Les mal-aimés du marché du travail Vincent Dubé
S’il est un indicateur important de l’état de l’économie, le taux de chômage n’en représente qu’une facette. Une autre statistique du chômage, à savoir la durée de recherche d’emploi, est un indicateur essentiel du bien-être économique1. Il est donc primordial de distinguer entre chômage de longue durée (ou chômage prolongé) et chômage de moyenne et courte durée. Si ces deux derniers correspondent à un roulement normal de la main-d’œuvre, le chômage prolongé est plutôt lié à des rigidités structurelles du marché du travail.
Le chômage prolongé a toujours retenu l’attention en raison de ses coûts élevés et de sa nature pernicieuse. En effet, dans la plupart des pays industrialisés, il existe une relation négative entre la durée du chômage et la probabilité de retour au travail (voir Le chômage prolongé à l’échelle internationale). Sur le plan individuel, le chômage prolongé entraîne des pertes d’opportunités présentes et futures, des difficultés financières, l’exclusion sociale, la perte d’estime de soi et des problèmes de santé. Sur le plan économique, le chômage prolongé entraîne une baisse des recettes fiscales, une perte de productivité due à la perte des compétences acquises et un accroissement des coûts des programmes sociaux et des soins de santé. En fait, l’efficacité même du marché du travail est entravée par des niveaux élevés de chômage prolongé en raison des coûts d’ajustement structurels qu’il entraîne2.
Cet article vise à apporter un éclairage sur le chômage prolongé au Canada pour la période de 1976 à 2003 (voir Source des données et définitions). Il s’agira donc d’examiner d’abord l’évolution de la fréquence du chômage prolongé (proportion des chômeurs de longue durée en pourcentage de l’ensemble des chômeurs)3. Ensuite, il s’agira de cerner les groupes les plus touchés, puisque la durée totale du chômage n’est pas répartie uniformément (voir Les chômeurs de longue durée diffèrent-ils vraiment du reste des chômeurs?).
Récession et chômage de longue durée
En 1976, à la fin de la récession de 1975, des 738 000 personnes qui ont connu une période de chômage, 29 000 étaient sans emploi pendant 12 mois ou plus, ce qui représente une fréquence de chômage prolongé de 3,9 %. Cette fréquence a progressivement augmenté jusqu’au début des années 1980, mais cette augmentation s’est accélérée à la suite de la récession de 1981-1982. Ainsi, en 1985, près de 165 000 personnes voyaient leur situation de chômage durer un an ou plus, représentant une fréquence de chômage prolongé de 11,9 %. Puis, à mesure que la reprise de l’emploi s’intensifiait, la fréquence du chômage prolongé a progressivement diminué jusqu’en 1990, où elle s’est fixée à environ 7 % (81 000 personnes). Toutefois, à la suite de la récession du début des années 1990, cette fréquence a fortement remonté pour atteindre un nouveau sommet (17,3 %, soit près de 263 000 personnes) en 1994. La fréquence du chômage prolongé demeura élevée pendant une bonne partie des années 1990, puis diminua sensiblement à partir de 1998. Enfin, en 2003, 9,7 % des chômeurs, soit 126 000 personnes, étaient en chômage prolongé. Malgré un taux de chômage global relativement comparable (environ 7,5 %), la fréquence du chômage prolongé en 2003 était de 39 % supérieure à celle de 1990 et plus du double (+120 %) de celle de 1977. Il faut donc se demander si certains facteurs cycliques n’ont pas eu comme effet de hausser le niveau « d’équilibre » du chômage prolongé, un phénomène que les économistes du travail désignent par « l’effet d’hystérèse »4.
