Aperçus économiques
Sélection des immigrants en deux étapes : analyse de son expansion au Canada

Feng Hou, Statistique Canada
Eden Crossman,
Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada
Garnett Picot,
Réfugiés et Citoyenneté Canada
11-626-X no 112

Cet article d’Aperçus économiques documente l’expansion de la sélection en deux étapes des immigrants au Canada depuis le début des années 2000. La sélection des immigrants en deux étapes fait référence à la sélection des immigrants économiques parmi les travailleurs étrangers temporaires. La transition accrue d’un nombre en essor rapide de travailleurs étrangers temporaire au statut de résidents permanents a été rendue possible par le changement de composition des programmes d’admission vers des programmes provinciaux et la Catégorie de l’expérience canadienne, ainsi que le recours croissant aux travailleurs étrangers temporaires au sein de chaque programme d’admission. Parmi les demandeurs principaux de la catégorie économique, la proportion des demandeurs ayant eu une expérience professionnelle au Canada avant leur admission est passée de 12 %, pour la cohorte d’admissions de 2000, à 59 %, pour la cohorte d’admissions de 2018.

Il s’agit du deuxième de cinq articles sur le processus de sélection en deux étapes.

Introduction

Le Canada, tout comme l’Australie et la Nouvelle-Zélande, sélectionne une part croissante de ses immigrants économiques parmi les travailleurs étrangers temporaires. Dans ce processus, les employeurs canadiens jouent un rôle majeur en recrutant et en évaluant des travailleurs étrangers temporaires, tandis que le gouvernement décide du nombre de travailleurs étrangers temporaires admissibles comme résidents permanents et les sélectionne selon un ensemble de critères. Comme l’article d’analyse précédent l’a souligné, ce processus d’immigration en deux étapes présente de nombreux avantages et quelques éventuels défis (Crossman, Hou et Picot 2020). Les principaux avantages comprennent une correspondance étroite entre les compétences des immigrants et la demande du marché de l’emploi ainsi qu’une meilleure situation des immigrants sur le marché du travail. Les défis majeurs sont pour le gouvernement de veiller à ce que les travailleurs étrangers temporaires ne subissent pas de conditions de travail abusives, d’atténuer l’incidence négative possible sur les travailleurs du pays, de veiller à ce que le processus réponde aux pénuries du marché du travail plutôt qu’aux postes régulièrement vacants à court terme du fait d’un roulement de personnel et de maintenir l’équilibre entre répondre aux besoins à court et à long termes du marché du travail et de l’économie dans son ensemble.

Depuis la fin des années 1990, le Canada a créé de nouvelles voies de transition des travailleurs étrangers temporaires et des étudiants internationaux vers le statut de résidents permanents, comme le Programme des candidats des provinces et la Catégorie de l’expérience canadienne (Hou et Bonikowska 2018; IRCC 2015, 2017). Qui plus est, l’accent mis sur les emplois obtenus avant l’arrivée, sur l’expérience de travail canadienne et sur les capacités de parler anglais ou français, dans le cadre du système d’Entrée express récemment mis en œuvre pour sélectionner les immigrants économiques, profite également aux travailleurs étrangers temporaires souhaitant obtenir la résidence permanente (Lu et Hou 2017). Ces changements de politiques ont stimulé une expansion rapide de la sélection des immigrants en deux étapes.

Le présent article est le deuxième d’une série en cinq parties fournissant un vaste aperçu de l’importance croissante des travailleurs étrangers temporaires dans la sélection et la situation sur le marché du travail des nouveaux immigrants au Canada. Alors que le premier article fournissait un aperçu des documents existants sur les avantages et les risques potentiels de la sélection en deux étapes des immigrants, le présent article documente la façon dans le processus de sélection en deux étapes s’est développé au Canada. On y décrit la hausse du nombre de travailleurs étrangers temporaires et de leur transition vers le statut de résident permanent. On y examine également le rôle du changement des programmes d’admission des immigrants économiques dans l’expansion de la sélection en deux étapes au Canada.

