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11-010-XIB
L'Observateur économique canadien
Mars 2005

Étude spéciale

Évolution récente du marché du travail

par P. Cross *

Les années 1990 se sont caractérisées par un régime à peu près uniforme de croissance de l’industrie. Les fabricants ont su tirer parti d’une ample montée des exportations déterminée par la libéralisation des échanges, l’essor de la demande de TIC à l’exportation et de solides livraisons d’automobiles à l’étranger. La progression du commerce a poussé les industries de biens en avant. Les services aux entreprises étaient alimentés par les services informatiques, tout comme le mouvement de recours à l’impartition. Il reste que nombre de nos exportations traditionnelles de ressources ont eu des ratés, que le secteur public a comprimé ses activités et que la construction et les services immobiliers sont restés en proie au marasme.

Ces tendances de l’industrie se sont répercutées sur tout le marché du travail. En milieu urbain, la croissance de l’emploi a été favorisée par le secteur des TIC qui est largement implanté dans les grandes villes. Cette vive progression a aussi fait monter la demande qui s’attache à une main-d’œuvre intellectuelle plus scolarisée. En revanche, le marasme de l’industrie primaire (y compris l’agriculture) et du secteur de la construction a nui à la croissance en milieu rural et à la main-d’œuvre moins scolarisée, notamment aux cols bleus.

Depuis l’an 2000 cependant, l’économie a subi un certain nombre de chocs. L’effondrement de la demande de TIC, plus particulièrement d’appareils de télécommunication et de fibre optique, a fait éclater cette année-là la bulle boursière qui s’était formée dans ce secteur. L’évolution consécutive à la baisse des taux d’intérêt s’est accélérée après les attentats du 11 septembre, provoquant une flambée des dépenses des ménages, surtout sur le marché de l’habitation.

Par ailleurs, le retour aux excédents dans le secteur public a permis de réinvestir dans les services publics en général et dans les hôpitaux en particulier. Enfin, l’intégration croissante de la Chine à l’économie mondiale a provoqué une envolée des cours des produits de base, ce qui devait à son tour faire monter en flèche le dollar canadien.

Il en est résulté une véritable transformation du régime de croissance de l’industrie. Nous décrirons comment, depuis l’an 2000, la demande de main-d’œuvre s’est inversée à bien des égards par rapport à la situation des années 1990 avec un déplacement hors de la haute technologie vers l’habitation et les ressources et avec de profondes conséquences sur la répartition de l’emploi entre régions urbaines et rurales et sur la scolarité exigée des travailleurs, les professions exercées et même la composition de la taille des employeurs.

À l’évolution de la demande de travail a correspondu une importante évolution de l’offre de travail. Notons que les travailleurs de plus de 55 ans sont à l’origine du tiers de toute la croissance de la population active dans la dernière décennie après plusieurs décennies de recul de leur taux d’activité. Précisons toutefois que la reprise de l’emploi dans les mines et la construction a entraîné le chômage dans ces industries à un niveau bas record, ce qui leur a permis de rajeunir leurs effectifs. Mentionnons enfin que les perspectives d’emploi qui s’offrent aux jeunes sont aujourd’hui meilleures en milieu rural qu’en milieu urbain.

Demande

L’an dernier, la croissance de l’emploi a eu pour chefs de file les mines, la construction et les services immobiliers avec des gains approximatifs de 5 % dans tous les cas1. Depuis le début de la présente décennie, ces trois branches d’activité ont mené le mouvement avec des hausses respectives de 17 %, 18 % et 10 %2. La relance de l’activité minière était entraînée par un bond de 43 % pour le pétrole et le gaz. (Les services aux entreprises3, les services de santé et les services publics ont été les seuls autres grands secteurs à présenter des taux de progression à deux chiffres depuis le début des années 2000.)

Dans la construction, les mines et les services immobiliers, l’emploi a progressé après une décennie où il a présenté les pires résultats de l’industrie. Dans les années 1990, ces trois secteurs ont respectivement éliminé 1 %, 20 % et 6 % de leurs emplois. Avec les secteurs de l’agriculture et de l’administration publique, ils offrent la pire feuille de route pour les pertes d’emplois dans la décennie 1990.

