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en-tête principal pour « L'emploi et le revenu en perspective »
sous-titre « L'édition en ligne »

Octobre 2001     Vol. 2, no. 10

Après la mise à pied

Diane Galarneau et Lori M. Stratychuk

Le roulement de la main-d'ouvre est un aspect important du marché du travail canadien. Bon an mal an, le tiers des travailleurs est déplacé en raison d'une mise à pied permanente, ou temporaire ou d'une démission. Les années 1990 ont été caractérisées par un sentiment général d'insécurité d'emploi. Cependant, ce sentiment semble s'appuyer sur peu de données. En effet, si certains groupes sont plus touchés par les mises à pied et les emplois de courte durée, les tendances moyennes à cet égard sont relativement semblables à celles observées durant les années 1980 (Picot et Lin, 1997).

Un aspect peu étudié jusqu'à maintenant touche aux conséquences des mises à pied. Par exemple, après combien de temps, en moyenne, les personnes mises à pied de façon permanente trouvent-elles un nouvel emploi? Quels sont les facteurs qui affectent la durée de la période sans emploi? Parmi les personnes ayant trouvé un nouvel emploi, quel est l'écart salarial entre ce dernier emploi et l'ancien? Et finalement, quels sont les facteurs qui affectent cet écart? Le présent article tentera donc de répondre à ces questions en examinant, à l'aide de l'Enquête sur la dynamique du travail et du revenu (EDTR), les mises à pied permanentes d'un emploi à temps plein survenues entre 1993 et 1998 (voir Source des données et définitions).

Personnes mises à pied

Le nombre de mises à pied annuel a oscillé entre 411 000 et 610 000 de 1993 à 1998 (tableau 1) note 1 . Puisqu'il existe habituellement un décalage entre la reprise de l'économie et celle de l'emploi, ce n'est qu'en 1995, soit trois ans après la récession de 1992, qu'on constate une diminution marquée du nombre de mises à pied permanentes (17 % entre 1994 et 1995). Cependant, bien que sensibles aux cycles économiques, les mises à pied permanentes le sont dans une moins grande mesure que les mises à pied temporaires, les démissions et les embauches (Picot, Lin et Pyper, 1997). En période de ralentissement économique, pour réduire les coûts en main-d'ouvre, les employeurs ont davantage recours aux mises à pied temporaires, à l'attrition et à la diminution des embauches. De façon similaire, en période de croissance, on rappelle les travailleurs mis à pied temporairement, on embauche de nouveaux employés et les travailleurs insatisfaits sont plus nombreux à tenter leur chance ailleurs de sorte que les embauches et les démissions augmentent.

La tendance à la baisse du taux de mises à pied, passant de 4,9 % en 1993 à 3,6 % en 1998, reflète l'amélioration progressive des conditions économiques et du marché du travail. Les années 1993 à 1998 ont en effet été caractérisées par une croissance du PIB et par une tendance à la baisse du taux de chômage (graphique A).

Le taux de mises à pied était plus élevé pour les hommes, les jeunes (16 à 24 ans), les travailleurs faiblement scolarisés, ceux des provinces de l'Atlantique et du Québec et ceux vivant en milieu rural, les personnes seules et celles n'ayant pas d'enfants à la maison (tableau 2) note 2 . Le taux était également plus élevé lorsque le conjoint gagnait un faible revenu note 3 . Les travailleurs non assujettis à une convention collective de même que ceux ouvrant dans de petites entreprises affichaient aussi un taux relativement élevé. En général, le taux de mises à pied était plus élevé dans les professions de la construction note 4  mais plus faible pour les gestionnaires et professionnels (tableau 3). Il était également plus élevé pour les personnes dont l'emploi perdu avait été de courte durée de même que pour les travailleurs faiblement rémunérés. A cet égard, le taux de mises à pied diminuait lorsque augmentait le salaire horaire.

Le taux de mises à pied plus élevé dans les petites entreprises s'explique par les caractéristiques différentes des employés y travaillant - ceux des grandes entreprises sont généralement plus scolarisés, plus âgés, plus expérimentés et plus souvent syndiqués. Également, les petites entreprises sont moins stables et plus susceptibles de disparaître et de créer ainsi une proportion importante de mises à pied permanentes (Picot, Lin et Pyper, 1997).

Qu'advient-il après la mise à pied?

L'examen des conséquences des mises à pied se fait à partir de l'échantillon longitudinal de l'EDTR (voir Source des données et définitions). On a concentré l'analyse sur les mises à pied survenues chez les personnes ayant au moins un an d'ancienneté dans l'emploi perdu. Cela afin de se rapprocher de la population d'intérêt : les travailleurs ayant un lien étroit avec le marché du travail note 5 .

