Série analytique des prix
De l'abattage au supermarché : comment les chaînes d'approvisionnement influencent les prix du bœuf
En 2021, le Canada a enregistré sa plus forte augmentation annuelle (+3,4 %) de l’Indice des prix à la consommation (IPC) depuis 1991Note , le marché étant aux prises avec les répercussions de la pandémie de COVID-19, aux perturbations de la chaîne d’approvisionnement et à la remontée des prix de l’énergie. En particulier, l’industrie du bœuf, qui représente environ 40 %Note de la consommation nationale totale de viande fraîche ou congelée, a connu de fortes fluctuations de prix l’an dernier. Les problèmes au sein de la chaîne d’approvisionnement en bœuf canadien ont entraîné une volatilité sans précédent des prix du bœuf.
L’objectif de cette analyse est d’évaluer la façon dont les fluctuations des prix du bœuf se transmettent par le canal de distribution dans la chaîne d’approvisionnement, qui regroupe les fabricants, les distributeurs en gros et les détaillants, avant de parvenir aux consommateurs finaux.
Start of text box- Pour la transmission des prix du bœuf, l’Indice des prix des produits industriels (IPPI) était un indicateur avancé de l’IPC, bien que les deux indices n’aient pas fluctué ensemble pendant une courte période (juillet 2020 à juin 2021);
- Les distributeurs en gros du système ont pu transmettre rapidement les répercussions sur les prix de l’amont vers l’aval;
- Les détaillants, bien qu’ils aient été confrontés à des conditions concurrentielles sur le marché, ont partiellement absorbé les fluctuations de prix et ont transféré ces coûts aux consommateurs dans une moindre mesure.
Aperçu de la chaîne d’approvisionnement du bœuf
Comme l’illustre la figure 1, la chaîne d’approvisionnement en bœuf canadien commence par les établissements d’élevage, les abattoirs et les usines de transformation du bœuf dans le flux en amont. Le flux intermédiaire comprend la fabrication d’aliments et la distribution en gros de produits de viande d’origine animale. Enfin, le flux en aval comprend la transmission aux distributeurs en gros, aux services du commerce de détail et aux consommateurs finaux.
En 2019, les Canadiens ont dépensé 399 $ par ménage pour du bœuf, ce qui représente 42,5 % de la consommation de viande par ménage (sauf la viande traitée)Note . Au cours de la même année, plus des quatre cinquièmes (86 %) de l’approvisionnement total de bœuf au Canada ont été produits au pays, tandis que la majorité de l’approvisionnement (63 %) a été consommée au paysNote . Ces parts sont demeurées stables en 2020. Les détaillants et les consommateurs canadiens dépendent donc principalement de l’offre intérieure en bœuf.

Description de la figure 1
Cette figure présente les différentes étapes de la chaîne d'approvisionnement de viande bovine; les importations ne sont pas représentées. Les bovins sont d'abord élevés puis généralement envoyés dans des parcs d'engraissement pour gagner en masse. Une fois qu'ils ont atteint la taille souhaitée, ils sont envoyés dans des abattoirs et les usines de transformation de viande. Des usines de transformation de viande, les carcasses sont ensuite acheminées vers soit les grossistes marchands, soit les fabricants de produits alimentaires, ou une combinaison des deux. Les produits qui en résultent sont finalement vendus à l'industrie de la restauration, exportés ou vendus aux détaillants pour la consommation.
La figure 2 montre que Statistique Canada mesure les variations de prix dans l’ensemble de la chaîne d’approvisionnement en fournissant une série d’indices des prix, y compris l’IPPI, l’Indice des prix des services de commerce de gros (IPSCG), l’Indice des prix des services du commerce de détail (IPSCD) et l’IPC. Ces indices des prix fournissent des renseignements essentiels sur les activités en amont et en aval pour aider à analyser la façon dont les variations de prix sont transmises tout au long de la chaîne d’approvisionnement.

Description de la figure 2
Cette image démontre l'ordre des sources de donéees pour la transmission des prix. Les produits industriels sont l'entrée pour les services de gros, qui sont l'entrée pour les services de détail, ce qui détermine ultimement les prix à la consommation.
