ou avec des personnes non apparentées, comme des camarades de chambre ou des pensionnaires. Les couples mariés avec enfants sont des couples non âgés (mariés devant la loi ou en union libre) vivant avec des enfants (nés du couple, adoptés, issus d’un mariage antérieur ou en foyer d’accueil) de moins de 18 ans. Les couples mariés sans enfants sont des couples non âgés sans enfants de moins de 18 ans. Les autres familles sont les familles de personnes âgées (65 ans et plus) et les familles monoparentales.
Le principal soutien économique est le membre de famille au revenu le plus élevé avant impôt.
La valeur nette d’une famille est la différence entre la valeur totale des avoirs et le montant total des dettes. Les familles sont classées par valeur nette et divisées en cinq groupes égaux.
Le solde des comptes d’épargne et de chèques exclut les régimes d’épargne enregistrés.
Le seuil de faible revenu représente le niveau de revenu auquel une famille risque de se trouver dans une situation difficile parce qu’elle doit consacrer une part plus élevée de son revenu aux nécessités que la famille moyenne de taille similaire. Des seuils distincts sont calculés pour sept tailles de famille et cinq tailles de collectivité. Voir Statistique Canada (2006) pour en savoir plus. |
Régression logistique
La régression logistique sert à estimer la probabilité qu’un événement se réalise (par exemple, l’emprunt d’argent par le biais d’un prêt sur salaire) en fonction de plusieurs variables indépendantes. Cette technique permet d’examiner la relation qui existe entre chaque variable indépendante et l’événement, les autres variables spécifiées étant maintenues constantes. Les ratios de probabilité sont indiqués d’après la régression. Ils montrent si certaines variables accroissent ou réduisent les chances de recourir à un prêt sur salaire comparativement à un groupe de référence, après pris en compte de toutes les autres variables indépendantes du modèle. On a utilisé ici des poids bootstrap pour estimer les erreurs-types afin de tenir compte du plan d’échantillonnage complexe utilisé dans l’ESF. |
L’abc des prêts sur salaire
Les prêts sur salaire sont des prêts à court terme d’un montant relativement modeste (de 100 $ à 1 000 $) consentis par des prêteurs autres que les banques ou autres institutions financières réglementées. Ces prêts s’élèvent à 280 $ en moyenne consentis pour une période de 10 jours (ACPS, 2006). En général, l’emprunteur doit présenter une pièce d’identité, détenir un compte de chèques et présenter une preuve de revenu régulier. Le remboursement doit avoir lieu au plus tard le jour de paie suivant. Les prêteurs suivent des règles différentes pour déterminer le montant du prêt et fixent souvent une limite en fonction du salaire net de l’emprunteur. Ce dernier fournit un chèque postdaté d’un montant équivalant à l’emprunt, auquel s’ajoutent les frais et intérêts exigés (Kitching et Starky, 2006).
En 2004, environ 1 200 points de vente offraient des prêts sur salaire au Canada. Ces entreprises de « services bancaires marginaux » offrent également l’encaissement de chèques, des avances sur remboursement d’impôt et des transferts de fonds. Elles tirent toutefois l’essentiel de leur revenu de leurs services de prêt sur salaire et d’encaissement de chèques (Kitching et Starky, 2006).
Le coût pour l’emprunteur comprend les frais d’intérêt et divers autres frais, dont des frais d’administration, de traitement, de courtage et de recouvrement. L’Agence de la consommation en matière financière du Canada estime le coût d’un prêt de 300 $ pour une période de 14 jours à 50 $, l’équivalent de 435 % par année, ce qui est de loin supérieur à d’autres emprunts à court terme, tels qu’une avance de fonds sur carte de crédit (4,13 $ ou 36 %), une protection de découvert (2,42 $ ou 21 %) ou une marge de crédit (1,15 $ ou 10 %)4.
Le coût du prêt se présente souvent sous forme de frais plutôt que d’intérêts. Une étude qui s’est penchée sur les coûts des prêts sur salaire à Toronto a découvert diverses structures de frais : soit par tranche de 100 $ empruntés ou des frais fixes, peu importe le montant. Les taux d’intérêt nominal varient entre 335 % et 650 % pour un prêt de 100 $ remboursé en 14 jours. (Voir L'abc des prêts sur salaire - Tableau et l’Enquête sur les prêts sur salaire.) |
Notes
- La reconduction consiste à prolonger un prêt en exigeant des frais, habituellement des frais de pénalité, des frais administratifs et des frais pour le nouveau prêt (CMC, 2004).
- L’Association canadienne des prêteurs sur salaire a affirmé que le taux annualisé en pourcentage n’était pas une façon adéquate de représenter le coût des prêts sur salaire puisqu’il s’agit de prêts à cour terme (Canada, 2005).
- Seul un très petit nombre de familles avaient un principal soutien âgé de 15 à 17 ans.
- Voir note 2.
- L’ESF est menée à l’échelle de la famille. (« Quelqu’un dans la famille a-t-il emprunté de l’argent par le biais d’un prêt sur salaire? ») Comme une personne seule constitue un ménage d’une personne, elle seule peut potentiellement utiliser ce service, comparativement à un couple.
- Pour en savoir plus sur le calcul des seuils de faible revenu, voir Statistique Canada (2006).
- Au sujet de la valeur nette, l’ESF prévoyait des questions sur les avoirs et les dettes au moment de l’enquête, c.-à-d. en mai ou juin 2005. Dans le cas présent, les répondants devaient fournir des renseignements sur le solde de leurs comptes d’épargne et de chèques.
