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- Introduction
- Données, méthodes et constatations de base
- Caractéristiques de l’établissement et avantages de l’agglomération
- Conclusion
1 Introduction
Comment les entreprises organisent-elles leurs activités et se font-elles concurrence dans l’économie de marché? Les producteurs individuels doivent faire une série de choix complexes et interdépendants relativement à ce qu’ils produisent, à la quantité qu’ils doivent produire, à la technologie qu’ils doivent utiliser, à la façon d’organiser leurs activités et à l’endroit où ils doivent s’installer. Lorsque l’on examine la structure de production à l’intérieur des industries et entre les économies, il est difficile de ne pas être frappé par la présence d’une hétérogénéité considérable. À tout le moins depuis les travaux de Penrose (1959) et Cyert et March (1963), cette variété a servi à comprendre le rendement et la stratégie des entreprises (voir Melitz [2003], pour un traitement formel récent). L’existence d’une hétérogénéité rend compte du fait que les actifs propres à l’entreprise — compétences en gestion, organisation, habitudes comportementales, taille, connaissances, technologie et même emplacement — sont très variables et que la valeur de ces actifs peut changer rapidement dans des marchés concurrentiels. Cette vision du rendement fondée sur les ressources est plus explicitement développée par Wernerfelt (1984) et Barney (1991), dont les travaux contrastent avec le modèle de possibilités et de menaces préconisé par Porter (1985). Un modèle de rendement de l’entreprise fondé sur les ressources est généralisé par Prahalad et Hamel (1990) dans leur étude des compétences et des capacités des entreprises. Kogut et Zander (1992) mettent l’accent sur le rôle essentiel des connaissances à l’intérieur de ce cadre, auquel Teece et Pisano (1994) donnent une tournure explicitement dynamique. Nelson et Winter (1982) fondent leur modèle évolutif de croissance économique sur des perceptions similaires de l’hétérogénéité entre des agents concurrents dans des marchés incertains.
Pendant la majeure partie des vingt dernières années, les recherches ont fourni des preuves empiriques concernant le degré d'hétérogénéité des entreprises et de la façon dont les caractéristiques des entreprises individuelles modèlent leur rendement et, globalement, la dynamique des industries et des régions (Baily et coll., 1992; Saxenian, 1994; Baldwin, 1995; Storper, 1997; Rigby et Essletzbichler, 2006; Boschma et Frenken, 2011). La plupart de ces travaux sont axés sur des aspects facilement observables de la variabilité des entreprises, comme l’âge, la taille, la technologie, l’emplacement, la structure organisationnelle et la propriété. Même si ces variables ne rendent en aucun cas compte de la gamme complète des caractéristiques des entreprises qui modèlent le rendement, elles servent à souligner l’importance de la variété et elles donnent un aperçu de la gamme de stratégies concurrentielles possibles. En outre, il ressort clairement d’une part importante des travaux mentionnés précédemment que les entreprises sont à la recherche d’efficiences de nombreuses façons différentes. On peut faire une distinction de base entre les entreprises qui ont la capacité interne de générer un avantage concurrentiel et celles qui obtiennent cet avantage grâce à la colocalisation.
Il existe des preuves abondantes que de nombreuses entreprises se regroupent au niveau spatial. Cela peut être expliqué en partie par la « géographie de première nature » et par le souhait des entreprises des secteurs de la transformation des ressources naturelles de s’établir près de leur source de matières brutes. Ellison et Glaeser (1999) estiment qu’au moins 20 % de la colocalisation d’entreprises aux États-Unis est guidée par la disponibilité des ressources. Les entreprises à l’extérieur du secteur des ressources ont aussi tendance à se regrouper, peut-être en raison des avantages qu’elles tirent d’une association spatiale étroite avec les autres. En fait, Ellison et Glaeser (1997) fournissent des preuves de formation de grappes dans 446 des 459 industries à quatre chiffres de la Classification type des industries (CTI). Même si la plupart des rapports sur l’agglomération de l’activité économique ont tendance à être plutôt sommaires, des tests rigoureux de la formation de grappes d’établissements au niveau spatial, à partir de méthodes fondées sur la distance, sont produits par Feser et Sweeney (2000), Marcon et Puech (2003) et Duranton et Overman (2005, 2008).
Deux cadres servant à expliquer l’agglomération sont fournis par Marshall (1920) et Jacobs (1969). Pour Marshall (1920), qui s’intéresse depuis longtemps au développement des villes monoindustrielles, la spécialisation locale des compétences de la main-d’oeuvre, les réseaux d’acheteurs et de fournisseurs et les retombées de connaissances produisent et soutiennent des avantages concurrentiels propres à l’emplacement à l’intérieur de secteurs industriels. Jacobs (1969), par contre, un champion de la diversité, imagine la ville comme un assemblage dense de bassins de connaissances différents qui fournissent un terrain fertile pour l’innovation et la croissance. Des traitements plus formels des rendements croissants agrégés, générés par les gains découlant d’une vaste gamme d’intrants intermédiaires et de la spécialisation de la main-d’oeuvre et par le regroupement de la main-d’oeuvre, sont présentés par Abdel-Rahman et Fujita (1990), Becker et Henderson (2000) et Krugman (1991), respectivement. Duranton et Puga (2001) élaborent un modèle de système urbain comprenant à la fois des centres urbains diversifiés et spécialisés. Ils relient l’innovation de processus dans les nouvelles entreprises à la diversité des modes de production existants à l’intérieur des « villes pépinières », tandis que les centres urbains spécialisés offrent aux entreprises matures des réductions des coûts techniques fixes, grâce au recours à des fournisseurs intermédiaires communs. Duranton et Puga (2004) fournissent un aperçu détaillé de ces arguments.
Des recherches empiriques antérieures ont tenté de trouver des données probantes sur l'incidence de l’agglomération, à partir de l’influence de l’échelle industrielle et de la taille de la population, de la proportion urbaine de population de l’État, ou de la densité de l’emploi sur les niveaux de productivité ou la croissance de la productivité (Sveikauskas, 1975; Carlino, 1978; Moomaw, 1981; Beeson, 1987; Moomaw et Williams, 1991; Ciccone et Hall, 1996). Glaeser et coll. (1992) et Henderson et coll. (1995) ont fait des efforts plus poussés pour isoler l’influence de la spécialisation de celle de la diversité de l’industrie, dans les externalités de forme dynamique de Marshall-Arrow-Romer (MAR) et de Jacobs. Glaeser et coll. (1992) examinent la croissance de l’emploi auprès d’un échantillon de grandes industries dans des villes américaines, entre 1956 et 1987. Ils mentionnent que la concurrence locale et la diversité industrielle accélèrent la croissance, tandis que la spécification industrielle régionale n’a pas d’effet significatif. Conformément à Jacobs (1969), ils font l’hypothèse que les retombées de connaissances se font entre les industries, plutôt qu’à l’intérieur des industries. Henderson et coll. (1995) rendent compte des résultats de l’analyse de la croissance de l’emploi urbain dans cinq secteurs matures de biens d’équipement et dans trois secteurs de technologies de pointe, entre 1970 et 1987. Les externalités de MAR exercent une influence positive et importante sur la croissance de l’emploi dans les industries matures, tandis que les externalités de MAR et de Jacobs sont à l’origine de la croissance de l’emploi dans les nouvelles industries de technologies de pointe. Ces résultats correspondent dans une large mesure avec ceux d’Henderson (2003). Des ouvrages considérables qui tentent de démêler l’importance relative des économies de localisation et d’urbanisation ont suivi. Beaudry et Schiffauerova (2009) en présentent un examen exhaustif.