Le cheminement des prix des fabricants(IPPI) au consommateurs (IPC)
Comme le montre le graphique 1, les mouvements de l’IPPI pour les produits du bœuf frais et congelés ont été plus stables pendant les périodes prépandémiques avant mars 2020. Au cours de la pandémie, de 2020 à 2021, les prix du bœuf ont connu des fluctuations prononcées pour plusieurs raisons, notamment la fermeture des usines liées à la COVID-19 au début de 2020, la sécheresse et les problèmes de chaîne d’approvisionnement mondiale en 2021. Les mouvements de l’IPPI pendant la pandémie se sont reflétés par deux vagues de volatilité : de mars à juillet 2020 et de mai à octobre 2021. L’IPC a rendu compte de ces mouvements, malgré certains effets de décalage. Un modèle de fluctuation aussi étroit indique un mécanisme possible de transmission des prix dans la chaîne d’approvisionnement, de l’IPPI à l’IPC. De plus, les fluctuations de prix de l’IPPI ont été absorbées dans une certaine mesure au sein de la chaîne d’approvisionnement, car l’IPC a évolué à un rythme plus lent que l’IPPI, surtout après le début de la pandémie en mars 2020.

Tableau de données du graphique 1
| Prix des produits industriels de bœuf et de veau frais et congelés | Prix à la consommation du bœuf frais et congelé | |
|---|---|---|
| Variation en pourcentage d’une année à l’autre | ||
| 2017 | ||
| janvier | -11,4 | -5,2 |
| février | -12,0 | -4,2 |
| mars | -3,0 | -7,0 |
| avril | 1,2 | -4,8 |
| mai | 11,1 | -3,3 |
| juin | 10,3 | -0,7 |
| juillet | 5,9 | 0,5 |
| août | 8,4 | 1,0 |
| septembre | 2,3 | 0,3 |
| octobre | 5,2 | -2,4 |
| novembre | 9,1 | 1,9 |
| décembre | 9,3 | 2,8 |
| 2018 | ||
| janvier | 7,0 | 2,0 |
| février | 6,9 | 1,0 |
| mars | 4,1 | -0,9 |
| avril | -1,5 | 2,0 |
| mai | -4,7 | -0,6 |
| juin | -5,4 | 0,3 |
| juillet | 0,2 | -1,2 |
| août | -1,3 | 1,3 |
| septembre | 0,3 | 1,1 |
| octobre | -2,2 | 1,8 |
| novembre | -3,7 | 1,5 |
| décembre | 0,0 | -0,1 |
| 2019 | ||
| janvier | -2,1 | 2,5 |
| février | -2,4 | 1,4 |
| mars | -2,2 | 3,3 |
| avril | 3,0 | -0,8 |
| mai | 2,2 | 2,5 |
| juin | -0,4 | 2,9 |
| juillet | -4,2 | 2,9 |
| août | 0,4 | 2,0 |
| septembre | 1,3 | 4,7 |
| octobre | 3,8 | 6,6 |
| novembre | 10,9 | 6,2 |
| décembre | 6,7 | 8,1 |
| 2020 | ||
| janvier | 3,5 | 5,5 |
| février | 7,6 | 5,0 |
| mars | 12,9 | 6,8 |
| avril | 45,8 | 8,5 |
| mai | 56,3 | 13,7 |
| juin | 45,5 | 21,6 |
| juillet | 10,2 | 14,7 |
| août | 9,3 | 4,8 |
| septembre | 13,2 | -0,5 |
| octobre | 9,1 | 1,1 |
| novembre | 6,9 | -0,5 |
| décembre | -4,6 | -1,5 |
| 2021 | ||
| janvier | 2,7 | 0,9 |
| février | 12,0 | 0,3 |
| mars | 3,3 | -2,1 |
| avril | -8,8 | 0,3 |
| mai | -7,9 | -4,3 |
| juin | 4,4 | -11,1 |
| juillet | 28,0 | -2,4 |
| août | 49,3 | 5,3 |
| septembre | 41,4 | 13,0 |
| octobre | 24,2 | 14,0 |
| novembre | 22,9 | 15,4 |
| décembre | 32,8 | 11,9 |
| 2022 | ||
| janvier | 29,2 | 13,0 |
| février | 15,0 | 16,8 |
| mars | 9,5 | 14,1 |
| avril | -3,4 | 12,9 |
| Source : Statistique Canada. Tableau 18-10-0266-01 Indice des prix des produits industriels, par produit, mensuellement et tableau 18-10-0004-01 Indice des prix à la consommation, mensuel, non désaisonnalisé. | ||
Il est également à noter que les deux indices n’ont pas évolué ensemble au cours de la courte période allant de juillet 2020 à juin 2021, ce qui indique que la pandémie a perturbé les chaînes d’approvisionnement intermédiaires entre l’IPPI et l’IPC, où les fluctuations des prix des grossistes et des détaillants ont joué un rôle dans la transmission. Le constat est étudié davantage dans les sections suivantes.