- Voir le tableau figurant dans l’encadré L’abc des prêts sur salaire pour une comparaison du coût d’emprunt au moyen d’un prêt sur salaire, d’une avance de fonds sur carte de crédit, d’une protection de découvert et d’une marge de crédit.
- L’approche du cycle de vie en matière de dépenses du ménage est résumée dans Chawla et Wannell (2005). La vie d’un ménage est divisée en trois étapes : l’emprunt, alors que les nouveaux ménages investissent en eux-mêmes dans l’attente d’une hausse de revenu, l’accumulation, alors que les ménages économisent le revenu excédentaire en prévision de la retraite, et la désépargne, alors que les ménages puisent dans leurs économies pour financer leur retraite. Ces étapes correspondent à peu près à l’âge de la personne de référence : moins de 45 ans, de 45 à 64 ans et 65 ans ou plus.
- La faillite n’a pas été incluse dans le modèle de régression logistique car elle aurait pu survenir en tout temps dans le passé. De plus, ajouter trop de variables connexes peut entraîner une multicollinéarité.
- Dans le cadre de l’ESF, les répondants devaient indiquer les soldes impayés des marges de crédit, mais pas spécifiquement s’ils avaient une marge de crédit.
- Trois provinces (le Manitoba, la Nouvelle-Écosse et la Saskatchewan) ont déposé des projets de loi concernant les prêts sur salaire. Le Manitoba et la Nouvelle-Écosse ont adopté ces projets de loi. Pour en savoir plus sur le projet de loi du Manitoba (projet de loi 25, 5e session de la 38e législature) ; pour celui de la Nouvelle-Écosse (projet de loi 87, 1re session de la 70e législature) ; et pour celui de la Saskatchewan (projet de loi 43, 3e session de la 25e législature - PDF).
Documents consultés
- ASSOCIATION CANADIENNE DES PRÊTEURS SUR SALAIRE (ACPS). 2006. What is a payday loan?.
- ASSOCIATION OF COMMUNITY ORGANIZATIONS FOR REFORM NOW (ACORN) Canada. 2004. Protecting Canadians’ Interest: Reining in the Payday Lending Industry, Vancouver, 36 p.
- CANADA. Le Sénat. Délibérations du comité sénatorial permanent des banques et du commerce, réunion du 27 octobre 2005, 1re session de la 38e législature, fascicule no 18.
- CANADA. Ministère de la justice. 2006. Modifications législatives concernant les prêts sur salaire, fiche d’information, Ottawa, 2 p.
- CHAWLA, Raj K. et Ted WANNELL. « Dépenser ou épargner? », L’emploi et le revenu en perspective, mars 2005, no 75-001-XIF au catalogue de Statistique Canada, vol. 6, no 3, (consulté le 3 avril 2007).
- COMITÉ DE MESURES EN MATIÈRE DE CONSOMMATION (CMC). 2002. Document de consultation sur les options stratégiques pour régler les préoccupations relatives au marché parallèle du crédit à la consommation, Bureau de la consommation, Industrie Canada, Ottawa, 12 p.
- ---. 2004. Document de consultation des intervenants relativement à une proposition de cadre de protection des consommateurs dans le marché parallèle du crédit à la consommation, Bureau de la consommation, Industrie Canada, Ottawa, 23 p.
- ENVIRONICS RESEARCH GROUP. Qui sont les consommateurs du secteur des prêts sur salaire au Canada, Exposé à l’Association canadienne des fournisseurs de services financiers communautaires, 9 juin 2005.
- ERNST & YOUNG. 2004. The Cost of Providing Payday Loans in Canada, Groupe des services de la politique fiscale, 59 p.
- HASSAN, Eman. 2006. « Recall bias can be a threat to retrospective and prospective research designs », The Internet Journal of Epidemiology, vol. 3, no 2.
- HORVATH, Francis W. « Forgotten unemployment: Recall bias in retrospective data », Monthly Labor Review, vol. 105, no 3, mars 1982, p. 40 à 43.
- KIRCHHOFF, Sue. « Breaking the cycle of payday loan ‘trap’ », USA Today, 20 septembre 2006, p. B1.
- KITCHING, Andrew et Sheena STARKY. 2006. Les sociétés de prêts sur salaire au Canada : déterminer l’intérêt public, Bibliothèque du Parlement, Service d’information et de recherche parlementaires, 16 p.
- LEFEBVRE, Sophie. « Le logement, une question de revenu », L’emploi et le revenu en perspective, no 75-001-XIF au catalogue de Statistique Canada, vol. 3, no 6, juin 2002, (consulté le 3 avril 2007).
- LUFFMAN, Jacqueline. « Mesurer l’abordabilité du logement », L’emploi et le revenu en perspective, no 75-001-XIF au catalogue de Statistique Canada, vol. 7, no 11, novembre 2006, (consulté le 3 avril 2007).
- RAMSAY, Iain. 2000. Access to Credit in the Alternative Consumer Credit Market, document préparé pour le Bureau de la consommation, Industrie Canada, et le ministère de la justice de Colombie-Britannique.
- STATISTIQUE CANADA. 2006. Le revenu au Canada, 2004, no 75-202-XIF au catalogue, Ottawa, (consulté le 3 avril 2007).
- STEGMAN, Michael A. et Robert FARIS. « Payday lending: A business model that encourages chronic borrowing”, Economic Development Quarterly, vol. 17, no 1, février 2003, p. 8 à 32.
Article intégral en format PDF
Auteur
Wendy Pyper est au service de la Division de l’analyse des enquêtes auprès des ménages et sur le travail. On peut la joindre au 613-951-0381 ou à perspective@statcan.gc.ca.
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