Une bonne part des variations du chômage prolongé semble être liée aux fluctuations cycliques de l’économie (graphique). Il existe, en effet, une forte corrélation entre le taux de chômage global et le chômage prolongé (Wong, Henson et Roy, 1999), mais avec un certain décalage entre l’augmentation du taux de chômage et celle du chômage prolongé. De même, le chômage prolongé demeure généralement élevé pendant plusieurs années durant les reprises économiques malgré le fait que le taux de chômage s’ajuste plus rapidement à la baisse. Par exemple, après la récession du début des années 1990, le taux de chômage au Canada a atteint un sommet en 1993 (11,4 %), alors que les fréquences du chômage prolongé les plus élevées ont été observées en 1994 (17,3 %) et en 1996 (16,3 %). Cela donne à penser que les derniers travailleurs mis à pied sont généralement les premiers à retourner au travail lorsque que la situation économique s’améliore. Par contre, les personnes au chômage depuis déjà une certaine période ainsi que les travailleurs les moins qualifiés se retrouvent en plus grande proportion dans la population des chômeurs.
Il est généralement difficile de différencier les causes conjoncturelles des causes structurelles en ce qui a trait à la durée du chômage. Le modèle le plus souvent utilisé par les économistes du travail suppose qu’une fois un individu est au chômage, sa durée de chômage sera fonction de sa probabilité de recevoir une offre d’emploi et de l’accepter. La probabilité de recevoir une offre d’emploi est déterminée par des facteurs tels que le niveau de scolarité ou l’expérience de travail (aspect structurel de l’offre de travail) et par le contexte économique dans lequel le chercheur de travail se trouve (aspect conjoncturel de la demande de travail). De même, la probabilité que cette personne accepte cette offre est déterminée par le salaire attendu, c’est-à-dire le salaire minimum (y compris les avantages sociaux et les conditions de travail) auquel elle est prête à travailler et qui est à la fois fonction de ses caractéristiques personnelles et de la conjoncture économique.
Les causes structurelles du chômage prolongé sont nombreuses et de nature diverse. Ces causes seraient liées, par exemple, aux restructurations et réorganisations industrielles qui pourraient être provoquées par la libéralisation des échanges, une faible mobilité de la main-d’œuvre, les disparités régionales et la désuétude des qualifications résultant du progrès technologique. De plus, les modifications apportées aux politiques organisationnelles et institutionnelles ayant influé sur la flexibilité des salaires peuvent aussi avoir eu un effet sur le chômage prolongé. Par exemple, les compressions des programmes provinciaux d’assistance sociale pendant les années 1990 auraient plus fortement incité les prestataires à chercher du travail. Dans ce cas, il se peut que les sans-emploi aient eu plus tendance qu’auparavant à s’identifier comme chômeurs plutôt qu’inactifs (Bédard, Bertrand et Grignon, 2000).
Certains sont plus sévèrement touchés
Bien que de fortes hausses du chômage prolongé aient été le résultat des récessions du début des années 1980 et des années 1990, certaines populations et certaines régions ont été plus sévèrement touchées que d’autres.
Les hommes
Depuis plus de vingt ans, les chômeurs de sexe masculin présentent une fréquence de chômage prolongé sensiblement plus élevée que ceux de sexe féminin (tableau 1). Cet écart a persisté malgré la présence croissante des femmes dans la population active. En 2003, la fréquence du chômage prolongé chez les hommes était de 11 %, contre 8 % chez les femmes, soit un écart de presque 40 %.
Cet écart s’expliquerait, entre autres, par la participation plus forte des hommes au marché du travail, mais aussi par les différences liées au secteur d’emploi et au type de travail. Par exemple, les femmes affichent des mouvements d’effectifs plus élevés que les hommes (Blau, Ferber et Winkler, 2002) et sont davantage représentées dans le secteur des services et le travail à temps partiel, secteur et type de travail qui se caractérisent par des taux de rotation plus élevés.
Les chômeurs plus âgés
Les chômeurs plus âgés (de 45 ans et plus) ont constamment affiché la fréquence de chômage prolongé la plus élevée. Cette fréquence était de 17 % en 2003, contre 10 % chez les chômeurs de 25 et 44 ans et 3 % chez les chômeurs de 15 à 24 ans (tableau 2). Ces chiffres indiquent la présence d’une relation positive entre l’âge et le risque d’être en chômage prolongé. Cette relation serait alors l’inverse de celle observée entre l’âge et le risque d’être au chômage, exprimé par le taux de chômage. Autrement dit, si la probabilité de perdre son emploi paraît plus faible chez les travailleurs plus âgés, ceux-ci, une fois au chômage, semblent avoir plus de mal à trouver du travail.