Glaeser et coll. (1992) et Henderson et coll. (1995) ont montré que le cycle de vie des produits ou industries est essentiel pour déterminer si des externalités d’agglomération améliorent les résultats économiques à l’intérieur des regroupements industriels urbains, et quelles formes elles prennent. À cet égard, ils fournissent des preuves conformes au modèle des « villes pépinières » de Duranton et Puga (2001). McCann et Folta (2011) amplifient cet argument et se demandent si toutes les entreprises profitent également de la formation de grappes au niveau spatial. Ils ont élaboré une perspective de l’entreprise fondée sur les connaissances, d’après Kogut et Zander (1992), et ont fait l’hypothèse que la capacité d’apprentissage des entreprises et leur souplesse organisationnelle atténueront l’influence des externalités d’agglomération. Des preuves recueillies auprès d’un échantillon d’entreprises de biotechnologie aux États-Unis ont confirmé que les entreprises plus jeunes et les entreprises ayant des stocks de connaissances plus importants profitent le plus de l’appartenance à une grappe. Alcacer (2006) et Knoben et coll. (2010) ont avancé des arguments connexes concernant les caractéristiques de l’entreprise et l’agglomération, tandis que Potter et Watts (2011) et Neffke et coll. (2011, 2012) ont développé une agglomération s'inscrivant dans un cadre d’évolution explicite et ont démontré comment le cycle de vie des industries réglemente la forme et l’existence même des avantages de la colocalisation.
En parallèle avec la recherche théorique des fondements microéconomiques de l’agglomération, des documents empiriques plus récents tentent non seulement de faire une distinction entre les économies de localisation et d’urbanisation, mais aussi de déterminer les mécanismes précis grâce auxquels sont générés les rendements de l’agglomération. Dumais et coll. (1997), Rigby et Essletzbichler (2002), Rosenthal et Strange (2001, 2003), et Baldwin et coll. (2008, 2010), adaptent tous les travaux de Marshall (1920), et tentent de trouver des preuves des avantages relatifs du regroupement de la main-d’oeuvre, des réseaux d’acheteurs et de fournisseurs, et des retombées de connaissances pour différentes industries et régions.
Le présent document fait suite aux appels récents de McCann et Folta (2008, 2011) en vue d’explorer comment les différents types d’entreprises profitent de l’agglomération. Il fait progresser la recherche sur l’agglomération en démontrant tout d’abord que ce ne sont pas toutes les entreprises qui profitent de la colocalisation et, en deuxième lieu, que les entreprises ayant des capacités internes différentes profitent de formes différentes d’externalités géographiques. Pour comparer les groupes d’entreprises, on utilise des modèles de panel qui régressent la productivité du travail au niveau de l’entreprise sur les caractéristiques propres à l’entreprise et propres à l’emplacement. L’utilisation d’une spécification de panel permet de neutraliser l’hétérogénéité non observée au niveau de l’entreprise qui pourrait exercer une influence confondante dans nombre des études transversales dont il est question précédemment. À cet égard, les résultats présentés dans le présent document sont potentiellement plus robustes que ceux récemment offerts par Knoben et coll. (2010). L’analyse diffère aussi de celle de McCann et Folta (2011), du fait qu’elle explore comment différents mécanismes d’agglomération exercent des effets asymétriques sur les établissements ou les entreprises comportant diverses caractéristiques. Les caractéristiques propres à l’emplacement représentent différents types d’économies d’agglomération, d’après Marshall (1920) et Jacobs (1969). Une étude comparative des différentes répercussions de ces externalités est effectuée pour les petites et les grandes entreprises ainsi que pour les établissements qui appartiennent à des entreprises à établissements multiples ou à des entreprises étrangères et les établissements qui constituent des entreprises à établissement unique. On étudie également comment les différentes économies d’agglomération profitent aux établissements plus jeunes par rapport aux établissements plus anciens, et comment les attributs propres à l’emplacement influencent le rendement des établissements créés par des entreprises établies par rapport aux établissements créés par de nouvelles entreprises. L’analyse empirique est axée sur les établissements du secteur canadien de la fabrication qui étaient en activité au cours de la période allant de 1989 à 1999.
Le reste du présent document se divise en trois parties. La section 2 porte sur les sources des données, les variables utilisées et la stratégie de modélisation adoptée. Les résultats de l’analyse sont présentés dans la section 3, en commençant par un bref aperçu des résultats antérieurs découlant de modèles transversaux et de panel. Ces résultats fournissent un repère qui est ensuite utilisé pour examiner comment les sous-ensembles d’établissements ayant des caractéristiques différentes sont touchés par les différents types d’économies d’agglomération qui sont identifiés. La section 4 conclut avec un sommaire des résultats et des orientations pour les travaux à venir.
2 Données, méthodes et constatations de base
Les variables utilisées dans les modèles économétriques se répartissent entre deux groupes : caractéristiques des unités commerciales ou des établissements individuels; et caractéristiques d’emplacements particuliers. L'encadré comporte une liste des variables de nos modèles et en donne une description concise. Les données au niveau de l’établissement sont établies à partir de l’Enquête annuelle des manufactures (EAM) au Canada pour 1989 et 1999. Les techniques de panel nécessitent des observations au niveau de l’établissement individuel pour au moins deux années.
Description des variables
Caractéristiques de l’établissement
Productivité du travail : Valeur ajoutée divisée par le nombre de travailleurs de l’établissement affectés à la production.
Ratio des bénéfices à la valeur ajoutée : Différence entre la valeur ajoutée et les salaires divisée par la valeur ajoutée.
Travailleurs de la production : Nombre de travailleurs de la production de l’établissement.
Ratio des travailleurs hors production aux travailleurs de la production : Quotient du nombre de travailleurs hors production et du nombre de travailleurs de la production de l’établissement.
Caractéristiques de l’emplacement
Composition de la main-d’oeuvre : Caractéristique définie à la section 2 du document.
Densité locale des fournisseurs en amont : Caractéristique définie à la section 2 du document.
Établissements dans un rayon de 5 kilomètres : Nombre d’établissements dans la même industrie à deux chiffres définie selon la Classification type des industries (CTI) dans un rayon de 5 kilomètres.
Population : Population de la région métropolitaine de recensement (RMR) ou de l’agglomération de recensement (AR) où l’établissement est situé.
Des données propres à l’emplacement sont établies à partir de l’EAM, du Recensement de la population de 1991 et 2001 et des comptes d’entrées-sorties du Canada. Toutes les données ont fait l’objet d’un géocodage en fonction d’un niveau géographique constant du Recensement de 2001 pour les régions métropolitaines de recensement (RMR) et les agglomérations de recensement (AR), ci-après appelées « régions métropolitaines ». En 2001, on comptait 141 régions métropolitaines au Canada, dont la population allait d’environ 10 000 habitants à Kitimat en Colombie-Britannique à environ 4,6 millions habitants dans la RMR de Toronto. Ces 141 régions représentaient environ 80 % de la population canadienne en 2001 et à peu près le même pourcentage des établissements canadiens de la fabrication en 1999.
2.1 Caractéristiques propres à l’établissement et à l’entreprise
La variable dépendante de l’analyse est la productivité du travail, mesurée d’après le quotient de la valeur ajoutée et du nombre de travailleurs de la production. Pour chaque établissement, nous mesurons la valeur ajoutée et les travailleurs de la production d’après la moyenne enregistrée pour trois années. Pour 1989, nous prenons en compte les deux années adjacentes. Compte tenu du fait que 1999 est la dernière année du fichier longitudinal, la moyenne de la valeur ajoutée et des travailleurs de la production est tirée de cette année-là et des deux années précédentes. La valeur ajoutée est mesurée en dollars constants à l’aide d’un déflateur au niveau de l’industrie. Des moyennes sur trois ans sont utilisées pour toutes les caractéristiques au niveau de l’établissement, afin de réduire la variabilité d’une année à l’autre inhérente aux microdonnées. Les établissements subissent souvent des chocs qui peuvent occulter la relation entre les intrants et la production au niveau des établissements (p. ex., en raison du maintien d’effectifs en surnombre). L’utilisation d’une moyenne sur trois ans contribue à atténuer l’effet de cette variabilité sur nos estimations.
