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11-010-XIB
L'Observateur économique canadien
Mars 2007

Étude spéciale

Tendances récentes de la production et de l’emploi

par P. Cross*

L’une des grandes tendances économiques de 2006 a été le ralentissement de la croissance de la production, qui s’est accompagné de hausses constantes au chapitre de l’emploi. Ces deux tendances concurrentes ont occupé une place de plus en plus grande dans les observations concernant l’économie, au fur et à mesure que l’année progressait. À long terme, il est typique que la production dépasse la croissance de l’emploi de plus de 1 % par an en réaction à la tendance à la hausse de la productivité. La convergence des gains de production et de l’emploi à la fin de 2006 comporte implicitement une diminution de la croissance de la productivité. Dans le présent article, nous tenterons de faire mieux comprendre la raison de cette situation.

La présente étude fournit un aperçu des sources du ralentissement de la croissance de la production par rapport à l’emploi en 2006. Elle comprend des exemples récents de précédents en ce qui a trait à la convergence de la croissance de la production et de l’emploi. Elle comporte en outre un examen d’une gamme variée d’activités économiques qui pourraient expliquer pourquoi la production et l’emploi ont convergé à la fin de 2006. Il s’agit notamment de l’évolution rapide de la situation des diverses industries et régions – à savoir principalement la reprise dans les industries de ressources de l’Ouest du Canada et le déclin de la fabrication dans le centre du Canada – ainsi que les changements qui ont touché la qualité de la main-d’œuvre et auxquels ont fait face les entreprises, le taux de chômage ayant atteint son niveau le plus bas en une génération. L’étude porte de façon détaillée sur les événements inhabituels et l’évolution des modèles saisonniers qui ont touché des industries particulières.

Comme il faut s’y attendre, une part importante de la discussion sur la situation actuelle est très technique. Les gens pensent souvent que la production par employé et la productivité du travail sont des concepts interchangeables. Il y a pourtant des différences qui peuvent provoquer une divergence entre ces séries avec le temps (figure 1). Ce dont il faut surtout tenir compte c’est que les données officielles sur la productivité du travail ne touchent que le secteur des entreprises duquel sont exclus les 15 % du PIB du secteur non commercial (ce qui évite les problèmes conceptuels relatifs à la mesure de la croissance de la productivité dans ce secteur). En outre, la productivité est calculée en fonction de la production par heure travaillée et non de la production par employé. Les données sur les heures travaillées peuvent être différentes des données sur l’emploi en raison des personnes qui cumulent les emplois, la proportion d’emplois à temps plein et à temps partiel et la longueur de la semaine de travail. Lorsqu’il est fait référence à la productivité dans le présent document, plutôt que de production par employé, ce sont les données du PIB par heure travaillée dans le secteur des entreprises dont il est question. À moins d’indications contraires, les données sur l’emploi du présent document sont tirées de l’Enquête sur la population active, tandis que la production totale est basée sur l’agrégation du PIB réel, qui comprend le secteur des entreprises et le secteur non commercial.

Figure 1

Le présent article est axé sur les facteurs qui ont contribué au ralentissement tant de la croissance de la production par employé que de la productivité en 2006. Il est donc peu fait mention des facteurs déterminants de la croissance de la productivité à long terme. Les économistes s’entendent généralement pour dire qu’ils vont de la structure et des compétences de la population aux dépenses en immobilisations, en passant par la recherche et l’innovation et les facteurs institutionnels, comme la fiscalité et la réglementation commerciale. Toutefois, étant donné que la majorité de ces variables ont peu changé l’an dernier (sauf pour quelques variations dans la population et les immobilisations), elles n’occupent pas une place prépondérante dans le présent document.

Contexte cyclique

La croissance de la production et de l’emploi converge souvent pendant de courtes périodes à l’extérieur des périodes de récession (en périodes de récession, les économistes s’attendent à ce que la production et l’emploi convergent, les entreprises gardent en réserve certains travailleurs tout en réduisant la production). Pas plus tard qu’en 2002 et 2003, la croissance de la production a été inférieure à celle de l’emploi, et ce, pendant plus longtemps qu’en 2006.

En fait, la figure 2 montre que la convergence de la croissance de la production et de l’emploi a été la règle, et non pas l’exception, depuis la reprise économique qui a fait suite à une période de stagnation à la fin de 2001. La croissance d’une année à l’autre de la production par employé a été inférieure à 1 % pendant 44 des 69 derniers mois (soit 63,8 % du temps), et a été négative pendant 16 des 26 mois entre juillet 2001 et août 2003. La croissance de la production a suivi difficilement celle de l’emploi la majeure partie du temps : se situant à un niveau inférieur à la fin de 2001, prenant difficilement les devants en 2002, et retombant encore une fois pendant la majeure partie de 2003. Ce n’est qu’en 2004 et 2005 que la croissance de la production a été de toute évidence supérieure aux hausses d’emploi, signalant une croissance positive de la productivité du travail. Même dans ce cas, les gains de productivité ont été de loin inférieurs à ceux enregistrés en 1999 et 2000. C’est donc dire que la convergence des deux encore une fois à la fin de 2006 n’est guère un phénomène nouveau.

Figure 2

En rétrospective, le ralentissement de la production par employé en 2002 et 2003 (qui a été confirmé par la suite dans les estimations officielles de la productivité du travail) est plus surprenant que celui de 2006. À ce moment-là, l’économie récupérait d’une période presque récessionnaire, en 2001, découlant de la morosité qui a suivi l’éclatement de la bulle des technologies de pointe et le choc des attentats du 11 septembre. Normalement, la reprise initiale après un repli cyclique de l’économie entraîne des gains de productivité importants, des ressources sous-utilisées étant mises à nouveau à contribution. La situation a été différente en 2006. En effet, une économie fonctionnant dans un contexte de quasi-plein emploi, particulièrement dans l’Ouest du Canada, où la croissance s’est concentrée, est plus susceptible d’afficher une faible croissance de la productivité. Étant donné que l’économie est plus près des limites de sa capacité qu’en 2003, les effets d’une faible productivité sont différents pour l’inflation et les taux d’intérêt.