Pour un certain nombre de personnes mises à pied entre 1993 et 1997, la période sans emploi a été relativement courte puisque de 13 % à 21 % des mises à pied se sont terminées par un nouvel emploi en un mois et moins (tableau 4). Toutes années confondues, dans 8 % des cas, la période sans emploi a été d'une semaine tout au plus, certaines personnes ayant même trouvé un emploi avant leur mise à pied. La proportion des mises à pied qui se sont terminées par un emploi en 12 mois ou moins a augmenté au fil des années, passant de 60 % en 1993 à 83 % en 1997 (graphique B) note 6 . Cela reflète les conditions plus favorables de la fin de la période d'observation et l'ajustement plus rapide des travailleurs. Cette tendance à trouver plus rapidement un emploi après la mise à pied se reflétait également dans la durée moyenne de la période sans emploi qui atteignait un sommet de 18,3 semaines en 1994 pour diminuer par la suite. Parmi ceux qui ont trouvé un emploi en un an ou moins, 84 % détenaient un emploi à temps plein. Cette proportion était comparable à la proportion de travailleurs à temps plein retrouvée parmi l'ensemble des travailleurs (81 % selon l'Enquête sur la population active) note 7 .

Un an après la mise à pied

Un an après leur mise à pied, près du cinquième des personnes étaient en chômage soit parce qu'elles n'avaient pas encore trouvé d'emploi, soit parce qu'elles avaient perdu de nouveau leur emploi. Le taux de chômage des travailleurs mis à pied s'élevait donc à 23,3 % (tableau 5). Ce taux était disproportionnellement élevé si on le compare avec celui de la population active totale, qui atteignait en moyenne 10,0 % de 1993 à 1997. Le taux des travailleurs mis à pied varie selon les années, 1993 marquant un sommet de 32,8 % et 1996, affichant le taux le plus faible de la période, soit 18,6 % note 8 .

Un examen de la situation d'activité un an après la mise à pied révèle que 83 % des personnes qui avaient trouvé un emploi en un an ou moins étaient toujours occupées un an plus tard, alors que 9 % étaient en chômage et 8 %, inactives. Cela réduit le taux de succès, un an après la mise à pied, de 74 % à 62 %. Le taux de chômage des personnes qui avaient trouvé un emploi en un an ou moins (9,8 %) était donc comparable à celui de l'ensemble de la population active (10,0 %). Parmi celles qui n'avaient pas trouvé d'emploi en un an, une proportion importante (53 %) étaient inactives et 47 % étaient en chômage.

Le taux de chômage des travailleurs mis à pied varie considérablement selon l'âge et c'est chez les travailleurs de 55 ans et plus qu'il atteint son plus haut niveau (45,8 %). Pour l'ensemble de la population active, le taux affichait aussi une variation importante mais diminuait généralement avec l'âge. Le taux pour le groupe des 55 ans et plus n'était que de 7,9 %.

Le taux de chômage était également supérieur pour les travailleurs mis à pied qui détenaient un faible niveau de scolarité. Il atteignait 29,1 % pour les personnes détenant moins d'un diplôme d'études secondaires contre 20,9 % pour celles qui détenaient un niveau postsecondaire ou plus. Pour l'ensemble de la population active, les valeurs correspondantes se chiffraient à 15,8 % et 7,8 %. Par ailleurs, un an après leur mise à pied, les gestionnaires et professionnels affichaient le taux de chômage le plus faible (15,3 %).

Une faible proportion de personnes (un peu plus de 13 %) sont retournées aux études après leur mise à pied. Ces dernières étaient généralement plus jeunes (49 % d'entre elles avaient moins de 35 ans contre 37 % de celles qui ne sont pas retournées aux études), plus scolarisées (87 % avaient au moins terminé leurs études secondaires contre 73 % des autres - cela était probablement attribuable au fait qu'elles étaient plus jeunes) et exerçaient plus souvent des professions exigeant moins de compétences comme celle de commis et celles du domaine des services et de la fabrication, du montage et de la réparation. Par ailleurs, les personnes qui ne sont pas retournées aux études étaient plus souvent des gestionnaires et professionnels. Une faible proportion de l'ensemble des personnes mises à pied (3 %) est retournée aux études à temps plein.

Quels sont les facteurs qui influencent la période sans emploi?