Nombre croissant de travailleurs étrangers temporaires et leur transition vers le statut de résidents permanents

L’expansion de la sélection des immigrants en deux étapes au Canada est due à la fois au plus grand nombre de travailleurs étrangers temporaires et au taux croissant de transition vers le statut de résident permanent. Entre 2000 et 2018, le nombre de résidents étrangers temporaires détenant un permis de travail au Canada a été multiplié par six, passant de 66 600 en 2000 à 429 000 en 2018 (graphique 1)Note  . La majorité des travailleurs étrangers temporaires sont admis dans le cadre de deux programmes : le Programme des travailleurs étrangers temporaires (PTET) ou le Programme de mobilité internationale (PMI). Le PTET vise à répondre aux pénuries de main-d’œuvre à court terme. Les participants au PTET obtiennent un permis de travail lié à un employeur donné, qui les limite à travailler pour un employeur précis n’ayant pas pu trouver de travailleurs canadiens adéquats. Le PMI vise à défendre les intérêts économiques et culturels généraux du Canada (Gouvernement du Canada 2016). La majorité des participants au PMI obtiennent un permis de travail ouvert, qui leur permet de travailler pour tout employeur disposé à les engager. En plus des détenteurs d’un permis de travail, certains résidents temporaires étrangers, en particulier des étudiants internationaux, peuvent travailler au Canada sans permis de travail.

Graphique 1

Tableau de données du graphique 1 
Tableau de données du graphique 1
Sommaire du tableau
Le tableau montre les résultats de Tableau de données du graphique 1 Programme des travailleurs étrangers temporaires, Programme de mobilité internationale et Taux de chômage national, calculées selon nombre et pourcentage unités de mesure (figurant comme en-tête de colonne).
Programme des travailleurs étrangers temporaires Programme de mobilité internationale Taux de chômage national
nombre nombre pourcentage
2000 22 480 44 145 6,8
2001 26 140 46 895 7,2
2002 29 230 50 410 7,7
2003 33 970 54 330 7,6
2004 37 165 64 490 7,2
2005 43 350 73 780 6,8
2006 53 950 83 605 6,3
2007 78 260 92 920 6,0
2008 110 540 115 735 6,1
2009 112 500 139 860 8,3
2010 92 090 158 875 8,1
2011 81 550 187 180 7,5
2012 86 530 208 650 7,3
2013 103 935 235 855 7,1
2014 93 765 257 530 6,9
2015 60 010 251 025 6,9
2016 51 075 288 330 7,0
2017 46 060 321 755 6,3
2018 56 080 372 905 5,8

Au cours de la période allant de 2000 à 2018, les deux principaux programmes ciblant les travailleurs étrangers temporaires présentaient des tendances divergentes. Le nombre de participants au PTET a diminué après avoir enregistré un sommet au cours de la récession de 2008-2009, lorsque le taux de chômage national a augmenté de 2 points de pourcentage (graphique 1). Alors que le PTET a reflété la conjoncture économique générale pour la plupart des périodes de l’étude, le nombre de participants au PMI a augmenté régulièrement, quelles que soient les variations de la conjoncture économique générale. En 2018, le nombre de participants au PMI était six fois plus élevé que celui des participants au PTET.

Les détenteurs de permis de travail n’ont en fait pas tous travaillé au Canada au cours d’une année donnée. Certains détenteurs de permis peuvent quitter le Canada rapidement après leur arrivée au Canada sans avoir occupé d’emploi. D’autres peuvent ne pas avoir cherché d’emploi ou ne pas avoir réussi à en trouver un, en particulier ceux participant au programme d’Expérience internationale Canada (EIC)Note  . Il est également possible que certains détendeurs de permis aient travaillé au Canada, mais n’ont pas reçu de formulaire d’impôt canadien T4 (p. ex., s’ils ont été payés directement par le siège social d’une entreprise située en dehors du Canada) (Lu et Hou 2019). En utilisant la réception de revenus inscrits au T4 comme mesure indirecte de la participation au marché du travail canadien, Lu et Hou (2019) ont relevé qu’en 2016 61 % des détendeurs de permis de travail ouverts (comprenant la majorité des participants au PMI) enregistraient des revenus inscrits sur un feuillet T4, alors que 44 % de détenteurs de permis de travail à niveau élevé de compétences liés à un employeur donné et 85 % de détendeurs de permis de travail à faible niveau de compétences liés à un employeur donné enregistraient des revenus inscrits sur un feuillet T4.