Chaînes intermédiaires des services de gros(IPSCG) et des services de détail (IPSCD)Note
Les distributeurs en gros et les détaillants sont les deux principaux intervenants entre les fabricants et les consommateurs. Ils fournissent des services et distribuent des biens aux consommateurs. Les fluctuations de prix sont ressenties par les grossistes lorsque les biens quittent les fabricants.
Comme le montre le graphique 2, les prix de vente en gros ont suivi de près les fluctuations des prix du bœuf de l’IPPI avant et pendant la pandémie. Par conséquent, un mécanisme de marché efficace était en place pour permettre aux distributeurs en gros de transférer une grande partie des variations de prix des fabricants en amont aux grossistes en aval. Autrement dit, les prix de vente des abattoirs et des usines d’emballage de viande ont influencé la façon dont les grossistes de bœuf ont établi leurs prix de vente, tant avant que pendant la pandémie.

Tableau de données du graphique 2
| Prix des produits industriels de bœuf et de veau frais et congelés | Prix de vente en gros des produits du bœuf | |
|---|---|---|
| Variation en pourcentage d’une année à l’autre | ||
| 2019 | ||
| janvier | -2,1 | -9,5 |
| février | -2,4 | -10,9 |
| mars | -2,2 | -12,1 |
| avril | 3,0 | -7,5 |
| mai | 2,2 | -6,9 |
| juin | -0,4 | -8,5 |
| juillet | -4,2 | -14,6 |
| août | 0,4 | -10,3 |
| septembre | 1,3 | -8,2 |
| octobre | 3,8 | 9,9 |
| novembre | 10,9 | 14,1 |
| décembre | 6,7 | 14,8 |
| 2020 | ||
| janvier | 3,5 | 12,5 |
| février | 7,6 | 20,0 |
| mars | 12,9 | 15,8 |
| avril | 45,8 | 19,3 |
| mai | 56,3 | 34,5 |
| juin | 45,5 | 26,0 |
| juillet | 10,2 | 8,6 |
| août | 9,3 | 3,2 |
| septembre | 13,2 | 6,3 |
| octobre | 9,1 | 2,4 |
| novembre | 6,9 | -3,6 |
| décembre | -4,6 | -4,9 |
| 2021 | ||
| janvier | 2,7 | -4,1 |
| février | 12,0 | -5,7 |
| mars | 3,3 | -0,5 |
| avril | -8,8 | -7,4 |
| mai | -7,9 | -18,8 |
| juin | 4,4 | -5,5 |
| juillet | 28,0 | 10,3 |
| août | 49,3 | 17,3 |
| septembre | 41,4 | 18,0 |
| octobre | 24,2 | 17,9 |
| novembre | 22,9 | 18,7 |
| décembre | 32,8 | 13,8 |
| 2022 | ||
| janvier | 29,2 | 22,4 |
| février | 15,0 | 22,8 |
| mars | 9,5 | 15,6 |
| Source : Statistique Canada. Tableau 18-10-0266-01 Indice des prix des produits industriels, par produit, mensuellement et calcul spécial fondé sur le Rapport sur les prix du commerce de gros de Statistique Canada (enquête no 5106) pour les produits du bœuf. | ||
Après l’étape des distributeurs en gros, le parcours des prix se poursuit avec les détaillants. Les détaillants disposent de plus grands systèmes de distribution pour atteindre les consommateurs finaux et, parallèlement, doivent faire face à des marchés plus concurrentiels. Le graphique 3 montre les fluctuations des prix de gros et de vente au détail. La variation d’une année à l’autre la plus aplatie du prix de vente au détail indique que les détaillants ont partiellement absorbé les fluctuations du prix de gros en rajustant leurs prix de vente. Autrement dit, la forte fluctuation observée dans les prix de vente en gros s’est traduite par des augmentations mineures des prix de vente au détail. Cela donne également à penser que les détaillants ont absorbé une grande partie des augmentations de prix de leurs grossistes et ont transmis une fraction de ces coûts aux consommateurs.