Il convient de se rappeler que de nombreux facteurs transitoires ont nui à la croissance du PIB en 2003, y compris l’épidémie de SRAS, la découverte de cas de la maladie de la vache folle, la panne de courant généralisée en Ontario, les incendies en Colombie-Britannique, l’ouragan Juan en Nouvelle-Écosse et le début de la guerre en Iraq. Mis ensemble, ces événements ont fait en sorte que le PIB n’a à peu près pas progressé pendant les deux trimestres du milieu de l’année, au moment où la croissance de la production tirait de l’arrière par rapport à celle de l’emploi.

Des données exhaustives sur la productivité du travail selon l’industrie sont disponibles pour 2003. Il est intéressant de constater que nombre des industries dans lesquelles la productivité a fléchi en 2006 ont aussi connu des difficultés en 2003. Dans le secteur du pétrole et du gaz, la productivité a diminué de 7 %, même quand les prix ont commencé à monter en flèche. La productivité de la fabrication a stagné, les entreprises faisant face à l’amorce d’une appréciation importante du taux de change. L’apathie de la productivité a été généralisée dans le secteur de la fabrication en 2003, tout comme elle l’a été l’an dernier.

Les services ont été davantage affectés par le ralentissement de la productivité en 2003 qu’en 2006. Les services relatifs aux voyages, comme l’hébergement et les services alimentaires, ont de toute évidence été grandement touchés par la crise du SRAS au cours de la première moitié de 2003, mais n’ont pas réduit leur effectif autant que ne le justifiait la demande (un phénomène que les économistes appellent « rétention du personnel »).

Il n’est pas non plus inhabituel pour les pays de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) de subir deux années (ou plus) de faible croissance de productivité. Seulement depuis 2000, 10 des 29 pays de l’OCDE pour lesquels des données sont disponibles ont vécu une telle situation. Fait intéressant, la Norvège et l’Australie enregistrent présentement une faible ou aucune croissance de la production par employé; tout comme le Canada, les deux pays ont d’importantes ressources naturelles. Ces dernières sont la source de la plus grande partie du ralentissement de la productivité au Canada.1

On ne sait pas clairement si le ralentissement de la production par employé à la fin de 2006 est autre chose qu’un simple phénomène transitoire. Une part de l’attention qui a été accordée à la baisse récente de la production par employé peut découler d’une inquiétude que la situation de 2002-2003, qui avait duré deux ans, se reproduise. Mais il pourrait aussi s’agir d’un événement transitoire, et la croissance de la productivité pourrait reprendre, comme cela s’était produit en 1998. L’analyse des tendances de la productivité selon l’industrie l’an dernier est la première étape en vue de comprendre les raisons qui sous-tendent le ralentissement.

Tendances selon l’industrie

La majeure partie de la baisse de la production par employé en 2006 s’est produite dans les industries productrices de biens (voir figure 3) entre décembre 2005 et novembre 2006 (1,9 %). Elle a été le fait dans une large mesure de la production de ces industries qui est passée d’une augmentation de 3,3 % à la fin de 2005 à une baisse de 1,9 % en 2006. Étant donné que la production par employé est beaucoup plus élevée dans le secteur des biens que dans celui des services, il n’est pas surprenant que le nombre d’emplois n’ait pas diminué autant.

Figure 3

Ressources naturelles

Une analyse plus détaillée des industries du secteur producteur de biens fait ressortir que presque toutes ont affiché une productivité inférieure pendant les trois premiers trimestres de 2006. La production par heure travaillée a diminué de près de 10 % dans le secteur des ressources, ce qui en soi a entraîné une diminution de 1 % de la croissance de la productivité l’an dernier (figure 4). C’est le secteur minier qui a été principalement à l’origine de cette baisse, la production dans ce secteur ayant augmenté lentement, tandis que l’emploi y connaissait une hausse vertigineuse de plus de 10 %, la plus élevée de toutes les industries en 2006.

De façon plus générale, la baisse de la production par employé dans ce secteur est symptomatique de l’exploitation de champs moins productifs. L’Office national de l’énergie a documenté la baisse de productivité dans les exploitations de nouveaux gisements de pétrole et de gaz conventionnels ces dernières années2, qui rend compte du fait que l’industrie délaisse les champs plus faciles à exploiter dans l’ouest au profit des puits moins productifs.

Figure 4

Toutefois, l’exploitation des puits de pétrole et de gaz conventionnels ne suffit pas à répondre à notre demande croissante d’énergie. Par conséquent, l’industrie a de plus en plus recours à l’exploitation de gisements non conventionnels au large des côtes, des sables bitumineux ou du méthane de houille. Par exemple, les projets pétroliers non conventionnels sont maintenant à l’origine de près de la moitié du pétrole produit au Canada. Étant donné que la production des gisements non conventionnels a augmenté, la production par employé dans le secteur du pétrole et du gaz a baissé de façon marquée.

