DOI: https://doi.org/10.25318/36280001202200400003-fra
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Les communautés ukraino-canadiennes existantes joueront un rôle de premier plan dans l’établissement de la population ukrainienne déplacée en raison de l’invasion de l’Ukraine par la Russie. Le Canada accueille depuis longtemps les Ukrainiens, particulièrement ceux déplacés par la guerre (SHIC, 2022). Les premiers Ukrainiens sont arrivés au Canada en 1891 et on estime que 150 000 Ukrainiens sont venus s’installer au pays entre 1891 et 1914 (gouvernement du Canada, 2020). Durant cette période, la plupart des Ukrainiens se sont établis au Manitoba, en Saskatchewan et en Alberta, où ils étaient en mesure d’obtenir des terres agricoles; d’autres se sont établis dans des villes un peu partout au Canada pour y exercer des métiers industriels (gouvernement du Canada, 2020). Après la Première Guerre mondiale, une importante vague d’Ukrainiens est arrivée au Canada lorsque l’Ukraine est devenue une république soviétique. La plupart de ces Ukrainiens se sont présentés au pays en tant que réfugiés et se sont installés dans des communautés ukrainiennes établies, particulièrement au Manitoba, en Saskatchewan, en Alberta et dans le sud de l’Ontario (Gerus et Rea, 1985; gouvernement du Canada, 2020). À la fin de la Deuxième Guerre mondiale, une troisième vague d’Ukrainiens est arrivée au Canada (gouvernement du Canada, 2020). En 1952, quelque 30 000 Ukrainiens étaient déjà venus s’installer au pays, principalement en tant que réfugiés (gouvernement du Canada, 2020; Hou et Yan, 2020). Après la dissolution de l’Union soviétique en 1991, on a recensé en 2016 environ 112 000 immigrants qui sont arrivés au Canada en provenance de l’Ukraine (Hou et Yan, 2020), et 14 000 autres immigrants sont arrivés au pays entre 2017 et 2021 (IRCC, 2022)Note . En raison de la récente invasion de l’Ukraine par la Russie, des millions d’Ukrainiens ont été déplacés. En réponse, Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada a mis en place de nouvelles mesures liées à l’accueil des Ukrainiens au Canada (gouvernement du Canada, 2022).
Le présent article compare la population ukraino-canadienne à la population nationale du Canada à l’aide des données du Recensement de la population de 2016. Les résultats fournissent de l’information sur les Ukraino-Canadiens actuels, y compris leur répartition géographique, leurs données démographiques, et leurs profils d’emploi et économiques.
Dans le Recensement de 2016, environ 1,36 million de personnes, ou près de 4 % de la population canadienne, ont déclaré « Ukrainien » comme étant au moins l’une de leurs origines ethniquesNote . De ce pourcentage, environ 20 % ont indiqué « Ukrainien » comme étant leur unique origine ethnique, 29 % ont indiqué une autre origine ethnique en plus de « Ukrainien », et 51 % ont déclaré deux autres origines ethniques ou plus. Parmi les Ukrainiens ayant déclaré des origines ethniques multiples, les autres origines ethniques les plus couramment indiquées étaient « Britannique », « Polonais », « Allemand » et d’autres origines européennes, de même que « Canadien ». Les personnes ayant indiqué « Ukrainien » comme étant leur seule origine ethnique étaient plus susceptibles d’avoir indiqué l’ukrainien comme langue maternelle (27 %), comparativement à ceux ayant déclaré des origines ethniques multiples (2 %). Environ 2 % des Ukraino-Canadiens parlaient ukrainien le plus souvent à la maison, et ce taux était plus élevé chez ceux déclarant une seule origine ethnique (8 %) que chez ceux déclarant des origines ethniques multiples (0,5 %).