La fréquence plus élevée du chômage prolongé chez les chômeurs plus âgés peut s’expliquer par plusieurs facteurs, dont leur plus faible mobilité (liée à des coûts de réinstallation plus élevés), un niveau de scolarité inférieur à celui des chômeurs de 25 à 44 ans, une plus faible capacité de recherche d’emploi et la possibilité d’une certaine discrimination à leur égard (DRHC, 1997; Hutchens, 1988). En outre, il est généralement plus difficile de trouver un nouveau poste après avoir occupé le même emploi pendant plusieurs années et accumulé des compétences non transférables. Par ailleurs, comme il s’agit de chômeurs dont l’expérience professionnelle et le patrimoine net sont plus élevés, il se peut que ces chômeurs soient plus sélectifs, ce qui contribue à allonger leur période de recherche d’emploi. Ces chômeurs sont aussi plus touchés par le retrait involontaire de la population active, souvent par une retraite anticipée, ce qui revient à du chômage caché. Il se peut donc que le chômage prolongé soit sous-estimé chez les groupes plus âgés.
D’autre part, la fréquence plus faible du chômage prolongé chez les chômeurs plus jeunes serait liée à leur taux de roulement élevé sur le marché du travail. Ces chômeurs seraient davantage enclins à accepter des emplois à temps partiel, précaires ou moins bien payés ou encore à retourner aux études après une recherche d’emploi infructueuse. Toutefois, même s’ils sont proportionnellement moins touchés par le chômage prolongé, on peut penser qu’ils en éprouvent plus durement les conséquences. Par exemple, plusieurs d’entre eux n’ont souvent pas de véritable expérience liée à leur formation, ne possèdent que très peu de liens avec le marché du travail et n’ont pas accumulé le nombre d’heures nécessaires pour être admissibles à l’assurance-emploi. En outre, comme ces chômeurs ont le patrimoine net le plus faible, on peut penser qu’ils seraient dans une situation plus vulnérable à la suite d’une absence de revenu prolongée.
L’écart de la fréquence du chômage prolongé entre chômeurs plus âgés et chômeurs plus jeunes s’est creusé au cours des deux dernières décennies. La comparaison de l’année 1980 à l’année 2003 montre que la fréquence du chômage prolongé est demeurée relativement stable (3 %) chez les chômeurs de 15 à 24 ans, alors qu’elle a presque doublé chez les chômeurs de 45 ans et plus, passant de 9 % à 17 %. L’effectif croissant des chômeurs de 45 ans et plus au sein de la population active a peut-être entraîné une concurrence accrue entre les chercheurs d’emploi de ce même groupe. D’un autre côté, les chômeurs de 45 ans et plus en 2003 sont peut-être différents de leurs homologues de 1980. Par exemple, il est possible qu’ils présentent des caractéristiques socio-économiques leur permettant d’être plus sélectifs par rapport aux emplois disponibles, tels un plus grand patrimoine accumulé ou encore une appartenance plus fréquente à une famille à deux revenus.
Les chômeurs moins scolarisés
Les chômeurs ayant un faible niveau de scolarité présentent généralement une fréquence de chômage prolongé sensiblement plus élevée que les autres groupes (tableau 3). En 2003, les chômeurs ayant moins que le niveau de 9e année affichaient une fréquence de chômage prolongé de près de 16 %, contre 9 % pour ceux ayant un niveau se situant entre la 9e année et le niveau universitaire et 12 % pour ceux détenant un diplôme universitaire. Ces chiffres concordent avec le taux de chômage, indiquant que la scolarité a un effet positif sur la recherche d’emploi.
Toutefois, la relation entre la fréquence du chômage prolongé et le niveau de scolarité n’est pas complètement linéaire. Par exemple, les chômeurs au niveau de scolarité le plus élevé (diplôme universitaire) affichaient en 2003 une fréquence de chômage prolongé plus élevée que ceux au niveau de scolarité intermédiaire (entre la 9e et le diplôme universitaire). Cela pourrait s’expliquer par le fait que les personnes plus instruites ont davantage tendance à éviter les emplois qui ne les intéressent pas. Ces personnes chercheraient davantage à optimiser leurs chances d’obtenir l’emploi (et le salaire) espéré, quitte à chercher plus longtemps. Par ailleurs, les personnes les moins scolarisées sont confrontées à une plus grande précarité d’emploi. Elles seraient alors plus contraintes d’accepter les emplois disponibles sur le marché même s’ils sont à temps partiel, temporaires ou mal rémunérés.