Tableau de données du graphique 3
| Prix de vente en gros des produits du bœuf | Prix de vente au détail des produits du bœuf | |
|---|---|---|
| Variation en pourcentage d’une année à l’autre | ||
| 2019 | ||
| janvier | -9,5 | 3,1 |
| février | -10,9 | 4,3 |
| mars | -12,1 | 2,1 |
| avril | -7,5 | 3,0 |
| mai | -6,9 | 1,9 |
| juin | -8,5 | 1,2 |
| juillet | -14,6 | 0,6 |
| août | -10,3 | 1,9 |
| septembre | -8,2 | 2,3 |
| octobre | 9,9 | 2,8 |
| novembre | 14,1 | 1,6 |
| décembre | 14,8 | 2,0 |
| 2020 | ||
| janvier | 12,5 | 2,4 |
| février | 20,0 | 2,0 |
| mars | 15,8 | 5,2 |
| avril | 19,3 | 6,2 |
| mai | 34,5 | 8,6 |
| juin | 26,0 | 14,6 |
| juillet | 8,6 | 10,1 |
| août | 3,2 | 8,2 |
| septembre | 6,3 | 5,8 |
| octobre | 2,4 | 5,7 |
| novembre | -3,6 | 6,3 |
| décembre | -4,9 | 5,0 |
| 2021 | ||
| janvier | -4,1 | 5,8 |
| février | -5,7 | 5,5 |
| mars | -0,5 | 3,0 |
| avril | -7,4 | 1,3 |
| mai | -18,8 | 0,9 |
| juin | -5,5 | -2,3 |
| juillet | 10,3 | 2,6 |
| août | 17,3 | 4,1 |
| septembre | 18,0 | 9,3 |
| octobre | 17,9 | 10,8 |
| novembre | 18,7 | 9,9 |
| décembre | 13,8 | 9,1 |
| 2022 | ||
| janvier | 22,4 | 9,5 |
| février | 22,8 | 8,2 |
| mars | 15,6 | 7,8 |
| Source : Calcul spécial fondé sur le Rapport sur les prix du commerce de gros de Statistique Canada (enquête no 5106) et le programme de l’Indice des prix des services du commerce de détail (enquête no 5135) – données administratives pour les produits du bœuf. | ||
Enfin, les détaillants ont absorbé la volatilité des prix en réduisant les marges de profit, maintenant ainsi des prix de vente au détail plus stables. Comme le montre le graphique 4Note , les marges bénéficiaires des détaillants ont connu une baisse marquée en juin 2020 et en juillet 2021, lorsque les prix de détail ont augmenté de façon marquée.

Tableau de données du graphique 4
| Prix de vente au détail des produits du bœuf | Prix d’achat au détail des produits du bœuf | Prix de marge de détail des produits du bœuf | |
|---|---|---|---|
| Variation en pourcentage d’une année à l’autre | |||
| 2019 | |||
| janvier | 3,1 | 1,8 | 6,0 |
| février | 4,3 | 2,7 | 7,5 |
| mars | 2,1 | 2,6 | 1,8 |
| avril | 3,0 | 2,6 | 5,2 |
| mai | 1,9 | 3,5 | -1,5 |
| juin | 1,2 | 3,1 | -0,4 |
| juillet | 0,6 | -0,1 | 4,3 |
| août | 1,9 | -0,1 | 9,2 |
| septembre | 2,3 | 1,4 | 6,5 |
| octobre | 2,8 | 3,7 | 4,9 |
| novembre | 1,6 | 2,0 | 4,1 |
| décembre | 2,0 | 3,8 | 1,8 |
| 2020 | |||
| janvier | 2,4 | 5,5 | -0,7 |
| février | 2,0 | 3,1 | 4,0 |
| mars | 5,2 | 4,6 | 9,4 |
| avril | 6,2 | 9,9 | 0,1 |
| mai | 8,6 | 18,7 | -12,8 |
| juin | 14,6 | 28,2 | -20,1 |
| juillet | 10,1 | 12,3 | 5,7 |
| août | 8,2 | 9,6 | 6,9 |
| septembre | 5,8 | 6,6 | 6,3 |
| octobre | 5,7 | 4,1 | 8,9 |
| novembre | 6,3 | 6,0 | 5,7 |
| décembre | 5,0 | 3,0 | 7,0 |
| 2021 | |||
| janvier | 5,8 | 1,8 | 12,7 |
| février | 5,5 | 1,9 | 11,0 |
| mars | 3,0 | 1,3 | 5,9 |
| avril | 1,3 | -3,8 | 12,8 |
| mai | 0,9 | -7,7 | 26,9 |
| juin | -2,3 | -8,6 | 22,9 |
| juillet | 2,6 | 6,5 | -7,2 |
| août | 4,1 | 10,0 | -7,4 |
| septembre | 9,3 | 18,8 | -10,1 |
| octobre | 10,8 | 21,5 | -11,3 |
| novembre | 9,9 | 18,7 | -6,8 |
| décembre | 9,1 | 15,6 | -2,6 |
| 2022 | |||
| janvier | 9,5 | 14,1 | 1,5 |
| février | 8,2 | 14,3 | -2,7 |
| mars | 7,8 | 13,2 | -2,1 |
| avril | 7,9 | 12,0 | -1,1 |
| Source : Calcul spécial fondé sur le programme de l’Indice des prix des services du commerce de détail de Statistique Canada (enquête no 5135) source de données administratives pour les produits du bœuf. | |||
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