On peut s’attendre à ce que la productivité du travail soit fonction de plusieurs caractéristiques au niveau des établissements. Cela comprend la taille de l’établissement, l’intensité de capital et le ratio des travailleurs hors production aux travailleurs de la production. Il est à prévoir que la productivité du travail sera supérieure dans les établissements de grande taille, parce qu’ils peuvent profiter de diverses formes d’économies d’échelle (p. ex., celles qui résultent de cycles de production plus longs). La taille de l’établissement est mesurée en fonction du nombre de travailleurs de la production. On s’attendra aussi à ce que la productivité des travailleurs de la production augmente en parallèle avec l’accroissement de la quantité de machines et de matériel dont ils se servent dans le cadre de leur travail. La meilleure mesure de la mécanisation est le ratio du capital au travail. Malheureusement, les données sur le stock de capital ne sont pas disponibles au niveau de l’établissement, de sorte que nous utilisons une variable de substitution pour représenter le ratio du capital au travail. Les travailleurs de la production ont tendance à engendrer des niveaux plus élevés de production lorsqu’un plus grand nombre de travailleurs hors production contribuent au processus de production. Par exemple, un apport accru de la part des fonctions de gestion et de génie peut concourir à une meilleure organisation du processus de production. Nous nous attendons donc à ce qu’il existe un lien positif entre la productivité du travail et le ratio des travailleurs hors production aux travailleurs de la production.
Le modèle tient compte de deux types de caractéristiques des entreprises. Tout d’abord, nous déterminons si l’établissement fait partie d’une entreprise comptant plusieurs établissements. Il s’agit d’une variable binaire, ayant comme groupe de référence les entreprises qui ont un seul établissement. Nous nous attendons à ce que ces entreprises comptant plusieurs établissements soient plus productives que les entreprises ne possédant qu’un seul établissement. Les entreprises comptant plusieurs établissements offrent l’avantage d’économies à l’échelle de l’entreprise. Par exemple, les entreprises comptant plusieurs établissements seront mieux en mesure de recueillir et d’analyser des données permettant d’améliorer les pratiques de gestion et, par conséquent, de faire augmenter la productivité. La deuxième caractéristique a trait au contrôle étranger de l’établissement. Les établissements qui entrent dans cette catégorie devraient avoir des niveaux plus élevés de productivité, parce qu’ils ont accès à une gamme plus large d’expériences et de technologies (Baldwin et Gu, 2005). Le contrôle étranger prend lui aussi la forme d’une variable nominale binaire, avec comme groupe de référence les établissements sous contrôle canadien.
2.2 Caractéristiques propres à l’emplacement
Les variables d’agglomération élaborées dans le modèle de productivité, la densité locale des réseaux d’acheteurs et de fournisseurs, les bassins de main-d’oeuvre et les retombées de connaissances ont tous pour origine les travaux de Marshall (1920). Les variables utilisées pour mesurer ces économies marshalliennes, de même que les indicateurs servant à saisir d’autres types d’économies d’agglomération, sont énoncés ci-après.
Le bassin de main-d’oeuvre dans une région comble les besoins d’une industrie donnée, lorsque la répartition de cette main-d’oeuvre par profession correspond à la répartition dont a besoin l’industrie en question. Nous définissons la composition de la main-d’oeuvre pour une industrie dans une région métropolitaine en nous inspirant de Dumais et de ses collaborateurs (1997) :
où o représente une profession, i et j sont des indices représentant les industries et u désigne la région métropolitaine. L mesure la proportion de travailleurs dans une industrie et une profession données, tandis que E mesure le nombre de travailleurs dans une industrie particulière ou dans l’ensemble des industries d’une région métropolitaine. Cet indice est la somme des écarts quadratiques indiquant dans quelle mesure la répartition par profession à l’intérieur d’une industrie est appariée (ou correspond à) la répartition par profession de la population active de la région métropolitaine dans son ensemble, à l’exclusion de l’industrie spécifiée. La répartition par profession des travailleurs de l’industrie est calculée à l’échelle nationale et englobe environ 47 professions au niveau à deux chiffres de la Classification type des professions de 1991, qui est utilisée pour les Recensements de 1991 et 2001. Nous nous attendons à ce qu’une meilleure concordance entre la répartition par profession (demande) dans une industrie et la répartition par profession dans l’ensemble de la population active d’une région métropolitaine (offre) accroisse la productivité. L’amélioration des appariements réduit la valeur du terme quadratique. Ainsi, nous prévoyons un coefficient négatif de cette variable dans les régressions qui suivent.
Pour calculer les avantages de la densité locale des réseaux d’acheteurs et de fournisseurs, nous utilisons des données nationales sur les entrées-sorties et des indicateurs de la concentration locale de la production à l’intérieur de secteurs particuliers de l’économie. Ces réseaux peuvent comporter d’autres avantages sous forme de retombées entre les industries des flux de matières entre les secteurs industriels. L’existence d’une forte corrélation entre les estimations de la concentration géographique des producteurs en amont et celles des consommateurs en aval nous a amenés à examiner uniquement l’activité en amont. Afin de mesurer la variation locale de la densité des connexions en amont pour chaque industrie à quatre chiffres et pour chaque région métropolitaine de recensement au Canada, un quotient de localisation pondéré par les fournisseurs en amont est défini :
Le terme entre parenthèses est un quotient de localisation pour chaque industrie i dans la région métropolitaine u. Les quotients de localisation sont calculés à l’aide de la valeur totale des livraisons (TVS) de chaque industrie et mesurent le degré de spécialisation d’une ville donnée relativement à une industrie. Une valeur inférieure à 1 indique qu’une industrie est sous-représentée, tandis qu’une valeur supérieure à 1 indique qu’une industrie est surreprésentée. Le terme wij représente la pondération de l’industrie i à titre de fournisseur de l’industrie j— c’est-à-dire la proportion de l’ensemble des intrants manufacturiers achetés par l’industrie j qui provient de l’industrie i. La pondération des fournisseurs est estimée en fonction des opérations inter-industries, à partir des données des tableaux nationaux d’entrées-sorties du Canada. Les indices i et j renvoient chacun aux 236 industries manufacturières du niveau à quatre chiffres de la CTI, u renvoie à une région métropolitaine de recensement particulière, et n fait référence au pays dans son ensemble. Il faut préciser que l’influence de l’industrie à laquelle appartient l’établissement a été supprimée en laissant tomber la diagonale principale de la matrice des coefficients directs des entrées-sorties. Dans le cas des régions métropolitaines dont les économies sont spécialisées dans les industries qui constituent d’importants fournisseurs de l’industrie j, la valeur de USXLQ sera relativement élevée, ce qui devrait avoir un effet positif sur la productivité du travail dans les établissements de l’industrie j de ces régions.