La chute de la productivité dans le secteur minier l’an dernier fait partie d’une tendance à la baisse à long terme. La productivité décroissante des puits de pétrole et de gaz conventionnels et le recours à l’exploitation moins productive des sables bitumineux se démarque par une baisse de 28 % de la productivité du travail dans les mines depuis le sommet atteint en 1999 (figure 5). Cette situation est en grande partie la conséquence d’une montée fulgurante (60 %) de l’emploi dans le secteur pétrolier et gazier, principalement en Alberta. La hausse de l’emploi dans le secteur minier a été le fait principalement de l’exploitation des sables bitumineux, des milliers de travailleurs ayant été recrutés pour des méga-projets, qui ne produiront pas de pétrole avant des années, compte tenu des longs délais requis pour construire une usine d’exploitation des sables bitumineux (à savoir, enlever les morts-terrains, construire les broyeurs et les extracteurs pour le bitume, et construire des bassins pour recycler l’eau, avant même de commencer la valorisation et le raffinage, la récupération in situ étant encore plus complexe)3. Ces employés s’occupent de logistique, de gestion et de recrutement; les employés qui construisent l’usine font partie de la catégorie de la construction.

Figure 5

Au cours des deux dernières années, des événements ont aggravé cette tendance à la baisse à long terme de la productivité dans les mines. La production des sables bitumineux a connu une baisse marquée en 2005, par suite d’un incendie majeur qui a interrompu la production chez le producteur le plus important pendant près de neuf mois. La reprise de la production à cette usine a contribué à rehausser la production de sables bitumineux en 2006. Étant donné que la productivité dans les sables bitumineux est inférieure à la moyenne pour d’autres sources pétrolières, ce mouvement en dents de scie dans la production en 2005 et 2006 a contribué à faire baisser la croissance de la productivité l’an dernier (en raison du poids accru de la faible production des exploitations pétrolières peu productives en 2006, après la baisse enregistrée en 2005).

Même si l’abandon des champs pétroliers conventionnels pour les sables bitumineux moins productifs a fait diminuer la production par employé à court terme, il est probable que cet effet ne durera pas longtemps. Lorsque l’exploitation des sables bitumineux commencera pour de bon, la production par employé augmentera, même si le niveau atteint ne sera jamais aussi élevé que dans les champs conventionnels. De façon plus générale, on doit s’attendre à ce que l’extraction de pétrole des sables bitumineux gagne en efficacité au fil du temps. La technologie relative aux sables bitumineux est plus avancée aujourd’hui qu’il y a une décennie, et les progrès en ce qui a trait à la production in situ laissent présager d’autres gains. La production des sables bitumineux aujourd’hui est dominée par la méthode d’extraction, qui est axée sur le retrait à la pelle du bitume sur les 75 premiers mètres en surface, ce qui nécessite beaucoup de main-d’œuvre. Cette source sera épuisée bientôt, et le développement à long terme des sables bitumineux dépendra de la technologie in situ, qui fait intervenir des techniques nécessitant des dépenses en immobilisations (avec du matériel se servant de la vapeur), en vue d’extraire le bitume des couches inférieures.

Ceci met en évidence l’un des dangers découlant de l’examen des tendances agrégées en productivité. La productivité pourrait augmenter au sein de chaque composante d’une industrie, mais ces gains pourraient être dissimulés par un passage des industries à productivité élevée à celles dont la productivité est plus faible, ce qui provoque une baisse globale de la productivité mesurée.

Par ailleurs, la production pétrolière a été entravée l’an dernier par un certain nombre d’interruptions. Il s’agit notamment d’accidents sur les plates-formes de forage très productives d’Hibernia et de Terra Nova, au large des côtes de Terre-Neuve, qui ont coûté des mois de production. Il est compréhensible, compte tenu de la pénurie de main-d’œuvre dans le secteur pétrolier, que les entreprises conservent leur effectif pendant ces interruptions de la production.

L’exploitation minière autre que de pétrole et de gaz a aussi lieu de plus en plus dans des parties éloignées du pays ou nécessite des forages plus profonds. Le meilleur exemple est celui des diamants, qui sont exploités exclusivement dans les Territoires du Nord-Ouest. Les problèmes de logistique de ces mines ont été accentués par l’hiver doux, au début de 2006, qui a raccourci la saison d’utilisation de la route de glace servant à l’approvisionnement de ces mines à seulement 42 jours (comparativement à une moyenne de 75 jours). Cela a forcé une entreprise à utiliser l’hélicoptère le plus gros et le plus coûteux au monde pour transporter de l’équipement à la mine, entraînant une hausse des coûts du carburant de près de 1 $ le litre4.

Une partie de la chute de productivité dans les mines métalliques relève de l’épuisement des gisements les plus productifs, comme c’est aussi le cas pour les gisements conventionnels de pétrole et de gaz. L’exemple le plus frappant est celui des mines aurifères pour lesquelles la production annuelle décroît constamment depuis 2001, y compris une chute de 25 % au cours des deux dernières années (malgré le cours élevé).

Plusieurs des industries minières les plus importantes ont connu des difficultés au chapitre de la production l’an dernier. Des grèves ont réduit la production de fer pendant l’été, ainsi que de nickel et de cuivre à l’automne : étant donné que l’EPA dénombre les grévistes comme des personnes occupées, cela fait diminuer la production par employé (les heures travaillées rendent compte de cet effet, ce qui fait que les intrants travail dans les mesures de la productivité ne sont pas touchés). La production de potasse a été réduite pendant les longues négociations contractuelles qui se sont tenues avec les acheteurs de la Chine5. Les travaux du projet d’extraction d’uranium le plus important au monde ont été interrompus, à Cigar Lake, en raison d’une inondation en octobre, entraînant des retards de plusieurs années dans les ventes6. Comme dans le cas du pétrole et du gaz, les pénuries de main-d’œuvre ont incité les employeurs à maintenir leur effectif, même pendant les interruptions temporaires de la production.

Aucun de ces problèmes n’a refait surface jusqu’à maintenant en 2007, ce qui fait qu’on devrait s’attendre à une certaine reprise de la productivité. Les producteurs de potasse ont conclu des ententes avec les acheteurs chinois au début de l’année, de nouvelles conventions collectives ont évité une grève dans l’industrie du nickel, et la route de glace vers les mines du Nord a connu sa deuxième ouverture la plus précoce.