Ukraino-Canadiens | Population nationale | |||
---|---|---|---|---|
Total | Une seule origine ethnique | Origines ethniques multiples | ||
pourcentage | ||||
Province ou région | ||||
Provinces de l'Atlantique | 1,1 | 0,7 | 1,2 | 6,7 |
Québec | 3,1 | 4,0 | 2,9 | 23,1 |
Ontario | 27,7 | 29,2 | 27,3 | 38,4 |
Manitoba | 13,2 | 14,5 | 12,9 | 3,6 |
Saskatchewan | 10,6 | 11,7 | 10,3 | 3,1 |
Alberta | 27,2 | 27,3 | 27,1 | 11,5 |
Colombie-Britannique | 16,9 | 12,6 | 17,9 | 13,2 |
Territoires | 0,3 | 0,1 | 0,3 | 0,3 |
Région métropolitaine de recensement | ||||
Toronto | 10,6 | 14,8 | 9,6 | 17,0 |
Montréal | 2,6 | 3,3 | 2,4 | 11,6 |
Vancouver | 6,9 | 5,2 | 7,4 | 7,0 |
Calgary | 6,7 | 5,3 | 7,0 | 4,0 |
Ottawa‒Gatineau | 2,1 | 1,5 | 2,2 | 3,8 |
Edmonton | 11,8 | 13,5 | 11,3 | 3,8 |
Québec | 0,1 | 0,1 | 0,1 | 2,3 |
Winnipeg | 8,6 | 9,0 | 8,4 | 2,2 |
Hamilton | 2,1 | 2,1 | 2,1 | 2,1 |
Petites régions métropolitaines de recensement | 18,9 | 16,3 | 19,6 | 17,3 |
Agglomérations de recensement | 12,6 | 10,9 | 13,1 | 12,1 |
Régions rurales | 17,1 | 18,0 | 16,9 | 16,7 |
Source : Statistique Canada, Recensement de la population de 2016. |
Le tableau 1 montre la répartition géographique des Ukraino-Canadiens et de la population nationale. Le volet supérieur indique la répartition par province ou par région. La plupart des Ukraino-Canadiens habitent en Ontario (28 %), en Alberta (27 %) ou en Colombie-Britannique (17 %). Une plus grande proportion d’Ukraino-Canadiens habite au Manitoba (13 %) et en Saskatchewan (11 %), comparativement à environ 4 % et 3 % de la population nationale, respectivement. Environ 3 % des Ukraino-Canadiens habitent au Québec, où l’on recense 23 % de la population nationale, et environ 1 % des Ukraino-Canadiens habitent dans les provinces de l’Atlantique et dans les territoires.
Le volet inférieur du tableau 1 montre la répartition géographique de la population ukraino-canadienne par région métropolitaine de recensement (RMR). Tout comme la population nationale, une grande proportion d’Ukraino-Canadiens habite dans de petites RMR (19 %), agglomérations de recensement (13 %) et régions rurales (17 %). Les Ukraino-Canadiens sont nettement moins susceptibles d’habiter dans les deux plus grandes RMR du pays que la population nationale. Environ 11 % de tous les Ukraino-Canadiens habitent à Toronto (par opposition à 17 % de la population nationale), et 3 % de tous les Ukraino-Canadiens habitent à Montréal (par opposition à 12 % de la population nationale). En comparaison, environ 7 % de tous les Ukraino-Canadiens habitent à Calgary (par opposition à 4 % de la population nationale), 12 % habitent à Edmonton (par opposition à 4 % de la population nationale) et 9 % habitent à Winnipeg (par opposition à 2 % de la population nationale). Outre les RMR incluses dans le tableau 1, d’autres RMR comportent 10 000 Ukraino-Canadiens ou plus, notamment : Saskatoon, Regina, St. Catharines–Niagara, Victoria, Kelowna, Thunder Bay, Oshawa, Kitchener–Cambridge–Waterloo, London et Windsor.