Il convient de mentionner que, puisque les mesures de la composition de la main-d’oeuvre et des réseaux d’acheteurs et de fournisseurs sont déterminées au niveau de la région métropolitaine, les valeurs de ces variables pour une industrie particulière seront constantes pour tous les établissements de l’industrie et de la région métropolitaine. Comme il est noté précédemment, il est donc nécessaire de procéder à un ajustement des erreurs-types dans notre modèle, car, comme le démontre Moulton (1990), ces erreurs peuvent représenter un biais lorsque les variables agrégées sont toutes fusionnées sur l’ensemble de micro-unités d’observation. Dans toutes les régressions ci-après, les erreurs-types sont regroupées par région métropolitaine.
Le troisième effet de l’agglomération, outre le regroupement de la main-d’oeuvre et les réseaux d’acheteurs et de fournisseurs, découle des retombées de connaissances engendrées par la grande proximité des producteurs de la même industrie dans la même région urbaine — les retombées intra-industrie. La mesure des retombées de connaissances est notoirement difficile, voire impossible, au dire de Krugman (1991), car il n’existe aucune trace écrite de la circulation de l’information. Jaffe et coll. (1993) sont en désaccord et soutiennent que les citations de brevet peuvent permettre de suivre les flux de connaissances. Néanmoins, le couplage de l’information sur les brevets et des données au niveau des établissements, qui sont de plus en plus fréquemment utilisées pour étudier le phénomène de l’agglomération, est étonnamment sous-exploité. Rigby et Essletzbichler (2002) montrent que les flux de connaissances intégrés dans les biens intermédiaires améliorent la productivité des établissements agglomérés. Toutefois, cela fournit peu d’éclaircissements quant au rôle des flux d’information non intégrés. Nous avons consacré un peu de temps à l’étude de l’incidence des brevets intra-industrie et inter-industries, à l’échelon local, dans les industries utilisatrices et productrices, sur la productivité du travail des établissements, mais les résultats ont été pour l’essentiel non significatifs, ce qui fait que cette voie n’a pas été poursuivie davantage. Nos mesures s’appuyaient sur le simple dénombrement des brevets dans les régions métropolitaines et dans les industries liées à la classification des brevets plutôt qu’aux citations des brevets. Que l’on considère 1999, des années antérieures ou encore des groupes d’années, aucune relation significative n’a été constatée entre le nombre brut de brevets et la productivité.
C’est pourquoi, à l’instar d’Henderson (2003) et de Rosenthal et Strange (2003), nous utilisons à la fois le nombre et la densité des établissements dans des régions géographiques données, à titre de substitut des retombées de connaissances intra-industrie. Les données sur la latitude et la longitude des établissements individuels servent à définir des cercles concentriques situés à des distances variables de chacun d’eux, à l’intérieur desquels on a dénombré les établissements de la même industrie à deux chiffres (CTI). Nos recherches passées (Baldwin et coll., 2010) ont montré que la productivité d’un établissement individuel est influencée par le nombre d’établissements voisins appartenant à la même industrie qui sont situés dans un rayon de 5 kilomètres. Le nombre d’établissements à l’intérieur des cercles concentriques qui se situent à plus de 5 kilomètres d’un établissement particulier n’ont pas d’influence générale sur la productivité. On ne sait pas clairement pourquoi la distance de 5 kilomètres représente un seuil de distance significatif, même si cela est conforme aux résultats d’autres recherches qui montrent que les retombées de connaissances sont très localisées (Rosenthal et Strange, 2003).
Nous ajoutons à notre modèle la taille de la population métropolitaine comme approximation des économies d’urbanisation qui ne sont pas reflétées ailleurs dans notre modèle. Les avantages liés à la taille de la région urbaine sont nombreux. Les grandes économies urbaines offrent une plus grande diversité industrielle et professionnelle, qui facilite le transfert des innovations entre les industries (Jacobs, 1969) et qui est considérée comme contribuant à la création de nouvelles entreprises (Duranton et Puga, 2001). Les centres fortement peuplés créent aussi une demande d’infrastructures qui peut accroître la productivité de toutes les industries.
2.3 Modèle
Il est possible de calculer de façon systématique la relation entre la valeur ajoutée, la taille de l’établissement et l’intensité de capital à partir d’une fonction de production utilisant la technologie Cobb-Douglas, où la valeur ajoutée (VA) est exprimée par :
où K est une mesure de l’intrant capital, Lpw est le nombre de travailleurs de la production de l’établissement et Lnpw est le nombre de travailleurs hors production. Il suffit de quelques manipulations algébriques pour reformuler l’équation (1) de telle sorte que la productivité du travail (LP) soit une fonction de l’intrant capital et de l’intrant travail :
L’EAM ne fournit pas d’estimations du capital au niveau de l’établissement et, par conséquent, une valeur de substitution est nécessaire. est estimée à partir de l’expression suivante des bénéfices :
où r est le taux de rendement du capital. Le ratio des bénéfices au travail, , peut être substitué dans l’équation (2) et, en supposant que le taux de rendement soit égal dans les divers établissements, la productivité du travail est donnée par :
À partir de cette formulation, la variation des bénéfices selon l’industrie et la province peut être attribuée aux effets fixes de l’industrie et de la province.
Une des questions pratiques de l’équation (4) est que notre approximation du ratio du capital au travail et notre mesure de la productivité sont très fortement corrélées parce que les deux comprennent une valeur ajoutée dans leur numérateur et le travail dans leur dénominateur. Pour résoudre ce problème, un modèle légèrement différent est estimé. Le produit de (1) et de est
ce qui suppose que
La productivité du travail peut alors être définie ainsi
où et . L’équation (7) peut être utilisée pour calculer les valeurs de , et . Ainsi, même si l’effet du ratio du capital au travail sur la productivité n’est pas examiné directement, nous pouvons parvenir à une estimation.
Afin d’estimer l’équation (7), un terme d’erreur multiplicatif, , est inclus et est transformé logarithmiquement :
où Description de l'image(49) Précisons aussi que l est l’indice des établissements, m, l’indice des entreprises et q, l’indice des emplacements géographiques.
Dans l’ensemble de notre analyse, nous faisons l’hypothèse que les autres caractéristiques de l’entreprise et de son emplacement sont transmises par le terme de la productivité multifactorielle . Ainsi,
où X est un vecteur des caractéristiques de l’entreprise qui exerce un contrôle sur l’établissement l et G est un vecteur des caractéristiques de l’emplacement q. Ces caractéristiques géographiques sont liées à la région métropolitaine (u) associée à q ou sont calculées en fonction d’une distance donnée par rapport à q, où q peut être considéré comme un point dans l’espace. Les effets fixes non observés associés à l’établissement l, son entreprise m et l’emplacement q sont respectivement représentés dans l’équation (9) par .
La principale question économétrique que pose l’estimation de l’équation (8) est la corrélation possible du terme d’erreur avec une ou plusieurs variables indépendantes. Cette corrélation peut découler de la présence d’effets fixes non observés et/ou de l’endogénéité (causalité inverse). Pour résoudre le biais possible lié à la variable omise, l’équation (9) est substituée à l’équation (9) et la première différence est répartie entre les périodes :
Ainsi, nous éliminons les effets fixes au niveau de l’établissement, de l’entreprise et de l’emplacement, qui pourraient être corrélés avec d’autres variables indépendantes. Pour plus de simplicité, on présume que le taux de rendement du capital est constant à l’intérieur des établissements pour nos deux périodes, ce qui fait que ce terme est supprimé de l’équation (10). Ailleurs (voir Baldwin et coll., 2010), on utilise des techniques de variables instrumentales pour examiner les problèmes possibles d’endogénéité découlant d’un biais de simultanéité. Les résultats semblent être robustes à ces préoccupations.