Tableau 1 Croissance annuelle de la productivité du travail

  Premier trimestre de 2005 Deuxième trimestre de 2005 Troisième trimestre de 2005 Quatrième trimestre de 2005 Premier trimestre de 2006 Deuxième trimestre de 2006 Troisième trimestre de 2006
Industries productrices de biens 0,1 0,7 1,9 2,6 1,7 0,3 -1,7
Agriculture, foresterie, pêche et chasse 8,7 5,4 2,2 -0,4 0,8 -2,3 -7,8
Extraction minière et extraction de pétrole et de gaz -8,9 -8,1 -5,4 -4,9 -5,4 -10,6 -9,6
Services publics 2,2 2,5 3,5 0,0 -2,4 -1,0 -2,6
Construction -2,2 -2,0 0,2 1,3 0,8 3,3 1,5
Fabrication 1,8 3,2 4,1 5,4 3,8 0,8 -1,2
Industries productrices de services 1,8 2,7 3,3 2,7 3,3 2,8 1,8
Commerce de gros 4,6 8,0 8,2 8,7 10,0 7,8 6,9
Commerce de détail 3,8 2,4 2,0 1,2 3,2 4,7 4,3
Transports et entreposage 1,9 2,7 5,7 5,6 3,5 2,9 0,2
Industrie de l'information et industrie culturelle 0,6 0,9 8,6 8,2 7,0 4,8 -0,3
Intermédiaires financiers, assurances et services immobiliers -0,7 -1,1 -2,3 -3,6 -2,4 -1,9 0,0
Services professionnels, scientifiques et techniques 1,8 2,1 1,5 1,0 0,8 0,7 -0,3
Services administratifs et gestion des déchets -0,9 0,5 2,1 2,0 1,4 1,6 0,5
Arts, spectacles et loisirs -0,6 4,3 5,1 5,9 4,3 4,7 -0,1
Hébergement et services de restauration -1,1 2,5 3,4 3,8 4,6 0,3 -0,1
Autres services 1,6 2,8 3,0 2,0 4,1 3,3 2,3
Secteur des entreprises 1,4 2,0 2,6 2,3 2,3 1,6 0,4

La productivité a diminué dans les services publics l’an dernier. Le temps doux de l’hiver a réduit la demande d’électricité et de gaz, tant au début qu’à la fin de l’année. Il n’est pas étonnant de constater que les services publics n’ont pas mis à pied d’employés, étant donné qu’ils n’avaient aucune façon de savoir quand la demande rebondirait (comme le récent épisode de temps froid l’a montré).

La productivité dans les secteurs de l’agriculture, de la foresterie et de la pêche a diminué de façon constante tout au long de 2006. Néanmoins, l’emploi dans le secteur agricole a augmenté légèrement pendant l’année. Il est intéressant de constater que l’ensemble de la hausse s’est produite au centre du Canada, et principalement dans le sud-ouest de l’Ontario. Là-bas, de nombreuses personnes qui travaillaient dans des usines tout en exploitant une ferme ont perdu leur emploi principal : par conséquent, elles ont déclaré l’agriculture comme leur emploi principal, ce qui a fait augmenter le nombre d’emplois en agriculture. Il s’agit d’un bon exemple de la façon dont les événements peuvent provoquer des mouvements inhabituels dans la production par travailleur dans l’industrie à court terme.

La foresterie a connu l’une des variations les plus importantes au chapitre de la croissance de la production par travailleur entre 2005 et 2006, passant de hausses à deux chiffres à des baisses à deux chiffres. La hausse rapide en 2005 a été le résultat du regroupement de la production dans des grandes scieries plus efficaces en Colombie-Britannique, ainsi que de l’accroissement de la production en raison du sommet atteint par les marchés du logement aux États-Unis. Le recul marqué de la demande de logements aux États-Unis, l’an dernier, a eu un effet à la baisse sur la production, baisse qui a été accentuée par la fermeture de nombreuses petites scieries dans l’Est du Canada à la fin de l’année, au moment où le Québec a réduit ses quotas de coupe de 20 % et lorsque l’entente sur le bois d’œuvre avec les États-Unis est entrée en vigueur.

Fabrication

La production par employé a diminué dans le secteur de la fabrication en 2006, après deux années de croissance. Jusqu’à maintenant au cours de la présente décennie, les usines sont demeurées bien en deçà des hausses de productivité remarquables qu’elles avaient connues au cours de la période d’essor des technologies de pointe, à la fin des années 90.

La baisse de la productivité dans le secteur de la fabrication cette année est le résultat d’une contraction de la production qui a réduit l’utilisation de la capacité (le principal facteur déterminant de la productivité à court terme). La production de la fabrication a diminué de 4,8 % au cours des dix premiers mois de l’année (avec une reprise légère à la fin de l’année) et, comme le montre la figure 6, la productivité a habituellement tendance à défaillir pendant les périodes de contraction. Même si l’augmentation de la valeur du dollar a fourni aux fabricants un incitatif important à augmenter leur productivité chaque année depuis 2003, ils sont arrivés à le faire plus facilement en 2004 et 2005, lorsque la production était en hausse de 1,9 % et 0,7 %, respectivement. Lorsque la production des usines a diminué, en 2001 et 2002, les fabricants ont aussi connu un recul de leur productivité.

Qu’en est-il de l’argument selon lequel la restructuration des industries, et plus particulièrement dans le secteur de la fabrication, devrait entraîner un transfert des ressources des usines peu productives aux usines très productives? En 2006, on a assisté à de nombreuses fermetures d’usines dans des secteurs peu productifs, comme le textile, le vêtement, l’ameublement et même l’automobile. Parallèlement, la croissance s’est poursuivie dans les industries très productives à forte intensité de capital, comme la première transformation des métaux et le raffinage de pétrole. De toute évidence, cela n’aurait-il pas dû faire augmenter la productivité globale?