Les chômeurs du Québec et de Colombie-Britannique
La fréquence du chômage prolongé varie grandement d’une région à l’autre, allant de 13 % en Colombie-Britannique à 4 % dans les Prairies (tableau 4). Ce classement ressemble un peu à celui du taux de chômage régional, sauf pour ce qui est de la région de l’Atlantique, qui a affiché le taux de chômage le plus élevé en 2003. Cela n’est pas surprenant étant donné l’importance dans cette région du chômage saisonnier, qui est de courte ou moyenne durée.
Le Québec a été le plus durement touché par le chômage prolongé, suivi de la Colombie-Britannique, province qui s’en est mieux sortie que les autres régions après la récession du début des années 1990, puisqu’elle affichait, en 1994, la plus faible fréquence de chômage prolongé (12 %), tandis que l’Ontario a enregistré une fréquence de près de 20 %.
Résumé
Le chômage prolongé a touché moins de 4 % de l’ensemble des chômeurs en 1976, mais il a fortement pris de l’ampleur pendant les récessions du début des années 1980 et des années 1990. Il a atteint un niveau record en 1994, année où plus d’un chômeur sur six (17 %) étaient touchés. Malgré une baisse significative survenue depuis, la fréquence du chômage prolongé s’élevait à près de 10 % en 2003. Les hommes, les personnes plus âgées, celles les moins scolarisées et celles résidant au Québec et en Colombie Britannique ont affiché une fréquence de chômage prolongé supérieure à celle des autres groupes.
Source des données et définitions
L’Enquête sur la population active (EPA), qui est une enquête mensuelle, est la source des données de cette étude. On obtient ces données en demandant chaque mois aux répondants qui sont chômeurs au moment de l’enquête depuis combien de semaines ils cherchent activement un emploi.
La durée du chômage est la période pendant laquelle un individu est au chômage de manière ininterrompue. Cette notion ne désigne pas une mesure du temps passé sans travailler (temps qui inclut les périodes où le répondant ne faisait pas partie de la population active). En outre, du fait qu’elle ne tient compte que des périodes de chômage qui durent encore au moment de l’enquête, elle n’est pas une mesure complète de la durée du chômage. La durée du chômage constitue un indicateur tardif (ou cyclique tardif).
Les chiffres du chômage figurant dans cet article ne tiennent pas compte des personnes n’ayant pas cherché de travail en raison d’un emploi devant commencer à une date ultérieure. Les personnes qui ne cherchent plus de travail ne sont pas interrogées sur la durée de recherche d’emploi.
La population active est la population civile de 15 ans et plus (à l’exclusion des pensionnaires d’établissements) qui, durant la semaine de référence de l’enquête, était occupée ou en chômage.
Les chômeurs sont les personnes qui, durant la semaine de référence, étaient disponibles pour travailler et avaient été mises à pied temporairement, avaient cherché un emploi au cours des quatre dernières semaines ou devaient commencer un emploi au cours des quatre prochaines semaines.
Pour les fins de cet article, le chômage de courte durée concerne les personnes en chômage depuis 26 semaines consécutives ou moins. Comme les chômeurs dont on ignore la durée de chômage sont ceux qui n’ont pas cherché de travail en raison d’un emploi qu’ils doivent commencer à une date ultérieure, il est probable que la fréquence du chômage de courte durée soit légèrement sous-estimée. Le chômage de moyenne durée concerne les personnes en chômage depuis plus de 26 semaines et moins de 52 semaines consécutives. Le chômage de longue durée (ou chômage prolongé) désigne une période de 52 semaines ou plus.