2.4 Caractéristiques de l’échantillon
Des statistiques descriptives portant sur toutes les variables propres à l’emplacement et sur les variables de l’établissement qui sont continues figurent dans le tableau 1. Les valeurs du tableau 1 sont fournies pour les deux années ayant fait l’objet de nos observations, soit 1989 et 1999. Ce ne sont pas des valeurs logarithmiques. La moyenne, la médiane et l’écart-type pour chaque variable ainsi que le nombre d’observations sont indiqués. On dénombrait 11 323 établissements en 1989 qui étaient en exploitation en 1999. La productivité du travail moyenne des établissements présents en 1989 et en 1999 est passée de 82 775 $ à 87 298 $. Les autres caractéristiques au niveau de l’établissement sont demeurées relativement stables au cours de la période. Le ratio des bénéfices à la valeur ajoutée est demeuré essentiellement constant. Les tailles moyenne et médiane des établissements ont augmenté marginalement, tandis que les ratios des travailleurs hors production aux travailleurs de la production ont légèrement diminué. Des coefficients de corrélation pour toutes les paires de variables continues figurent dans Baldwin et coll. (2008).
Les caractéristiques des établissements sont mesurées au niveau des établissements individuels de la fabrication. L’échantillon était limité de plusieurs façons. Par construction, les établissements des régions rurales sont exclus de l’étude. Les régions rurales du Canada couvrent une superficie extrêmement importante et comptent relativement peu d’établissements. Ainsi, il est peu probable que des agglomérations significatives d’établissements de la fabrication soient laissées de côté. Par ailleurs, les difficultés liées à l’élaboration de données propres à l’emplacement dans le cas des régions rurales laissent aussi supposer que l’ajout d’observations pour de telles régions serait très peu pratique. Seuls les établissements dont le niveau moyen de l’emploi sur trois ans est supérieur à zéro sont inclus dans l’étude, la productivité du travail n’étant pas définie si la valeur de l’emploi est de zéro. De plus, l’échantillon ne comprend que les établissements dont la valeur ajoutée et le rendement du capital sont positifs. Dans ce dernier cas, cela signifie que la valeur ajoutée, une fois retranchés les salaires, est supérieure à zéro. Ces restrictions sont imposées par des raisons d’ordre pratique, du fait que les variables transformées logarithmiquement dont la valeur est de zéro ou moins sont mathématiquement non définies. Une autre raison est que les établissements pour lesquels la valeur ajoutée ou le rendement du capital est négatif subissent probablement des chocs économiques importants. Là encore, cela peut avoir pour effet de rendre floue la relation entre les entrées et la production. Nous excluons les établissements qui changent d’emplacement ou d’industrie. Même si les établissements qui changent d’industrie ne présentent pas un grand intérêt aux fins de la présente étude, ceux qui changent d’emplacement présentent un intérêt certain. Ces établissements ont produit beaucoup de bruit dans nos résultats généraux, particulièrement en ce qui a trait aux répercussions de nos différentes mesures de l’agglomération. Malheureusement, toutefois, les établissements qui ont changé d’emplacement au cours de la période allant de 1989 à 1999 sont allés dans de nombreuses directions et leur nombre n’était pas suffisamment important pour permettre de déterminer des effets distincts associés à ces changements.
Étant donné la nature longitudinale de l’analyse, la restriction la plus importante touchant l’ensemble d’établissements est celle qui consiste à ne retenir que ceux qui sont demeurés en affaires pendant au moins dix ans. Pour 1999, cette restriction, combinée à toutes celles mentionnées précédemment, a eu pour conséquence de ramener de quelque 29 000 à 11 300 le nombre d’établissements de l’échantillon. La perte d’un si grand nombre d’observations soulève des questions concernant les biais d’échantillonnage. Toutefois, les résultats présentés ci-après sont très similaires à ceux publiés précédemment (Baldwin et coll., 2008) à propos d’un échantillon transversal d’établissements beaucoup plus vaste pour 1999. Par ailleurs, dans le présent document, nous nous préoccupons des différences dans les effets de l’agglomération entre les établissements ou les entreprises comportant des caractéristiques variées. Le fait que l’ensemble des établissements ou les entreprises examinés soient des « survivants » laisse supposer qu’ils partagent un biais commun. Par ailleurs, les résultats ne sont pas répartis par industrie dans l’analyse qui suit. Il est entièrement possible que les résultats pour des industries individuelles diffèrent quelque peu des conclusions générales présentées. Malheureusement, il n’y a pas suffisamment d’observations sur les industries individuelles pour la période à l’étude pour estimer des modèles de panel pour différents secteurs de l’économie.
Passons maintenant aux variables géographiques, ou variables propres à l’emplacement, relativement à chaque établissement. Nous avons dénombré les établissements appartenant à la même industrie à deux chiffres (CTI) dans un rayon de 5 kilomètres. Ce dénombrement rend compte de tous les établissements, et non pas uniquement de ceux faisant partie de notre échantillon. Des valeurs de population sont établies pour les 141 régions métropolitaines qui constituent les unités géographiques d’analyse. La composition de la main-d’oeuvre et le quotient de localisation en amont sont calculés au niveau à trois et à quatre chiffres de la CTI du Canada, pour chaque région métropolitaine, ce qui produit 3 204 observations.
3 Caractéristiques de l’établissement et avantages de l’agglomération
3.1 Tous les établissements
Le modèle 2 du tableau 2 est fondé sur l’équation d’estimation ((10)) pour l’ensemble du panel équilibré de 11 323 établissements. Ce modèle a été estimé au moyen des moindres carrés ordinaires après calcul des différences entre les années. Toutes les erreurs-types sont robustes et sont regroupées par région métropolitaine, ce qui permet un ajustement en fonction de la corrélation possible des erreurs entre les établissements de la fabrication compris dans la même région (Moulton, 1990). À des fins de comparaison, et pour montrer que la plupart des résultats sont robustes à une gamme variée de spécifications économétriques, les modèles 1 et 3 figurent aussi dans le tableau 2. Le modèle 1 représente un modèle transversal pour l’année 1999. Le modèle 3 montre que les signes et la signification des coefficients du modèle de panel sont uniformes parce que des techniques de variables instrumentales sont utilisées ici pour résoudre les problèmes possibles d’endogénéité. Il est important de noter que le coefficient de la population, qui représente la mesure des économies d’urbanisation, change de positif à négatif, passant d’une section transversale à un panel longitudinal. Il s’agit d’une constatation qui sera abordée plus tard dans l’examen des résultats.
Les estimations du modèle du tableau 2 correspondent dans une large mesure aux attentes théoriques. Toutes les caractéristiques des établissements et des entreprises exercent une influence significative sur la productivité dans la direction prévue. La productivité du travail a tendance à être significativement plus élevée dans les établissements où le ratio des bénéfices à la valeur ajoutée, qui représente une approximation du ratio du capital au travail, est élevé. Les augmentations du ratio des travailleurs hors production aux travailleurs de la production à l’intérieur des établissements fait aussi augmenter la productivité, avec une élasticité représentant environ la moitié de celle du ratio des bénéfices à la valeur ajoutée. Le signe négatif de la taille de l’établissement rend compte de la valeur de l’exposant dans l’équation (7). Pour les résultats du panel à effets fixes, Description de l'image(52) La solution pour signifie, de façon triviale, que la valeur ajoutée augmente avec le nombre de travailleurs de la production ( = 0,425), mais comme les établissements connaissent des rendements d’échelle modérément moins grands.