La durée de la période sans emploi après la mise à pied variait selon diverses caractéristiques. On a donc eu recours à un modèle de risque proportionnel afin d'isoler l'effet de ces variables sur la durée de la période sans emploi. Pour analyser ces déterminants, on a procédé à l'estimation d'un modèle de durée. La durée de la période sans emploi s'est révélée sensible au sexe, à l'âge, à la présence d'enfants ou d'un conjoint, à la profession, au fait de recevoir des prestations d'assurance-emploi, à l'ancienneté dans l'emploi perdu, au fait d'être membre d'une minorité visible et à l'année de la mise à pied note 9 .

Caractéristiques personnelles

Etre un homme âgé de 55 ans et plus diminuait les chances note 10  de trouver un nouvel emploi de 66 % par rapport aux hommes de 16 à 24 ans; les travailleurs plus âgés peuvent être perçus comme étant trop près de la retraite ou leurs compétences peuvent être considérées comme désuètes. Le fait d'être une femme de 55 ans et plus diminuait encore plus les chances de trouver un nouvel emploi - de 77 % - par rapport au groupe des hommes de 16 à 24 ans. De façon générale, la probabilité de trouver un emploi après une mise à pied diminue avec l'âge (par rapport au groupe des hommes de 16 à 24 ans). Cependant, les chances de trouver un emploi sont toujours plus minces pour les femmes que pour les hommes des groupes d'âge correspondants. Cela s'explique par le lien plus étroit des hommes avec le marché du travail.

Le fait de vivre seul ou de ne pas avoir d'enfants - deux facteurs susceptibles d'accroître la mobilité - avaient tendance à augmenter les chances de trouver un nouvel emploi de 30 % et 24 % respectivement. Le niveau de revenu du conjoint s'est avéré sans effet sur la durée de la période sans emploi.

Profession et durée d'emploi

En comparaison de la catégorie de référence - les gestionnaires et professionnels - la plupart des professions liées à l'emploi perdu avaient peu d'impact sur la durée de la période sans emploi, à l'exception des professions de commis, des ventes et celles du domaine des services. Pour les mises à pied touchant ces professions, les chances de trouver un nouvel emploi, à n'importe quel moment après la mise à pied, était de 32 % plus faible que pour les gestionnaires et professionnels. Plusieurs explications sont possibles : en comparaison des gestionnaires et professionnels, les vendeurs, commis et personnel des services pourraient posséder de moins grandes possibilités au chapitre de la transférabilité de leurs compétences. Leurs compétences pourraient ainsi paraître « moins valables » auprès d'employeurs potentiels et donc réduire leurs chances de trouver un emploi. Cette moins grande transférabilité pourrait également traduire une moins grande polyvalence. Un travailleur moins polyvalent aura un éventail plus restreint de compétences, ce qui pourrait diminuer ses chances de trouver un emploi. En outre, les commis, vendeurs et personnel des services semblent posséder un lien plus faible au marché du travail puisque 20 % d'entre eux étaient inactifs un an après la mise à pied contre 6 % des gestionnaires et professionnels. Ce lien plus faible peut traduire une moins grande intensité de la recherche d'emploi.

Une plus grande ancienneté dans l'emploi perdu diminuait les chances de trouver un nouvel emploi de 15 %. Cela pour plusieurs raisons : les travailleurs qui maintiennent un emploi depuis une plus longue période possèdent des qualifications spécifiques à leur employeur, lesquelles peuvent parfois être difficilement transférables puisqu'elles ont moins de valeur pour un autre employeur. De plus, ce type de travailleur pourrait être moins familier avec le processus de recherche d'emploi. Par conséquent, cela peut accroître la durée de la période de recherche d'emploi.

Prestations d'assurance-emploi

Le fait de recevoir des prestations d'assurance-emploi tendait à diminuer les chances de trouver un emploi de 38 %. Ces prestations peuvent donc être liées à une recherche d'emploi moins intensive au début ou encore à une période de recherche prolongée dans l'espoir de trouver un emploi qui convient mieux. Les prestations d'assurance-emploi ont un effet important sur la durée de la période sans emploi. Parmi les personnes qui ne recevaient pas ces prestations, près des deux tiers trouvaient un emploi en trois mois et moins, contre 30 % de celles qui en recevaient. Étant donné la durée limitée des prestations offertes par le programme d'assurance-emploi, l'effet de ces dernières diminue avec le temps de sorte qu'une proportion comparable de prestataires et de non-prestataires trouvent un emploi en 12 mois ou moins (graphique C).