La fréquence du chômage de longue durée (ou de courte et moyenne durée) est la proportion des chômeurs qui sont en chômage prolongé (de courte et moyenne durée) par rapport à l’ensemble des chômeurs.
Le taux de chômage est le nombre de chômeurs d’un groupe exprimé en pourcentage de la population active de ce même groupe.
La durée du chômage est le nombre de semaines consécutives durant lesquelles une personne a été mise à pied temporairement ou a été sans travail et à la recherche de travail.
Le chômage structurel désigne la situation dans laquelle les travailleurs ne peuvent occuper les postes disponibles parce qu’ils n’ont pas les compétences voulues, n’habitent pas là où les postes sont offerts ou ne sont pas prêts à travailler au salaire offert sur le marché.
Les travailleurs découragés sont les personnes sans emploi qui souhaitent travailler mais qui ne cherchent pas d’emploi car elles ne croient pas, pour diverses raisons, être en mesure d’en trouver un qui soit satisfaisant. Puisque ces individus ne cherchent pas activement du travail, ils ne font pas partie des chômeurs. |
Le chômage prolongé à l’échelle internationale
La fréquence du chômage prolongé varie considérablement d’un pays à l’autre. Elle est généralement beaucoup plus faible en Amérique du Nord que dans la majorité des pays industrialisés. Parmi les pays du G-7, par exemple, le Canada se classait au deuxième rang en 2002, tout juste derrière les États-Unis (8,5 %). Parmi les 30 pays de l’OCDE, le Canada se classe cinquième après le Mexique et les États-Unis, ces deux derniers pays se trouvant aux premier et quatrième rangs, respectivement (OCDE, 2003).
La fréquence du chômage prolongé est, par définition, tributaire du temps passé sans emploi. Plus le roulement de la main-d’œuvre est élevé dans un pays donné, plus la proportion de courtes périodes de chômage est importante et plus la fréquence du chômage de longue durée dans ce pays est faible. Comme les taux de roulement de la main-d’œuvre nord-américaine sont parmi les plus élevés au monde, il est peu surprenant que la fréquence du chômage prolongé y soit parmi les plus faibles. Toutefois, une faible fréquence du chômage prolongé peut également dissimuler un autre phénomène presque identique. Il est en effet possible que de plus longs épisodes de chômage soient remplacés par un plus grand nombre d’épisodes plus courts. Ainsi, en additionnant toutes les périodes de chômage d’une même personne au cours d’une année donnée, la durée totale de chômage pourrait s’apparenter à celle d’une personne en chômage prolongé.
En outre, les écarts considérables de fréquence du chômage prolongé entre les pays peuvent s’expliquer, du moins en partie, par les différences entre cycles économiques. Toutefois, une fréquence élevée de chômage prolongé ne provient pas seulement de l’augmentation du chômage global due à une conjoncture difficile. Cela est particulièrement apparent dans la comparaison du taux de chômage du Canada (7,7 %) avec celui du Royaume-Uni (5,1 %) en 2002. En effet, les différences observées entre pays datent de longtemps et ne semblent pas s’expliquer par des écarts des niveaux des taux de chômage ni par leurs variations (OCDE, 1987). D’autre part, plusieurs des différences qui caractérisent les politiques institutionnelles ont un effet sur les disparités observées. Certains aspects des programmes d’assurance-emploi nationaux ou encore la présence de mesures spécifiques pour contrer le chômage prolongé (le recours aux subventions salariales, par exemple) sont les plus souvent cités à cet égard. Tableau. |
Les chômeurs de longue durée diffèrent-ils vraiment du reste des chômeurs?
Près de quatre chômeurs sur cinq (79,1 %) étaient en chômage de courte durée en 2003. Le nombre élevé de mises à pied temporaires et l’importance du chômage saisonnier dans certains secteurs ont sans doute été des facteurs non négligeables à cet égard. De par son importance, le chômage de courte durée a les caractéristiques les plus similaires à celles du chômage global, à savoir une fréquence plus élevée chez les femmes (80,5 %), chez les travailleurs plus jeunes (89,2 %), les personnes au niveau de scolarité se situant entre la 9e année et le niveau universitaire (80,7 %), et chez les résidents de la région des Prairies (85,1 %).