Figure 1

Ce revirement dans les années 2000 s’explique par l’essor des marchés des produits de base et de l’habitation. Les cours des produits de base ont remonté du tiers depuis 2000, surtout grâce à l’énergie4. Pour l’investissement résidentiel, le redressement a aussi été de près de moitié dans la même période, mené par les ventes d’habitations. Comme la demande de prêts hypothécaires a rebondi en conséquence, le secteur des finances en général et le secteur bancaire en particulier se sont redressés, tout comme le secteur de la fabrication de produits minéraux non métalliques.

Il y a deux secteurs liés à l’administration publique qui sont passés à des gains dans la présente décennie, après des pertes dans les années 1990. L’administration publique avait été heurtée de plein fouet par des compressions visant à réduire les déficits des budgets gouvernementaux. Un financement nettement majoré des hôpitaux a permis de multiplier les mesures d’embauchage après une situation d’absence relative de croissance dans les années 1990.

Il faut dire en revanche que, depuis le début de la décennie, un certain nombre d’industries de grande croissance dans les années 1990 ont pris du retard5. Il y a d’abord le secteur de la fabrication. Les industries de l’informatique et de l’électronique ont cependant prédominé dans ce renversement, éliminant les 45 000 emplois qu’elles avaient créés dans les années 1990. Enfin, l’industrie de l’automobile (cette activité comprend les pièces de rechange) s’est enlisée après avoir fait naître 69 000 emplois6.

Figure 2

On constate rétrospectivement que la relance de l’emploi manufacturier dans la décennie 1990 s’est opérée à rebours de son mouvement à long terme. La figure 3 indique que la part manufacturière de l’emploi global a culminé à 19 % en 1980 et, victime d’une décroissance persistante, n’était plus que de 14 % en 1993. Cette part devait remonter à 15,3 % en l’an 2000 avec presque les deux tiers de la hausse dans l’automobile. Depuis, elle a lentement régressé, approchant de son minimum de tous les temps atteint il y a dix ans.

Figure 3

Du cycle d’expansion-récession du secteur de la fabrication de TIC témoigne la montée de la demande de concepteurs de systèmes informatiques. Il s’est créé 182 000 de ces emplois dans les années 1990, mais depuis le mouvement s’est arrêté à cause du marasme du secteur de la haute technologie et de la fin des activités de conversion liées au passage à l’an 2000.

Depuis le début des années 2000, plusieurs tendances liées au libre-échange en Amérique du Nord dans les années 1990 se sont aussi estompées. L’accord de libre-échange a fait naître une décennie de croissance rapide du transport routier alors que la progression du commerce de produits de haute technologie et du tourisme a favorisé le transport aérien et les services des voyagistes. Le marasme du commerce et du tourisme canado-américains depuis l’an 2000 a mis fin à la croissance de ces branches d’activité. Quant aux industries du vêtement et du textile, elles ont éliminé sans cesse plus d’emplois après avoir su faire face avec de modestes pertes aux premières mesures de libéralisation des échanges en Amérique du Nord dans les années 1990.

Tableau 1: Moyenne annuelle de la croissance de l'emploi par industrie*

  1990-2000 2000-2004
  %
Redressements    
Mines -1,7 4,2
Construction -0,1 4,5
Immobilier -0,4 2,5
Hôpitaux 0,1 2,8
Admin. publique -0,9 2,1
Services publics -1,9 4,2
Vente au détail 0,7 2,4
     
Replis    
Services informatiques 32,0 0,3
Ordinateurs et électronique 4,4 -7,9
Autos 4,1 0,4
Vêtements -1,6 -4,6
Transport aérien 0,7 -3,9
Placement temporaire 11,4 1,1
Messageries 5,7 -1,0
     
Tendance inchangée    
Services aux entreprises1 4,7 3,4
Soins de santé2 2,8 4,6
Éducation 1,5 1,7
Services de consommation 2,4 2,1
Manutention 2,3 1,3
Agriculture -1,5 -3,3
* Les industries comptent pour 70 % de tous les emplois.
1: sans les services de systèmes informatiques.
2: sans les hôpitaux.