Figure 6

On a procédé à un test statistique de la théorie selon laquelle l’emploi, en définitive, a été transféré aux industries plus productives, grâce à un indice de Laspeyres (à pondération fixe) de la production dans le secteur de la fabrication. Plus simplement, il s’agit de maintenir constant le poids de chaque industrie en fonction de la part de l’emploi qu’elle représentait en 2003. Les résultats de la figure 7 ne font ressortir à peu près aucune différence par rapport à l’indice de Fisher pondéré en fonction de l’année en cours utilisé pour le calcul du PIB réel. Ce résultat surprenant vient du fait que, même si la productivité du travail était plus élevée dans les industries responsables d’une part plus grande de la production, leur productivité a néanmoins diminué tout au long de 2006. Par ailleurs, la production a ralenti dans certaines industries à productivité élevée, notamment les métaux de première transformation et les ordinateurs et l’électronique.

Figure 7

Ces résultats correspondent aux recherches antérieures qui montrent que les transferts entre industries ont peu de répercussions sur la croissance globale de la productivité à court terme. En dernier ressort, la productivité dépend des hausses réelles dans des industries particulières, et non pas des transferts entre industries affichant des niveaux de productivité différents. L’an dernier, la productivité dans le secteur de la fabrication a été terne dans presque toutes les industries, annulant l’effet des transferts entre industries. La baisse de la productivité dans des industries comme l’aérospatiale, la première transformation des métaux, le papier et le pétrole est peut-être le résultat d’événements particuliers, comme des interruptions de l’approvisionnement ou des grèves. Cela peut aussi rendre compte de l’inclination naturelle des entreprises qui, lorsqu’elles jouissent d’une bonne fortune soudaine, comme cela s’est produit dans les métaux et le pétrole, portent temporairement moins attention aux coûts7.

Services

Dans l’ensemble, la production par employé dans les services a échappé au ralentissement important enregistré pour les biens. La figure 8 montre que la production par employé a continué d’augmenter selon son rythme moyen à long terme, et qu’elle est bien supérieure à la baisse provoquée par le SRAS en 2003. Plusieurs branches ont affiché une croissance solide, plus particulièrement celles qui dépendent des consommateurs qui ont profité de la vigueur de la demande. Toutefois, la croissance a été freinée par l’importance plus grande des services publics et des services aux entreprises, où la croissance de la productivité est limitée par définition.

Près de 40 % de la croissance du PIB mensuel dans les services est projetée à partir de l’emploi. Dans la plupart des cas, et plus spécialement dans le secteur public, cela vient de la difficulté conceptuelle à mesurer la production. Étant donné qu’il n’existe pas de prix marchand pour la production de ces services, le Canada suit les mêmes pratiques comptables que les États-Unis utilisent pour calculer leur PIB et utilise la croissance du facteur travail (rajustée pour tenir compte des changements dans la qualité de la main-d’œuvre), comme approximation de la croissance de la production. La croissance de la productivité est donc limitée par définition dans ces industries. Le secteur non commercial est donc exclu des mesures officielles de la productivité du travail, mais il a des répercussions sur le PIB par employé et a, par conséquent, influencé le débat actuel.

Figure 8

La croissance de la production en 2006 a été largement concentrée dans des branches où l’emploi est utilisé comme approximation de la croissance de la production dans le PIB mensuel. En date de novembre, la croissance d’une année à l’autre dans les branches dont la production est projetée à partir de la croissance de l’emploi a été de 2,1 %, comparativement à 1,3 % dans le reste de l’économie. Il s’agit d’un renversement de tendance par rapport à 2004 et 2005, au moment où, les branches dont la production est estimée à partir des intrants travail n’ont crû qu’à la moitié du taux des autres services. La figure 9 montre que ces branches représentaient environ 40 % de l’ensemble de la croissance du PIB d’une année à l’autre, à la fin de 2006, soit le double de leur contribution au début de l’année. Cela rend compte à la fois de l’activité accrue dans ces branches et de la croissance plus faible du PIB dans d’autres.

L’augmentation de près de 20 % de la proportion de la croissance du PIB attribuable aux branches où la production mesurée par employé ne peut augmenter de façon significative par définition a eu pour effet de réduire la production globale par employé de 0,1 point en 2006. La croissance y est attribuable principalement aux dépenses plus élevées en services de soins de santé à l’extérieur des hôpitaux. Par ailleurs, la demande a repris dans le cas des organismes religieux et de bienfaisance. Ces hausses ont contrebalancé une baisse marquée dans les services d’enseignement et les services de loisirs.

Figure 9

La production dans certains services aux entreprises est aussi projetée sur une base mensuelle, à partir de la croissance de l’emploi. Cette approche est la plus courante dans le cas des branches pour lesquelles il n’existe pas d’autres sources de données mensuelles, comme les services professionnels, scientifiques et techniques8. Ces secteurs ont progressé plus rapidement que le reste de l’économie. Toutefois, étant donné qu’ils ne sont pas aussi importants que le secteur public, ils n’ont eu que peu de répercussions sur la croissance de la productivité globale.

Si l’on exclut le secteur non commercial, la croissance d’une année à l’autre de la productivité du travail dans les services a augmenté de 1,8 % au troisième trimestre, soit une baisse légère par rapport à la hausse de 2,7 % enregistrée à la fin de 2005. La croissance a été le fait principalement du commerce de gros et du commerce de détail, ce qui s’inscrit dans la tendance à la hausse importante de la productivité dans ces industries amorcée en 2002. Les grossistes et les détaillants ont profité des prix plus faibles des importations depuis que le dollar a commencé à augmenter en 2003. L’intérêt plus marqué pour les magasins à grande surface a aussi alimenté la productivité.