Les résultats transversaux du tableau 2 montrent que les établissements des entreprises comptant plusieurs établissements et des entreprises sous contrôle étranger sont plus productifs. À l’intérieur d’un cadre de différence première, la nature des variables du statut d’entreprise comptant plusieurs établissements et d’entreprise étrangère nécessite d’être expliquée. L’effet du statut d’entreprise à établissements multiples est calculé au moyen de l’effet des transferts entre le statut d’entreprise à établissement unique et celui d’entreprise à établissements multiples. Il en va de même pour le statut d’entreprise étrangère. Comme ces statuts sont mesurés à la fin de la période, un transfert du statut d’entreprise à établissement unique à entreprise à établissements multiples, ou d’entreprise canadienne à entreprise étrangère, donnera lieu à une valeur positive (+1), tandis que l’inverse donnera lieu à une valeur négative (-1). Le coefficient des deux variables rendra compte de la moyenne pondérée de ces transferts bidirectionnels entre les établissements. En ce qui a trait aux résultats, les coefficients positifs et significatifs du statut d’entreprise à établissements multiples et du statut d’entreprise étrangère laissent supposer que les établissements qui sont intégrés à des entreprises comptant plusieurs établissements ou à des entreprises sous contrôle étranger ont tendance à avoir une productivité plus forte que les entreprises canadiennes à établissement unique.
L’influence des économies d’agglomération sur la productivité des établissements est aussi démontrée dans le tableau 2, tant pour l’échantillon transversal que pour tous les établissements qui constituent notre panel équilibré. La variable de la composition de la main-d’oeuvre a l’influence la plus grande de tous les facteurs d’agglomération sur la productivité. Ainsi, les établissements situés dans des régions urbaines où l’offre de main-d’oeuvre correspond de plus près à la demande de professions de l’industrie à laquelle appartient l’établissement ont une productivité plus forte que les établissements situés dans des régions urbaines où il y a une plus grande discordance entre la demande de main-d’oeuvre dans des professions particulières et l’offre disponible. La densité locale des fournisseurs en amont fait augmenter la productivité de l’établissement, mais son élasticité ne représente environ que le cinquième de celle de la composition de la main-d’oeuvre. Les retombées de connaissances sont aussi considérées comme améliorant le rendement des établissements, notre approximation des retombées (le nombre d’établissements dans la même industrie à deux chiffres (CTI) dans un rayon de 5 kilomètres d’un établissement particulier) entraînant une hausse significative, faible toutefois, de la productivité. Cet effet des retombées n’était pas significatif pour les établissements situés à une distance supérieure à 5 kilomètres, ce qui confirme les résultats de Rosenthal et Strange (2003), qui signalent un gradient de distance prononcé en ce qui a trait aux retombées intra-industrie.
3.2 Entreprises canadiennes et entreprises étrangères
Une préoccupation majeure est la façon dont ces facteurs d’agglomération s’exercent dans les sous-ensembles d’établissements déterminés d'après les caractéristiques de l’établissement ou de l’entreprise, qui sont couramment considérées comme des indicateurs des ressources ou des compétences disponibles au niveau interne. Pour tous les tableaux qui suivent, les résultats sont fournis à partir d’un modèle de panel à effet fixe. Les résultats de base, pour tous les établissements du panel, sont ceux du modèle 2 indiqué dans le tableau 2. Compte tenu des mises en garde qui précèdent, les modèles sont estimés pour l’ensemble de la population des établissements de la fabrication au Canada qui étaient en activité en 1989 et en 1999. Ainsi, d’une part, les différences entre les coefficients de régression indiquées pour différents sous-ensembles de la population peuvent être considérées comme étant significatives. Par ailleurs, les établissements examinés peuvent être interprétés comme un échantillon tiré d’une population plus large. Cette dernière interprétation exige que la signification des différences entre les coefficients de régression soit vérifiée pour l’ensemble des échantillons qui sont comparés. À cette fin, on régresse un échantillon de base sur les variables indépendantes de l’équation (10), puis on fait interagir un deuxième échantillon d’établissements avec chacune de ces variables et on détermine, au moyen de tests t, si les coefficients de régression partielle du deuxième échantillon diffèrent de façon significative de ceux de l’échantillon de base. Le corps de chaque tableau rend compte des valeurs p pour chaque coefficient de régression partielle établissant la signification des variables de chaque modèle.
Dans le tableau 3, on répartit l’échantillon de base entre les entreprises canadiennes et les entreprises sous contrôle étranger. La plupart des établissements, soit 73 % du panel équilibré original, appartiennent à des entreprises canadiennes à établissement unique. La taille de l’établissement, le ratio des travailleurs hors production aux travailleurs de la production et le ratio des bénéfices à la valeur ajoutée, notre valeur de substitution pour l’intensité de capital, sont tous significatifs, avec le même signe, pour les entreprises canadiennes et étrangères. Les coefficients de ces caractéristiques d’établissement sont légèrement plus grands pour les établissements sous contrôle étranger, mais la différence entre les coefficients est importante pour les deux ensembles d’établissements, uniquement dans le cas du ratio des bénéfices à la valeur ajoutée. Le passage au statut d’entreprise à établissements multiples fait augmenter la productivité des établissements canadiens, mais n’a pas de répercussions significatives sur les entreprises étrangères. On pense que cela pourrait venir du fait que les établissements sous contrôle étranger font de facto partie d’une entreprise comptant plusieurs établissements. La prise de contrôle par une entreprise étrangère fait augmenter la productivité de l’établissement, tandis que la productivité du travail des entreprises sous contrôle étranger qui passent sous contrôle canadien n’affiche pas de changements significatifs. Les différences entre les coefficients de régression partielle pour le statut d’entreprise à établissements multiples et d’entreprise étrangère sont statistiquement significatives pour les établissements canadiens et étrangers du secteur de la fabrication.
Les établissements contrôlés par des entreprises canadiennes et étrangères profitent des trois types d’économies marshalliennes. Les différences entre les coefficients d’agglomération des établissements sous contrôle canadien et sous contrôle étranger sont significatives uniquement dans le cas de la densité locale des fournisseurs en amont, les établissements sous contrôle étranger tirant davantage parti d’une telle association spatiale. On se penchera à nouveau sur cette constatation plus tard dans le document. La productivité des établissements canadiens diminue au fur et à mesure que la taille de la population urbaine augmente, même si le résultat concernant l'incidence différente de la taille de la population urbaine sur l’efficacité des entreprises canadiennes et étrangères n'est pas statistiquement significatif. Il convient aussi de souligner que certains des résultats du tableau 3 peuvent subir le biais de secteur et d’emplacement des établissements sous contrôle étranger par rapport aux établissements canadiens. Les établissements sous contrôle étranger sont surreprésentés dans les industries basées sur les ressources, basées sur les économies d’échelle et à vocation scientifique au Canada.
3.3 Entreprises canadiennes à établissement unique et entreprises canadiennes à établissements multiples
Dans le tableau 4, on utilise les 9 704 établissements canadiens du tableau 3 et on les répartit en deux groupes : ceux qui représentent des entreprises indépendantes; et ceux qui font partie d’entreprises à établissements multiples. Environ 85 % des établissements canadiens de la fabrication sont des entreprises indépendantes. On s’attend à ce que ces établissements utilisent davantage les possibilités d’agglomération que les établissements des entreprises à établissements multiples, qui pourraient tirer parti d’un ensemble plus exhaustif de ressources propres à l’entreprise. Les caractéristiques de l’établissement influencent la productivité des entreprises à établissement unique et à établissements multiples de façon similaire, les augmentations de la taille de l’établissement, le ratio des bénéfices à la valeur ajoutée et le ratio des travailleurs hors production aux travailleurs de la production menant tous à des gains de productivité. La productivité des établissements canadiens qui font partie d’entreprises à établissements multiples, par opposition aux entreprises à établissement unique, augmente significativement plus rapidement en ce qui a trait au ratio des bénéfices à la valeur ajoutée, et significativement plus lentement en ce qui a trait au ratio des travailleurs hors production aux travailleurs de la production.