Alors que leur nombre des travailleurs étrangers temporaires augmente rapidement, une part croissance d’entre eux a procédé à une transition vers le statut de résident permanent. Des estimations de Lu et Hou (2017) ainsi que de Prokopenko et Hou (2018) ont montré que la part des travailleurs étrangers temporairesNote  ayant obtenu le statut de résident permanent avant la cinquième année suivant leur arrivée initiale (c.-à-d., le taux de transition cumulatif à cinq ans) a augmenté pour atteindre 9 % pour la cohorte d’arrivée de1995-1999, 14 % pour la cohorte de 2000-2004 et 22 % pour la cohorte de 2005-2009. Des analyses mises à jour ayant recours à une définition plus inclusive des travailleurs étrangers temporaires pour la première foisNote  ont révélé que le taux de transition cumulatif à 10 ans a augmenté, passant de 30 % pour la cohorte de 2001 à 39 % pour la cohorte de 2006Note  . Ainsi, parmi ceux ayant obtenu leur premier permis de travail en 2006, plus d’un tiers étaient devenus des résidents permanents 10 ans plus tard.

Les résultats obtenus pour les cohortes de 1995-1999 et 2000-2004, pour lesquelles des points de données disponibles dépassent 10 ans, indiquent que les taux de transition cumulatifs ont peu augmenté après 10 ans. Généralement, la probabilité de passer au statut de résident permanent s’accélère au cours de la deuxième année suivant l’obtention du permis de travail, mais commence à se stabiliser après la cinquième année et change peu après 10 ans. Il reste à vérifier si les cohortes plus récentes reproduiront ces tendances (Lu et Hou 2017; Prokopenko et Hou 2018).

Les taux de transition cumulés varient considérablement en fonction du type de permis de travail de travailleur étranger temporaire. Au sein de la cohorte de 2006, par exemple, le taux de transition à 10 ans a atteint 51 % pour les détenteurs de permis de travail à faible niveau de compétences liés à un employeur donné, 47 % pour les détenteurs de permis de travail ouverts, mais seulement 20 % pour les détenteurs de permis de travail à niveau élevé de compétences liés à un employeur donné. La principale raison du taux de transition élevé chez les détenteurs de permis de travail à faible niveau de compétences liés à un employeur donné est que pour la cohorte de 2006 (ou les cohortes antérieures), la plupart avaient participé au Programme des aides familiaux résidants (PAFR) qui permettait aux participants de demander la résidence permanente après avoir travaillé comme aides familiaux au domicile de leurs clients au Canada pendant deux ans (Lu et Hou 2017)Note  . Les détenteurs de permis de travail à niveau élevé de compétences liés à un employeur donné bénéficient d’un plus grand nombre de voies d’obtention de la résidence permanente, mais peuvent ne pas être très motivés à le faire, car leurs compétences sont également recherchées au niveau international (Ci, Hou et Morissette 2018; Prokopenko et Hou 2018). Les détenteurs de permis de travail ouverts sont un groupe diversifié et leurs permis de travail ne comprennent pas de renseignements sur leur niveau de compétence (Lu et Hou 2019).

Il est important de noter que le taux de transition relativement élevé chez les travailleurs étrangers temporaires à faible qualification ne signifie pas qu’ils représentent une part élevée de ceux étant passés au statut de résident permanent. Pour la cohorte de 2006 des nouveaux travailleurs étrangers temporaires, par exemple, seuls 18 % détenaient un permis de travail à faible niveau de compétences. Parmi ceux étant devenus des résidents permanents 10 ans plus tard, seuls 23 % étaient des travailleurs étrangers temporaires peu qualifiésNote  . Une autre mesure de la répartition des compétences parmi les travailleurs étrangers temporaires devenant résidents permanents est le niveau de leurs revenus au Canada avant leur admission. Parmi les demandeurs principaux de la catégorie des immigrants économiques admis en 2018, seuls 10 % indiquaient de faibles revenus annuels avant leur immigration (20 000 $ ou moins en dollars de 2017), alors que les parts de ceux ayant gagné des revenus moyens (20 000 $ à 50 000 $) et élevés (plus de 50 000 $) s’élevaient respectivement à 59 % et 31 % (voir le tableau 2).