Membres des minorités visibles

Etre membre d'une minorité visible diminuait les chances de trouver un nouvel emploi note 11 . Plusieurs de ces membres sont des immigrants arrivés au Canada assez récemment (près du tiers après 1985). Nombre d'entre eux pouvaient être encore en processus d'intégration au marché du travail canadien ou en formation (cours de langue ou cours visant à faire reconnaître leurs diplômes). Il est possible que certains acceptent d'abord des emplois qui ne sont pas compatibles avec leurs qualifications, pour ensuite chercher un emploi qui leur convient mieux.

Année de la mise à pied

Certaines années étaient plus susceptibles d'accroître les chances des personnes mises à pied de se trouver un emploi. C'était le cas des années 1995 à 1997 en comparaison de 1993. En effet, ces années affichaient des taux de chômage plus faibles et étaient caractérisées par une bonne croissance de l'économie (graphique A). Une partie des années à l'étude coïncidaient avec celles de la réforme du Programme d'assurance-emploi. L'amélioration constatée vers la fin de la période d'observation pourrait donc être en partie imputable à la réforme du programme. A partir de 1996, des changements tels que le resserrement des règles d'admissibilité, la diminution de la durée d'admissibilité note 12  et des modifications dans le calcul de la prestation accordée ont été implantés et ont pu inciter certaines personnes mises à pied à intensifier leur recherche d'emploi.

Les autres caractéristiques telles que la scolarité, le salaire de l'emploi perdu de même que le mois de la mise à pied n'ont révélé aucun impact significatif sur la probabilité de trouver un nouvel emploi.

Salaire avant et après la mise à pied

Un examen des emplois suivant ceux de la mise à pied révèle que 21 % des travailleurs conservaient un salaire égal - à plus ou moins 5 % - à celui de l'emploi perdu, tandis que 47 % touchaient un salaire inférieur et 32 %, un salaire supérieur (tableau 6). Quelle que soit l'année de la mise à pied, un plus grand nombre de personnes ont subi une perte salariale dans l'emploi suivant la mise à pied. Pour les personnes qui subissaient des pertes, la moyenne de celles-ci atteignait près de 30 %; pour les personnes qui connaissaient des gains, l'augmentation moyenne atteignait un peu moins de 26 %. Dans l'ensemble, 21 % des mises à pied étaient suivies par des pertes salariales de plus de 30 %, alors que seulement 14 % étaient suivies par des gains de plus de 30 %.

Des estimations démontrent que l'écart salarial était très sensible au salaire de l'emploi perdu note 13 . Les personnes dont le salaire était élevé étaient plus susceptibles de subir une perte; par ailleurs, celles qui avaient un emploi plus faiblement rémunéré avaient plus de chances de connaître un gain dans un nouvel emploi (graphique D). Cet effet a été observé antérieurement (Picot et Wannell, 1987; Picot et Pyper, 1993) et, selon Picot et Pyper, « la variation de salaire peut également avoir une corrélation négative selon le niveau de rémunération de l'emploi perdu, étant donné simplement que plus la rémunération est élevée, moins le gain salarial est susceptible d'être important. Il existe une limite aux salaires que la plupart des entreprises sont disposées à payer (pour un niveau de capital humain donné). De même dans le cas des emplois très peu rémunérés, les pertes salariales sont peu probables, étant donné l'existence d'un salaire minimum. Ces considérations peuvent entraîner un effet de régression vers la moyenne ».

Les caractéristiques du nouvel emploi affectaient également l'écart salarial : par exemple, si l'emploi était à temps plein note 14 , s'il était syndiqué ou si la profession était la même que celle de l'emploi perdu, le salaire du nouvel emploi tendait à être supérieur. Le niveau de compétences capté par la profession affectait l'écart salarial. Les gestionnaires et professionnels ainsi que les travailleurs de la construction avaient plus de chances d'enregistrer un gain dans leur nouvel emploi (en comparaison de la catégorie de référence Autres professions : opérateurs d'équipement de transport, manutentionnaires et autres professions). Cependant, l'écart salarial ne démontrait pas de relation avec la durée de la période sans emploi ou avec le niveau de scolarité du travailleur note 15 . De plus, les caractéristiques familiales comme le fait d'avoir des enfants ou un conjoint sans revenu n'affectaient pas l'écart salarial pas plus que l'année de la mise à pied.

Résumé

La présente étude avait pour but d'examiner ce qu'il advient après une mise à pied permanente d'un emploi à temps plein. Le taux de mises à pied était plus élevé pour les hommes, les jeunes (16 à 24 ans), les travailleurs faiblement scolarisés, les travailleurs de la construction, les travailleurs non protégés par une convention collective et ceux des petites entreprises. Ce taux était plus élevé pour les personnes dont l'emploi perdu avait été de courte durée de même que pour les travailleurs faiblement rémunérés. Les personnes seules et celles qui n'avaient pas d'enfants présents à la maison affichaient aussi un taux relativement élevé. A l'opposé, le taux de mises à pied était faible pour les gestionnaires et professionnels.