Certains services ont connu un ralentissement de la croissance de leur productivité en 2006. Toutefois, ces baisses ne représentent pas nécessairement toutes une tendance négative. Par exemple, l’hébergement et les services de restauration ont connu des baisses légères de productivité, après avoir commencé à résoudre les pénuries de main-d’œuvre qui avaient nui à leur croissance (mais alimenté la productivité mesurée) en 2005. C’est l’Alberta qui a connu la variation la plus marquée, une baisse de 12 % des emplois en 2005 ayant été suivie par une hausse de 9 % en 2006. De même, le transport a réussi à attirer davantage de main-d’œuvre en 2006, après avoir connu une baisse d’effectif en 2005. La production du transport a augmenté de façon constante ces dernières années, par suite du revirement de situation dans le secteur du transport aérien (après les pertes graves attribuables au 11 septembre et au SRAS), ainsi que de l’essor dans la livraison de biens et de conteneurs par rail et par eau (la plupart en provenance ou à destination de l’Asie).

La productivité a peu changé dans la plupart des autres services, y compris les finances, les services administratifs et les arts et loisirs. Les finances connaissent une faiblesse chronique de leur productivité depuis 2002.

Pour des raisons subtiles, il est parfois impossible de calculer la production par employé dans l’industrie. Le meilleur exemple est celui des logements occupés par leur propriétaire. Le système de comptabilité nationale suit la pratique internationale courante et traite les propriétaires de maisons comme étant leurs propres locataires. Cette estimation, qui a totalisé 90 milliards de dollars l’an dernier, est le fait des changements qui touchent le stock de logements. Étant donné qu’il n’y a pas d’emploi dans cette industrie, la productivité n’y est pas définie (c’est l’une des raisons pour lesquelles la production par employé dans le secteur non commercial peut augmenter ou diminuer avec le temps). Après plusieurs années de croissance à deux chiffres, l’augmentation du stock de logements amorce un ralentissement, qui rend compte de celui qui touche le marché du logement. Cela aura pour effet de réduire la croissance du PIB réel à l’avenir, mais n’aura pas d’impact sur l’emploi.

Emploi

La croissance du revenu a été le fait principalement du revenu du travail, qui a augmenté de 6,1 % en 2006. Cette augmentation a été alimentée par des hausses marquées de l’emploi. Les deux moyens de mesurer l’intrant travail — l’Enquête sur la population active (EPA) et les heures travaillées utilisées pour l’intrant travail des estimations de la productivité — en tiennent compte.

Il existe des différences conceptuelles importantes entre l’emploi d’après l’EPA et les heures travaillées utilisées dans les estimations de la productivité. Dans le cadre de l’EPA, une personne qui cumule plusieurs emplois est considérée comme une seule personne occupée, tandis que, pour l’intrant travail, le nombre d’emplois est établi à partir des heures travaillées. La productivité exclut des secteurs importants de l’économie, comme le secteur non commercial.

Si l’on admet que le ralentissement de la productivité du travail en 2006 est un phénomène apparemment réel et envahissant, quels sont les grands facteurs économiques touchant toutes les industries qui pourraient l’expliquer? La section qui suit porte sur des événements propres à 2006 qui pourraient expliquer pourquoi la croissance de la production par employé a diminué de façon aussi marquée, après deux années de productivité en hausse.

Le point de départ le plus évident de cette analyse est le caractère cyclique de l’économie canadienne. L’expansion sur 16 ans de l’emploi s’est accélérée en 2006, la majeure partie de la croissance ayant touché les postes à temps plein. Cela a fait reculer le taux de chômage à son niveau le plus faible en 30 ans d’histoire de l’actuelle Enquête sur la population active. De nombreuses industries ont été aux prises avec des pénuries de main-d’œuvre, plus particulièrement en Alberta et en Colombie-Britannique, mais même les provinces de l’Atlantique ont été touchées à la fin de l’année (les fabricants là-bas ont déclaré davantage de pénuries de main-d’œuvre qualifiée et non qualifiée que dans le centre du Canada).

Pénuries de main-d’œuvre et qualité de la main-d’œuvre

L’étroitesse du marché du travail et les pénuries de main-d’œuvre peuvent souvent mener à une croissance plus faible de la productivité. Les employeurs recherchent et recrutent de plus en plus des travailleurs moins productifs du fait que leur expérience, leurs compétences ou leur formation sont moindres. Lorsque le marché du travail s’est rétréci aux États-Unis, au sommet de l’essor des technologies de pointe en 1999 et 2000, par exemple, la croissance de la productivité a ralenti de 1 %.

Plusieurs mesures montrent la diminution de la qualité de la main-d’œuvre, particulièrement dans l’Ouest du Canada, où les employeurs font face à des pénuries graves. L’emploi a augmenté plus rapidement l’an dernier pour les segments les plus jeunes et les plus âgés de la population — les moins productifs — que pour les travailleurs dans la force de l’âge (entre 25 et 54 ans). Dans le cas des jeunes, cette productivité inférieure à la moyenne est le fait de leur expérience et de leur formation moindres; dans le cas des travailleurs plus âgés, l’érosion des compétences, une nouvelle carrière et la moins grande participation au marché du travail9 sont responsables. Même si ni l’une ni l’autre de ces tendances n’était nouvelle l’an dernier, leur importance s’est accrue de façon marquée.

À l’échelle nationale, l’emploi a augmenté plus rapidement pour les personnes de 55 ans et plus (6,7 %) et les jeunes (1,5 %) que pour les travailleurs d’âge moyen (1,4 %). À la suite de l’augmentation de la demande, le taux de chômage chez les jeunes a atteint un seuil record de 9,7 % en décembre dernier, tandis que l’emploi et le taux de participation à la population active des personnes âgées de 55 ans et plus a aussi atteint un sommet inégalé.