Changements des catégories d’immigrants et expansion de la sélection des immigrants en deux étapes

L’expansion de la sélection des immigrants en deux étapes a été due en partie aux changements significatifs des types de programmes utilisés pour sélectionner les immigrants économiques. Jusqu’à la fin des années 1990, le Programme fédéral canadien des travailleurs qualifiés (PFTQ) était la principale source pour la catégorie des immigrants économiques. Dans le cadre d’efforts visant à accroître les capacités du système d’immigration de répondre aux pénuries de compétences régionales et sectorielles, le gouvernement du Canada a lancé plusieurs nouveaux programmes, en particulier le Programme des candidats des provinces (PCP) en 1998 et la Catégorie de l’expérience canadienne (CEC) en 2008 (Ferrer, Picot et Riddell 2014; Hou et Picot 2016; IRCC 2015, 2017b). Le Québec dispose de son propre programme provincial d’immigration, le Programme des travailleurs qualifiés du Québec, depuis 1991.

Ces programmes sélectionnent des résidents permanents en fonction de leurs capacités potentielles à réussir sur le marché du travail, mais ils sont administrés différemment et se fondent sur des critères de sélection différents. Les PCP sont administrés conjointement par les gouvernements fédéral et provinciaux. Les provinces et territoires nomment les immigrants pour leurs secteurs de compétence. Le ministère de l’immigration fédéral évalue alors les candidats en fonction de critères d’admissibilité fédéraux. La CEC a été établie pour contribuer à attirer et à retenir des travailleurs hautement qualifiés et des diplômés internationaux ayant prouvé leur capacité à s’intégrer au marché du travail canadien (IRCC 2015). La CEC fournit une voie directe vers la résidence permanente pour les travailleurs hautement qualifiés et les diplômés internationaux ayant acquis au moins une année d’expérience de travail qualifié au Canada (Alboim et Cohl 2012; IRCC 2015).

Au cours des dernières années, les programmes PCP et CEC se sont considérablement développés, alors que la proportion des immigrants entrant au Canada dans le cadre du PFTQ a reculé. En 2018, les participants au PFTQ représentaient seulement 20 % de tous les immigrants économiques entrant au Canada, alors que le nombre de participants aux programmes provinciaux (admissions dans le cadre du PCP et du programme québécois) et au programme CEC avait augmenté pour atteindre respectivement 50 % et 15 % (IRCC sd.) Le changement des catégories d’admission a été particulièrement important chez les demandeurs principaux de la catégorie économique. Pour ces immigrants, le PFTQ, programme dominant de sélection en 2000 (représentant 78 % des demandeurs principaux de la catégorie économique) a été devancé par les programmes provinciaux en 2018 (le PFTQ représentant alors moins de 30 %) (graphique 2).

Graphique 2

Tableau de données du graphique 2 
Tableau de données du graphique 2
Sommaire du tableau
Le tableau montre les résultats de Tableau de données du graphique 2 Programme fédéral des travailleurs qualifiés, Programmes provinciaux, Catégorie d’expérience canadienne et Autres programmes fédéraux, calculées selon pourcentage unités de mesure (figurant comme en-tête de colonne).
Programme fédéral des travailleurs qualifiés Programmes provinciaux Catégorie d’expérience canadienne Autres programmes fédéraux
pourcentage
2000 78,041 13,698 Note ...: n'ayant pas lieu de figurer 8,261
2001 76,190 16,561 Note ...: n'ayant pas lieu de figurer 7,249
2002 72,432 21,074 Note ...: n'ayant pas lieu de figurer 6,494
2003 68,213 24,491 Note ...: n'ayant pas lieu de figurer 7,296
2004 63,693 28,498 Note ...: n'ayant pas lieu de figurer 7,809
2005 64,216 27,116 Note ...: n'ayant pas lieu de figurer 8,668
2006 55,003 33,760 Note ...: n'ayant pas lieu de figurer 11,237
2007 49,304 39,975 Note ...: n'ayant pas lieu de figurer 10,721
2008 45,837 38,731 Note ...: n'ayant pas lieu de figurer 15,432
2009 35,835 45,807 2,683 15,675
2010 38,633 42,963 3,217 15,187
2011 29,995 50,464 5,947 13,593
2012 30,158 53,871 8,701 7,270
2013 27,190 54,580 6,582 11,649
2014 17,070 46,478 17,675 18,777
2015 23,584 43,596 14,282 18,537
2016 24,664 48,862 13,769 12,706
2017 14,364 46,579 26,422 12,635
2018 25,271 46,438 20,168 8,123

