Partage des tâches domestiques : faire équipe pendant la pandémie de COVID-19

Le confinement à la maison a été mis en place au début de la pandémie pour ralentir la propagation de la COVID-19. Pour les familles canadiennes, cela se traduisait par le télétravail, la fermeture des écoles et des garderies, l’école à distance et l’annulation des activités parascolaires. De plus, les sorties étaient limitées.

Ces mesures, qui ont eu une incidence sur les familles canadiennes tout au long de la pandémie, ont aussi modifié la dynamique au sein des ménages. La façon dont les couples^Note 1 ont partagé les tâches domestiques en cette période sans précédent mérite alors d’être étudiée. Avant la pandémie, quelle que soit leur situation d’emploi, les femmes consacraient plus de temps que les hommes aux tâches domestiques, et ce sont elles qui adaptaient le plus souvent leur horaire aux besoins de leur famille^Note 2.

La présente analyse montre la façon dont les couples^Note 3 au Canada ont partagé les tâches domestiques au cours des premiers mois de la pandémie. On aborde les différences entre les femmes et les hommes quant à la répartition des tâches domestiques et le degré de satisfaction à l’égard de l’attribution de ces tâches. On examine aussi l’incidence de la présence ou non d’enfants dans le ménage et de l’augmentation significative du télétravail^Note 4.

Le présent article se fonde sur les données de la troisième vague de la Série d’enquêtes sur les perspectives canadiennes, qui s’est déroulée du 15 au 21 juin 2020. Depuis le début de la pandémie, Statistique Canada mène cette série d’enquêtes, qui est statistiquement représentative de la population canadienne. Cette fois-ci, l’enquête portait, entre autres, sur la répartition des tâches domestiques chez les couples vivant ensemble.

La satisfaction de la population canadienne quant au partage des tâches domestiques est demeurée la même pendant la pandémie

Pendant les premiers mois de la pandémie de COVID-19, près de 7 Canadiens et Canadiennes sur 10 (68 %) ont déclaré être satisfaits de la façon dont les tâches domestiques étaient réparties dans leur couple. Toutefois, le degré de satisfaction variait en fonction de l’âge et du sexe du répondant.

Une proportion plus élevée de personnes âgées de 55 ans et plus (74 %) se sont dites satisfaites de la répartition des tâches domestiques par rapport à celles de moins de 55 ans (63 %). Cette différence est plus marquée chez les femmes; en effet, 57 % des femmes de moins de 55 ans ont indiqué être satisfaites de la répartition des tâches domestiques, comparativement à 72 % de celles de 55 ans et plus.

En ce qui concerne les différences entre les sexes, les femmes (16 %) étaient près de deux fois plus susceptibles que les hommes (9 %) d’être insatisfaites de la répartition des tâches domestiques pendant la pandémie. Un cinquième (20 %) des femmes et des hommes n’étaient ni satisfaits ni insatisfaits.

Peu importe la tâche, les femmes sont plus satisfaites lorsque leur conjoint s’occupe des tâches ou que celles-ci sont partagées également que lorsqu’elles en sont principalement responsables (graphique 1). Par exemple, plus de femmes étaient satisfaites de la répartition de l’entretien ménager lorsque cette tâche était principalement effectuée par l’homme (82 %) ou partagée également (80 %) que lorsque la responsabilité leur incombait (50 %).

Enfin, pour la grande majorité des personnes en couple (86 %), le degré de satisfaction quant à la répartition des tâches domestiques était le même qu’avant la pandémie. Les hommes (88 %) étaient plus susceptibles que les femmes (83 %) de dire que leur degré de satisfaction était le même qu’avant la pandémie.

Tout près de 1 Canadien ou Canadienne sur 10 (8 %) a déclaré que le degré de satisfaction quant à la répartition des tâches domestiques pendant la pandémie était meilleur qu’auparavant. Dans l’ensemble, il n’y a pas de différence statistiquement significative entre les proportions d’hommes (7 %^Note 5) et de femmes (9 %) ayant mentionné que leur degré de satisfaction s’est amélioré.

Les personnes de moins de 55 ans (10 %) étaient plus susceptibles que celles de 55 ans et plus (6 %^Note 6) de déclarer que leur degré de satisfaction s’est amélioré.