Il y a d’autres « nouvelles tendances » jugées incontournables de la décennie 1990 qui ont pourtant été ébranlées depuis le début de la nouvelle décennie. Dans les années 1990, les bureaux de placement ont progressé dans un modèle d’entreprise où on cultivait la souplesse et le recours à la sous-traitance. Ces branches d’activité ont peu augmenté depuis. L’emploi dans l’édition et les messageries a également piétiné après des gains dans les années 1990, peut-être parce que les communications par Internet ont amorti la demande.

Dans beaucoup d’industries, il y a eu un retournement de fortunes depuis le début du millénaire, mais quelques tendances demeurent communes aux années 1990 et 2000. Dans certaines industries de biens, il s’est perdu encore plus d’emplois. Notons surtout l’effritement persistant de l’emploi en milieu agricole, qu’il s’agisse des cultures ou des élevages (ce dernier secteur s’est mis à se contracter avant la découverte du premier cas de maladie de la vache folle en 2003). L’emploi a aussi continué à diminuer dans les pêches et les pâtes et papiers.

Quelques services ont su maintenir leur croissance dans les deux décennies. Les services informatiques mis à part, la plupart des services aux entreprises ont constamment progressé, plus particulièrement les services de sécurité, de construction et d’architecture et de génie. La demande de services d’enseignement a suivi une courbe de croissance dans les deux périodes, tout comme les services d’aide sociale et les services de santé hors du milieu hospitalier. Dans les services de consommation, les jeux de hasard et les services d’hôtellerie-restauration ont offert de solides gains dans les deux décennies. Disons toutefois que, dans le commerce de détail, le taux de progression a triplé entre les années 1990 et les années 2000. On a relevé des gains comparables pour la distribution de biens (commerce de gros et transports), bien que, dans ce cas, on soit passé de la manutention d’un commerce continental de produits manufacturés à des importations en provenance de la Chine et à des exportations de ressources naturelles.

La remontée entraînée par le marché de l’habitation et de l’industrie primaire depuis le début de la présente décennie, jointe au marasme du secteur de la haute technologie, s’est répercutée sur tout le marché du travail : la croissance de l’emploi a été d’une répartition plus égale que dans les années 1990 entre les gens ayant fait et n’ayant pas fait des études universitaires et entre les cols blancs et les cols bleus. Ajoutons que, dans les années 2000, les grands établissements ont succédé aux petits comme moteur de la croissance de l’emploi et que les régions rurales ont rattrapé les régions urbaines sur ce plan.

De 1996 (où on a commencé à recueillir des données sur le clivage milieu rural-milieu urbain) à 2001, l’emploi s’est accru moitié plus vite en milieu urbain qu’en milieu rural (12,8 % contre 8,7 %), et ce, en grande partie parce que le secteur des TIC était concentré dans les régions urbaines et qu’il a créé 4 emplois sur 10 dans les grandes villes au cours de la décennie 19907.

Depuis, l’emploi a monté un peu plus rapidement en milieu rural (6,5 %) qu’en milieu urbain (6,2 %). C’est ainsi que les taux de chômage ont régressé dans le Canada rural et progressé dans le Canada urbain. Depuis le point culminant, en 2000, du secteur de la haute technologie, l’écart de chômage entre milieu rural et milieu urbain est tombé de 1,6 point (8,1 % contre 6,5 %) à 0,5 point (7,6 % contre 7,1 %)8.

Cette amélioration des perspectives d’emploi en milieu rural, on la doit surtout à l’industrie primaire. Il s’est en effet créé 14 000 emplois depuis deux ans dans l’industrie primaire hors agriculture, phénomène entièrement concentré en milieu rural. Il s’est créé 41 000 emplois manufacturiers en région rurale, alors qu’il y avait peu de mouvement en région urbaine. Dans le Canada rural, les secteurs des pâtes et papiers et de la fonte et de l’affinage sont la première source d’emplois manufacturiers au moment même où l’implosion du secteur des TIC enfonçait l’emploi en milieu urbain. Disons enfin que le nombre d’emplois dans les services de transport des ressources naturelles a plus augmenté (10 %) dans les régions rurales.

Figure 4

Toutes les industries de biens et l’industrie des transports présentent une proportion supérieure à la moyenne d’emplois en milieu rural (la moyenne était de 26 %; l’industrie primaire à elle seule se trouve concentrée à 60 % dans les régions rurales). Il faut aussi dire que, depuis 2001, la construction a augmenté aussi rapidement en milieu rural qu’en milieu urbain. Les régions rurales s’en seraient tirées encore mieux s’il n’y avait eu ces pertes persistantes d’emplois en agriculture.