Quant aux chômeurs de moyenne durée, ils représentaient 7,0 % de l’ensemble des chômeurs en 2003. Il s’agissait alors du type de chômage le moins fréquent au Canada. Globalement, la fréquence du chômage de moyenne durée est plus élevée chez les hommes (7,3 %), chez les chômeurs plus âgés (9,2 %), les chômeurs ayant un diplôme universitaire (9,4 %) et chez les chômeurs de l’Ontario (7,6 %). Dans l’ensemble, les personnes en chômage de moyenne durée semblent partager davantage les caractéristiques du chômage prolongé que celles du chômage de courte durée. Il existe toutefois certaines différences entre les deux types de chômage, notamment pour ce qui est du niveau de scolarité. Cela s’expliquerait par le fait que les chômeurs les plus scolarisés sont plus sélectifs à moyen terme dans leur recherche d’emploi en raison, entres autres, d’attentes salariales plus élevées et parce qu’ils estiment généralement plus grandes leurs chances de recevoir des offres d’emploi plus avantageuses dans le futur. Tableau. |
Notes
- À cet égard, un autre indicateur publié par Statistique Canada est la durée moyenne du chômage. Mais cet indicateur ne donne aucune information sur la distribution de la durée du chômage. Or, c’est tout à fait différent lorsqu’il s’agit d’établir si, pour une durée moyenne donnée, tous les travailleurs ont été chômeurs pendant un mois dans une année donnée ou si seulement un douzième des travailleurs ont été en chômage toute l’année.
- Pour un examen exhaustif des conséquences du chômage prolongé, voir l’OCDE (1993), chapitre 3.
- La fréquence du chômage prolongé n’est pas fonction du taux de chômage du groupe. Par exemple, un groupe peut présenter un taux de chômage élevé mais afficher une faible fréquence de chômage prolongé. Cela indiquerait que bien que les membres de ce groupe risquent fort de se retrouver au chômage, la probabilité qu’ils demeurent chômeurs pendant un an ou plus est faible. Le taux de chômage prolongé, c’est-à-dire la probabilité des membres du groupe (au travail ou en chômage) d’être en chômage prolongé, n’est pas traité dans le présent article.
- Voici une explication relativement simplifiée de ce phénomène : une augmentation du chômage entraîne généralement une hausse de la proportion de personnes en chômage prolongé. Or, à mesure que ces personnes restent en chômage, elles deviennent progressivement marginalisées sur le marché du travail. Elles ont alors de moins en moins d’influence dans les jeux d’équilibre des salaires. Par conséquent, les salaires demeurent élevés. Cette situation représente alors, toutes choses étant égales par ailleurs, un frein à la création d’emploi et contribue à aggraver la situation globale du chômage.
Documents consultés
- BÉDARD, M., J.-F. BERTRAND et L. GRIGNON. Les chômeurs sans emploi récent, Direction générale de la recherche appliquée, document de travail no W-00-4F, Développement des ressources humaines Canada, Ottawa, 2000.
- BLAU, F. D., M. A. FERBER et A. E. WINKLER. The Economics of Women, Men and Work, 4e éd., Prentice Hall, 2002.
- DÉVELOPPEMENT DES RESSOURCES HUMAINES CANADA. Étude bilan, Examen de programmes pour les travailleurs âgés, rapport technique no 1, Services d’évaluation, Évaluation et développement des données, juillet 1997.
- HUTCHENS, R. M. « Do job opportunities decline with age », Industrial and Labor Relations Review, vol. 42, no 1, octobre 1988, p. 89 à 99.
- ORGANISATION DE COOPÉRATION ET DE DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUES. Perspectives de l’emploi, 2003.
- ---. Perspectives de l’emploi, 1993
- ---. Perspectives de l’emploi, 1997
- WONG G., H. HENSON et A. ROY. Long-term Unemployment, Worker Profiling and Program evaluation Issue, Développement des ressources humaines Canada, Évaluation et développement des données, juin 1999.
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Auteur
Vincent Dubé est au service de la Division des transports. On peut le joindre au (613) 951-7031 ou à perspective@statcan.gc.ca.
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