Ukraino-Canadiens | Population nationale | |||
---|---|---|---|---|
Total | Une seule origine ethnique | Origines ethniques multiples | ||
pourcentage | ||||
Groupe d’âge | ||||
De 0 à 14 ans | 20,7 | 5,5 | 24,6 | 16,9 |
De 15 à 24 ans | 13,9 | 6,0 | 15,9 | 12,3 |
De 25 à 44 ans | 27,1 | 20,5 | 28,7 | 26,4 |
De 45 à 64 ans | 25,9 | 35,4 | 23,4 | 28,6 |
65 ans ou plus | 12,5 | 32,6 | 7,4 | 15,9 |
Type de ménage | ||||
Ménage comptant une seule famille de recensement : Couple sans enfant | 20,8 | 32,7 | 17,8 | 21,1 |
Ménage comptant une seule famille de recensement : Couple ayant un ou des enfants | 45,9 | 29,0 | 50,2 | 41,8 |
Ménage comptant une seule famille de recensement : Famille monoparentale | 9,3 | 7,6 | 9,8 | 9,2 |
Ménage multigénérationnel | 3,5 | 3,1 | 3,6 | 6,3 |
Autres types de ménages | 20,5 | 27,6 | 18,7 | 21,6 |
Statut de génération des immigrants | ||||
Troisième génération ou plus | 73,9 | 54,4 | 78,8 | 58,4 |
Deuxième génération | 17,0 | 26,3 | 14,7 | 17,7 |
Nés à l'étranger, résidents permanents | 8,7 | 18,3 | 6,2 | 22,4 |
Nés à l'étranger, résidents temporaires | 0,4 | 1,0 | 0,3 | 1,5 |
Éducation chez les adultes âgés de 25 à 64 ans | ||||
Sans diplôme d'études secondaires | 7,3 | 8,1 | 7,1 | 11,5 |
Diplôme d'études secondaires | 25,3 | 26,5 | 24,9 | 23,7 |
Études postsecondaires partielles | 36,7 | 36,0 | 36,9 | 36,3 |
Baccalauréat | 20,9 | 18,3 | 21,6 | 19,0 |
Diplôme d'études supérieures | 9,9 | 11,1 | 9,6 | 9,6 |
Taux d’emploi chez les adultes âgés de 25 à 64 ans | ||||
Hommes | 82,2 | 79,3 | 83,0 | 79,4 |
Femmes | 75,8 | 71,7 | 76,8 | 71,6 |
Compétences professionnelles chez les travailleurs âgés de 25 à 64 ans | ||||
Peu spécialisées | 31,1 | 33,5 | 30,4 | 35,8 |
Moyennement spécialisées | 41,3 | 41,9 | 41,2 | 38,9 |
Hautement spécialisées | 27,6 | 24,6 | 28,4 | 25,4 |
en dollars constants de 2015 | ||||
Revenus médians d'emploi chez les travailleurs ayant des gains positifs | ||||
Hommes | 47 900 | 47 700 | 47 900 | 40 400 |
Femmes | 31 900 | 32 500 | 31 800 | 28 900 |
Source : Statistique Canada, Recensement de la population de 2016. |
Le tableau 2 indique les caractéristiques sociodémographiques des Ukraino-Canadiens et de la population nationale. En général, les Ukraino-Canadiens sont légèrement plus jeunes que la population nationale. Cependant, il y a une proportion plus importante d’Ukraino-Canadiens ayant une seule origine ethnique qui sont âgés de 45 à 64 ans (35 %) et de 65 ans et plus (33 %), comparativement à la population nationale (29 % et 16 %, respectivement).
En ce qui a trait à la composition du ménage, il y a une proportion légèrement moins élevée de ménages ukraino-canadiens multigénérationnels (4 %) et une proportion légèrement plus élevée de couples avec des enfants (46 %) comparativement à la population nationale (6 % et 42 %, respectivement). Les différences sont plus importantes entre les Ukraino-Canadiens ayant une seule origine ethnique et ceux ayant des origines ethniques multiples. Les ménages ukraino-canadiens ayant une seule origine ethnique sont moins susceptibles d’être composés de couples avec des enfants (29 %) que les ménages ukraino-canadiens aux origines ethniques multiples (50 %), ce qui reflète probablement la différence entre les groupes dans la structure par âge.
En ce qui concerne le statut de génération des immigrants, les Ukraino-Canadiens ayant une seule origine ethnique et ceux ayant des origines ethniques multiples sont plus susceptibles d’avoir habité au Canada depuis plus d’une génération que la population nationale. Par exemple, environ 79 % des Ukraino-Canadiens ayant des origines ethniques multiples sont membres d’une troisième génération ou plus, ce qui représente environ 20 points de pourcentage de plus que la population nationale.
Les Ukraino-Canadiens ont des niveaux de scolarité et d’emploi légèrement plus élevés que la population nationale. Par exemple, les Ukraino-Canadiens ayant une seule origine ethnique et ceux ayant des origines ethniques multiples sont moins susceptibles de ne pas avoir de diplôme d’études secondaires (8 % et 7 %, respectivement) que la population nationale (12 %). En outre, une proportion légèrement plus élevée d’Ukraino-Canadiens détient un baccalauréat ou un diplôme d’études supérieures. De même, le taux d’emploi des hommes ukraino-canadiens est environ trois points de pourcentage plus élevé que celui de la population nationale de sexe masculin et, dans le cas des femmes ukraino-canadiennes, il est environ quatre points de pourcentage plus élevé que celui de la population nationale de sexe féminin.