Les types de tâches domestiques différaient entre les femmes et les hommes

Pendant la pandémie, les tâches domestiques les plus susceptibles d’être accomplies principalement par les femmes étaient la lessive et la préparation des repas. Près de 6 Canadiens ou Canadiennes sur 10 (56 %) vivant en couple ont déclaré que la lessive était surtout accomplie par la femme, comparativement à 16 % ayant mentionné que l’homme effectuait principalement cette tâche. Environ la moitié (48 %) a déclaré que la préparation des repas était surtout effectuée par la femme, alors que seulement 16 % ont indiqué que cette tâche était surtout accomplie par l’homme (tableau 1).

Parallèlement, 4 personnes en couple sur 10 ont déclaré que l’homme s’occupait surtout des finances du ménage, par rapport à 30 % ayant mentionné que c’était principalement la femme qui en était responsable.

La vaisselle (45 %) et l’entretien ménager (43 %) étaient les tâches domestiques les plus susceptibles d’être partagées également entre la femme et l’homme pendant la pandémie.

Les hommes étaient plus susceptibles de prendre part aux tâches domestiques pendant la pandémie par rapport à 2017

Les données de l’Enquête sociale générale sur la répartition des tâches domestiques ont été utilisées pour comparer la situation actuelle au contexte observé en 2017 (qui représente les données les plus récentes de cette enquête).

Dans l’ensemble, la répartition des tâches domestiques n’a pas beaucoup changé de 2017^Note 7 à 2020. Toutefois, les hommes étaient plus susceptibles de prendre part aux tâches domestiques en 2020 qu’en 2017. Leur participation a augmenté, et ce, pour toutes les tâches domestiques. Par exemple, la proportion d’hommes qui s’occupaient de l’épicerie a doublé pendant la pandémie et est passée de 15 % à 30 %; il en va de même pour la lessive, dont la proportion est passée de 8 % à 16 % (graphique 2). De plus, la proportion d’hommes s’occupant des finances du ménage est passée de 34 % en 2017 à 40 % en 2020.

Cette contribution accrue des hommes à certaines tâches domestiques peut être attribuable au fait qu’ils ont passé plus de temps à la maison en raison de la pandémie. Toutefois, la présence d’enfants semble également être un facteur important. Les femmes ayant pris en charge les soins aux enfants ou leur scolarité — une responsabilité quasi continue au cours des premiers mois de la pandémie — avaient possiblement moins de temps à consacrer aux tâches domestiques. Comparativement à 2017, la participation des femmes à la préparation des repas et à la lessive a diminué pendant la pandémie (graphique 3), tandis que, d’autre part, elles étaient plus susceptibles que les hommes de déclarer qu’elles étaient principalement responsables des tâches parentales^Note 8. Plus précisément, 64 % des femmes étaient surtout responsables de l’enseignement à domicile et de l’aide aux devoirs, une tâche supplémentaire pour les parents pendant la pandémie, par rapport à 19 % des hommes.

La présence d’enfants âgés de moins de six ans dans le ménage influence la participation des hommes à certaines tâches domestiques

La présence de jeunes enfants dans le ménage a une incidence sur la répartition des tâches domestiques, particulièrement chez les hommes. Environ un tiers des Canadiens et Canadiennes (30 %) ont déclaré que l’épicerie était surtout faite par l’homme. Cette proportion augmente toutefois à 42 % lorsqu’il y a au moins un enfant âgé de moins de six ans dans le ménage (tableau 2).

À l’inverse, l’entretien ménager était deux fois moins susceptible d’être effectué principalement par l’homme lorsque des enfants âgés de moins de six ans étaient présents dans le ménage (7 %) qu’en l'absence d’enfants ou en la présence d’enfants adultes seulement (16 %).

Le télétravail n’influence pas la façon dont les couples canadiens partagent les tâches domestiques

Pendant la pandémie, le télétravail est devenu beaucoup plus courant. En juin 2020, 39 %^Note 9 des Canadiens et Canadiennes avaient travaillé à distance, comparativement à 17 % avant la pandémie. Les femmes (44 %) étaient plus susceptibles que les hommes (35 %) d’avoir travaillé à distance. Cependant, avant la pandémie, on constatait très peu de différence entre les hommes et les femmes (16 % par rapport à 18 % respectivement).

Toutefois, il semble que le télétravail n’a pas eu d’incidence sur la répartition des tâches domestiques dans le couple, sauf en ce qui concerne la préparation des repas par les hommes. Des proportions équivalentes^Note 10 de Canadiens et Canadiennes qui travaillaient à distance et à l’extérieur du domicile ont déclaré que les tâches domestiques étaient surtout effectuées par la femme (graphique 4).