Les pénuries ont forcé les employeurs de l’Alberta et de la Colombie-Britannique à se tourner vers les travailleurs plus jeunes et plus âgés pour combler les postes. En Alberta, la hausse a été la plus marquée pour les jeunes, dont le taux d’emploi a fait un bond, passant de 64,1 % à 65,3 % de décembre 2005 à décembre 2006. La Colombie-Britannique a dépendu davantage des travailleurs plus âgés : alors que le taux d’emploi des travailleurs dans la force de l’âge a diminué à 0,9 % en 2006, il a augmenté de 12,6 % pour les travailleurs plus âgés (et plus particulièrement ceux âgés de 65 ans et plus dont l’augmentation a atteint 1,7 points, s’établissant à 8,3 %), deux fois l’augmentation de 2005.

En Alberta, les personnes ayant fait des études secondaires ou ayant un niveau inférieur d’études ont été responsables de plus de la moitié de la croissance de l’emploi en 2006. Il s’agit là du niveau le plus élevé jamais atteint, ainsi que d’un changement important par rapport aux années 90, pendant lesquelles les employeurs affichaient une préférence marquée pour les personnes ayant un niveau d’études supérieur au niveau secondaire (figure 10).

La Colombie-Britannique a aussi eu tendance à recruter des personnes moins scolarisées l’an dernier, même si cette tendance était moins prononcée qu’en Alberta. Toutefois, les pénuries en Colombie-Britannique sont suffisamment graves pour que le Business Council prévienne qu’elles l’obligeront à baisser ses prévisions de croissance du PIB pour 200710.

Il convient de souligner que la diminution de la qualité de la main-d’œuvre est symptomatique de l’étroitesse du marché du travail, et non pas de la détérioration de la qualité du travail disponible. Autrement dit, la plus faible qualité à la marge est attribuable à l’offre de travailleurs et non pas à la demande des employeurs (qui, de toute évidence, auraient préféré recruter des personnes ayant de meilleures compétences).

Figure 10

Ce ne sont pas toutes les mesures de la qualité de la main-d’œuvre qui se sont détériorées l’an dernier. L’emploi des jeunes âgés de 15 à 24 ans a connu un ralentissement pendant l’année à l’extérieur de l’Alberta. En outre, les rangs des travailleurs autonomes se sont éclaircis en 2006, en dépit d’une brève remontée à la fin de l’année (la productivité des travailleurs autonomes est inférieure à celle des employés). La croissance de l’emploi a ralenti pour les Autochtones (malheureusement l’un des groupes les moins instruits de la société) après avoir inscrit des progrès marqués en 2005.

L’accélération de la formation représente un signe concret que les employeurs réagissent au niveau plus faible de connaissances des employés. Des estimations détaillées de l’emploi montrent que le nombre d’emplois dans les écoles de commerce et les instituts de formation en informatique et en gestion a augmenté de façon marquée l’an dernier. Il s’agit d’une hausse importante par rapport aux cinq années précédentes.

Outre qu’ils recrutent des travailleurs moins productifs, les employeurs qui font face à des pénuries peuvent modifier leurs comportements de telle façon que cela fait diminuer la productivité. Des interruptions temporaires de l’approvisionnement d’autres industries ou de la production peuvent se produire en raison de grèves, des mauvaises conditions climatiques, etc. Les employeurs pourraient être plus réticents à mettre à pied des travailleurs de façon temporaire dans un marché du travail serré, craignant que ces employés trouvent des emplois ailleurs et ne reviennent pas. De même, il arrive que des entreprises retiennent de la main-d’œuvre en prévision de grands projets devant être entrepris plus tard (il semble que cela se produit déjà dans les sables bitumineux)11.

L’investissement des entreprises est l’une des quelques variables économiques qui signalent une amélioration de la croissance de la productivité. Alimentées par des bénéfices records, les entreprises ont accéléré leurs dépenses en immobilisations dans une proportion constante de 10 %, chacune des trois dernières années. Cette pression concurrentielle accrue sur les entreprises attribuable à la hausse marquée du taux de change depuis 2003 devrait constituer un incitatif majeur pour que les entreprises dépensent davantage. Des pressions similaires exercées aux États-Unis au début de la décennie ont entraîné une amélioration marquée de la productivité.

Figure 11

La figure 11 montre qu’il est rare que la productivité diminue pendant une période prolongée lorsque les investissements sont en expansion. Cela laisse entrevoir un rebond de la croissance de la productivité à court terme, ou laisse présager que la baisse actuelle ne sera pas aussi prolongée qu’en 2002-2003. Un des facteurs qui peut expliquer la divergence entre la productivité et les investissements en 2006 est qu’une part importante de ces derniers a été le fait du secteur de l’énergie, où les retombées sous forme de production plus grande ne se matérialiseront pas tout de suite. La fabrication, le secteur où les incitatifs à investir dans des machines et du matériel améliorant la productivité sont les plus importants, se démarque au chapitre de ces dépenses (ce qui rend peut-être compte des pressions intenses exercées sur les marges bénéficiaires), une hausse de 10 % en 2005 ayant contribué à alimenter la productivité cette année-là.

Conclusion

Plusieurs raisons économiques et statistiques expliquent pourquoi la productivité a ralenti l’an dernier. Au niveau national, la croissance est passée dans les industries où la productivité est faible, notamment les mines. De nombreuses industries, particulièrement dans l’Ouest du Canada, font face à des pénuries de main-d’œuvre. Les employeurs ont recruté du personnel moins qualifié et ont consacré davantage de temps à la formation des employés. Enfin, un plus grand nombre d’industries ont été touchées par des événements ponctuels l’an dernier, comme les interruptions dans le secteur minier et la clémence record des températures hivernales qui ont réduit la production.