Les Ukraino-Canadiens ont tendance à occuper des emplois aux compétences professionnelles plus spécialisées que la population nationale. Plus précisément, la proportion de travailleurs ukraino-canadiens qui occupent des emplois peu spécialisésNote (31 %) est moins élevée que la population nationale (36 %). En outre, la proportion d’Ukraino-Canadiens occupant des emplois qui exigent des compétences moyennement spécialisées (41 %) et très spécialisées (28 %) est plus importante que celle de la population nationale (39 % et 25 %, respectivement). Par secteur industriel, les Ukraino-Canadiens sont plus susceptibles que la population nationale d’occuper un emploi dans les domaines suivants : extraction minière, exploitation en carrière et extraction de pétrole et de gaz; construction; services professionnels, scientifiques et techniques; services d’enseignement; et administration publique. Toutefois, comparativement à la population nationale, ils sont moins susceptibles d’occuper un emploi dans le domaine de la fabrication et des services d’hébergement et de restauration (données non présentées).
Parmi les travailleurs ayant des gains positifs, les travailleurs ukraino-canadiens ont également des revenus médians d’emploi plus élevé que la population nationale. Les travailleurs ukraino-canadiens de sexe masculin ont un revenu médian d’emploi de 47 900 $, soit 7 500 $ de plus que leurs homologues de la population nationale de sexe masculin. De même, les travailleuses ukraino-canadiennes ont un revenu médian de 31 900 $, comparativement à 28 900 $ chez leurs homologues de la population nationale de sexe féminin.
En résumé, la plupart des Ukraino-Canadiens habitent en Ontario, en Colombie-Britannique et dans les Prairies. Ils sont moins concentrés dans les villes de Toronto et de Montréal, et sont généralement bien répartis dans l’ensemble des RMR. Également, la plupart des Ukraino-Canadiens vivent au Canada depuis des générations et ont de meilleurs profils scolaires et d’emploi que la population nationale, de même que des compétences professionnelles plus spécialisées.
Auteurs
Max Stick et Feng Hou travaillent au sein de la Division de l’analyse sociale et de la modélisation de la Direction des études analytiques et de la modélisation à Statistique Canada.
Remerciements
Les auteurs tiennent à remercier Rubab Arim, Allison Leanage et Xue Li pour les conseils et les commentaires qu’elles ont transmis à l’égard d’une version antérieure du présent article.
Bibliographie
Société historique de l’immigration
canadienne. (2022). Ukraine.
https://cihs-shic.ca/ukraine/
Gerus, W. et Rea, J. E. (1985). Les Ukrainiens au Canada. Société historique du Canada.
Gouvernement du Canada. (2020). Ukrainiens.
https://www.bac-lac.gc.ca/fra/decouvrez/immigration/histoire-ethniques-culturels/Pages/ukrainiens.aspx
Gouvernement du Canada. (2022). Mesures d’immigration pour les
personnes touchées par l’invasion russe de l’Ukraine.
https://www.canada.ca/fr/immigration-refugies-citoyennete/services/immigrer-canada/mesures-ukraine.html
Hou, F. et Yan, X. (2020). Immigrants from
post-Soviet states: Socioeconomic characteristics and integration outcomes in
Canada. Dans M. Denisenko, S. Strozza et M. Light (dir.), Migration
from the newly independent states (p. 373-391).
https://doi.org/10.1007/978-3-030-36075-7_17
Immigration,
Réfugiés et Citoyenneté Canada. (2022). Résidents permanents – Mises à jour
mensuelles.
https://open.canada.ca/data/fr/dataset/f7e5498e-0ad8-4417-85c9-9b8aff9b9eda/resource/d1c1f4f3-2d7f-4e02-9a79-7af98209c2f3
Statistique Canada. (2017). Guide de référence sur l’origine
ethnique, Recensement de la population, 2016.
https://www12.statcan.gc.ca/census-recensement/2016/ref/guides/008/98-500-x2016008-fra.pdf
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