Le tableau 4 montre que les entreprises à établissement unique profitent d’avantages importants au chapitre de la productivité découlant des trois économies de localisation et qu’elles subissent une influence négative de l’économie d’urbanisation. Un examen des mesures d’agglomération de Marshall pour les établissements des entreprises à établissement unique montre les avantages positifs du regroupement de la main-d’oeuvre et de la densité locale des réseaux de fournisseurs. Les entreprises à établissements multiples ne semblent pas profiter d’une association spatiale étroite avec d’autres établissements de la même grande industrie. Des tests statistiques révèlent que les coefficients de régression pour les deux échantillons de types d’entreprises diffèrent de façon significative uniquement dans le cas de la composition de la main-d’oeuvre et du réseau de fournisseurs en amont. Ainsi, les entreprises à établissement unique ont tendance à tirer davantage parti d’une composition avantageuse de la main-d’oeuvre, tandis que les établissements des entreprises à établissements multiples profitent davantage d’un réseau dense de fournisseurs locaux.
3.4 Petites et grandes entreprises canadiennes à établissement unique
Le tableau 5 répartit l’échantillon des entreprises canadiennes à établissement unique en deux groupes selon la taille de l’établissement. Le premier de ces groupes, le groupe des petites entreprises, est constitué de 5 825 établissements de la fabrication, chacun comptant moins de 21 travailleurs de la production en moyenne entre 1988 et 1990. Le deuxième groupe, qui est constitué d’entreprises relativement importantes, comprend 2 451 établissements, chacun employant 21 travailleurs de la production ou plus au début de la période à l’étude. Encore une fois, les caractéristiques individuelles de l’établissement influencent la productivité de façon semblable dans les deux groupes. Les grands établissements profitent beaucoup plus que les petits des niveaux plus élevés de capital.
Les petits et les grands établissements profitent des économies de localisation marshalliennes, mais de façons différentes. Même si seul le coefficient de la variable de la composition de la main-d’oeuvre peut sembler significativement différent d'un échantillon à l'autre, les données du tableau 5 suggèrent certaines différences ayant trait aux avantages relatifs de l’agglomération. Les petits établissements de la fabrication ne semblent pas profiter de la densité locale des fournisseurs en amont autant que les grands établissements, même si nous ne pouvons pas prétendre que les différences de coefficients sont importantes. La productivité des petites et des grandes entreprises canadiennes à établissement unique profite davantage de leur association avec des grappes locales d’établissements appartenant à la même industrie.
Les petits établissements font face à des réductions importantes de productivité liées à l’augmentation de la taille de la ville. L’influence de la taille de la ville sur la productivité des grands établissements est ambiguë et est mesurée avec relativement peu de précision, ce qui fait que les coefficients sur l’effet de la taille de la région urbaine des petits établissements ne peuvent pas être considérés comme différents de ceux des grands établissements.
3.5 Entreprises canadiennes à établissement unique, selon l’âge
Le tableau 6 présente les répercussions des caractéristiques de l’établissement et des économies d’agglomération selon l’âge des établissements de la fabrication. Les établissements compris dans le panel ont été créés avant 1989. On ne peut pas établir avec précision l’âge de 822 établissements créés avant 1960, ce qui fait qu’ils sont exclus des résultats présentés. Les établissements les plus anciens de l’échantillon, c’est-à-dire les entreprises canadiennes à établissement unique créées au cours des années 1960, connaissent des gains de productivité significativement plus importants découlant d’un ratio plus élevé des bénéfices à la valeur ajoutée et d’une taille plus importante que les établissements plus jeunes, même si tous les établissements profitent de ces caractéristiques. Tous les établissements sont plus productifs lorsque le ratio des travailleurs hors production aux travailleurs de la production est plus élevé, même si les établissements les plus anciens ont des gains significativement moindres. Les effets du changement de statut de propriété et de statut d’entreprise à établissements multiples sont encore plus variables entre les établissements de différents âges.
En ce qui a trait aux effets de l’agglomération, les établissements les plus jeunes, c’est-à-dire ceux créés au cours des années 1980, devraient dépendre le plus des ressources externes. Les entreprises créées dans les années 1980 profitent de façon significativement plus importante d’une composition appropriée de la main-d’oeuvre que les établissements plus anciens. Conformément à nos attentes, les retombées de connaissances font aussi augmenter la productivité des établissements les plus récents beaucoup plus que celle des établissements les plus anciens. Le nombre d’établissements appartenant à la même industrie dans un rayon de 5 kilomètres n’a pas d’influence statistique sur la productivité des établissements créés dans les années 1970 et a une incidence négative sur la productivité des établissements plus anciens, c’est-à-dire ceux créés dans les années 1960. La productivité des nouveaux établissements ne comporte pas de lien significatif avec le réseau de fournisseurs locaux, alors que la densité de ce réseau fait augmenter la productivité des établissements créés avant les années 1980. Cette constatation est conforme aux résultats présentés précédemment, même si les différences entre les coefficients de régression sur le réseau en amont ne sont pas statistiquement significatives pour les différents groupes d’âge des établissements. Qu’est-ce que cette tendance explique? Il se peut que les entreprises canadiennes nouvelles à établissement unique produisent initialement une proportion importante de leurs intrants à l’interne, mais qu’au fur et à mesure qu’elles font leur apprentissage et que leurs processus de production deviennent plus uniformes, les différentes étapes de la production se prêtent davantage à l’externalisation. Enfin, les établissements plus jeunes (ceux nés au cours des années 1970 et 1980) semblent être touchés de façon plus négative par la taille de la région urbaine, même si les coefficients sur cette variable ne diffèrent pas de façon significative entre les trois échantillons d’âges d’établissement.
3.6 Entreprises canadiennes à établissement unique : entreprises établies et entreprises entrantes selon l’âge
Les établissements de la fabrication dont il est question au tableau 6 étaient tous des entreprises canadiennes à établissement unique en 1999, à la fin du panel. Certaines de ces entreprises étaient de nouveaux entrants dans l’économie et d’autres ont été créés comme des établissements d’entreprises établies ou existantes. Il se peut que les établissements de ce dernier groupe profitent d’une composition différente de ressources internes que les nouvelles entreprises entrantes. Cette possibilité est analysée ci-après.
Le tableau 7 montre les résultats de l’estimation de notre modèle des avantages de l’agglomération sur la productivité pour les entreprises canadiennes à établissement unique. Dans les deux premières colonnes du tableau sont présentés les établissements créés dans des entreprises établies (qui deviennent des entreprises à établissement unique indépendantes en 1999) et les établissements nouveaux (la plupart demeurant des entreprises indépendantes à établissement unique jusqu’en 1999). La moitié droite du tableau divise le dernier groupe entre les établissements créés dans les années 1970 et ceux créés dans les années 1980.
Lorsque l’on met l’accent sur l’influence de l’agglomération, les établissements créés dans des entreprises établies et ceux créés comme de nouvelles entreprises voient leur productivité augmenter par suite d’une composition avantageuse de la main-d’oeuvre. Dans le cas des nouveaux entrants, ce gain d’efficacité est significativement plus important. Les établissements créés dans des entreprises établies profitent de la densité locale des fournisseurs en amont, mais ne profitent pas du tout de la colocalisation. Parallèlement, les nouveaux entrants ne profitent pas de la densité locale des réseaux de fournisseurs en amont, mais profitent de la colocalisation avec des établissements de la même industrie. Toutefois, pour ces deux processus d’agglomération, les différences entre les coefficients pour les établissements créés dans des entreprises établies et pour ceux qui sont de nouveaux entrants ne sont pas significatives.