Un facteur tout aussi important est la composition démographique de cette revitalisation rurale. Notons d’abord un bond de 4,4 points du taux d’emploi des jeunes de 15 à 24 ans; c’est près du double du taux de progression correspondant des adultes. En fait, c’est la première fois dans l’histoire que les perspectives d’emploi qui s’offrent aux jeunes sont plus réjouissantes en milieu rural qu’en milieu urbain, les taux d’emploi s’établissant respectivement à 58,7 % et 57,9 % dans les régions rurales et urbaines. Il s’est créé un peu plus d’emplois pour les jeunes hommes que pour les jeunes femmes en milieu rural. Les gains ont été de 11 % au cours des trois dernières années; ils avaient été nuls les cinq années précédentes. En revanche, le nivellement des sources d’emploi dans les villes a eu de grandes répercussions sur les jeunes dans les noyaux urbains où l’emploi a cessé de croître après avoir fait un bond de 15 % de 1996 à 2001. La conséquence est que le taux de chômage des jeunes a été plus élevé en milieu urbain qu’en milieu rural (13,5 % contre 12,8 %) pour la première fois dans l’histoire.

Figure 5

C’est sur la répartition de l’emploi entre cols bleus et cols blancs que l’évolution du régime de croissance de l’industrie a aussi beaucoup influé. Malgré une décroissance ininterrompue en agriculture, les emplois de cols bleus ont été en progression accélérée, passant d’un taux annuel de croissance nul dans les années 1990 à une valeur de 1,4 % dans les années 2000 grâce à la relance de l’emploi en construction et dans les mines. Les emplois de cols blancs ont également remonté, leur taux d’accroissement passant de 1,7 % à 2,3 %.

Figure 6

Précisons que la nature de ces emplois créés a beaucoup évolué, notamment sur le plan de la scolarité exigée. Les emplois en gestion ont mené le mouvement de croissance dans les années 1990 avec un gain global de 18 %. Ils plafonnent cependant depuis l’an 2000. La croissance est aujourd’hui dictée par le commerce de détail et le travail de bureau (en hausse de 15 % en quatre ans seulement dans les deux cas), ce qui s’explique par l’accélération des dépenses de consommation. Parmi les autres secteurs en progression rapide, on compte les services de sécurité et de restauration. Dans aucun de ces secteurs en forte croissance n’exige-t-on une scolarité postsecondaire dans la plupart des emplois en gestion9.

Depuis l’an 2000, l’emploi croît plus vite dans les grands établissements que dans les petits à l’inverse de ce qui s’est produit dans les années 1990 (où les grandes entreprises ont haussé leur productivité en éliminant des travailleurs). Le fossé entre la grande et la petite entreprise s’est mis à se creuser en l’an 2000 au plus fort de l’expansion du secteur de la fabrication de TIC. Plus récemment, l’essor des exportations de produits de base a été favorisé par la croissance des grandes multinationales de l’industrie primaire.

Figure 7

Offre

Les nouvelles tendances de l’emploi ont leur écho au tableau du chômage. Les mines ont présenté le taux de chômage le plus bas qu’elles aient jamais connu (4,5 % seulement). La reprise de l’emploi dans le secteur minier depuis deux ans a aussi permis de rajeunir la main-d’œuvre de ce secteur, les jeunes de 15 à 24 ans en formant le contingent le plus dynamique. De même, l’essor du marché de l’habitation a fait tomber le taux de chômage en construction à son plus bas niveau (8,6 % en 30 ans) au moment même où ce secteur entreprenait aussi de renouveler sa main-d’œuvre en embauchant plus de jeunes.

Depuis deux ans, les taux de chômage ne se sont pas élevés dans la fabrication malgré des pertes d’emplois imputables à la valorisation du dollar. Ce phénomène tient à un exode de travailleurs, plus particulièrement de jeunes devant le tarissement des sources d’emploi. Par ailleurs, la main-d’œuvre manufacturière est toujours en vieillissement rapide; les travailleurs de 55 ans et plus ont formé presque 60 % de ces effectifs au cours de la décennie écoulée.