Pour un certain nombre de personnes, la période sans emploi a été relativement courte, puisque dans 8 % des cas, elle a été d'une semaine tout au plus. La proportion de mises à pied qui se sont terminées par un emploi (en un an ou moins) se situait à 74 %. Elle a cependant augmenté au fil des années, passant de 60 % en 1993 à 83 % en 1997. Cela reflète les conditions économiques plus favorables de la fin de la période d'observation et l'ajustement plus rapide des travailleurs. Toutefois, un examen de la situation un an après la mise à pied révèle qu'une certaine proportion de personnes qui avaient trouvé un nouvel emploi l'ont perdu de nouveau. Cela porte donc le taux de succès de la recherche d'emploi à 62 %.

Un an après leur mise à pied, près du cinquième des personnes étaient en chômage soit parce qu'elles n'avaient toujours pas trouvé d'emploi, soit parce qu'elles l'avaient perdu de nouveau. Le taux de chômage des travailleurs mis à pied s'élevait donc à plus de 23 % un an plus tard. Les personnes mises à pied affichaient donc des taux de chômage disproportionnellement élevés en comparaison de la population active totale pour laquelle le taux atteignait en moyenne 10 % de 1993 à 1997. Le taux de chômage des travailleurs mis à pied variait selon les années, 1993 marquant un sommet de 32,8 % et 1996 affichant le taux le plus faible (18,6 %).

Les chances de trouver un emploi - quel que soit le nombre de semaines après la mise à pied - étaient plus faibles pour les personnes de 55 ans et plus, les femmes, les personnes ouvrant comme commis, vendeurs ou dans des professions liées aux services, les prestataires d'assurance-emploi, les membres des minorités visibles et les personnes ayant cumulé une période d'emploi relativement longue. L'absence présence d'enfants à la maison, le fait d'être une personne seule, d'ouvrer à titre de gestionnaire ou de professionnel de même qu'une mise à pied survenue entre 1995 et 1997 tendaient à accroître les chances de trouver un nouvel emploi après une mise à pied. Contre toute attente, le niveau de scolarité et le salaire de l'emploi perdu n'affectaient pas les chances de trouver un nouvel emploi de façon significative.

Quelle que soit l'année de la mise à pied, un plus grand nombre de personnes ont subi une perte salariale dans l'emploi suivant celui de la mise à pied. Les pertes et les gains salariaux moyens étaient relativement élevés, atteignant 30 % et 26 % respectivement. L'écart salarial était très sensible au salaire de l'emploi perdu. Plus ce dernier était élevé, plus fréquentes étaient les pertes. Au contraire, lorsque le salaire de l'emploi perdu était faible, les gains étaient plus fréquents. L'écart salarial dépendait également des caractéristiques du nouvel emploi. Par exemple, si ce dernier était à temps plein, s'il était syndiqué et si la profession était la même que celle relative à l'emploi perdu, le salaire s'y rattachant tendait à être supérieur à celui de l'emploi perdu. Le niveau de compétences capté par la profession affectait l'écart salarial; les gestionnaires et professionnels de même que les travailleurs de la construction avaient plus de chances d'enregistrer un gain dans leur nouvel emploi.

 

Source des données et définitions

L'Enquête sur la dynamique du travail et du revenu (EDTR) est une enquête longitudinale mise en ouvre en 1993; elle peut également fournir des estimations transversales. Le présent article comporte une première partie basée sur l'échantillon transversal de l'EDTR - qui permet d'examiner le nombre et le taux de mises à pied pour chaque année. Une deuxième partie est basée sur l'échantillon longitudinal - qui traite de ce qu'il advient après la mise à pied permanente. Les estimations provenant de l'échantillon transversal ont été pondérées de façon à être représentatives de la population canadienne de chaque année (exclusion faite des personnes de moins de 16 ans, de celles qui vivent dans les Territoires, les réserves indiennes, les bases militaires et les établissements institutionnels) tandis que l'échantillon longitudinal représente la population canadienne du mois de décembre 1992. De 1993 à 1995, l'échantillon longitudinal de l'EDTR était basé sur un seul panel, soit un échantillon de 15 000 ménages représentant environ 30 000 personnes. Depuis 1996, avec l'introduction du deuxième panel, l'enquête compte désormais 30 000 ménages, soit à peu près 60 000 personnes.