La transition vers les programmes provinciaux et la CEC est importante, parce qu’ils représentent une plus grande part des immigrants entrants ayant été auparavant des travailleurs étrangers temporaires, par rapport à ce qui était le cas avec le PFTQ. Ainsi, cette nouvelle répartition en faveur de la CEC et des programmes provinciaux a augmenté la part globale des immigrants économiques ayant une expérience professionnelle antérieure au Canada. Un deuxième facteur a également joué un rôle. Au sein des programmes provinciaux, la part des immigrants sélectionnés ayant auparavant été des travailleurs étrangers temporaires a augmenté au fil du temps. En 2000, il existait peu de différence entre le PFTQ et les programmes provinciaux quant à la part des immigrants sélectionnés ayant gagné des revenus au Canada avant leur immigration : respectivement 11 % et 9 % pour les demandeurs principaux (tableau 1). En 2018, en revanche, cette part a augmenté, passant à 62 % pour les programmes provinciaux, mais à seulement 20 % environ pour le PFTQNote  . Par définition, près de 100 % des immigrants sélectionnés dans le cadre du programme CEC ont une expérience professionnelle antérieure au Canada puisqu’il s’agit d’une exigence d’admission.

Une décomposition simple démontre que la nouvelle répartition en faveur de la CEC et des programmes provinciaux, combinée à la tendance croissance des programmes provinciaux à sélectionner les immigrants dans le bassin des travailleurs étrangers temporaires, a contribué à pratiquement l’ensemble de l’augmentation (98 %) de la part des immigrants économiques ayant gagné des revenus au Canada avant leur admission sur la période allant de 2000 à 2018. Parmi tous les immigrants économiques adultes entrants, cette part est passée de 8 % en 2000 à 46 % en 2018. Cette hausse a été observée parmi les principaux demandeurs et leurs conjoints et personnes à charge, même si elle été plus notable pour les demandeurs principaux. En 2018, 59 % des demandeurs principaux de la catégorie économique avaient travaillé au Canada avant leur admission (en hausse par rapport à 12 % en 2000), ainsi que 22 % des conjoints et personnes à charge (en hausse par rapport à 2 % en 2000).


Tableau 1
Part des revenus, avant leur admission au Canada, des immigrants économiques âgés de 18 ans ou plus à l’admission
Sommaire du tableau
Le tableau montre les résultats de Part des revenus Tous les immigrants économiques et Demandeur principal, calculées selon pourcentage unités de mesure (figurant comme en-tête de colonne).
Tous les immigrants économiques Demandeur principal
Tous Demandeur principal Conjoint/
personne à charge
Travailleurs qualifiés fédéraux Programmes provinciaux Catégorie d’expérience canadienne Autres programmes fédéraux
pourcentage
2000 7,8 11,5 2,1 8,7 11,2 Note ...: n'ayant pas lieu de figurer 38,1
2001 7,5 11,0 2,2 8,1 11,3 Note ...: n'ayant pas lieu de figurer 41,0
2002 7,8 11,4 2,3 8,2 13,2 Note ...: n'ayant pas lieu de figurer 41,4
2003 9,0 13,0 2,7 7,8 13,8 Note ...: n'ayant pas lieu de figurer 59,1
2004 10,9 15,7 4,0 11,2 14,2 Note ...: n'ayant pas lieu de figurer 57,6
2005 9,9 14,8 3,5 9,5 13,7 Note ...: n'ayant pas lieu de figurer 57,6
2006 15,7 22,6 6,0 16,8 20,9 Note ...: n'ayant pas lieu de figurer 56,2
2007 18,1 25,8 7,1 20,9 22,9 Note ...: n'ayant pas lieu de figurer 59,2
2008 21,8 31,1 8,4 24,3 26,0 Note ...: n'ayant pas lieu de figurer 63,7
2009 24,8 34,6 9,8 24,3 29,9 97,7 60,9
2010 23,3 32,9 8,8 18,8 29,6 97,5 64,4
2011 23,2 32,7 8,7 14,1 29,9 97,9 55,9
2012 27,9 39,4 11,0 16,3 38,3 97,3 74,8
2013 33,1 44,9 13,8 15,4 49,2 97,9 63,3
2014 44,1 57,8 19,0 24,3 46,4 98,3 78,3
2015 43,5 58,6 18,4 14,2 59,1 98,3 83,4
2016 43,4 58,6 19,2 33,0 53,4 98,0 85,2
2017 52,2 67,3 23,5 22,3 56,4 97,7 94,9
2018 46,3 59,0 21,8 10,7 62,2 97,2 95,7