Ces résultats laissent supposer, à tout le moins en partie, que les origines des nouveaux établissements ont des répercussions sur leur organisation et leur structure, ainsi que sur les avantages possibles de l’agglomération. Les résultats du tableau 7 révèlent aussi que la taille de la région urbaine a des répercussions négatives sur les nouveaux entrants, même si elle n’a pas d’influence sur la productivité des établissements créés dans des entreprises établies. Cette constatation est significative dans les deux groupes.
Quand les nouveaux entrants sont répartis selon la décennie de leur création, on observe ce qui suit : les établissements les plus jeunes profitent légèrement plus d’une bonne composition de la main-d’oeuvre; ils ne profitent pas du réseau local de fournisseurs en amont et ils profitent de la colocalisation avec des établissements de la même industrie dans un rayon de 5 kilomètres. Les entrants plus anciens profitent peu de la colocalisation avec des établissements de la même industrie, mais ils ont appris à exploiter les réseaux de fournisseurs en amont. Une comparaison entre les coefficients d’agglomération pour ces deux échantillons d’établissements montre que l’influence de la composition de la main-d’oeuvre et de la colocalisation est significativement différente.
Enfin, nous nous penchons sur l’effet des économies d’urbanisation mesurées au moyen des changements dans la population des régions urbaines où les établissements sont installés. Les établissements de la fabrication qui, selon nous, auraient moins de ressources internes, c’est-à-dire les petits établissements canadiens jeunes qui ne font pas partie d’entreprises à établissements multiples, sont tous touchés négativement (du point de vue de la productivité) par la taille de la région urbaine. On se demande pourquoi il devrait y avoir des économies négatives d’urbanisation pour ces établissements « plus vulnérables ». On s’attendrait à ce que les effets de congestion aient des répercussions sur tous les établissements. Par ailleurs, il est bien connu que les salaires ont tendance à être plus élevés dans les régions urbaines que dans les régions non urbaines et plus élevés dans les grands centres urbains que dans les petits. Si les petites entreprises canadiennes plus jeunes à établissement unique ont une productivité plus faible que leurs rivales, elles auront de la difficulté à attirer de la main-d’oeuvre dans les régions urbaines, parce qu’elles ne peuvent offrir des salaires concurrentiels. Il existe aussi une explication dynamique aux effets de l’urbanisation. La valeur d’option de l’entrée est plus élevée dans les grandes régions urbaines en raison des possibilités de croissance attendues pour les entrepreneurs moins qualifiés ou moins expérimentés. Ils sont capables de survivre, même lorsque la croissance de la productivité diminue, parce que les marchés locaux prennent de l'expansion. Il est important de se rappeler que, comme les données sont différenciées, les effets des économies d’urbanisation sont estimés à partir des changements dans la population urbaine. Par conséquent, même si les changements dans la population servent d’estimateur de l’effet des économies d’urbanisation sur la productivité, ils représentent simultanément une mesure de la croissance économique locale.
4 Conclusion
On considère en général que les concentrations importantes d’activité économique font augmenter les rendements qui peuvent être partagés par les unités commerciales qui se regroupent au niveau spatial. Selon les théories de l’entreprise et de la gestion stratégique, un avantage concurrentiel découle du développement et de l’exploitation d’actifs ou de capacités propres à l’entreprise, à l’intérieur ou à l’extérieur de l’entreprise. Les grandes entreprises plus anciennes sous contrôle étranger ayant des établissements multiples devraient avoir des ressources internes plus importantes dont elles peuvent tirer parti. Les petites entreprises canadiennes jeunes ne comptant qu’un établissement ne peuvent pas profiter des mêmes ressources ou sont plus susceptibles d’élaborer des stratégies de survie qui reposent sur des économies liées à l’emplacement générées dans des emplacements particuliers. L’analyse présentée ici vise à déterminer les sources de ces ressources externes et à examiner si elles profitent à toutes les entreprises ou seulement à certaines d'entre elles.
L’analyse montre qu’à peu près tous les établissements profitent des avantages au chapitre de la productivité liés au fait d’être situés dans des endroits où la répartition des professions des travailleurs correspond à la demande de main-d’oeuvre par profession. Toutefois, ces avantages ont tendance à être plus importants pour les petites entreprises jeunes. Les retombées de connaissances, mesurées par le nombre d’établissements dans la même industrie dans un rayon de 5 kilomètres, génèrent aussi de vastes gains de productivité. Ces gains étaient toutefois plus importants pour les établissements plus jeunes que pour les plus anciens. La densité locale des fournisseurs en amont ne profite pas aux entreprises qui, selon nous, auraient peu de ressources internes. Les entreprises plus anciennes, peu importe leur taille ou leur complexité, tirent les avantages les plus importants de la proximité des fournisseurs en amont. Cela est conforme à l’argument selon lequel les entreprises plus anciennes, dont les processus de production ont été uniformisés, sont mieux en mesure de tirer parti des avantages des réseaux locaux de fournisseurs et d’acheteurs. On croit que les entreprises plus jeunes ont moins d’information concernant les possibilités de production internes et externes et/ou n’ont pas encore appris comment configurer leurs possibilités de production de façon optimale.
Notre exploration initiale de l’agglomération dans l’économie canadienne, dans le contexte d’un modèle transversal, a fait ressortir une influence positive de la taille de la région urbaine sur la productivité de l’établissement. Cette constatation générale a été renversée lorsque l’analyse est passée à un format à effet fixe, afin de contrer l’hétérogénéité non observée. Les résultats du présent document éclairent davantage le rapport entre la taille de la région urbaine et le rendement des établissements de la fabrication. La taille de la région urbaine a des répercussions négatives importantes sur la productivité des établissements qui sont petits, relativement jeunes, sous contrôle canadien et qui appartiennent à des entreprises à établissement unique. Dans le cas des établissements plus grands, des établissements plus anciens, des établissements sous contrôle étranger et de ceux qui appartiennent à des entreprises à établissements multiples, la taille de la région urbaine n’a pas d’effet significatif sur la productivité.
Dans le cadre d’une analyse récente à partir de microdonnées, on a pu déterminer les gains liés à la colocalisation. Le présent document montre que ce ne sont pas tous les établissements de la fabrication qui profitent des économies de localisation et d’urbanisation, et détermine les types d’entreprises qui peuvent exploiter différentes formes d’économies externes. Toutefois, il reste beaucoup à faire pour comprendre précisément comment et où les avantages de l’agglomération sont produits et comment ils sont répartis entre les entreprises et les régions. L’évolution de la dynamique des agglomérations présente un intérêt particulier. Comment les grappes d’entreprises et les autres agents économiques prennent-ils de l’expansion? Quels sont les liens qui relient les acteurs économiques à des emplacements particuliers, et comment ceux-ci changent-ils au fil du temps et dans l’espace? Comment les caractéristiques des grappes et les caractéristiques des agents économiques qu’elles regroupent évoluent-elles en parallèle? La dynamique de l’entrée et de la sortie des entreprises ainsi que leur croissance diffèrent-elles à l’intérieur et à l’extérieur de l’agglomération? Comment la mobilité géographique, c'est-à-dire le mouvement des agents économiques de l’intérieur à l'extérieur des grappes et vice-versa, influe-t-elle sur leur réussite? Ces questions ont trait à la géographie du rendement économique, aux façons dont les connaissances et les autres ressources clés sont générées et exploitées sur place, ne serait-ce que temporairement, ainsi qu’aux processus qui contrôlent les mouvements de ces ressources.
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