La principale question pour le moment n’est pas de déterminer si la production a connu un ralentissement par rapport à l’emploi, mais plutôt si ce ralentissement est transitoire et attribuable à des facteurs temporaires (liés à des événements comme la température, d’autres interruptions de production, ou le transfert soudain de ressources à de nouvelles industries et régions) ou représente le début d’une baisse à plus long terme de la productivité, en raison d’une pénurie de main-d’œuvre et de changements structurels dans l’économie. La plupart des variables examinées pour la présente étude indiquent des facteurs transitoires dominants à court terme. Les pénuries de main-d’œuvre dans l’Ouest canadien, en partie causée par la mise en valeur des sables bitumineux constituent l’exception.

S’il faut retenir une leçon de 2006, c’est que des mouvements irréguliers importants sont plus susceptibles de se produire dans une économie où les ressources naturelles sont à l’origine d’une part croissante de la production. La production mensuelle dans le secteur minier affiche la plus grande variabilité de tous les secteurs de l’économie. Étant donné que ce secteur emploie relativement peu de travailleurs, des mouvements contraires à court terme de la production et de l’emploi pourraient facilement se produire à nouveau à l’avenir. La meilleure pratique dans tels cas consiste à ne pas trop mettre l’accent sur les mouvements à court terme de la productivité, et à les placer dans le contexte des périodes précédentes de croissance pendant lesquelles la productivité a chuté de façon temporaire.



 



Études spéciales récemment parues


Notes

* Division de l’analyse économique de conjoncture 613-951-9162.
1 Même aux États-Unis, où la productivité a augmenté de 2 % en 2006, son ralentissement plus tôt en cette décennie a incité la Federal Reserve Board à observer que « le ralentissement récent de la productivité du travail pourrait, du moins en partie, être une réaction cyclique temporaire… plutôt qu’un ralentissement significatif à long terme » [traduction], p. 26, Monetary Policy Report, le 14 février 2006.
2 La productivité initiale des puits dans l’Ouest du Canada a diminué de près de deux tiers depuis 1996; p. 23, Office national de l’énergie, Productibilité à court terme de gaz naturel au Canada 2006-2008, octobre 2006. En ce qui concerne le pétrole, l’ONE décrit l’ouest du Canada comme « ...un bassin mature au chapitre de l’exploration, les taux de découverte allant s’amenuisant et les coûts de RMV étant relativement élevés. Pour la plupart, les plus grands gisements ont été découverts tandis qu’il est toujours plus difficile et plus coûteux de trouver les plus petits », p 17 Perspectives à court terme de la production de pétrole brut au Canada, septembre 2005.
3 Voir « An Overview of Canada’s Oil Sands Industry », par le Canadian Energy Research Institute.
4 Voir « Ice is now thick enough on road to riches: Vital winter route to North’s diamond mine opens », par David Finlayson, E1, Edmonton Journal, 31 janvier 2007.
5 « En 2006, la production de potasse a ralenti dans un certain nombre de mines de la Saskatchewan, les producteurs attendant la décision du gouvernement chinois concernant l’établissement des prix. Cela a eu pour résultat que les livraisons à grande échelle de potasse par la Saskatchewan n’ont commencé qu’en août. » Tiré de « Potash producers reach early Chinese pricing deal », dans le Financial Post,
9 février 2007.
6 Voir « Cameco extends delay over ooded mine », p. B4, dans The Globe and Mail.
7 Des résultats semblables ont été obtenus en utilisant des indices de la productivité de Laspeyres et de Fisher pour l’ensemble de l’économie à deux chiffres, au moyen de données détaillées sur l’emploi provenant de l’Enquête sur l’emploi, la rémunération et les heures de travail.
8 Par ailleurs, en bout de ligne, ces industries sont étalonnées en fonction de données qui ne sont pas fondées sur le facteur travail (comme les données fiscales, qui rendent compte de tous les coûts et revenus) et sont par la suite soumises à un indice implicite des prix du marché. Compte tenu du rapport historique entre le facteur travail et ces mesures finales de la production, les estimations mensuelles de la croissance sont modifiées pour réduire les révisions possibles. Il est intéressant de constater que c’est en 2003 que, pour la dernière fois, la contribution de ces industries à la croissance a été aussi importante que l’an dernier. À ce moment là, leur contribution à la croissance avait aussi atteint un sommet, à plus de 40 %, en raison en partie de la hausse de la demande de services de santé pendant l’épidémie de SRAS. Il n’est pas étonnant de constater que cela a contribué à faire diminuer la production par travailleur cette année là. Il convient en outre de souligner que cela n’a pas marqué le début d’une nouvelle tendance, la croissance de la productivité ayant rapidement rebondi en 2004 et 2005.
9 Le vieillissement de la main-d’œuvre peut considérablement réduire la productivité. Une étude publiée récemment estime que la répercussion sur le Canada entre 2001-2006 représentent des pertes annuelles de productivité de 0,2 % (p. 598, J. Tang et C. MacLeod, “Labour force ageing and productivity performance in Canada.” Canadian Journal of Economics, Vol. 39, no 2, mai 2006).
10 Voir « B.C. Outlook », par Jack Finlayson, Business Council of British Columbia, février 2007.
11 Par exemple, le consortium de Long Lake a indiqué que la phase 1 du projet avait été retardée en raison d’une réduction de 20 % de la productivité du travail attribuable à l’inexpérience des travailleurs. On a aussi indiqué que les travaux de la phase 2 seraient entrepris, dans la crainte de perdre des employés, ainsi que pour maintenir leur position dans les files d’attente de plus en plus longues pour les fournitures et l’équipement. Voir « Nexen project in oil sands on budget and on time: But worker inexperience causes problems », par Dave Ebner, B5, The Globe and Mail, 28 avril 2006.



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Date de modification : 2008-11-21 Avis importants
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