Les industries incapables de faire passer leur main-d’œuvre excédentaire à d’autres secteurs demeurent en proie au chômage. Les forêts et les pêches se sont distinguées à cet égard avec des taux respectifs de chômage de 16 % et 22 %. Ce sont les seuls taux de décroissance à deux chiffres dans l’économie.

Le vieillissement de la génération du boom des naissances reste le premier facteur démographique en importance sur le marché du travail. Le segment le plus en croissance dans la population est la tranche d’âge 55-59 ans avec une hausse de 4,7 % l’an dernier seulement. Depuis 1998, le nombre des 55 ans et plus a augmenté de 19 %; il y a surtout eu un accroissement de 28 % du nombre de 55 à 64 ans par l’arrivée des premiers représentants du baby-boom dans cette tranche d’âge. Par ailleurs, le nombre de travailleurs d’âge mûr de 25 à 44 ans a diminué en valeur absolue une septième année de suite pour une perte totale de 2,3 %, tandis que les effectifs de la tranche d’âge 15-24 ans s’accroissaient de 7 % depuis 1997.

Si la génération du boom des naissances est entrée dans des tranches d’âge depuis toujours associées à la retraite, il y a des données qui suggèrent par ailleurs que cette génération n’aborde pas du tout l’âge d’or comme les générations qui l’ont précédée. Ainsi, le taux d’activité des 55 à 59 ans devait atteindre un sommet de 67,6 % dans l’histoire. Ce taux était resté fixé à 60 % environ de 1976 à 1998 avant d’entamer une montée ininterrompue à mesure que la génération du boom des naissances entrait dans cette tranche d’âge.

La hausse des taux d’activité de cette génération qui vieillit relève d’une tendance marquante de la population de 55 à 69 ans à rester sur le marché du travail10. La figure 8 indique que le taux d’activité de ce groupe a monté en flèche, passant d’un minimum de 36 % en 1996 à une valeur record de 47 % l’an dernier. Le gain le plus imposant est celui des 60 à 64 ans (de 33 % à 43,7 %); pour sa part, le groupe des 65 à 69 ans est passé de 11,5 % à 16,2 %.

Figure 8

Dans l’ensemble, la progression des 55 ans et plus tant en nombre qu’en taux d’activité fait qu’ils auront apporté plus du tiers à l’accroissement de 2,35 millions de la population active canadienne depuis 1996. Fait intéressant, c’est l’année où les premiers représentants de la génération du boom des naissances ont atteint l’âge de 50 ans.

Aucun facteur socioéconomique n’explique à lui seul cette plus grande présence de la population plus âgée sur le marché du travail. Le tout pourrait s’expliquer par l’évolution des attitudes à l’égard du travail (on n’invoque plus la « Liberté 55 ») et une espérance de vie supérieure, ainsi que par la plus grande souplesse des employeurs devant une main-d’œuvre qui rétrécit11. Ce mouvement qui s’est amorcé bien avant l’effondrement boursier de 2001 a nui à bien des régimes de retraite privés, mais il s’est en réalité un peu accéléré par la suite. À elle seule, la culture du baby-boom n’explique pas une présence encore plus grande de la génération plus âgée sur le marché du travail. On ne peut évoquer non plus la plus grande scolarité de la génération du boom des naissances, puisque son attachement croissant au marché du travail se manifeste indépendamment de la scolarité12.

Un séjour sur le marché du travail qui se prolonge après l’âge de 55 ans met fin à presque trois décennies de présence décroissante de la génération plus âgée (le taux d’activité de la population féminine plus âgée est resté à 17 % avant de faire un bond à 24 % dans les cinq dernières années). Un des facteurs de passage à l’inactivité de la population masculine plus âgée dans les années 1990 était les pertes d’emplois de ce groupe dans l’industrie primaire, la construction, la fabrication et l’administration publique (secteurs qui, collectivement, employaient près de la moitié de tous ces travailleurs en 1990). La reprise de la croissance dans ces branches d’activité s’est accompagnée d’une progression de la population active masculine plus âgée dans toutes ces industries, après les baisses enregistrées durant les années 1990; elle contribue au tiers de la croissance totale pour les hommes de plus de 55 ans.