Étude longitudinale

Toutes les estimations ayant trait à la durée de lapériode sans emploi et à l'écart salarial sont basées sur l'échantillon longitudinal de l'EDTR. On a sélectionné uniquement les personnes qui ont eu au moins une mise à pied entre janvier 1993 et décembre 1998 et qui ontrépondu au questionnaire de l'EDTR au cours des sixannées pendant lesquelles ces personnes étaient suivies (1993 à 1998). L'échantillon de population représente la population au 31 décembre 1992. L'unité d'analyse portait sur la mise à pied (et non la personne); il fallait donc tenir compte de l'ensemble des mises à pied d'une même personne.

La probabilité de trouver un emploi à n'importe quel moment après la mise à pied a été estimée par le modèle Cox à risque proportionnel. L'avantage d'un tel modèle est la prise en compte des valeurs censurées. Par exemple, si une personne mise à pied en 1998 n'avait pas trouvé d'emploi à la fin de l'année, les informations s'y rattachant ont pu être incorporées dans le modèle. Les renseignements relatifs aux personnes qui n'avaient pas trouvé d'emploi plus d'un an après la mise à pied ont également pu être intégrés.

Le modèle portant sur l'écart salarial a été estimé uniquement pour les personnes qui avaient trouvé un emploi en un an ou moins. Ce modèle a été estimé par la méthode des moindres carrés ordinaires.

Mises à pied

Les mises à pied retenues dans la présente étude sont celles survenues pour diverses raisons structurelles : un déménagement de la compagnie, la compagnie n'est plus en affaires, un ralentissement des affaires ou le renvoi de l'employé.

Étant donné qu'une personne mise à pied doit nécessairement avoir été préalablement employée, on a donc exclu les travailleurs autonomes de même que les étudiants à temps plein qui occupaient simultanément un emploi à temps plein ou qui avaient fréquenté un établissement d'enseignement pendant au moins huit mois durant l'année. Les mises à pied d'un emploi temporaire ou saisonnier ont été exclues puisque les travailleurs exerçant de tels emplois s'attendent à ce que ceux-ci se terminent après une période déterminée. Les mises à pied de personnes cumulant plusieurs emplois durant plus d'unesemaine n'ont pas été considérées puisque ces personnes peuvent ne pas ressentir la même « urgence » de se replacer ailleurs car elles détiennent d'autres emplois. Cependant, une période de transition a été allouée, dans le cas, par exemple, où les personnes ont trouvé un nouvel emploi dans les semaines entourant celle de la mise à pied.

Seules les mises à pied permanentes d'un emploi à temps plein ont été retenues afin d'observer le comportement des travailleurs ayant un lien étroit avec le marché du travail. Quant au caractère permanent ou temporaire de la mise à pied, cela dépend de la perception du répondant.

Une même personne peut être comptée plus d'une fois si elle a plus d'une mise à pied. Cela permet d'arriver à un portrait plus complet des caractéristiques des emplois dans lesquels les mises à pied ont eu lieu, soit par branche d'activité, profession, niveau de syndicalisation, salaire ou durée d'emploi. Prendre en considération certaines personnes plus d'une fois, dans ce contexte, ne correspond pas à un double compte puisque les mises à pied ont lieu à des moments différents. Les caractéristiques des personnes pourront s'être modifiées entre-temps; ces derniSres auront vieillié leur niveau de scolarité pourra s'être accru ou leur expérience sera peut-être plus diversifiée. La majorité des personnes mises à pied nel'ont été qu'une seule fois par année pendant la période d'observation.

Le taux de mises à pied représente le rapport entre le nombre de mises à pied permanentes d'un emploi à temps plein et l'ensemble des emplois à temps plein détenus durant une année, exclusion faite des travailleurs autonomes et des étudiants à temps plein. Ce taux est compilé pour chaque année.