Non seulement la part d’immigrants ayant été auparavant des travailleurs étrangers temporaires a augmenté, mais les caractéristiques de leurs revenus avant l’admission ont également changé au cours de la période de 2000 à 2018. Les revenus annuels moyens gagnés au Canada avant l’admission par les demandeurs principaux de la catégorie des immigrants économiques ayant été auparavant des travailleurs étrangers temporaires ont augmenté, passant de 43 600 $ (en dollars de 2017) en 2000 à 48 600 $ en 2018, ce qui ne constitue pas une importante variation en revenus réels sur près de 20 ans. Pourtant, cette relative stabilité masque deux changements significatifs. La part ayant gagné de faibles revenus (moins de 20 000 $ par an) au Canada avant l’immigration a baissé, passant de 38 % à 10 % entre 2000 et 2018 (tableau 2). Alors que la proportion ayant gagné des revenus élevés (plus de 50 000 $) avant l’admission est passée de 21 % à 31 %, leurs revenus moyens ont significativement baissé, passant de 129 000 $ (en dollars de 2017) à 87 000 $ au cours de la même période. Ainsi, les personnes gagnant un très faible revenu et celles gagnant un revenu très élevé ont représenté une moindre proportion des travailleurs étrangers temporaires ayant obtenu la résidence permanente. Au cours de la période, la part de demandeurs principaux de la catégorie économique ayant gagné des revenus moyens (entre 20 000 $ et 50 000 $) a augmenté, passant de 41 % en 2000 à 59 % en 2018.

Ces tendances en matière de revenus annuels pourraient être liées à des changements survenus dans la participation au marché du travail (c.-à-d., travailler un plus grand nombre ou un moins grand nombre d’heures par an) ou dans le taux de rémunération, ou les deux. La base de données longitudinales sur l’immigration (BDIM) ne contient pas les renseignements pertinents pour distinguer ces effets. Le recul de la part des travailleurs aux revenus très faibles suggère une réduction du nombre de travailleurs à faibles qualifications ayant effectué la transition, même si une partie de cette diminution pourrait être due au fait que les travailleurs étrangers temporaires du PMI en particulier trouvent simplement des emplois offrant davantage d’heures par an.