Dans l’ensemble, 67,6 % des Canadiens de 15 ans et plus se trouvaient sur le marché du travail; c’est un peu moins que le record établi l’année précédente. Ces dernières années, ce sont les taux d’activité de tous les groupes démographiques qui ont évolué en hausse, et non pas les seuls taux de la génération plus âgée. Depuis quelques années, le long et progressif mouvement de décroissance de la population masculine d’âge adulte (de 96 % en 1979 à moins de 92 %) s’est légèrement renversé. L’ample exode de jeunes après la récession de 1990 a largement été remplacé par une progression (de 61,5 % en 1997 à 67 % l’an dernier).

Disons enfin que la présence – croissante – sur le marché du travail de la population féminine d’âge adulte de 25 à 54 ans s’affirme toujours depuis le début de ce relevé statistique en 1976 (les grandes périodes de récession mises à part). Son taux d’activité a monté à 81,6 % l’an dernier. Bien que toujours de 10 points inférieur au taux de la population masculine correspondante d’âge adulte, il représente le plus petit écart jamais constaté (il dépassait les 40 points en 1976). La population féminine d’âge adulte augmente constamment alors qu’elle diminue aux États-Unis depuis 1997, en partie à cause d’une hausse de 23 % du taux de procréation des femmes de 30 à 44 ans. On doit dire que les Américains plus âgés sont aussi plus présents sur le marché du travail, mais la baisse relevée dans le cas des femmes adultes et des jeunes fait que, dans l’ensemble, leur taux d’activité devait tomber à un minimum en 16 ans de 65,8 % au début de 2005.


Notes

* Groupe d’analyse de conjoncture (613) 951-9162; oec@statcan.ca.

1 Toutes les données viennent de l’Enquête sur la population active. Que nous utilisions les données sur la rémunération de l’EERH n’influe presque en rien sur les comparaisons entre décennies.
2 Les services immobiliers sont encore plus en progression (16 %) depuis leur creux de cycle de 2001. Une partie de la croissance dans les services publics traduit la réorganisation effectuée après la dérèglementation.
3 Les services aux entreprises comprennent les services professionnels, scientifiques et techniques et les services de soutien aux entreprises.
4 Indice des prix du FMI.
5 De la même manière, aux États-Unis, 7 des 18 industries enregistrant la croissance la plus rapide vers la fin des années 1990, sont maintenant en déclin structurel, ce qui suggère qu’elles ont connu un surinvestissement au cours de cette période. C’est la thèse que présente E.L. Groshen et S. Potter dans « Has Structural Change Contributed to a Jobless Recovery? », Federal Reserve Bank of New York, vol.9, n°8, août 2003, page 5.
6 Les pertes d’emplois après l’an 2000 dans le secteur de la fabrication ont encore enfoncé les taux de syndicalisation. Le nombre de travailleurs syndiqués était inchangé depuis l’an dernier, alors que le nombre de travailleurs non syndiqués s’accroissait de 2,6 %. C’est ainsi que la proportion de travailleurs syndiqués est passée l’an dernier à un nouveau minimum de 31,8 %; c’est moins que les 33,0 % de 1996.
7 Il s’agit surtout des grandes villes comptant plus de 1 million d’habitants et qui regroupent près de la moitié de tous les emplois dans le secteur des TIC.
8 Il faut aussi dire que les taux de chômage s’élèvent en milieu urbain à mesure que l’on passe de la banlieue rurale à la banlieue urbaine et au noyau urbain (on y trouve 85 % des emplois en milieu urbain).
9 Le secteur de la santé est un de ceux où la demande de main-d’œuvre plus scolarisée s’est accélérée après l’an 2000.
10 Le taux d’activité des plus de 70 ans s’est un peu élevé à 4,1 %.
11 Rien n’en témoigne dans le travail à temps partiel où la proportion de travailleurs plus âgés a été tout à fait la même (22 %) qu’en 1996.
12 Les taux d’activité augmentent en effet avec la scolarité dans le cas de la génération de plus de 55 ans; ils montent de 23 % chez les scolarisés secondaires à 49 % chez les scolarisés universitaires. Notons que les hausses depuis 1996 étaient plus marquées pour les gens moins scolarisés agés de 55 à 64 ans et pour les gens plus scolarisés âgés de 65 ans et plus.



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Date de modification : 2008-11-21 Avis importants
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