Notes

  1. Cette partie de l'étude s'appuie sur l'échantillon transversal.
  2. Les caractéristiques des personnes mises à pied sont celles du 31 décembre de l'année de la mise à pied.
  3. Dans des études antérieures (Picot et Wannell, 1987; Picot et Pyper, 1993; Picot et Lin, 1997), on retrouve des tendances similaires. Les derniers arrivés semblent donc également les premiers sortis. Diverses théories sur le roulement de la main-d'ouvre ont permis d'expliquer ce phénomène, telles que celles qui s'appuient sur des notions de capital humain (Parsons, 1972) ou sur le jumelage emplois-travailleurs (Jovanovic, 1979). Selon la théorie de Parsons, l'employé acquiert une certaine expérience et l'employeur investit dans l'employé, de sorte que les probabilités de démission ou de renvoi diminuent avec le temps. Jovanovic maintient qu'au début, l'employé et l'employeur ont une connaissance limitée l'un de l'autre. Avec le temps, le jumelage employeur-employé est plus solide, ce qui diminue les probabilités de départ ou de renvoi.
  4. Et ce, en dépit de l'exclusion des travailleurs saisonniers et temporaires. Bien que les travailleurs de la construction soient souvent mis à pied de façon temporaire, ces résultats suggèrent que les mises à pied permanentes sont également importantes pour cette profession. Il est cependant possible qu'un certain nombre de travailleurs saisonniers se soient immiscés dans l'univers à l'étude.
  5. Les personnes qui n'ont que quelques mois d'ancienneté pourraient avoir un profil se rapprochant du travailleur intermittent. Une proportion importante de mises à pied sont survenues dans des emplois de courte durée; en fait, près du tiers d'entre elles se trouvaient dans des emplois n'ayant duré que moins de quatre mois. En restreignant l'analyse aux mises à pied dans des emplois dont la durée excédait un an, 56 % des mises à pied sont exclues. Cette restriction fait qu'une plus grande proportion des personnes mises à pied (97 %) n'ont eu qu'une seule mise à pied entre 1993 et 1998. L'ensemble des mises à pied correspond à une moyenne de 91 %.
  6. Le taux de succès global - soit lorsque aucune restriction temporelle n'était imposée - est évidemment plus élevé. Il se situe en effet entre 85 % et 89 %. Cependant, ce taux de succès est influencé par l'année de la mise à pied, c'est-à-dire que les gens mis à pied en 1993 ont eu cinq ans pour se trouver un nouvel emploi alors que ceux qui l'ont été en 1997 n'ont eu qu'une année. Afin que la durée moyenne de la période sans emploi ne soit pas influencée par l'année de la mise à pied, on a calculé le taux uniquement pour les personnes qui se sont trouvé un nouvel emploi en un an ou moins. L'année 1998 a donc été exclue pour ces calculs; elle a cependant été incluse dans le modèle de durée.
  7. Dans l'Enquête sur la population active, la proportion de 81 % réfère au nombre de personnes tandis que dans l'EDTR, la proportion est basée sur le nombre d'emplois. Comme dans 97 % des cas les personnes n'avaient qu'une seule mise à pied, les deux valeurs peuvent être comparées.
  8. D'après Picot et Wannell (1987), le taux de chômage après la mise à pied pour la période de 1982 à 1985 se situait à 24,9 %. Cette période diffère de celle qu'on examine puisqu'elle débute par une récession et se termine par une expansion, alors que la période de 1993 à 1997 se situe durant la reprise qui a suivi la récession de 1992. Les taux de chômage pour les deux périodes peuvent donc difficilement être comparés. Également, le taux de Picot et Wannell était celui au moment de l'enquête, soit en janvier 1986; ce n'était donc pas nécessairement un an après la mise à pied puisque les mises à pied avaient lieu entre 1981 et 1984. D'après Picot et Pyper (1993), le taux de chômage des travailleurs déplacés en 1988 d'un emploi à temps plein (sans restriction quant au nombre de mois ou d'années d'ancienneté dans l'emploi perdu) se situait à 17,6 %, soit un taux légèrement plus faible que celui de l'année 1996. Les années 1988 et 1996 étaient différentes en raison du taux de chômage (7,8 % et 9,6 % respectivement) et du taux de croissance du PIB (4,9 % et 1,5 %); cependant, elles se situaient dans des phases de croissance du PIB et de diminution du taux de chômage. L'étude de Picot et Wannell met l'accent sur les mises à pied dans les emplois à temps plein sans égard à la durée de l'emploi, ce qui diffère de la définition utilisée dans la présente étude qui, elle, traite des mises à pied d'une période d'au moins une année survenues dans les emplois à temps plein.
  9. Le modèle sur la durée de la période sans emploi incluait les variables suivantes : le sexe, l'âge, la province de résidence, le niveau de scolarité et la situation familiale (présence d'enfants, d'un conjoint et son revenu s'il y a lieu) de la personne mise à pied, les caractéristiques de l'emploi perdu (profession, salaire horaire et durée d'emploi), le fait de recevoir des prestations d'assurance-emploi de même que certaines caractéristiques de la mise à pied comme l'année et le mois o— elle est survenue. On a également testé d'autres variables (comme la syndicalisation de l'emploi perdu, le fait d'habiter une région rurale ou urbaine). Aucune de celles-ci n'a donné de résultats concluants. De plus, puisque toutes les provinces n'étaient pas à la même phase du cycle économique, une variable combinant l'effet de l'année et de la province a également été testée sans résultats significatifs. Voir l'appendice pour les résultats détaillés.
  10. Le terme technique approprié dans le cas d'une approche de risque proportionnel est en fait le « risque » de trouver un emploi. Pour éviter la connotation négative associée à ce terme, on emploie ici le mot « chances ». Pour plus de détails sur les modèles de risque proportionnel et sur leur interprétation, voir l'analyse d'Allison (1995).
  11. Seulement 8 % des emplois ayant fait l'objet d'une mise à pied étaient détenus par des membres des minorités visibles; toute conclusion doit donc être faite avec prudence.
  12. Avant le 30 juin 1996, les prestataires pouvaient recevoir des prestations pendant 50 semaines au plus, selon le taux de chômage de leur région et leur durée d'emploi. La nouvelle loi a réduit la période d'admissibilité à 45 semaines. Comme les personnes mises à pied dans la présente étude devaient avoir au moins un an d'ancienneté dans l'emploi perdu, elles étaient donc admissibles au maximum de semaines de prestations selon le taux de chômage de leur région.
  13. Dans les modèles d'estimation de l'écart salarial, on utilise habituellement le logarithme naturel du ratio entre le nouveau salaire et l'ancien. C'est l'approche qui a été retenue ici. On peut communiquer avec les auteurs pour les résultats détaillés de ce modèle.
  14. Cette relation était attendue puisque les mises à pied avaient été restreintes au départ aux personnes détenant un emploi à plein temps.
  15. Dans l'étude de Picot et Pyper (1993), la relation était la même entre l'écart salarial et le fait de changer ou non de profession de même qu'avec la période de recherche d'emploi. Contrairement aux résultats de la présente étude, l'écart salarial était affecté par le niveau de scolarité.