À propos de la diminution des revenus annuels des demandeurs principaux ayant gagné un revenu élevé, une analyse multivariéeNote  révèle qu’elle était principalement associée aux variations observées quant à trois caractéristiques sociodémographiques : le niveau de scolarité, la région d’origine et l’âge à l’admission. Au cours de la période allant du milieu des années 2000 au milieu des années 2010, la part de ces immigrants possédant un diplôme d’études supérieures (maîtrise ou doctorat) a diminué (p. ex., de 45 % en 2005 à 31 % en 2014). Il existe également des changements significatifs dans les régions d’origine de ces immigrants. La part des personnes en provenance des États-Unis et de l’Europe du Nord et de l’Ouest ayant gagné un revenu élevé a diminué, passant de 45 % en 2005 à 22 % en 2018, alors que la part de ceux provenant d’Asie du Sud et du Sud-Est a augmenté, passant de 12 % à 37 % au cours de la même période. L’âge moyen à l’admission pour ce groupe d’immigrants a également diminué, passant d’environ 38 ans au milieu des années 2010 à 33 ans en 2018. Selon les années comparées, ces trois facteurs ont représenté entre la moitié et les deux tiers du recul des revenus au Canada avant l’immigration de ce groupe ayant gagné un revenu élevé. Cette analyse suggère un repli des immigrants très qualifiés (c.-à-d., à niveau de scolarité élevé) et un déplacement vers les personnes provenant de régions gagnant traditionnellement des revenus inférieurs pour des raisons liées à la langue, à une moindre rentabilité de leurs études et à d’autres facteurs. Parallèlement, la conséquence d’un flux d’immigrants en moyenne plus jeunes peut être que les niveaux initiaux de revenus après l’obtention de la résidence permanente ne sont pas aussi élevés que ceux des immigrants admis à un âge supérieur; si un âge plus avancé reflète un avantage associé à une expérience professionnelle et à la situation à court terme sur le marché du travail.

Globalement, ces tendances relatives aux revenus suggèrent une variation relativement faible de la qualité moyenne des travailleurs étrangers temporaires effectuant la transition vers le statut de résident permanent, mas un changement significatif des extrémités supérieure et inférieure de la répartition des compétences.



Tableau 2
Répartition et revenus moyens, avant leur admission au Canada, des principaux demandeurs immigrants économiques âgés de 18 ans ou plus à l’admission
Sommaire du tableau
Le tableau montre les résultats de Répartition et revenus moyens Répartition en pourcentage, Revenus moyens, Revenus médians et Moyenne totale, calculées selon pourcentage et en dollars de 2017 unités de mesure (figurant comme en-tête de colonne).
Répartition en pourcentage Revenus moyens Revenus médians Moyenne totale
0 - <= 20 000 $ > 20 000 $ – <= 50 000 $ > 50 000 $ 0 - <= 20 000 $ > 20 000 $ – <= 50 000 $ > 50 000 $ 0 - <= 20 000 $ > 20 000 $ – <= 50 000 $ > 50 000 $
pourcentage en dollars de 2017 en dollars de 2017
2000 38,3 40,5 21,2 11 800 28 900 129 100 12 414 25 897 86 639 43 607
2001 37,4 40,9 21,7 11 800 28 900 131 600 12 730 25 992 88 581 44 764
2002 34,7 39,2 26,0 11 500 29 300 126 600 11 997 26 544 91 269 48 433
2003 32,3 43,9 23,9 11 600 29 000 137 200 12 465 26 266 97 343 49 203
2004 30,8 40,0 29,2 11 500 29 100 142 100 12 518 26 120 99 484 56 666
2005 34,2 41,4 24,4 12 200 28 600 144 300 13 690 25 826 99 083 51 202
2006 34,2 41,8 24,0 11 600 29 600 133 200 12 508 27 056 96 272 48 303
2007 31,9 42,8 25,3 11 500 30 400 126 800 12 545 28 223 91 131 48 760
2008 29,8 45,8 24,4 13 100 29 900 117 300 14 703 27 340 84 431 46 250
2009 24,8 48,9 26,3 13 200 31 500 110 500 15 085 29 843 80 572 47 706
2010 22,7 50,7 26,7 13 600 31 300 107 000 15 388 29 373 79 345 47 460
2011 17,1 53,7 29,1 13 500 32 300 105 600 15 245 31 123 79 990 50 430
2012 14,3 54,9 30,8 12 100 33 600 103 900 13 157 33 050 76 731 52 188
2013 13,9 56,4 29,7 12 300 33 000 99 000 13 642 32 135 74 786 49 703
2014 10,4 59,0 30,7 13 300 32 400 98 900 15 233 31 515 75 809 50 800
2015 10,1 59,8 30,1 12 600 32 500 96 700 13 978 31 541 74 440 49 791
2016 9,3 55,3 35,4 12 100 33 700 94 700 13 233 33 087 74 459 53 253
2017 9,4 58,3 32,3 12 500 33 700 91 100 13 747 33 072 71 645 50 230
2018 9,5 59,4 31,1 12 300 34 100 87 200 13 559 33 609 69 553 48 550