Conclusion

Bien qu'elles doivent plus que jamais concilier travail et vie familiale, les femmes continuent d’accomplir la plupart des tâches domestiques. Même si, par rapport à 2017, les femmes étaient moins susceptibles d’être principalement responsables de la lessive et de la préparation des repas pendant la pandémie, aucun changement significatif n’a été observé en ce qui concerne leur participation aux autres tâches domestiques.

À la lumière de ces constatations, certaines questions se posent, à savoir si les tendances ou les changements observés pendant les premiers mois de la pandémie demeureront après le retour à la vie « normale ». Une nouvelle enquête postpandémique confirmera-t-elle les tendances observées en 2020 ou montrera-t-elle que ce n’étaient que des changements temporaires attribuables à des circonstances exceptionnelles?

Méthodologie

Les données utilisées dans la présente analyse sont tirées de la nouvelle Série d’enquêtes sur les perspectives canadiennes (SEPC) de Statistique Canada, de l’Enquête sociale générale (ESG) de 2017 sur la famille et de l’Enquête sur la population active (EPA).

La SEPC représente un panel de Canadiens et Canadiennes qui ont accepté de répondre à un certain nombre de courtes enquêtes en ligne. Comme la SEPC fait appel à un panel probabiliste fondé sur l’EPA, elle est représentative de la population en général. La SEPC permet à Statistique Canada d’obtenir des renseignements importants auprès de la population canadienne de façon plus efficace et plus rapide et à moindre coût que les méthodes d’enquête traditionnelles. La première itération de la SEPC a eu lieu du 29 mars au 3 avril et a permis de recueillir de l’information auprès de 4 600 répondants. La deuxième itération de la SEPC, qui s’est tenue du 4 au 10 mai, a été menée auprès de la plupart des mêmes répondants. La troisième itération, qui a servi à rédiger le présent article, a eu lieu du 15 au 21 juin auprès de 4 209 répondants. Statistique Canada tient à remercier tous les Canadiens et toutes les Canadiennes qui ont pris le temps de répondre aux questions de l'enquête en cette période de crise.

Les données de la SEPC et celles de l’EPA ont été couplées pour permettre de dériver deux variables importantes pour l’analyse (le sexe du conjoint ou partenaire et la présence d’enfants âgés de moins de six ans dans le ménage) qui n’étaient pas disponibles dans la SEPC.

Enfin, l’ESG sur la famille permet de suivre les tendances et les changements qui surviennent au sein des familles canadiennes. Elle recueille des renseignements sur l’histoire conjugale et parentale (chronologie des mariages, des unions libres et de l’arrivée des enfants), les antécédents familiaux, le départ du foyer parental, les intentions de fécondité et d’autres caractéristiques socioéconomiques. La population cible de l’ESG de 2017 comprend les personnes âgées de 15 ans et plus ne vivant pas en établissement et résidant dans l’une des 10 provinces canadiennes. Il s’agit d’une enquête-échantillon comportant un plan transversal. Les données ont été recueillies directement auprès des répondants au moyen de la méthode d’interview téléphonique assistée par ordinateur.

La présente analyse porte sur les personnes âgées de 20 ans et plus au Canada qui étaient mariées ou qui vivaient en union libre au moment de l’enquête. Seuls les répondants vivant sous le même toit que leur conjoint ou partenaire de sexe opposé ont été pris en compte.

Références

LECLERC, Karine. 2020. « Soins des enfants : répercussions de la COVID-19 sur les parents », StatCan et la COVID-19 : Des données aux connaissances, pour bâtir un Canada meilleur, produit n^o 45-28-0001 au catalogue de Statistique Canada.

HOULE, Patricia, Martin TURCOTTE et Mike WENDT. 2017. « Évolution de la participation des parents aux tâches domestiques et aux soins des enfants de 1986 à 2015 », Mettre l’accent sur les Canadiens : résultats de l’Enquête sociale générale, produit n^o 89-652-X2017001 au catalogue de Statistique Canada.

STATISTIQUE CANADA. 2020a. « Histoire de famille : Partage des tâches domestiques chez les couples au Canada : qui fait quoi? », Le Quotidien, diffusé le 19 février.

STATISTIQUE CANADA. 2020b. « Série d’enquêtes sur les perspectives canadiennes 1 : La COVID-19 et travailler de la maison, 2020 », Le Quotidien, diffusé le 17 avril.