Documents consultés

  • ALLISON, P. Survival analysis using the SAS system: a practical guide, Cary (N.C.), SAS Institute, 1995.
  • JOVANOVIC, B. « Job Matching and the Theory of Turnover », The Journal of Political Economy, Part 1, Chicago, octobre 1979, vol. 87, no 5, p. 972 à 990, <http://www.jstor.org/>.
  • LIN, Z., et W. PYPER. « Mouvements de la main-d'ouvre et adaptation au marché du travail en Ontario de 1978 à 1993 », no 11F0019MPF au catalogue de Statistique Canada, Ottawa, Direction des études analytiques, 1997, no 106, série « Documents de recherche ».
  • PARSONS, D. « Specific Human Capital: An Application to Quit Rates and Layoff Rates », The Journal of Political Economy, Chicago, novembre et décembre 1972, vol. 80, no 6, p. 1120 à 1143, <http://www.jstor.org/>.
  • PICOT, G., et Z. LIN. « Les Canadiens sont-ils plus susceptibles de perdre leur emploi au cours des années 1990? », no 11F0019MPF au catalogue de Statistique Canada, Ottawa, Direction des études analytiques, 1997, no 96, série « Documents de recherche ».
  • PICOT, G., Z. LIN et W. PYPER. « Les mises à pied permanentes au Canada : vue d'ensemble et analyse longitudinale », no 11F0019F au catalogue de Statistique Canada, Ottawa, Direction des études analytiques, 1997, no 103, série « Documents de recherche ».
  • PICOT, G., et W. PYPER. « Licenciements et travailleurs déplacés : Variations cycliques, secteurs les plus touchés et expérience après le licenciement », no 11F0019F au catalogue de Statistique Canada, Ottawa, Direction des études analytiques, 1993, no 55, série « Documents de recherche ».
  • PICOT, G., et T. WANNELL. « Perte d'un emploi et adaptation au marché du travail dans l'économie canadienne », no 11F0019F au catalogue de Statistique Canada, Division des études sociales et économiques, Ottawa, Direction des études analytiques, 1987, no 5, série « Documents de recherche ».
 

Appendice

 Tableau : Modèle de durée — Risque proportionnel — Résultats

Auteurs

Diane Galarneau est au service de la Division de la statistique du travail. On peut communiquer avec elle au (613) 951-4626 ou à diane.galarneau@statcan.gc.ca.

Lori M. Stratychuk est au service de la Division des méthodes des enquêtes auprès des ménages. On peut communiquer avec elle au (613) 951-0380 ou à lori.stratychuk@statcan.gc.ca.

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