Résumé

L’expansion de la sélection des immigrants en deux étapes au Canada a été stimulée par le nombre croissant de travailleurs étrangers temporaires et par la hausse du taux de transition vers le statut de résident permanent. Au cours de la période de 2000 à 2018, le nombre de travailleurs étrangers temporaires (détenant un permis de travail valide au 31 décembre) au Canada a augmenté, passant d’environ 60 000 à 429 300 personnes. Cela étant dit, les détenteurs de permis de travail n’ont pas tous gagné de revenu au cours de chaque année donnée. On n’observe aucune corrélation étroite entre la variation du taux de chômage national et le nombre de travailleurs étrangers temporaires au Canada depuis le début des années 2000, principalement du fait de l’expansion continue du Programme de mobilité internationale, même si le Programme des travailleurs étrangers temporaires a suivi la conjoncture économique générale au cours des années 2000 et au début des années 2010. Globalement, les variations du nombre total de travailleurs étrangers temporaires n’ont pas correspondu à la demande du marché du travail. Parmi les travailleurs étrangers temporaires ayant obtenu leur premier permis de travail au début des années 2000, plus d’un tiers sont devenus résidents permanents au cours des dixième années suivantes.

L’expansion de la sélection en deux étapes est évidente selon le nombre en hausse rapide des immigrants économiques ayant eu une expérience professionnelle au Canada avant leur admission. En 2000, 8 % des immigrants économiques avaient gagné des revenus au Canada avant leur admission; chiffre passant à 46 % en 2018. Au niveau agrégé, la proportion des immigrants de ce groupe ayant gagné un revenu avant leur admission est passée de 12 % en 2000 à 59 % en 2018. Cette expansion a eu lieu pour deux raisons : la transition vers les programmes provinciaux et la Catégorie de l’expérience canadienne (CEC), programmes ciblant tous deux les travailleurs étrangers temporaires, et une plus grande part de résidents permanents ayant gagné des revenus auparavant, dans le cadre de programmes provinciaux. Les divers programmes d’admission diffèrent considérablement en matière de part de nouveaux immigrants ayant déjà travaillé au Canada. En 2018, le Programme fédéral canadien des travailleurs qualifiés (PFTQ) enregistrait le plus faible taux de sélection de demandeurs ayant une expérience professionnelle canadienne antérieure : 11 % des sélectionnés avaient gagné des revenus au Canada avant leur immigration, par rapport à 62 % dans le cadre des programmes provinciaux et 97 % pour le programme CEC. Ces différences sont significatives du fait de la transition majeure en matière de programmes d’admission des immigrants économiques. Jusqu’à la fin des années 1990, le PFTQ était la principale source d’entrée pour les immigrants économiques; sa part a cependant décliné pour s’établir à environ un quart au milieu des années 2010. Parallèlement, les programmes provinciaux (en plus de la source d’admission du Québec) ont augmenté et sont devenus la plus importante source d’entrées.

Les types de travailleurs étrangers temporaires sélectionnés (comme l’indiquent leurs revenus au Canada avant leur admission) ont également changé au cours de la période de 2000 à 2018. La part des immigrants ayant gagné de faibles revenus annuels avant leur admission a reculé de 38 % à 10 % de tous les demandeurs principaux de la catégorie des immigrants économiques ayant gagné des revenus au Canada avant leur immigration. La part des immigrants ayant gagné des revenus moyens au Canada avant leur immigration a augmenté, passant de 41 % à 59 %, et celle des immigrants ayant gagné des revenus élevés au Canada avant leur immigration a également augmenté, passant de 21 % à 31 %, même si les revenus moyens de ces derniers ont diminué de façon significative au cours de la même période. Globalement, ces tendances relatives aux revenus suggèrent une variation relativement faible de la qualité moyenne des travailleurs étrangers temporaires effectuant la transition vers le statut de résident permanent, mas un changement significatif des extrémités supérieure et inférieure de la répartition des compétences.

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